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Résumé Le Provencal

du 10 mars 1969

 

JOSEPH MARQUE...

...ET C'EST LE DELIRE

Le coup d'envoi ne sera pas donné si tous les spectateurs ne sont pas derrière les barrières ! Le match ne se jouera pas si vous ne faites pas montre de discipline !

Tout avait commencé sur le coup de 14 h 30. À ce moment-là des milliers d'aspirants spectateurs s'étaient trouvés enserrés comme sardines en boîtes dans l'étroit goulet d'accès aux populaires et rien ne résista à la poussée de tous ceux qui étaient encore derrière... Les barrières s'affaissèrent, le service d'ordre plia et cette marée humaine déferla jusqu'aux lignes de touche de but... au grand étonnement des cadets du lever de rideau.

L'action des organisateurs provoqua jusqu'au moment du coup d'envoi flux et reflux incessants, puis à 15 h 10 les responsables charentais, Goujon et Phelippon en tête discutaient encore avec l'arbitre, M. Lacoste, dont la responsabilité en l'occurrence allait être grande.

Hâtons-nous de le dire : la proximité de la foule, assez disciplinée, ne fut à l'origine d'aucun incident, mais à deux reprises on frôla la catastrophe. Le feu étant bien près d'être mis aux poudres, le soleil féroce d'un brusque printemps tapant dur sur des milliers de têtes déjà chaudes...

Aucun accident grave à déplorer, c'est vrai. Mais la présence de la foule pesa lourdement sur le déroulement de la rencontre, Angoulême touchant du doigt ce que l'on entend par jouer à l'extérieur.

11e : Tête de Joseph

Il ne faut donc pas s'étonner dans ces conditions que les deux équipes aient abordé leur duel extrêmement nerveuses, contractées, prudentes. Un petit Ajax - Benfica, en quelque sorte, les erreurs étant nombreuses et les prises de risques nulles.

Pourtant, dès le début, l'O.M. cherchant le k.o. obtint corner sur corner à la suite d'actions de Magnusson. En conclusion du cinquième donné par Destrumelle, Joseph s'élevant au-dessus de la mêlée catapulta magnifiquement de la tête la balle dans les filets au milieu de l'explosion d'enthousiasme que l'on devine.

On crut alors que c'en était fait des chances d'Angoulême. Mais les Charentais montrèrent qu'ils n'étaient pas les premiers venus. Après une tentative de Magnusson (24me minute) qui tira souvent et dangereusement hier, Hodoul dut sauver devant Jean-Louis Leonetti (30e minute).

Penalty ou pas ?

On frôla pour la première fois l'incident lorsque Poirot faucha assez impunément Magnusson un bon mètre à l'intérieur de la surface, à la 34me minute. La faute ne lui coûtant qu'un coup franc ! Ce n'était pas cher.

La fin de la première période se joua de façon assez molle. L'O.M. se relâchant nettement, cependant que Grisetti, mais Meggiolaro et Goujon tiraient de trop loin pour inquiéter Escale.

La seconde mi-temps allait être plus heurtée, plus animée. Giusseppin fut à l'ouvrage sur des tirs, de Magnusson (47me minute) et Lopez (55me minute).

Douze minutes après la reprise, les deux numéros 12, Duhayot et Gueniche faisaient simultanément leur entrée prenant la place de Goujon et Fiawoo.

Le premier nommé, trois minutes plus tard, bousculait Escale et recevait de Bonnel une bourrade qui l'envoyait s'asseoir au milieu du public ! La bonne volonté générale coupant courte au début du pugilat et Sérafin reprenant de la tête un coup franc de Leonetti forçait Escale à réussir son premier arrêt véritable (60me minute). Nouvelle intervention de Jean Paul sur un autre coup franc brossé par son ami Jean-Louis (65me minute). Affaire marseillaise.

65e : l'estocade !

La contre-attaque était lancée par Djorkaeff. Le capitaine de l'O.M. s'appuyait sur Joseph menait son action jusqu'au bout et envoyait vers le but une balle que Magnusson pour plus de sécurité envoyait au fond avec un enthousiasme juvénile.

Nouvelle explosion de joie. Saluts de la foule et fin, pour Angoulême, de son aventure 69...

