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Résumé Le Provencal

du 20 août 1970

 

UN PETIT PENALTY !

Dominique BARATELLI

un match de classe

(Louis DUPIC raconte le match)

Une soirée une douceur extrême. La joie pour le public de retrouver la véritable compétition, un adversaire ayant débuté en fanfare au même titre que l'O.M. Nous avions là assez d'ingrédients pour faire un grand succès populaire de cette reprise officielle au Stade Vélodrome.

Comme prévu, Mario Zatelli alignait les vainqueurs de Strasbourg, alors que Louis Hon, nouvel entraîneur ajaccien, comblé par un écrasant succès sur Nancy, présentait à une exception près, son équipe type, l'Antillais Trésor, blessé, étant remplacé par le jeune Rémois Czekaj, magnifique gaillard aussi blond que son coéquipier Leroy et que le Marseillais Leclercq.

Loubet dangereux

Les premières actions marquantes étaient le fait des Olympiens. Une bonne passe de Magnusson vers le centre, une tête de Couecou, une charge rageuse de Jules, mais surtout deux envolées irrésistibles de Loubet enrayées par Vanucci, de la tête, puis par une manchette de Baratellli, les deux excellents défenseurs corses ayant dû intervenir en catastrophe.

L'A.C.A. obtenait ensuite deux corners sur des actions de Leroy et de Dédé Tassonne envoyait son vieil adversaire Charly Loubet au tapis ! Résultat : le marseillais devait être soigné sur la touche, alors que le public conspué bruyamment l'ancien arrière de l'O.M., chaque fois qu'il touchait le ballon, mais Charly, bien vite, reprenait sa place.

18me : penalty

de Magnusson

A la 18e minute, alors que Roger Magnusson exécutait une série de dribbles de la surface de réparation, il était victime d'un ciseau les deux jambes, classique, appliqué par son garde du corps, Le Lamer. M. Vuillemin accordait sans hésiter un penalty que le Suédois transformait lui-même impeccablement.

O.M. 1 - Ajaccio 0.

Menant à la marque sur un incident de jeu, l'O.M. était cinq minutes plus tard en mesure de creuser l'écart par Skoblar, reprenant de la tête un centre de Magnusson. Puis par Loubet, contré in extremis par Baratelli, mais cela ne lui rapportait qu'un corner.

A la 27e minute, Baratelli bien inspiré repoussait un tir dangereux de Skoblar, bien servi par Leclercq.

Nouvelle tentative infructueuse Josip, alerté cette fois par Couecou à la 30e minute puis de Magnusson, deux minutes plus tard.

Ajaccio quant à lui, obtient consécutivement deux nouveaux corners sans résultat. Rien de bien spectaculaire dans tout cela, les attaquants marseillais ne parvenant pas à mettre nettement hors de position une défense corse bien groupée devant Baratelli. Quant à Sansonetti et ses camarades, ils n'étaient jamais en nombre suffisant pour mettre en danger le but d'Escale.

Au repos nous restions donc sur un penalty obtenu et transformé par Magnusson, un minimum !

L'O.M. inefficace

Pourtant au moment ou M. Vuillemin s'apprêtait à renvoyer les deux équipes aux vestiaires, un déboulé de Skoblar suivi d'un centre impeccable permettait à Couecou de prendre de la tête le meilleur sur le gardien ajaccien, mais la balle passait juste à côté du montant.

La seconde période débutait comment la première s'était achevée, Skoblar tirant de peu à côté.

Puis, sur un joli centre de Magnusson, Vanucci avait tout juste le temps de mettre en corner, sous la menace de Skoblar qui, depuis la reprise, opérait nettement en pointe.

Un peu plus tard, sur un nouveau centre de Magnusson on avait l'impression que le Yougoslave était cloué au sol par un défenseur insulaire.

On était à la 60e minute lorsque Loubet bien placé en profondeur dans l'axe du terrain, prit tout le monde de vitesse, mais ne put redresser ni sa course ni son tir.

Occasions de Georgin

A la 65e minute, les visiteurs, par leur demi Georgin, ratèrent une belle occasion d'égaliser. Il manqua en effet une première passe de Dumas, récupérant pourtant la balle, mais trébucha alors qu'il était à quelques mètres du but.

A la 70e minute, bien servi par Couecou, Charly Loubet débordait une fois encore la défense ajaccienne ; mais il fut crocheté est descendu par Vanucci au moment d'entrer dans la surface ; le coup franc ne donna rien.

