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Résumé Le Provencal

du 20 juin 1971

 

CHAMPION VIRTUEL !

L'O.M. démarre en trombe à St Ouen et bat le Red Star : 4-3

PARIS (Par téléphone) - Miséricordieuse, la pluie qui tombait sans discontinuer sur la région parisienne depuis plusieurs jours s'arrêta en fin de matinée, et ce week-end de football commença par un gai soleil.

Dans ces conditions, le vieux stade de Paris allait faire le plein, le menu proposé et tant de choix, avec comme hors-d'oeuvre une prometteuse finale de Coupe Gambardella, revanche de celle de la saison dernière pour les juniors de Lyon et de Saint-Étienne.

Très tôt, plus d'une heure avant le coup d'envoi du match de championnat, les spectateurs des populaires qui s'étaient installés sur l'herbe pour saucissonner, durent-ils prendre une position beaucoup moins confortable.

Le sort de cette finale demeura longtemps indécis, les adversaires, très nerveux, accumulant les fautes de défense, puis pencha brusquement en faveur des jeunes Lyonnais, plus homogène et surtout plus vifs.

Aussi, Saint-Étienne, placé sur tous tableaux, voyait-il filer entre ses doigts un nouveau titre et ses observateurs allaient être bientôt fixés sur le dessin de l'équipe fanion dont le duel avec l'O.M. se poursuivait par adversaires interposés, à 500 kilomètres de distance.

UNE CHAUDE AMBIANCE

Au cours du long entracte qui séparait de rencontre, les deux chorales adverses avaient eu le temps de s'affronter. La rigueur avec laquelle les partisans du Red Star répliquaient à ceux de l'O.M. ne laissait aucun doute sur l'ambiance dans laquelle la partie allait se disputer. Les Parisiens n'avaient pas caché que, pour vaincre, les Marseillais devraient, selon l'expression consacrée, "leur marché sur le ventre", et ces derniers y étaient tout à fait disposés.

Dès les premiers échanges, Monin balayait littéralement Skoblar, son vieil ennemi, et Zvunka rendait la pareille à Pintenat. Mais un centre de Loubet, créait une situation dangereuse, alors que Magnusson après avoir éliminé Garrigues, se faisait arrêter par Ahache.

14me MINUTE :

BUT DE LOUBET.

Laudu avait déjà été inquiété à deux reprises par son partenaire Monnin, puis sur un centre de Gress, l'O.M. marqua un but gros de conséquence.

Un coup franc de Skoblar, faiblement repoussé et Loubet reprenait de face la balle au bond et la logeait dans le but. L'épaule ou le dos d'un défenseur parisien lui facilitait la tâche en la déviant hors de portée de Laudu.

Ce but récompensait la tenue d'ensemble de l'équipe marseillaise qui, après la flambée initiale du Red Star, avait pris la partie en mains.

Des deux côtés, on s'engageait à fond.

Quelques minutes plus tard, un centre de Novi traversant la défense était dégagé tout juste avant de parvenir dans les pieds de Skoblar.

25me MINUTE :

EXPLOIT DE SKOBLAR

Ce n'était que partie remise.

À la 25me minute, Josip, de la limite et de la gauche, reprenait de volée du droit un centre de Bonnel et catapultait littéralement la batte dans le but d'un extraordinaire tir à effet.

Grâce à un véritable exploit, il atteignait ainsi le mur des quarante buts.

On notait, au cours des minutes suivantes, un tir au-dessus de Loubet et une nouvelle tentative de Skoblar de l'extérieur du gauche, cette fois, que Laudu parvenait à contrôler.

35me MINUTE

PENALTY RATÉ DE SKOBLAR.

A la 35me minute, Magnusson, dans la surface, était pratiquement soulevé du sol par Garrigues, et Skoblar, décidément peu heureux dans cet exercice tirait trop mollement le penalty accordé par M. Frauciel : Laudu pouvait se coucher sur la balle.

