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Résumé Le Provencal

du 24 mai 1971

 

SKOBLAR dépasse ANDRESSON !

RENNES TAILLE EN PIECES PAR L'O.M. (5-0)

La question du jour, ou plutôt de la nuit était :

"Comment le Stade Rennais, qui vise la Coupe par priorité, va-t-il disputer ce match pour lui, de préparation ? "

L'O.M. jouant franchement sur les deux tableaux, n'avait qu'un seul problème :

Gagner et distancer Saint-Étienne plus possible, à la différence de buts.

Dès le début de la rencontre, on se rendit compte que les Bretons allaient jouer le jeu, dans le meilleur esprit, mais sans appuyer jusqu'au bout leurs actions.

Dans ces conditions, la victoire de l'O.M. ne parut jamais douteuse.

Elle fut celle d'une équipe foncièrement supérieure à sa rivale et par-dessus le marché portée par son public et se rendant compte que le succès ne pouvait lui échapper.

Le résultat fut une première mi-temps très ouverte, parfois spectaculaire, illustrée par une profusion d'attaques olympiennes et quelques mouvements offensifs rennais assez bien conduits.

Ce que l'on ne prévoyait pas, c'est que la défense du Stade Rennais, ordinairement assez sûre, allait commettre autant d'erreurs, surtout en son centre.

Ces fautes permirent à l'O.M. de prendre un avantage beaucoup plus net que ne le méritait la physionomie de ces premières 45 minutes.

Certes, elle avait été olympienne cette mi-temps, mais pas au point de valoir un 4 à 0.

 QU'EN SERA-T-IL JEUDI ?

Voilà pourquoi, à quelques jours du match aller en Coupe de France, il faut éviter de verser dans un optimisme excessif.

Nous croyons que, jeudi soir, la rencontre sera différente.

Sans aller jusqu'à prétendre que les Bretons ont caché leur jeu - il faudrait être très fort pour le faire - on peut aisément supposer qu'ils n'ont eu tendance, sans doute involontairement, à considérer le match d'hier soir comme secondaire.

En football, on ne se raisonne pas toujours et entre ce que l'on veut et ce que l'on peut, il y a souvent une différence.

Nous attendrons, en tout cas, jeudi soir, pour porter un jugement sur le Stade Rennais.

Méfiance d'abord.

 L'ÉQUIPE OLYMPIENNE AU SPRINT.

Cette réserve faite, il reste que l'O.M. a confirmé, hier soir, son retour en forme, amorcé contre Bastia et confirmé, surtout mardi dernier à Reims.

L'équipe olympienne a retrouvé ses automatismes, son calme et sa joie de jouer.

Elle paraît capable de terminer la saison au sprint, comme elle l'avait commencé, ce qui lui permettrait de valoriser sa possible victoire dans le championnat de France.

Il est bien certain que ce titre éventuel ne sera mis en considération dans le monde du football français, que dans la mesure où il sera sanctionné par une série de victoires éclatantes.

Celle d'hier soir en est une, car quoique l'on puisse dire ou écrire, battre le Stade Rennais par 5 à 0, est une performance appelée à avoir un retentissement certain.

Il faut des victoires de la sorte, pour enterrer définitivement l'affaire.

 SKOBLAR ET LES RECORDS.

Skoblar a livré un match dans le match à Keita d'abord, mais aussi à Andersson et à Gondet.

En 34 matches, Andersson avait marqué 35 buts.

En 34 matches, aussi Skoblar vient de marquer 36 buts. Josip a dépassé le regretter Gunnar !

Encore une légende qui disparaît.

Gondet avait marqué, lui, 36 buts, en 38 rencontres.

Relativement son record était assez inférieur à celui d'Andersson.

A moins que Skoblar n'ait une jambe cassé ou qu'il ne tombe gravement malade, nous voyons mal comment cet autre record, déjà égalé, pourra ne pas devenir son exclusivité, alors qui du reste encore quatre rencontres de championnat à jouer.

Et, pourtant, Josip a raté un penalty.

Cette saison 70-71 sera, en tout cas, pour lui, celle du triomphe et de ses extraordinaires qualités de buteur complet.

Il est dommage que l'on ne puisse faire un montage de ces 36 buts.

En s'apercevant à quel point le registre de Josip est étendu et varié.

La tête, les deux pieds, toutes les surfaces, la force, la finesse, la ruse, l'acrobatie, le classique etc....

L'un des meilleurs buteurs mondiaux, en ce moment.

C'est une certitude.

Maurice FABREGUETTES

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  Victoire acquise à la mi-temps

L'ombre de Saint-Étienne a plané une nouvelle fois hier soir, sur le Stade Vélodrome. Il est inutile, bien sûr, d'en souligner la raison.