Par la suite l'O.M. s'efforcera de contrôler le jeu, mais Grisetti, à la 70me minute, sera bien près de réduire l'écart, rattrapé et stoppé en bonne position par Lopez.

Nouvelle escarmouche à peu près en même temps. Poirot fauchant une seconde fois Magnusson qui allait au but... Là, le service d'ordre dut intervient intervenir vigoureusement pour couper court à toute éventualité.

On vit encore Bonnel, bien servi par Joseph inquiéter Giussepin, Joseph échouer... de peu sur le gardien charentais après une tentative de percée magnifique. Giussepin, très sollicité, s'opposa avec assez de bonheur et de chance plusieurs actions de Magnusson.

Et le Suédois, au moment où M. Lacoste allait mettre fin aux hostilités, recevait une passe de Gueniche et déclenchait un tir ratant de peu l'objectif à son grand désespoir.

La fin de cet après-midi victorieux fut assez indescriptible. Des milliers de spectateurs envahirent la pelouse, entourant les joueurs, les touchant, tentant de les porter en triomphe. Ils y demeurèrent longtemps laissant le terrain jonché d'épaves comme s'il venait d'être le théâtre d'un gigantesque pique-nique !

Louis DUPIC

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FOOTBALL VAINQUEUR

...et deux buts pour les Marseillais

L'O.M. a gagné, hier, la grande bataille du football à Marseille.

...Et, accessoirement, il a éliminé l'A.S. Angoulême de la Coupe de France.

Ne nous en veuillez pas joueurs des deux équipes, pour cet "accessoirement".

Il n'a aucun sens péjoratif.

Mais il saute aux yeux que la chose importante, le fait essentiel de ce beau dimanche de mars et l'immense amour pour le jeu de la balle ronde et pour s'en Oème manifeste par la foule provençale.

Nous étions optimiste samedi. Nous étions, pourtant, largement en dessous de la vérité.

Le record absolu du stade a été battu, et ce que nous avions prévu pour une demi-finale entre l'O.M. et Bordeaux s'est produit hier.

Notre déjà vieux stade vélodrome a littéralement éclaté, comme un fruit trop mûr.

Dans l'optique d'une Coupe d'Europe, il faut prévoir plus grand plus conforme, plus accessible.

C'est la façon de ce choc en retour entre l'O.M. et Angoulême.

La crise du football, c'est du passé dépassé.

Après Ajax - Benfica, le hasard d'une rencontre de Coupe a voulu que nous constations, chez nous, que ce sport restait le plus spectaculaire, le plus aimé dans le monde.

Nous n'en avions, d'ailleurs, jamais douté.

Sur un volcan

On ne peut jamais séparer une rencontre de son cadre mouvant, coloré et combien vivant.

Comme les choeurs antiques, la foule est beaucoup mieux que le 23me acteur de la pièce. Elle y joue un rôle considérable, à la mesure de la présence et de ses milliers de voix multipliées par les échos du stade.

Hier, sans que l'événement ait été annoncé par une quelconque trompette de Jéricho, les barrières tombèrent 45 minutes avant le coup d'envoi.

Il s'en suivit un long préalable - on se serait cru à la conférence de Paris pour la paix au Vietnam ! - Entre un speaker d'une attendrissante sagesse et les opposants de la pelouse.

Ou auraient-ils pu aller, d'ailleurs, ces "braves" supporters sur-compressés, sans risque de voir la rencontre avec leurs oreilles ?

Cet état de fait, contre lequel on ne pouvait rien, sauf délivrer moins de billets, fit que la rencontre se joua sur un volcan.

À tout moment ont pu craindre l'explosion, l'émeute, l'envahissement du terrain et l'ensevelissement des maillots bleus angoumoisins sous la marée humaine.

Rien ne tel ne se produisit, heureusement !

Vive le public !

Disons, cependant, que l'expérience n'est pas à renouveler.

ANGOULEME "seul contre tous"

L'A.S. Angoulême, son mérite n'en est que plus grand, a joué hier "seule contre tous".

Ses supporters, si supporters il y avait furent totalement noyés dans la foule.

Le résultat de la rencontre (2 buts de l'O.M. parfaitement clairs, à zéro) ne doit rien à l'ambiance.