On abordait le dernier quart d'heure. Magnusson débordait tirait, contraignant Baratelli à mettre en corner. Ce même Baratelli pris à contre pied par Skoblar, réussissait, dans un ultime reflète, à dévier la balle, ce qui parvenait à faire un peu plus tard un défenseur ajaccien sur un tir de Novi monté à l'attaque.

On assistait ensuite à deux cafouillages épiques ; un devant chaque but, mais force restait aux défenseurs.

À dix minutes de la fin, Rigaud remplaçait Dortomb et finalement l'O.M. se contentait d'une courte victoire.

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 "La chèvre de M. SEGUIN"

VERSION CORSE

(Les impressions de Maurice FABREGUETTES)

Était-ce le fait d'être au balcon (l'avancée de la tribune de presse) par une splendide nuit provençale, comme si nous prenions le frais, nous n'avons pu nous empêcher de penser à la "chèvre de M. Seguin".

C'est par une nuit pareille que la chevrette blanche, après avoir vaillamment combattu toute la nuit se laissa dévorer morte de fatigue, par le loup.

Les Corses de l'A.C. Ajaccio et de Louis Hon, après s'être défendus de tout leur coeur, de toutes leurs forces durant la première mi-temps, avoir suivi les justifications de Magnusson, évité les tirs de Skoblar, stoppé les percées en force ou en vitesse de Couecou et de Loubet, allaient-ils en seconde mi-temps subir lourdement la loi de l'indiscutablement meilleur ?

C'est ce que nous pensions à la mi-temps, tout en accordant vers par avance un satisfecit aux joueurs de l'A.C. Ajaccio.

Le prix du courage malheureux...

Seulement

le bout de l'oreille

Or - et ce fut la plus grande surprise de la rencontre - c'est exactement le contraire qui se produisit.

En 2me mi-temps, le jeu fut généralement mené et contrôlé par les Corses.

On s'y attendait si peu, que la grande foule versatile du Stade-Vélodrome siffla plusieurs fois son équipe pourtant victorieuse.

Deuxième curiosité de cette période, l'O.M. est toujours beaucoup plus dangereux dans la contre-attaque que dans le jeu savamment organisé.

C'est ainsi que, bien que dominés, les Olympiens se créèrent de nombreuses occasions fort nettes, contraignant Baratelli à faire étalage d'une classe certaine.

Mais notre devoir est de tirer un grand coup de chapeau à cette équipe de l'A.C.A. faite, au dernier moment de pièces et de morceaux et qui, hier soir, fit largement honneur à ses couleurs.

Car enfin, un gardien de but faisant partie de l'équipe, la chèvre de M. Seguin n'a eu, en définitive, qu'un bout de l'oreille mangée.

Traduisez qu'elle ne s'est inclinée que sur un penalty dont on ne finira pas de parler sur le cours Napoléon.

Vainqueurs, oui mais...

Petit vainqueur si l'on se réfère au résultat sec, l'O.M. n'en a pas moins largement mérité sa victoire.

À "l'occasionomètre" l'avantage des Olympiens fut flagrant et Baratelli eut infiniment plus de travail que son vis-à-vis Escale.

Cependant on doit objectivement constater que cette supériorité écrasante de l'O.M. est due à l'exceptionnelle qualité de ses attaquants de pointe, Magnusson Skoblar et Loubet, plus qu'à ce que l'on appelle le jeu collectif.

Le miracle et que les dribbles étourdissants de Magnusson, la puissance de tir de Skoblar, la vitesse de pénétration au pied de Loubet n'aient donné qu'un tout petit but.

On fera certainement mieux la prochaine fois.

Cela écrit, il reste qu'en 2e mi-temps, l'O.M. avait du sable et non pas de l'huile dans ses rouages.

Contre une équipe ayant des moyens offensifs supérieurs à ceux de l'A.C. Ajaccio, le fait eut été inquiétant.

Il appartient aux responsables de voir ce qui a pu empêcher la mécanique de tourner pendant 90 minutes.

Magnusson, Skoblar,

Loubet

Bien que le football soit un jeu collectif on est toujours à la recherche des performances individuelles.

À l'O.M., il est certain que Magnusson, Skoblar et Loubet furent très brillants, même si la chance ne leur a pas souri.

Leclercq ? Du bond et quelques passages à vide. Des passes de qualités d'autres qui n'arrivèrent pas un tir excellent 2e mi-temps et un certain relâchement aussi.

La moyenne reste bonne et encourageante pour ce jeune joueur auquel il faut laisser le temps de s'habituer à l'O.M. et à Marseille.

Couecou ? Une évidente bonne volonté, beaucoup de bonnes choses aussi, à côté de moins bonnes. Il convient de poursuivre l'expérience.

