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Résumé Le Provencal

du 24 août 1972

 L'O.M. fait front à BASTIA (0-0) 

A match exceptionnel, tactique de circonstances

BASTIA - Nous avons sous les yeux, de l'autre côté du terrain, la publicité d'une marque de chloroforme.

Sous notre stylo-bille, une feuille quasiment blanche. C'est la mi-temps et nous pourrions résumer ces 45 premières minutes sur un papier de cigarettes si nous ne voulions nous en tenir qu'aux occasions sérieuses de but.

Jusqu'à présent, tout s'est passé comme prévu dans le plan olympien.

L'équipe marseillaise, privée de ses meilleurs attaquants de pointe, ceux de charme et ceux d'une grande efficacité, a réussi à chloroformer le jeu.

En l'occurrence, et compte tenu des circonstances particulières de la partie, c'était bien joué.

Pour obtenir ce résultat, encore négative, l'O.M. a bourré le milieu de terrain de produits calmants. Les joueurs allaient par paires, comme les frères siamois.

Les tandems de ce soir étaient : Bracci-Kanyan, Zvunka-Félix, Kula-Giordani, Novi-Papi, Gress-Bauda et Bonnel-Lenoir.

Leclercq joue franchement au milieu du terrain, généralement au niveau de Bonnel.

Franceschetti est seul en pointe face à son ami bastiais Lucchini. Quant à Di Caro, joue le rôle ingrat d'ailier unique, se promenant sur toute la largeur du terrain.

Voilà pour le scénario.

L'ATTAQUE BASTIAISE COMPLÈTEMENT ENGLUÉE

Cette manière de jouer à, pour les Olympiens, un premier avantage.

L'équipe de contre-attaque comptant généralement sur la vitesse, le sens de l'improvisation et le perçant de ses avants de pointe. Bastia ne sait plus à quel saint corse se vouer.

Les Kanyan, Gordani, Felix et autres Lenoir sont comme pris dans la glu. À chacune des généreuses attaques corses, la densité des joueurs devant Carnus est telle que placer un tir demanderait une grande maîtrise technique et un sang-froid à toute épreuve.

Ce qui manque le plus aux joueurs bastiais.

Deuxième avantage, si l'on veut : en calmant résolument le jeu, l'O.M. a aussi calmé le public. On crie, certes, on s'agite, mais cela ne va pas plus loin.

Bref, cette rencontre, que les responsables olympiens redoutaient tant, se déroule on ne peut plus normalement.

À un point tel que l'un de nos voisins a pu dire : "Tiens, on dirait un match amical".

N'exagérons rien, le rythme du jeu et l'engagement des joueurs des deux camps est bien d'un véritable match de championnat.

PANTELIC ET CARNUS TRÈS PEU À L'OUVRAGE

En ajoutant un zeste de dynamisme et une plus grande domination bastiaise, vous aurez une image de la deuxième mi-temps.

Comme la première, elle fut marquée par l'intraitable jeu défensif des Olympiens et leur art de geler le jeu au milieu du terrain.

Mais les Bastiais se montrèrent beaucoup plus entreprenants et à plusieurs reprises, ont pu craindre pour Carnus.

À quelques différences près cette 2me mi-temps ressembla beaucoup à la première. En effet, ce qui caractérisa le plus cette rencontre fut que les deux grands gardiens internationaux Pantelic et Carnus n'eurent pas à se surpasser.

Le meilleur arrêt de Pantelic se situe en première mi-temps. Sur un coup franc tiré par Bosquier, il plongea d'une façon superbe et bloqua le ballon dans le coin inférieur de sa cage. Malheureusement c'était un exploit inutile car l'arbitre a fait retirer le coup franc.

Carnus se trouva dans quelques situations difficiles mais pas plus de deux ou trois fois. En première mi-temps, il réussit à intercepter de la jambe un tir à bout portant de Gordani.

En deuxième mi-temps, il se distingua sur quelques poussées corses. Mais enfin, on n'a pas vu, hier soir, ni le grand Carnus ni le grand Pantelic.

L'EXCELLENTE SANTÉ DE L'O.M.

On savait, avant cette rencontre, que l'O.M., sans Skoblar, Magnusson, Nagy et compagnie, ne pourrait-on pas jouer un match offensif et qu'il serait obligé d'accommoder les restes. Il l'a fait avec beaucoup de caractère et de sang-froid. Cette rencontre aura au moins démontré que la santé morale de l'équipe était excellente et que son fond était comme la saison dernière, capable de supporter les rencontres les plus difficiles.

Il est bien évident que c'est le centre de la défense olympienne qui supporta le principal de la rencontre. Parmi les meilleurs défenseurs, nous citerons en premier lieu Bosquier, qui ne commit aucune faute et fut en toutes circonstances à peu près parfait. Il est dommage, avant France Grèce, que l'arrière central olympien ne soit plus sélectionnable car il rendrait encore de grands services aux tricolores.

On peut également accorder une super mention à Zvunka qui s'opposa avec beaucoup de détermination et de force aux infiltrations de Félix.