Toutefois, il faut ne jamais avoir joué au football pour ignorer combien il est difficile et surtout éprouvant pour les nerfs de jouer dans de pareilles conditions.

La vaillante A.S. Angoulême, donc, a confirmé sa valeur et son indomptable volonté.

À la lueur de cette rencontre, on comprend encore mieux ses récents exploits en Coupe.

N'oublions pas que, menés par 1 à 0, les angoumoisins venaient de prononcer une véritable série d'offensives quand, au bénéfice d'une contre-attaque, Joseph permit à Djorkaeff d'obtenir le second but de son équipe. Le but vraiment de la victoire et de la qualification.

Le public ne s'y trompa qui libéra, alors en de frénétiques manifestations de joie, sa réelle inquiétude.

Une victoire méritée

L'O.M. a gagné. On ne lui demandait pas davantage.

Son équipe a-t-elle bien ou moins bien jouer que d'habitude ?

Un match d'une telle intensité ne se coupe pas en quatre comme un cheveu.

Il faut le prendre et le juger dans son ensemble et à travers son climat particulier.

Pour les joueurs olympiens, aussi, la foule était pesante, bien que désireuse de les porter à la victoire.

Ça ne s'explique pas, ça se voit, ça se sent.

L'O.M., hier, a manifesté une santé morale et physique remarquable.

Ne lui en demandant pas plus.

Et bien joué, le fignolé, le léché... ce sera pour une autre fois.

De toute façon, sa victoire était amplement méritée. N'a-t-il pas inscrit, à son actif, les plus nombreuses occasions de buts !

JOSEPH le plus utile

A l'issue d'un combat aussi tendu, aussi dense, il est toujours délicat d'accorder des étoiles ou des bougies d'honneur aux individualités.

Essayons cependant.

À Angoulême, nous avons beaucoup aimé le petit Solas, très efficace devant Magnusson, le calme et puissant Legros, Meggiolaro, Leonetti, formant à eux deux un excellent milieu de terrain, et l'ailier droit Sérafin, lequel donna beaucoup de fil à retordre à international Djorkaeff.

À l'O.M., avec Escale impeccable, le centre de la défense au Hodoul - Zwunka, fut aussi fort qu'à Angoulême.

Magnusson, pour une fois, sacrifia un peu trop le jeu d'équipe à son incomparable virtuosité.

Mais il rata plusieurs tirs décisifs de si peu..., que, à quelques centimètres près, il aurait pu être le héros du jour.

Mais l'attaquant le plus utile de l'O.M. fut, en définitive, Joseph.

Un but exploit de la tête sur corner donné par Destrumelle, et une passe fort opportune à Djorkaeff, laquelle fut à l'origine du deuxième but.

Bravo "Zé" !

Maurice FABREGUETTES

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La gigantesque kermesse

(Gérard PUECH regardait autour du match)

Marseille a vécu une journée de fièvre. À plus de 40 degrés, comme titrait hier la "Une" de notre journal.

Dès midi, une animation inaccoutumée qui gagnait les rues de la ville laissait percevoir l'événement. Et dans les bureaux de PMU, si les aficionados discutaient ferme sur les chances respectives de "Gopal" ou de "Gal Soleil" les noms de Magnusson, Joseph, Bonnel revenaient souvent dans les propos...

Ca sentait la poudre comme on dit couramment. Sur le coup de 14 heures, alors que nous "descendions" pare-choc contre pare-choc la rue Paradis, nous comprîmes très vite l'ampleur du rassemblement.

À plus d'un kilomètre du Stade-Vélodrome, chaque mètre de trottoir se trouvait transformé en parking. Et les allées du Prado se révélaient de gigantesques garages où les places étaient chères, très chères même.

* * *

L'ambiance fut vite créée.

L'arène du boulevard Michelet prise d'assaut donnait l'image d'un cratère en fusion, sol y sombra.

Là-bas sous les pleins feux d'un soleil printanier, ceux de la tribune Ganay avaient pour la plupart tombé la veste. Toile de fond sans cesse mouvante, piquetée de taches multicolores. Au centre le rectangle vert idéalement vert, cerné par une foule bon enfant, impatiente de pouvoir libérer son trop-plein d'enthousiasme.