En défense, ou Novi ne rappela Facchetti que par un tir fulgurant en seconde mi-temps, il nous a semblé que le plus lucide était Hodoul.

Baratelli et Vanucci

Chez les Corses deux joueurs ressortirent nettement.

Baratelli dont le sens du placement est remarquable, et Vanucci que nous ne n'avions jamais vu aussi bien jouer.

Ils ne furent pas les seuls à se distinguer.

Les deux jeunes ex-Rémois Dumat et surtout Czerkaj nous ont plu, ainsi que l'ailier droit Leroy, toujours très entreprenant.

On l'a peut-être moins remarqué, mais le travail de Georgin et de Richard fut de premier ordre.

"Sanso", marqué au millimètre par Zwunka, n'a pu s'exprimer totalement encore qu'il nous ait paru bien en jambes.

Bref, une équipe corse qui a agréablement surpris.

Et l'arbitre

L'arbitre, par contre, nous a déçu.

Il a sifflé tout ce qui était insignifiant et laissé passer tout ce qui était dangereux.

Qu'il n'y ait pas eu de blessés graves et une chance.

Quand on laisse les joueurs se lancer à corps perdu sur l'adversaire, il faut s'attendre à ce qu'il y ait de la casse.

C'est tellement évident que l'on voudrait ne pas avoir à le répéter...

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 Le choeur des Marseillais :

"IL N'Y A PAS DE PETITES VICTOIRES !"

(Gérard PUECH était dans les coulisses)

Dans les vestiaires marseillais, ce n'est pas l'euphorie, le climat des grandes victoires.

À croire que ce succès étriqué, obtenu sur un penalty signé Magnusson ne satisfait qu'à moitié les acteurs.

"Mais on a gagné et je crois qu'il s'agit là du principal, souligne à ce propos Jules Zwunka, capitaine lucide et objectif. Les deux points que nous venant d'empocher valent ceux d'une victoire plus nette.

"Il faut bien se persuader pourtant qu'on doit s'attendre à de telles résistances d'autres adversaires, même chez nous. Dan ces cas c'est toujours pareil. Nous manquons de réussite et ceux d'en face s'enhardissent petit à petit.

"Il reste 36 rencontres à disputer. Nous en verrons d'autres..."

Cet avis apparaît pertinent car il explique en partie étroite du score.

Pour sa part, président Leclerc se montre assez sévère à l'encontre de ses joueurs et le dit :

"Je vais même plus loin... Ajaccio méritait à mes yeux le match nul. Les Corses ont fait jeu égal avec nous, même si l'on peut mettre quelques arrêts - miracles de Baratelli au compte de la chance ou de la réussite.

"Mais je vous rassure aussitôt il n'y a pas de petite victoire. Nous voilà avec 3 points d'avance sur Saint-Étienne et il ne serait pas normal de faire la fine bouche..."

Précisons que Marcel Leclerc n'avait pas hésité à aller féliciter Louis Hon et le directeur sportif Federicci, pour la performance de leurs élèves.

Loubet et Escale :

coups douloureux

Au rayon des pleurs, citons Charly Loubet et Jean-Paul Escale.

L'un et l'autre se plaignent du genou, le premier plus que l'on second.

"Mais je n'accuse pas Tassone, car il ne l'a pas fait exprès. Les circonstances ont voulu qu'il tombe en porte-à-faux sur ma jambe..."

Et le penalty ?

Il est vraiment au coeur du problème, personne dans le camp marseillais surtout pas le Suédois ne doutent de sa validité.

"Le Lemer a bloqué la jambe de Roger, explique Zwunka et Novi. L'arbitre ne pouvait siffler qu'un coup franc direct, soit un penalty".

Deuxième penalty ?

Dans le clan opposé, on est évidemment un peu plus réticent. Écoutons Louis Hon à ce propos.

"Je ne conteste pas la décision de M. Vuillemin. Mais pourquoi alors n'a-t-il pas jugé de la même manière d'action litigieuse de Zwunka sur Dortomb. Là, je crois sincèrement qui s'est trompé en fermant les yeux !"

Toujours cette sombre histoire de penalty sifflé en faveur de l'équipe qui reçoit.

Consultez donc à cet égard les statistiques de la saison dernière.

Côté insulaire, on est malgré tout satisfait du résultat :

"Partir avec le point du match nul nous aurait comblé certes, confirme Louis Hon, mais je ne peux adresser aucun reproche à mes hommes, qui se sont battus avec l'énergie.

"Pour une équipe bâtie à la va-vite, de bric et de broc, je crois que je n'ai pas si mal que ça. Le public de Timizzolo devrait être nombreux samedi lors de la venue d'Angers.