En exagérant à peine, on pourrait même dire que la cité marseillaise a vécu la soirée du dimanche à l'heure de l'O.M. A preuve, entre autres, ce concert de klaxons qui, dès 19 heures déjà, retentissait aux quatre coins de la ville. Cela devait se traduire, comme prévu, par une assistance des grands jours et une ambiance sur les gradins qu'on peut facilement imaginer sans l'avoir vécue.

En un mot, lorsque les puissants projecteurs s'allument sur ce monde passionné à l'impression que les Olympiens s'apprêtent à engager la grande bataille du titre.

Quoi qu'il en soit, pour l'instant, les Stéphanois sont bels et bien leaders, c'est peut-être une autre cause de l'engouement populaire, la foule attend dans la fièvre, la passation des pouvoirs.

Les équipes sont celles annoncées. L'arbitre M. Mouton.

BUT DE SKOBLAR.

Dès les premiers échanges, il saute aux yeux que l'O.M. est contracté, ce qui vaut à Escale d'intervenir sur deux tirs de Guy, dont le premier, première minute, était le plus dangereux. Mais, comme d'habitude, Magnusson secoue le joug, après avoir éliminé Cardiet, il don-?ne un bon centre qu'Aubour capte sur la tête de Loubet, 4me minute.

Une minute après, il alerte au centre son compère Skoblar, qui tire fort. Mais le gardien breton est une nouvelle fois bien placé.

Toujours est-il que l'O.M. semble avoir réagi, et Aubour a encore l'occasion de se distinguer sur un tir de Skoblar qui prenait le chemin de ses filets, 12me.

Puis un relais Novi - Lopez se termine par une tentative de l'arrière marseillais, 19me minute, sur laquelle Aubour fait une nouvelle et magnifique envolée.

L'O.M. manifestement, cherche la faille et va la trouver sur un remarquable centre de Gress qui fonce de l'aile gauche, la balle arrive sur Skoblar, Aubour et Goueffic par leur précipitations se gênent et Josip qui bénéficie d'un heureux rebond, ouvre le score (22e minute), dans l'explosion de joie que l'on devine.

À GRESS, LE DEUXIÈME !

Les Marseillais, totalement revigorés par ce but s'emploient à maintenir la pression et c'est une excellente idée.

Loubet, coup sur coup, échoue d'un rien après deux raids solitaires, mais au terme du second obtient un corner qu'il tire lui-même. À la réception Gress placé en embuscade, saute plus haut que les défenseurs rennais et son coup de tête admirablement dirigé prend Aubour à contre-pied (30me).

L'AVALANCHE

Après une demi-heure de jeu et avec deux buts d'avance, les Olympiens ont la situation en main, d'autant que sur une passe de Loubet, Skoblar va augmenter la note. Josip résiste à trois défenseurs et son tir, pour la troisième fois ne laisse aucune chance à Aubour (42me).

Et ce n'est pas fini !

Les attaques marseillaises fusent de toutes parts, et sur l'une d'elles, Magnusson échappe encore à Cardiet, et centre. Skoblar est seul au point de penalty et ajoute un quatrième but comme à la parade (44me).

À la mi-temps cette débauche offensive se traduit par un cinglants 4 à 0.

Rennes cacherait-il son jeu ?

COUECOU RENTRE EN JEU.

L'O.M., lui, ne s'en soucie guère et la deuxième période est à peine engagée que Aubour est obligé de se coucher sur un tir tendu de Skoblar. Les Rennais tentent néanmoins de sauver la face mais leurs timides actions ne peuvent inquiéter Escale. C'est au contraire Magnusson qui sème un début de panique dans l'arrière défense bretonne en déviant pour Loubet. Le centre de l'ailier international est raté d'un cheveu par Bonnel (49me).

Les hommes de Prouff ont encore eu chaud !

Lucien Leduc, lui, en profite pour faire entrer Couecou à la place de Magnusson qu'il tient à ménager bien entendu avant le match de jeudi (59me).

PENALTY RATÉ DE SKOBLAR.

Peut être rassuré par la sortie du Suédois, Rennes fait alors des efforts pour présenter un meilleur visage. Rico l'un de plus remuant attaquants bretons à même la possibilité de tirer en force mais Escale en grande forme écarte le danger en se saisissant de la balle (64me).

Sur le renvoi, Cosnard à la malencontreuse idée de tomber dans la surface de réparation en mettant semble-t-il la main sur le ballon. M. Mouton accorde un penalty que Skoblar ne peut transformer (70e), Aubour déviant le tir en corner.