Et alors que le tunnel, tel un vomitoire déversait les milliers de spectateurs n'ayant pu trouver place sur les gradins de ciment, les banderoles se déployaient.

La télévision nous a souvent donné les images de ces supporters brandissant à bouts de bras ces calicots vantant les vertus de leur équipe favorite.

Mais ici, tout prenait une autre dimension.

L'ami Maurin avait beau lancer au micro de multiples appels à la prudence, faisant même peser la menace d'un match remis car ne pouvant se dérouler dans des conditions normales de sécurité, rien n'y faisait.

Les privilégiés de la première ligne, celle limitant le quadrilatère de jeu reculaient de quelques mètres à chaque injonction mais aussitôt après reprenaient leur position première.

Flux et reflux

Mouvements divers aussi et indescriptible tumulte quand surgit cachée jusqu'à là, une pancarte rédigée en honneur d'Angoulême. On siffle, on hurle, certes mais le climat, pour l'heure, reste bon enfant.

À l'entrée des joueurs sur la pelouse, des feux de bengale s'allument, lâcher de ballons portant la griffe du "Provençal" s'envole vers l'azur du ciel.

C'est la fiesta !

Une sort de gigantesque kermesse à laquelle se trouvait gentiment mêlés cinquante mille Marseillais libérant leur enthousiasme.

Jouera, jouera pas...

Sur le bord de touche, des personnages s'affairent. Les Angoumoisins s'inquiètent de cette marée humaine qui les serre comme dans un étau.

Phélippon en capitaine obéissant va-et-vient entre l'arbitre et son président lequel ne semble pas goûté une telle ambiance. Il a sans doute ses raisons et le moindre incident risque dans ces conditions de prendre un tour dramatique.

Le public raisonnable, recule d'un mètre ou deux. C'est gagné on peut commencer avec un quart d'heure de retard.

Mais grands dieux, on a eu chaud... à la pensée d'un match dans l'impossibilité de se jouer normalement et de ses conséquences.

* * *

Plus tard, il y eut Magnusson le sorcier blond, la tête de Joseph, la vista de Djorkaeff, les centaines d'action dont vous parlent par ailleurs nos camarades.

Il y eut aussi tous ces gosses se désintéressant de l'action et disputant entre eux un match en contrepoint sous l'oeil débonnaire des spectateurs... qui ne pouvaient pas voir.

Il y eut également, dès le coup de sifflet final, cet extraordinaire raz-de-marée vers les onze maillots blanc vainqueurs, disparaissant aussitôt comme englouti par leurs "tifosi".

Il y eut enfin un de ces après-midi de rêve, de ceux qu'on osait plus imaginer...

Marseille, capitale du football ? Oui, c'est une réalité !

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Dard, Aznar, Gonzales :

"Quelle ambiance !"

(Jean FERRARA écoutait les "anciens")

Quel est le spectateur qui n'a pas ressenti comme une pointe au coeur dans ce stade vélodrome transformé hier en cratère de volcan.

Tous ont vibré à la nouvelle formule de la Coupe de France qui donne à la carrière de l'O.M. des allures d'épopée.

Et parmi tous ces visages tendus, il en était peut-être qui méritaient davantage d'attention que les autres. Parce que ce match explosif leur faisait faire un bond de vingt ans en arrière, leur rappelait le temps où ils recevaient leur part de bravos. Vous les avez reconnus. Il s'agit de ces anciens de l'Olympique, de ces joueurs que l'on dit de la belle époque, pour rendre hommage à leurs exploits passés.

Georges DARD :

"Quelle assistance !"

Il fut le Magnusson des années 50. Le stade se dressait aussi lorsque Georges Dard recevait la balle avant d'effectuer ces déboulés sur l'aile qui sont restées mémorables. Le public, la foule, il les connaît bien, pourtant hier la véritable marée humaine est parvenue à le surprendre... Ce stade, nous a-t-il dit, Dieu sait si j'ai pu le voir abondamment garni, mais aujourd'hui, pardon c'est du délire. Je ne me souviens pas avoir vu un jour tant de monde de l'O.M. ? Les joueurs me paraissent... un peu contractés et je les comprends. Vous vous rendez compte de l'enjeu !... À mon avis Magnusson méritait un penalty. Il a été indiscutablement fauché dans la surface de réparation. Enfin je leur souhaite d'arriver jusqu'à la finale.