D'évidence, Ajaccio a rempli son contrat.

Spectateur intéressé, Gaby Robert, entraîneur national, confia également son opinion.

"À côté de moins bonnes, j'ai vu d'excellentes choses dans ce débat. Ainsi les deux ailiers ajacciens (Le Roy et Dumat rappelons-le) n'ont séduit par leur allant, leur vivacité, leur dynamisme.

"Chacun des joueurs, des deux côtés, a pris le match comme il fallait le prendre et ce fut une rencontre intéressante sur plus d'un point".

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 La merveilleuse ambiance des grands soirs

C'est l'ambiance des grands soirs : température douce, ciel sans nuage, foule bon enfant, mais prompte à réagir, parmi laquelle se trouvent, bien sur, de très nombreux supporters insulaires - Ne dit-on pas que Marseille est la première ville corse ? - Eclairage toujours aussi timide - ça s'arrangera bientôt on le sait - et instruments divers qui répondent aux immenses clameurs.

Le décor est planté, les acteurs au rendez-vous, l'O.M. reste l'O.M. enfant chéri du public.

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D'ailleurs, il s'agit bien de retrouvailles entre Marseillais et Ajacciens, certains tels Tassone, Sansonetti ou même Richard étant ici en pays de connaissance.

Dédé Tassone, enfant du pays, nous présentait, quelques instants avant le coup d'envoi, un télégramme ainsi libellé : "Soit gentil, laisse passer Charly. Grosses caresses ainsi qu'à ta femme et tes filles. Marraine".

Un joli message de Madame Guttmann.

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De Sansonetti : "Si le championnat s'était arrêté le soir de la première journée nous capitaliserions le maximum points buts etc."

Notre ami "Sanso" se pendrait pour Merckx lui aussi terrible capitaliste ?

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Pour s'échauffer Jules Zwunka arborait un magnifique maillot rayé rouge et bleu. Renseignements pris, il s'agissait de celui de l'équipe de Zadar, la ville natale de Skoblar, où ses parents habitent toujours. Des amis, retour de Yougoslavie, lui en avaient fait cadeau.

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Louis Hon ne tarit pas d'éloges sur la Corse : "J'ai trouvé là-bas un climat merveilleux, et on se croirait constamment en vacances. Si en outre quelques victoires venaient s'inscrire au tableau, tout serait parfait".

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Le même entraîneur ne cache pas ses idées sur le championnat actuel. "Je crois disait-il, qu'il y aurait tout intérêt à jouer de mars à octobre. Le temps s'y prête, et les recettes s'en ressentiraient. Voyez ce soir.

Une idée à étudier.

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Un spectateur enthousiaste, à côté de nous, s'adressant à son voisin : "On se lèvera à tous les buts, même à ceux d'Ajaccio !

Les voilà les véritables amateurs de fotball, les purs !

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Le désir intime, le voeu le plus cher de Couecou est de marquer un but en championnat pour l'O.M. Alors de s'adresser à ses partenaires : "Si vous me faites cette fleur, je vous en serai reconnaissant toute ma vie !"

C'est beau la foi !

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Les Ajacciens, arrivés dans la matinée d'hier, par avion, à 11 h 25, ne trouvèrent pas l'hôtel en ville, faute de place, ceux-ci étant pris d'assaut par les touristes.

Ils durent loger au "Clos Joli" de Sainte-Anne.

"Comme si nous étions au vert...", soulignait avec humour Tassone.

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Le jeune Le Roy, qui avait joué un excellent match, il y a deux ans, contre l'O.M., sous les couleurs de Rouen, dit le plus grand bien de son équipe : "Je n'ai jamais vu un public comme celui de Timizzolo. Quelle chaleur ! quelle passion ! si l'on réalise seulement un match honnête contre l'O.M. ils vont se retrouver 8 à 9.000 autour de la pelouse, face à Angers.

Rien de tel pour créer un climat !

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Remarqué dans la tribune présidentielle, Jean-Louis Jaubert, le merveilleux Compagnon de la chanson.

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Notre ami René Gallian est grand-père pour la première fois. Toutes nos félicitations à ce jeune "papie" du comité directeur de l'O.M.

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Versatilité du public :

Charlie Loubet couché rudement au sol par Tassone celui-ci est hué alors que quelques instants plus tôt en applaudissant !

C'est ça le football !

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Et lorsque Magnusson se vengeait lui-même, en réalisant un penalty suite à une faute caractérisée de Le Lamer, une multitude de pétards éclatait.

Justice était faite !

 

 

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