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Résumé Le Provencal

du 18 septembre 1969

 

DUKLA GAGNE (1-0) UN MATCH SANS ECLAT DEVANT 1.600 SPECTATEURS

RIEN N'EST JOUE !

(Louis DUPIC nous téléphone de PRAGUE)

PRAGUE (Par téléphone) - Après nous avoir donné pendant une longue première mi-temps de sérieuses inquiétudes, l'O.M. a finalement réalisé à Prague une très honnête performance qui lui permet d'envisager le match retour avec optimisme ; ses chances de qualification demeurant très sérieuses.

Extrêmement contractés, ne réussissant pas à trouver la distance, ratant passes et contrôles, les Marseillais firent tout d'abord figure de proie facile pour les Tchèques abordant la rencontre à 100 à l'heure, imposant leur meilleure technique, mais aussi leur taille, leur poids et leur hargne, à l'image de leur capitaine Strunc, déchaîné.

S'ils s'encaissèrent un but sur coup de pied arrêté et un jeu sur une erreur de jugement de Jean-Paul Escale, voulant contrôler la balle glissante au lieu de la boxer, nos représentants pouvaient tout aussi bien en encaisser deux autres avec un peu de malchance, l'emprise des Tchécoslovaques étant totale presque tout au long de cette première mi-temps.

L'autre visage de l'O.M.

Mais après avoir subi l'orage, la pluie tombant drue sans discontinuer, ils revinrent sur le terrain bien décidé à vendre chèrement leur qualification.

Pratiquant un football plus rationnel, recherchant les appuis, conservant leur équilibre après avoir changé leurs crampons, il imposèrent à leur tour non par leur puissance, mais leur meilleure condition physique, les Tchèques à bout de souffle, connaissait eux aussi des moments pénibles, les occasions marseillaises étant nombreuses et nettes.

1 à 0 à la pause, ce n'était pas trop cher.

1 à 0 à la fin de la partie, c'était plutôt mal payé pour les efforts marseillais de la seconde mi-temps notamment celui de Merschel trouvant, à l'image de son équipe, des réserves physiques et la lucidité nécessaire pour forcer à demi, hélas, la chance.

Un match sans ambiance

Disputé devant une assistance extrêmement réduite pour de nombreuses raisons (horaires de travail, impopularité de Dukla, transmission de la rencontre à la télévision et mauvais temps), Dukla - O.M. n'eut pas l'allure d'une rencontre internationale, les deux équipes ne tournant jamais simultanément à plein régime.

Mais tout n'est-il pas lié en football : le cadre, le public et la tenue des équipes ; cela s'appelle l'ambiance et elle fut singulièrement terne hier sur la colline de Juliska.

Pour nous, et malgré la gentillesse des dirigeants tchèques, ce fut un après-midi à marquer d'une pierre noire, car jamais nous n'avions travaillé dans des conditions pareilles.

Toute organisation de Dukla était artisanale, et presque familiale, on ne saurait lui en faire grief, mais il est inimaginable que ce club dans un tel contexte, ait pu vivre à l'échelon européen.

Bonnel en tête

Pour en revenir à ce qui se passa sur le terrain de jeu, disons tout de suite que si l'O.M. sortit de la période difficile, il le dut beaucoup à Joseph Bonnel. Il ne cessa tout au long de la première mi-temps de venir au secours de ses camarades, qu'il s'agisse des avants de pointe, incapable de conserver la balle, ou des défenseurs accablés de travail. Il joua hier un de ses meilleurs matches de sa carrière marseillaise et fut l'un des individualités les plus en vue de la rencontre.

Avec lui, et il faut citer les gladiateurs Lopez - Zwunka, physiquement égaux des solides Tchèques, bien secondés dans cette tache par Novi et Hodoul.

Djorkaeff, capitaine contre capitaine, s'attachant au pas du terrible Strunc. Irrésistible.

Merschel, un peu étonné au début, se reprise fort bien par la suite et termina très fort.

Magnusson eut en seconde mi-temps quelques débordements dignes de lui.

Lopez "fit ce qu'il put" face au meilleur adversaire, le vétéran Dvorak.

Joseph, battu par le grand Novak dans le jeu aérien, s'accrocha de toutes ses forces et accomplit quand même sur les coups francs et corners un gros travail défensif.