SKOBLAR QUAND MÊME

Aubour a encore une intervention pleine d'autorité, sur un tir de loin de Skoblar, 74me, alors que Lenoir fait son entrée à la place de Simian, 80me.

Mais cet apport de sang nouveau ne change rien à l'affaire. Couecou est bien que près d'aboutir à l'issue d'un sprint échevelé (82me). Skoblar, lui, a plus de chances quelques minutes plus tard : il résiste à la poursuite de ses gardes du corps et, sans perdre un 10me de seconde, tire dans le coin droit de la cage rennaise. Cela fait le 5me but olympien, et le quatre 36me de Josip, qui vient d'égaliser le record de Gondet, 84me minute.

Escale n'en intervient pas moins sur un tir de Guy à l'ultime minute.

Quand M. Mouton siffle la fin, chacun est persuadé que l'O.M. a gagné en champion sa première place. Mais sans trop d'euphorie, tout de même. Jeudi en coupe, bien des choses risquent de changer.

Jean FERRARA

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 Lucien LEDUC : "Méfiance tout de même !"

Lucien Leduc, après la très large victoire de son équipe, ne pavoisait pas pour autant. Il résumait ainsi la situation :

"Aujourd'hui nous avons fait tout ce qu'il fallait pour améliorer notre différence de buts. À cet égard, nous pouvons nous montrer satisfaits, mais il est très rare que deux matches se ressemblent. Nous ne devons pas, après ce succès, nous endormir sur nos lauriers. Jeudi, notre tâche sera plus ardue que certains ne l'estiment ! Alors, méfiance !".

Le président Leclerc s'attachait surtout à mettre l'accent sur les progrès de son équipe.

"Je crois que nous sommes arrivés, tout simplement, à notre meilleur rendement, et cela, au bon moment. Nous avons joué, ce soir, sur la lancée de notre seconde mi-temps de Reims. Le ballon circulait bien, et nous avons su allier le résultat à la manière. C'est très encourageant !"

Pour la première fois, nous avons eu Skoblar rire de toutes ses dents dans le vestiaire de l'O.M. Nous connaissons tous le caractère ombrageux du Yougoslave. Mais, hier soir, le roi n'était pas son cousin. Ne venait-il pas en marquant quatre fois, de rejoindre, en attendant de les dépasser, les Gondet, Fontaine et Andersson ?

- Alors content, Josip ?

- Oui, vous pouvez le dire ! Très content !

- Demain, il va lire les journaux ! intervenait Roger Magnusson. Sa réflexion provoquait l'hilarité générale.

En fait, pourquoi donc le Suédois a-t-il laissé sa place à Couecou ?

"J'étais très fatigué. Vous savez, jouer deux fois par semaine, avec la chaleur, c'est dur. Je voulais déjà sortir à la mi-temps. À 4-0, c'était gagné. Comme cela, j'espère être en bonne condition pour jeudi.

Et Roger ajoutait, admiratif :

"Quel grand match a fait Josip !"

Finalement, les joueurs marseillais se montraient très éprouvés par leur match victorieux. Gilbert Gress demeurait longtemps assis sur son banc. Il se déridait quand nous lui apprenions qu'un journaliste sportif allemand, qui l'appréciait beaucoup, était dans la tribune.

"Vous savez, nous dit-il mi-figue, mi-raisin, j'avais pas mal de supporters en Allemagne. Mais, ici, croyez bien que je prouverai à tout le monde que l'O.M. n'a pas fait une mauvaise affaire en s'attachant mes services !"

Le capitaine Zwunka nous lançait :

"Bien sûr, nous avons gagné ! Mais il est terrible de penser qu'il faudra remettre ça jeudi. Dans ce métier, on n'est jamais plus de deux jours tranquilles !"

Dans son coin, Édouard Kula nous glissait :

"Cela a pu vous paraître un peu match facile. Pourtant, les Rennais remuent beaucoup, avec des déplacements de jeu incessants. Nous terminons tous assez éprouvés. Le jeu sans ballon est parfois fatigant !"

Enfin Charley Loubet souriant, mais essoufflé, répétait sans cesse :

"C'est très bien, tout cela, mais je suis cuit !"

Louis DUPIC

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Jean Prouff

"Jeudi, tout sera différent !"

On eut dit en pénétrant dans le vestiaire breton entendre un écho fidèle des paroles prononcées dans celui d'à côté.

"L'O.M. était très fort ce soir, nous disait Jean Prouff. Il nous était largement supérieur et nous nous sommes si mal arrangés que nous lui avons facilité la tâche. Les deux premiers buts marseillais ont été acquis sur de grosses fautes de défense. Après, il n'y avait plus de match possible, d'autant plus, je le répète, que l'O.M. était très bon ! Mais il est rare que deux matches se ressemblent. Jeudi, il en ira tout autrement, je l'espère".