40me MINUTE :

ENCORE JOSIP

Il fut racheté bien vite en allant tromper seul Laudu, sur une belle passe de Gress qui avait échappé à Monin, et ce n'était pas fini ! Le temps de remettre en jeu, et Laudu sauvait à deux reprises en quelques secondes devant le roi des buteurs.

C'était incontestablement le meilleur O.M. qui avait, en moins d'une demi-heure, balayé le Red Star. Il lui restait la seconde mi-temps pour augmenter l'addition et se mettre hors de portée de Saint-Étienne, dont on ne savait rien. Mais il est évident que la décision étant faite, elle ne pouvait être aussi spectaculaire que la première.

Skoblar, néanmoins échouait de justesse sur un très bon centre de Magnusson. Dans l'équipe parisienne, Ferreira prenait la place de Garcia, à la 55me minute, et le public écriait "Ferreira, trois buts".

Ferrie arrêtait Magnusson, bien lancé par Lopez à quelques mètres du but. L'O.M. contrôlait le jeu, mais ses partisans, insatiables, réclamaient d'autres buts.

Pour le malheureux Red Star, ne sachant trop que faire, le temps aussi devait être long.

65me MINUTE :

TÊTE DE BONNEL.

Il fallut un très bon centre de Skoblar, exécuté depuis la gauche, de l'extérieur du pied droit, la balle échappant à Laudu, et magistralement reprise de la tête par Bonnel, pour que le stade se réveille avec ce quatrième but marseillais.

Des deux côtés, on s'engageait à fond. Les Parisiens se montrant comme ils l'avaient annoncé, extrêmement combatif. L'O.M. cependant paraissait capable de se tirer d'affaire.

TROIS BUTS PARISIENS.

Mais ce fut aussi le départ d'une bonne réaction des Parisiens, qui réussirent à sauver l'honneur, grâce à un joli coup de francs de Ahache, habilement servi par Pintenat.

Cela se passait aux 75me et 81me minutes et démontrait que l'O.M. n'avait pas battu un adversaire résigné. Et l'on eut droit au suspense le plus total, quand Pintenat, à la 87me minute, reprit victorieusement de la tête un centre de Garrigues.

Quelle ahurissante fin de match, aussi extraordinaire par le sensationnel retour du Red Star, que par l'euphorie de l'O.M. en première mi-temps.

En tout cas, une soirée inoubliable pour les 18.000 spectateurs payants.

Louis DUPIC

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  On ne s'incline pas dans

la victoire comme dans un lit

PARIS - Pour remplir un stade il faut de la passion et un bon scénario.

On s'écrasait hier soir à Saint-Ouen, on se marchait sur les pieds, on occupait les moindres recoins de ce terrain vétuste dans l'espoir d'assister à deux choses totalement différentes : le sacre ou le massacre de l'O.M.

Il apparut dès les premières minutes de la rencontre que l'O.M. n'était pas le moins du monde décidé à se laisser massacrer et que le Red Star n'avait aucune réelle disposition pour ce genre de besogne.

En voyant, au demeurant, assez mal à cause du trop grand nombre de poteaux situés entre nous et la pelouse, les Olympiens, calmes, froids, occupant rationnellement le terrain et faisant adroitement courir la balle, nous comprîmes sans peine ce qui allait se passer.

Les amateurs de roman noir en seraient pour leurs frais, nous allions être les témoins ravis du roman rose de l'O.M.

 LE RED STAR RÉDUIT AU

RÔLE DE COMPARSE.

Le Red Star, au lieu d'absorber d'aborder cette rencontre dans un véritable esprit de challenger, avait cherché une solution tactique. Faire supporter tout le poids de la partie à sa robuste défense en comptant sur une éventuelle contre-attaque pour marquer un but miraculeux.

Mais que peut valoir une tactique quand l'adversaire à la maîtrise du ballon, joue plus vite, de manière plus précise et compte dans ses rangs les meilleurs techniciens presque à tous les postes ?

Le résultat est celui que des milliers de Marseillais, fidèles habitué du Stade-Vélodrome, ont rarement vu cette saison.