Enfin, on ne saurait trop reprocher à Escale d'avoir encaissé un but dans ces conditions difficiles, avec une balle extrêmement glissante.

Dukla un peu décevant.

Très mal classé en championnat tchèque, Dukla n'est évidemment plus l'égale de celui de Masopust. Certes il a une solide technique de base, une bonne frappe de balle, une valeur athlétique appréciable et une grande agressivité, et il y a tout de même quelque chose qui ne va pas dans cette équipe.

Tout d'abord un rien de lenteur et de raideur qui fait rater les actions amorcées de façon irrésistible, ensuite un manque certain d'inspiration chez des joueurs doués comme les attaquants Strunc, en dehors de son mauvais caractère, Nedorost et Lasso.

Nous devons dire que le milieu de terrain est solide, mais pas génial, que Dvorak, 35 ans, le seul rescapé du grand Dukla, et de loin le meilleur défenseur, sans que les autres soient d'ailleurs mauvais. N'oublions pas le trait sûr gardien Viktor, et vous aurez une idée de Dukla, une équipe sans grande faiblesse, mais tout de même à la portée de l'O.M. au Stade-Vélodrome.

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MERSCHEL place sur le poteau la balle du "nul"

PRAGUE - Depuis le matin nous avions l'oeil fixé sur le ciel, non pas en maniaque de la météo mais bien parce que le stade de Dukla ne dispose d'aucunes tribunes couvertes en dehors de la loge officielle. Pluie et brouillard le matin, chaud soleil au début d'après-midi nous soumirent au régime de la douche écossaise. Mais la vraie douche, nous allions la recevoir dès la fin du lever de rideau : de gros nuages noirs débouchant de derrière la colline pour se déverser joyeusement sur nous.

Aussi, le coup d'envoi fut-il donné sous une pluie battante que le vent nous plaquait un peu partout devant une assistante extrêmement réduite (1.615 spectateurs), la partie dirigée par l'arbitre suisse M. Schurer étant télévisée en direct.

Dukla domine

Les premières minutes nous montrèrent un Dukla puissant et entreprenant, malmenant notre O.M. pas tellement à l'aise qui subissait l'orage au propre comme au figuré.

Dès la 2e minute, Lopez fort heureusement bien placé devait sauver son camp sur une action vivement menée par Nedorost et le grand Strunc. À la 6e minute, Hudec tirait de peu à côté imité à la 10e par Strunc puis quelques minutes plus tard Novi devait "descendre" d'un tackle glissé Nedorost bien placé. Escale intervenait devant Strunc menaçant (15e).

L'O.M. desserrait alors l'étreinte et obtenait un corner sur lequel Bonnel de la tête était à deux doigts d'ouvrir la marque (20e).

34e minute :

Hudec marque

Mais les Tchèques repartaient de plus belle : le défenseur Novak plaçait un coup de tête très peu à côté (25e). Son compère Dvorak ajustait un coup franc ahurissant de puissance qui ratait de peu son objectif.

À la 34e minute, Lopez écopait d'un coup franc pour un tacle glissé inoffensif. Strunc brossait la balle et Escale sûr de lui, voulait contrôler en plongeant. Mais celle-ci glissante, lui échappait, heurtait le poteau et revenait dans les pieds de Hudel bien placé qui marquait comme à la parade le seul but du match.

À ce moment-là, on ne le savait pas encore et au repos notre impression était que l'O.M. dominé et impuissant, ne s'en tirait pas trop mal.

L'O.M. réagit

L'O.M. revenait sur le terrain avec des crampons plus adaptés à la pelouse et des intentions beaucoup plus offensives. Les Tchèques se montrèrent à l'affût beaucoup moins dangereux et furent dominés dans l'ensemble jusqu'au coup de théâtre de la 90e minute. Novak fut d'abord assez heureux pour intercepter de la tête entre Joseph et Bonnel un très bon centre de Magnusson (58e) puis on vit quelques minutes plus tard Viktor réaliser sa première parole sur un tir dangereux de Novi, avant d'aller deux fois de suite boxer la balle sur la tête de Joseph.