Bracci, jusqu'à sa blessure en fin de partie, avait confirmé tout le bien que l'on pense de lui en s'opposant la plupart du temps aux attaques du meilleur joueur corse, Kanyan.

On attendait Leclercq et il n'a pas déçu. Il prit confiance au fil des minutes et, en deuxième mi-temps, plusieurs de ses services à distance firent sensation. Il est regrettable que ces services n'aient pas trouvé devant eux de véritables attaquants de pointe en forme.

Pour le reste, l'équipe de l'O.M. a fait le match sérieux et consciencieux que l'on attendait d'elle.

On peut, cette saison encore, lui faire confiance ; elle a prouvé au cours de cette rencontre difficile qu'elle possédait de grandes ressources morales.

Maurice FABREGUETTES

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0-0 : un point précieux pour les Marseillais

BASTIA. - Pleuvra, pleuvra pas ? Toute la journée, hier, on s'est posé la question intimement liée, vous le devinez, avec le sort de la rencontre.

À quelques minutes du coup d'envoi personne n'était encore fixé. Mais le moins qu'on puisse dire est que d'inquiétants nuages à s'amoncelaient au-dessus de Furiani.

Qu'à cela ne tienne. À ce moment-là le succès populaire étant largement assuré.

L'O.M. FAIT FRONT

Ambiance indescriptible quand... Franceschetti engage. Mais on s'aperçoit déjà que la défense olympienne ne va pas manquer d'ouvrages. Kanyan et Giordani placent tour à tour les premières banderilles.

Il n'empêche que Bracci et Kula, sans doute émoustillés par leur récente sélection nationale, font bonne garde.

L'O.M., sans s'affoler, laisse passer l'orage.

On s'attendait à ce qu'il y ait pas mal de monde au milieu du terrain.

Les pronostics, là encore, sont confirmés.

CARNUS SAUVE

Nous allons même le voir montrer le bout du nez ce champion marseillais. Leclercq, Di Caro, Bonnel, Bosquier même essaient de construire quelques contre-offensives. C'est pourtant Bauda, bien lancé par Kanyan, qui donne l'occasion à Carnus d'effectuer son premier arrêt véritable (24me minute) et ce n'est pas fini.

Le gardien olympien, dans la minute suivante, va effectuer un arrêt miraculeux, empêchant avec tout son sang-froid étonnant les Bastiais d'ouvrir la marque.

Un centre de Lenoir arrive en effet sur Giordani qui tire dans la foulée. Dans un excellent réflexe Carnus arête du pied cette balle bruyante brûlante qui tenait qui prenait dangereusement le chemin de ses buts.

Ouf ! la délégation marseillaise vient d'avoir les sueurs froides.

ÉGALITÉ À LA PAUSE

Encore Franceschetti, suivi par Luccini, Hodoul et Bauda. Hélas, le Corse de l'O.M. pressé par ses poursuivants, pousse trop la balle et Pantelic s'en tire sans dommage (38me minute).

Les dernières minutes n'apportent pas de modification au tableau d'affichage.

PRESSION BASTIAISE

Toujours la même explication au milieu du terrain quand le jeu reprend. Bastia, cependant a, semble-t-il, changer de rythme. Il s'ensuit une sérieuse alerte devant la cage marseillaise. Un centre de Kanyan est repris par Papi, Bosquier dégage une première fois.

Félix intervient alors et il faut un dégagement opportun de Bracci pour écarter le danger (59me minute).

Arrêt de Carnus sur une nouvelle reprise de Papi (52e minute), puis coup franc du même avant bastiais, qui vient frapper l'extérieur des filets (54e minute).

À la 60me minute, Linder estime que Gress avait assez fait d'efforts avec son tibia blessé.

Il le remplace par Buigues. Cela n'empêche pas Kanyan d'échapper à Bracci, puis à Bosquier. Heureusement Zvunka est en couverture et arrête le déroutant avant Bastiais.

L'O.M. connaît encore un moment difficile sur une offensive de Félix (64e minute) et un tir du même qui frôle la transversale.

Cahuzac en profite à son tour pour faire entrer son 12me homme Savkovic, à la place de Tosi qui boitillait lui aussi depuis quelques instants (65me minute).

Bracci doit se faire soigner quelques instants sur la touche après un contact avec Kanyan. L'O.M. s'efforce donc de garder la balle pour préserver son point du match nul. Bauda

J.F.

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Le président René GALLIAN : "Une performance"

Il paraît superflu de mentionner qu'une ambiance euphorique régnait hier soir dans les vestiaires marseillais après le partage des points sur le terrain de Furiani.

Le premier à nous donner son sentiment fut le président René Gallian.

"Je suis très content, nous dit-il. Prendre un point à Bastia est une performance. Beaucoup d'autres équipes s'en apercevront tout au long de la saison. Nous avons fait un match sérieux. L'ensemble, je crois est à féliciter. N'oublions pas qu'il nous manquait des joueurs comme Skoblar, Magnusson et Nagy. Vous avez vu aussi que Gilbert Gress a été obligé de céder sa place. Le jeune Bracci lui-même a été blessé au cours du match : tout m'autorise à dire que notre équipe s'est montrée à la hauteur.