Un O.M. à la fois brillant et efficace, faisant une belle démonstration de son talent que derrière nous un spectateur devait dire : "Je n'ai jamais vu autant plaint le Red star que ce soir".

Et pendant ce temps, au cri de "Allez l'O.M.", on ne voyait que des maillots blancs sur le terrain.

C'était en première mi-temps, vous l'avez deviné.

 SKOBLAR : UN BUT D'ANTHOLOGIE.

À part que prit Skoblar dans la conclusion heureuse de ce festival fut une fois de plus magistrale.

Sous les yeux de tous ceux que la tribune d'honneur comptait de techniciens du football, Josip a fait une démonstration de frappe même s'il a raté un penalty.

Restant en retrait pour éviter le contact direct avec athlétique Monnin, Skoblar travailla du droit et du gauche avec tous les efforts possibles, comme il le fait parfois à l'entraînement, pour les plus grands plaisirs d'une centaine de supporters.

Son premier but, le second de l'O.M. mériterait de figurer dans la cinémathèque du football, s'il y en avait une. Un but d'anthologie. De vingt-deux mètres, sous un angle à demi ouvert, il réussit à loger le ballon dans la lucarne opposée d'un simple fouetté de la jambe droite, apparemment sans le moindre effort.

Merveille de la technologie et excellente leçon pour tous les finalistes la Coupe Gambardella qui, précisément, avaient montré quelques lacunes dans ce domaine essentiel du football.

 LE SOMMET D'UNE SAISON.

À deux à zéro, la cause était déjà entendue : à 3 à 0 la condamnation du Red Star était déjà écrite au grand registre du championnat de France 70-71. Le reste n'aurait été plus qu'une simple formalité si l'O.M. n'avait trop cru à sa victoire.

Jusque-là, O.M. avait gagné aux points, par k.o. de toutes les façons possibles et imaginables.

Ce n'était peut-être pas encore le sacre, mais l'apothéose. Le sommet en tout cas de la saison.

Ainsi donc, l'O.M. avait eu la coquetterie d'aller pratiquement recevoir la couronne de champion là où il était le plus contesté, c'est-à-dire à Paris.

Tous les critiques de la capitale ont maintenant compris : l'O.M. n'a pas gagné son titre sur le tapis vert des "affaires", il l'a aussi conquis de haute lutte sur la pelouse de tous les stades de France, y compris celui de Saint-Ouen à la lumière éclatante des projecteurs. Il était important que sa démonstration de force et de qualité fut faite à Paris.

  UNE FIN EXTRAORDINAIRE.

Si l'on en juge d'après les réactions du public après l'étonnante remontée du Red Star, on devine ce qui se serait passé si les Parisiens avaient tenu de bout en bout leur rôle de tombeur d'idole. St-Ouen eut été un volcan en ébullition, une source d'incidents et de bagarre.

Cependant, cette fin de match qui vit le Red Star revenir de l'enfer aux portes du purgatoire, est une bonne leçon pour les deux équipes.

D'abord pour le Red Star qui aurait dû savoir qu'on ne triomphe pas d'un adversaire foncièrement plus fort en réfléchissant trop. Il faut foncer, foncer toujours, foncer encore et surtout avoir la foi.

Ensuite, pour l'O.M. qui a compris qu'on ne doit jamais s'installer confortablement dans la victoire comme dans un lit. En football tout est possible, même d'être remonté quand on mène par 4 à 0 à un quart d'heure de la fin.

Il n'en reste pas moins que l'O.M. a tout de même gagné cette rencontre qu'il ne fallait pas perdre et qu'il n'est plus maintenant séparé du titre que par un simple match nul contre Strasbourg.

Maurice FABREGUETTES

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 Lucien LEDUC :

"Un relâchement que je ne m'explique pas..."

PARIS - Il ne restait plus qu'une minute à jouer et le Red Star venait par Pintelat, de ramener le score à 4-3 et faisait de louables efforts pour arracher le match nul, dans une ambiance indescriptible.