Et Jean Prouff ajouté en riant :

"Il fallait bien que nous perdions une de ces deux rencontres. Nous avons choisi de gagner notre demi-finale. Mais cela, ne l'écrivait pas !"

Nous étions revenus au côté de Marcel Aubour. Le joyeux Tropézien, après avoir chaleureusement félicité ses vainqueurs marseillais, nous glissait :

"Ce soir, nous avons fait trop de cadeaux à l'O.M., mais nous lui préparons un piège pour jeudi... une arme secrète. En vérité, tout devrait aller mieux pour nous, quand nous aurons reconstitué notre défense !"

Ainsi tout le monde était du même avis : Jeudi on assistera à un autre match.

L.D.

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Le biniou en sourdine

 OISEAUX SUR LE STADE.

Quelques minutes avant le coup d'envoi, un groupe d'oiseaux survola la pelouse du stade vélodrome et dans la lumière des projecteurs, il apparut d'une blancheur éclatante. Était-ce un présage ? Les Romains de l'Antiquité qui croyaient énormément aux augures auraient sans aucun doute, tiré un enseignement de ce passage inattendu...

 KLAXONS PRÉMATURÉS...

On a beau répéter qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, quelques chauffeurs optimistes scandaient à l'aide de leurs klaxons "O.M. vainqueur !" C'était peut-être prématuré mais également un signe de confiance indéniable sur le destin olympien 1970-1971.

 UN BEAU SPECTACLE

Nous avons remarqué dans les tribunes la présence de nombreux visages connus comme ceux de "Loule" Cossou, Hatchi, Orsatti.

Comme nous demandions à Cossou s'il avait un favori pour ce match au sommet, il nous répondit avec un large sourire : "Cela m'importe peu, ce que je veux c'est voir un beau spectacle !"

 FAUSSES NOTES POUR LE BINIOU.

La flûte Hindoue charme même des serpents, le biniou breton a-t-il le même pouvoir ? Nous ne le pensons pas. Dans tous les cas, au stade vélodrome, hier soir, il a fait entendre de nombreuses fausses notes !

 PAS DE PHALANGE D'ARVOR

Certes, la colonie bretonne est bien moins importante à Marseille que la colonie corse, ou même ardéchoise, mais il y a bien quelques milliers de gars d'Arvor ou d'Armor dessiminés de l'Estaque aux Goudes. Au stade vélodrome, ils n'étaient pas venus en masse soutenir leurs compatriotes, ou s'ils l'ont fait ils l'ont fait en ordre dispersé !

Alain DELCROIX

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L'HUMOUR BRETON

Avant le premier acte, Jean Prouff, qui est un humoriste dans son genre, a déclaré, sur un ton pince-sans-rire : "Battre trois fois les Marseillais, ce sera dur... En réalité, mon sentiment profond était une victoire et un nul en coupe, et une défaite en championnat !

 LES COMPTES SIMPLES

Nous ne savons pas si les footballeurs marseillais sont forts en mathématiques, mais, hier soir, avant le premier coup de sifflet de la rencontre, ils ont fait des comptes très simples. Saint-Étienne n'ayant pas pris qu'un point à Angers, s'ils battaient, eux, les Rennais, ils se trouveraient seuls en tête avec un point d'avance. Ce sont des comptes très simples, mais qui peuvent nous donner mal à la tête ou une certaine appréhension, pour ne pas parler d'angoisse !

 LA VALISE PLEINE !

À la 30e minute de jeu, quand l'O.M. eut marqué son 2me but, l'un de mes amis Bretons me dit d'un ton amer : "Ce soir, je vois mal partis les Rennais ! J'ai l'impression qu'ils vont remplir leur valise...", Sous-entendu de buts adverses.

 ILLOGISME.

Quand Couecou fait sa rentrée, on applaudit, mais quand Magnusson sort, on siffle, car le public veut continuer à voir en action le diabolique Suédois. Comportement illogique, car le football ne se joue pas encore à douze !

 COMME AU BASKET.

Quand Skoblar reprit la balle qui allait lui permettre de marquer son 4me but, il était tout seul, totalement délaissé par ses gardes du corps. On aurait dit une phase de basket-ball et non de football.

 MALHEUR AUX BARBUS !

Ce fut le titre d'une célèbre émission de Francis Blanche et de Pierre Court, mais il n'était pas question de footballeurs. Beta, lui, arborait contre l'O.M. une magnifique barbe et lui aussi ne fut pas très chanceux !

Alain DELCROIX

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