Manu AZNAR :

"Ils souffrent !"

L'ex avant-centre au tir meurtrier à retrouver, lui, que cela n'allait pas tout seul.

"Je m'attendais, nous a-t-il confié, à une farouche résistance des Angoumoisins et je m'aperçois que l'O.M. est loin de faire cavalier seul. Angoulême, c'est clair, recherche le match d'appui et nos gars ont besoin de cravacher ferme pour faire la différence. Mais je crois tout de même à notre victoire..."

Jo GONZALES :

"Et le penalty !"

"L'arbitre a fait un beau cadeau à Angoulême en ne pas sifflant le penalty qui s'imposait pour le fauchage de Magnusson. C'est une grosse faute !

"En dehors de cela, j'ai dans l'idée que l'O.M. ne joue pas trop bien, en tous cas loin de sa valeur réelle. Que voulez-vous, c'est la Coupe ! Mais quelle ambiance et quel but de Joseph !... Ah ! S'ils pouvaient arriver jusqu'à Colombes..."

Mais cela, on le sait, était hier le voeu de toute une ville...

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"Le premier but

nous a libérés !"

(Alain DELCROIX a entendu les joueurs)

Dans le camp marseillais, ce n'était pas du délire, de l'euphorie, mais une grande sérénité générale.

Le président Marcel Leclerc arborait un large sourire : "Je suis heureux que cela soit terminé ! Il y a de quoi pousser un profond soupir de soulagement car Angoulême est réellement une équipe très coriace ! Ce qui est également agréable en dehors de notre qualification c'est d'avoir battu le record absolu de recette et du nombre de spectateurs ! Il devait y avoir au moins 50.000 spectateurs ! Une bonne journée pour le football".

Joseph assurait de son côté : "Les joueurs d'Angoulême sont grands, costauds, solides. C'était dangereux pour nous s'ils avaient ouvert le score ! Il fallait marquer les premiers ! Le but que j'ai réussi nous a libérés !"

Hodoul constatait tranquillement : "L'enjeu était très important et sans doute les deux équipes étaient-elles contractées du moins au début ! Le premier but nous a donné confiance !"

Bonnel avouait : "Il fallait gagner à tout prix ! Nous y sommes parvenus, c'est l'essentiel, inutile d'épiloguer, mais pour ma part, j'ai terminé ce match très fatigué. Durant le dernier quart d'heure, j'avais même des crampes !"

Jules Zwunka s'esclaffait : "Ils avaient un peu la tête enflée ces Angoumoisins ! N'avaient-ils pas répété surtout les tons qu'ils venaient à Marseille pour faire match nul et qu'ensuite ils gagneraient le match d'appui ? Et bien, il n'y aura pas de match d'appui."

Djorkaeff remarquait avec beaucoup de bon sens : "Nous avons fait le maximum mais nous avons eu du mal à démarrer. La mise en train a été difficile !"

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Jean-Louis LEONETTI

"Si on joue en style de coupe... on se fait tous tuer"

Dans les vestiaires Angoumoisins, un peu d'amertume, mais néanmoins les joueurs ont sablé le champagne.

Jean-Louis Leonetti, le Marseillais, était le plus volubile et le plus mécontent : "Si on joue normalement ce match de coupe, on se fait tous tuer ! Et puis ce Magnusson certes, il a de la classe, mais on ne peut pas le toucher ! Alors c'est un peu exagéré !

L'entraîneur Phelippon remarquait sans acrimonie : "Je ne peux pas chercher de fausses excuses, mais on ne peut pas dire que ce match se soit déroulé dans des conditions normales ! Angoulême est vaincu avec les honneurs de la guerre ! J'ai été très content de la prestation de Solas, qui a confirmé sa brillante exhibition de dimanche dernier ! Magnusson est un excellent joueur, mais il ne nous a rien appris !"

Solas confirmait l'opinion de son capitaine entraîneur : "Comment voulez-vous jouer normalement dans un stade survolté, surchauffé ! Tenez à deux reprises, les flics ont renvoyé le ballon de la main aux joueurs olympiens ! Est-ce normal ?"