"Je vous le répète, je suis ce soir un président comblé".

LINDER : "BASTIA AVAIT

DÉJÀ EU SA REVANCHE"

Kurt Linder était en train de regarder la blessure de Bracci allongé sur la table de massage. "Notre équipe a fait un effort sensationnel, et je pèse mes mots. Vous savez, partager les points à Bastia avec toutes les conditions défavorables et un véritable exploit. Vous savez comme moi que les Corses n'avaient pas trop gagné une partie depuis le début de la saison. L'occasion était magnifique de se réhabiliter devant le champion de France, et sous les yeux de leurs supporters. L'O.M., avec un cran remarquable, ne l'a pas permis.

"On disait que les Bastiais nous attendait de pied ferme pour avoir leur revanche de la Coupe de France, mais je vous rappelle que cette revanche est intervenue voici quelques temps sur le ce le stade de Toulon. Ce n'est pas tous les jours que l'O.M. est aussi vulnérable.

"À vrai dire, avant cette rencontre j'étais un peu inquiet, surtout en pensant que mes joueurs pouvaient être complexés. Jamais, en effet, ils n'avaient pu réussir à gagner sur cette pelouse, et c'est souvent, même, qu'ils avaient effectué de mauvaises rencontres.

Cette fois, je pense que tous ont déjoué le "sigle indien" avec une détermination louable.

- Êtes-vous venus ici dans l'idée de faire un match nul ? avons-nous demandé à l'entraîneur.

- Non, nous a-t-il répondu. Je savais qu'il fallait être prudent mais nous aussi nous avons eu des occasions. Avec un peu de chance nous aurions pu repartir avec les deux points de la victoire. Ne nous plaignons pas cependant. Ce partage des points et un excellent résultat".

ZVUNKA : DÉJÀ

UNE PENSÉE POUR NANTES

L'opinion des joueurs maintenant : celle du capitaine tout d'abord.

"Eh bien ! ça continue, nous dit le vaillant Zvunka, un large sourire étalé sur les lèvres.

À Bastia certainement, on s'attendait à enregistrer notre première défaite. Il faut croire que sommes encore solides.

"Je vous signale que, depuis dix ans que je viens à Bastia, je n'avais pas glané le moindre point ici sur ce terrain de Furiani. Alors je peux dire aujourd'hui que j'ai tout lieu de me réjouir de ce match nul. Les conditions, comme vous le savez, étaient défavorables au départ, avec l'absence de nos étrangers.

'Enfin, nous avons su faire front. Voilà qui promet encore une belle assistance samedi prochain pour la venue de Nantes".

Un autre joueur était passablement entouré. C'était vous l'avez deviné Georges Franceschetti.

"Oui, mes anciens équipiers ne m'ont pas ménagé, mais vous savez, c'est normal en sport et en football normalement : seule la victoire compte, et il ne faut pas faire de sentiment.

Quant à ce premier match sur le terrain de Furiani, je vous avoue que j'ai eu une curieuse impression en rentrant sur la pelouse. Vous savez, ce public est à peu près le seul que j'ai connu jusqu'ici. Disons qu'on ne le trouve pas sans une certaine émotion.

Les premières minutes passées, j'ai réussi à reprendre le dessus en ne pensant, moi aussi qu'au seul résultat".

Buigues, lui aussi, était à peu près dans les mêmes conditions.

"Moi, dit-il, c'est avec plaisir que j'ai retrouvé cette ambiance typiquement insulaire".

Des nouvelles de Gilbert Gress qui, on le sait, a dû abandonner ses camarades en deuxième mi-temps.

"Ce n'est pas tellement la blessure, nous a dit Gilbert, qui m'a obligé à arrêter le jeu, je crois plutôt que j'étais tourmenté par la fièvre. J'ai eu des piqûres la veille du match, j'étais malade. Je pensais être établi, mais ce n'est vraiment pas le cas. Je me demande maintenant si je pourrais tenir la place samedi contre Nantes. Nous verrons à l'arrivée à Marseille.

Bracci, de son côté, nous a dit que ce n'était pas le choc avec Kanyan qui l'avait blessé, mais plutôt son contact avec un poteau de corner. Il portait un hématome sur la cheville, mais il semble qu'il n'y ait pas un caractère de gravité.

Daniel Leclercq, enfin, esquissait, lui aussi, un sourire de satisfaction :

"Je n'avais d'ailier gauche que le nom puisque je devais jouer en retrait, nous confiait Daniel. Mais entre ce match et de Bastia et celui vécu à Rennes la saison dernière à la même place, il y a une grande différence. Devant, contre les Bretons, je n'avais pas "piqué" un ballon. Cette fois, je crois que je me suis quand même un peu mis en évidence".

Ce point de vue était d'ailleurs corroboré par Kurt Linder qui nous affirmait que ses remplaçants avaient manifestement rempli leur contrat. Ce n'est pas toujours aisé de tenir le rôle de Skoblar, de Magnusson ou de Nagy, affirmait l'entraîneur, car, en fait, tout le problème était là".

Jean FERRARA

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