Peu après, il y eut de vives réactions adverses. Strunc à la 65e minute tirait à côté. Sur une attaque générale de l'O.M., Magnusson servait Joseph. Ce dernier tirait de très peu à côté (70e) Strunc faisait un gros travail et donnait à son arrière Pendl qui sur le point de penalty, se rendait coupable d'un affreux loupé (72e).

Dukla obtenait alors trois corners consécutifs dont l'un concédé par Escale sur un tir vicieux de Lasso (78e).

Viktor, de son côté, allait plonger dans les pieds de Loubet (79e).

90e minute : Merschel

et le poteau

Les deux équipent brûlaient alors leurs dernières cartouches. Strunc tirait en force sur le côté du filet (85e). Viktor était heureux, sur une action menée par Magnusson et presque parachevée par Joseph ; il réussissait en effet à coincer la balle contre le montant (86e).

La partie se terminait sur une note élevée. Merschel récupérait la balle, s'avançait et plaçait un tir croisé du gauche, trompait Viktor et échouait sur le montant.

Une action symbolisant à quelque sorte la rencontre. L'O.M. contrairement à son adversaire la terminant mieux qu'il ne l'avait commencée.

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M. LECLERC : "Ouvrez les bouteilles !"

PRAGUE - Le président Leclerc, toujours optimiste, avait apporté deux magnums de champagne dans ses bagages. Dès qu'il fut revenu au vestiaire, ses premières paroles furent : "Apportez les bouteilles ! Considérons quand même que cette courte défaite est un demi-succès que Merschel pouvait nous apporter avec un peu plus de réussite. Je suis satisfait du résultat, mais je pense que nous allons nous qualifier à Marseille."

Mario Zatelli : un peu déçu par Dukla

"Je suis heureux du résultat qui aurait pu, vous l'admettrez être meilleure. Nous étions contractés en première mi-temps et aussi mal cramponnés. L'adverse étant tombé au moment du coup d'envoi. Mais nous nous sommes bien repris par la suite, en jouant notre jeu normal. Je suis un peu déçu par Dukla qui a jeté au début toutes ses forces dans la bataille et n'a pas tenu la distance ; sans sous-estimer cet adversaire, je pense que nous devrions nous qualifier à Marseille".

Merschel : "Ah, ce rebond !"

Merschel venait pour un centimètre de rater l'occasion de revenir devenir le héros marseillais de Prague. "Vous savez que je suis un spécialiste des buts décisifs. J'ai bien ajusté ma balle, je l'ai vue aller en plein dans le coin du gardien archi battu ; elle a touché le sol et là, un rebond l'a envoyée sur le poteau, un poteau énorme. Pourquoi les Tchèques ont-ils des poteaux aussi gros.

Escale : " J'aurais dû boxer la balle"

Escale n'était pas content de lui : "Le coup franc de Strunc n'était pas très dangereux, j'ai péché par excès de confiance ; en effet, j'étais sûr de pouvoir me saisir de cette balle ; elle m'a glissé entre les mains comme une savonnette et a filé sur le poteau sans que je puisse la reprendre. Je me suis conduit comme un gamin.

Djorkaeff : "Strunc est un comédien"

"Jamais je n'ai eu affaire à un joueur aussi comédien que Strunc, disait le garde du corps du capitaine tchèque. Il vous donne un coup et se roule au sol en hurlant. C'est vraiment un drôle de client".

Novi : "Nous étions contractés"

Nous étions tous très contractés, assurer Novi. C'est la raison d'une première mi-temps pénible. Après, cela allait beaucoup mieux et physiquement nous étions mieux préparés que nous adversaires."

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MAGNUSSON :

"C'est normal"

PRAGUE - Interrogé sur le résultat, Roger Magnusson se contenta de répondre : "Ils sont chez eux, c'est normal !"

Cette opinion était partagée par l'ensemble des joueurs marseillais. Bonnel était félicité pour sa belle partie. Hodoul, toujours très réservé, Joseph fatigué par d'énormes efforts, Loubet durement traité par Dvorak et par les deux duellistes de la défense, Lopez et Zwunka qui déclaraient en choeur : "N'oubliez pas que nous venons de jouer cette rencontre sur terrain adverse avec le logique handicap que cela suppose.

Ce sera aujourd'hui le mot de la fin.

 

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