Lucien Leduc, livide, se leva brusquement du banc de touche et se frayant un passage parmi le service d'ordre, hochant tristement la tête, regagna immédiatement le vestiaire.

Lorsque nous le rejoignîmes, quelques instants plus tard, il faisait les cent pas dans les couloirs et s'avança vers nous pour nous demander le résultat. Il ne se contracta enfin lorsqu'il sut que Marseille avait réussi à préserver sa victoire.

"Je ne comprends pas ce relâchement", dit-il. "Mais ce dont je suis sur c'est qu'il est involontaire. Mes joueurs n'ont pas lever le pied lorsqu'ils menaient 4-0. Malheureusement, ce relâchement a failli nous coûter cher... Mais je vous ferai remarquer quand même que Marseille n'a plus été battu depuis sa défaite malheureuse de Metz et que nous venons de remporter notre sixième victoire consécutive au stade de Paris, à Saint-Ouen, ou St-Étienne n'avait pu faire que match nul.

Sur ce, Marcel Poujinc arrive dans le vestiaire et lance à la cantonade :

"Saint-Étienne a battu Ajaccio : 5-2. Keita a marqué 4 buts. Il est maintenant à égalité au classement du meilleur buteur avec Josip Skoblar..."

Pour Mario Zatelli, ce n'est pas une surprise :

"J'avais vu Ajaccio récemment et avant le match j'avais dit que Saint-Étienne marquerait beaucoup de buts, je ne me suis pas trompé. Nous avons gagné ce soir et c'est ce qui est important. Nous aurions pu gagner plus nettement, beaucoup plus nettement, mais l'O.M. mena 4-0 et se déconcentra. Cela par excès de confiance. Le public, doit être content, il a vu marquer 7 buts.

Si Josip Skoblar faisait grise mine, visiblement pas content du tout de la fin du match, Jules Zwunka, lui, n'était pas trop mécontent. Nous avons gagné nos chances d'être champions de France sont toujours les mêmes..."

Jean-Paul Escale, lui, regrettait d'avoir pris des buts bêtes.

"Quand un gardien prend de jolis buts, il n'y a rien à dire. Mais je ne suis pas très content des 3 buts que le Red Star nous a marqués. Le premier, parce que le mur été mal fait. Le second parce que Roger s'est fait prendre le ballon. Le troisième sur un corner mal renvoyé".

Pour le président Marcel Leclerc le titre n'est pas encore gagné.

"L'Olympique de Marseille a montré ce soir ses deux visages : l'un très bon, l'autre mauvais. L'O.M. est ainsi fait. Nous ne sommes pas encore champions de France. Attendons, s'il vous plaît, samedi prochain le résultat du match Marseille - Strasbourg".

Nous n'avons pas rencontré une équipe abattue dans le vestiaire du Red Star.

Au contraire, "nous nous sommes réveillés trop tard", dit Jean Mouthon. "Le premier but que nous avons encaissé nous a fait terriblement mal, mais je suis sûr que cette défaite va nous stimuler pour notre dernier match à Valenciennes".

C'est également l'avis de Marcel Tomazover, entraîneur du Red Star :

"Cette défaite n'a aucune importance. Le point dont nous avons besoin pour assurer notre maintien en première division nous l'obtiendrons à Valenciennes. Pour en revenir au match de ce soir, l'O.M. a eu l'énorme avantage de marquer le premier but. Si nous avions réussi, nous, à marquer ce premier but, nous aurions gagné. Et, si le match avait duré cinq minutes de lpus nous égalisions.

Le président Hubert Zenatti n'est pas très optimiste :

"Je me demande si nous parviendrons à faire le match nul à Valenciennes. Ce soir, nous avons certes réagi, mais notre réaction a coïncidé avec une déconcentration bien normale de Marseille qui menait alors 4-0.

Robert BUREAU

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 (Photo : collection personnelle de Matthieu Lecharpentier)

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