Duhayot récriminait : "Il ne fallait pas jouer un match en ayant le public à une aussi faible distance ! L'arbitre avait peur de sifflet en notre faveur ! Nous aurions dû bénéficier d'un penalty et le second but olympien était hors-jeu."

Meggiolaro affirmait de son côté : "Il aurait mieux valu que nous jouions le premier match contre Marseille au Stade Vélodrome de Marseille et le retour chez nous ! Nous serions partis peut-être avec seulement un handicap d'un but !"

Poirot ajoutait : "Et puis ces menaces continuelles ! Ne fait pas le malin !, entendais-je de temps en temps ! Si nous avions gagné c'était la curée !...

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Réclamation des Angoumoisins

Les joueurs angoumoisins avaient déposé une réclamation. Ils s'estimaient en effet que les conditions normales du jeu n'ont pas été observées. Le public ayant enfoncé les barrières de protection, pour s'asseoir en bordure de la ligne de touche. En dépit des appels pressants, au micro, des dirigeants marseillais, il n'a pas été possible de faire évacuer la partie du terrain envahi et l'arbitre M. Lacoste, après avoir consulté le délégué de la Fédération, a décidé que le match pouvait être joué.

En dehors de quelques explosions de pétards et de quelques bagarres entre spectateurs, la rencontre s'est déroulée normalement

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Un Mercure de bronze émergea soudain

La balle s'éleva.

Blonde comme une nébuleuse, elle entra dans le soleil. Suspendit le temps. Suspendit le silence. Suspendit la pensée.

Puis, lentement, elle pesa sur l'espace. Déclina vers la terre. Se livra !

Alors, d'une masse d'hommes subjugués comme des pêcheurs de lune, d'un groupe sculptural lié par l'unité de l'essor, un Mercure de bronze émergea, talonné d'allégresse, pétri de puissance, façonné d'agilité.

La balle captée au plus haut de sa chute, au plus haut de la convoitise des hommes, au plus haut de l'élan, la balle devint éclair, la balle devint offense. Déchira "le seuil du sort, la chose qui n'est faite que pour être vierge, les poteaux de but et leur filet goudronné."(1)

Alors ce fut l'explosion ! De l'immense marmite où bouillonnaient le soleil, la couleur, la fumée, la poussière et les premiers pollens du printemps, où bouillonnaient la sueur et l'angoisse de 45.000 peurs entassées, le couvercle éclata en mille millions d'atomes.

Car TOUS n'étaient venus que pour cela. Pour cet instant d'infini qui les libérerait de l'anxiété du doute. Tous, même ceux de l'Angoumois, qui sentirent cruellement retomber sur les éclats de la rupture. Mais ouvrirent dès lors à l'espérance, une pensée ou il n'y avait pas place que pour de l'inquiétude.

Le spectacle, certes n'était pas encore à sa fin. Mais son mystère oui ! Le ciel se faisait plus léger, l'air devenait plus fluide ; la foule se "débraillait" du geste, du rire et de la voie.

Qui peut dire jusqu'à quel point eût atteint, dans cette arène surchauffée, le magnétisme électrique qui y flottait depuis la première heure, si l'exploit d'un joueur ne l'eût hâtivement dissipé ?

Jamais, depuis plus de vingt ans que je fréquente ce stade, jamais je n'avais prévu pareille fête. Fête fiévreuse, et par la même dramatique dans ses ressorts.

Avant l'heure de la rencontre, des remous de foule en trahissaient déjà la nature exaltante. Du goulet de la piste cycliste, des flots de têtes ruisselaient, soumise au reflux des ressacs, en un mouvement liquide qui affectait une sorte d'ébullition. Jusqu'à ce que la digue céda. Laissant se répandre la vague jusqu'à l'extrême lisière de la plage réservée.

Ce fut là, Dieu merci ! le seul débordement de la journée. La clémence du temps, la générosité du soleil, la limpidité du ciel inclinaient à une joie pure.

La Victoire a bien voulu y mêler ses effluves parfumés.

L.P. SEMENE

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45.040

spectateurs payants

Tous les records d'affluence et de recette ont été battus avec 45.040 spectateurs payants pour 339.704 francs

On peut estimer à 5.000 les ayant droits et les resquilleurs. C'est à dire qu'il y avait hier 50.000 personnes dans le stade.

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