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Résumé Le Provencal

du 10 mars 1975

 

UN BUT D'EMON DANS LA PROLONGATION PERMET A LO.M. D'ELIMINER MONTLUCON

UNE QUALIFICATION QUI COUTE CHER !

CHARRIER et TRESOR sérieusement blessés

Quel match mes amis. Nous pensions naïvement que la formule aller-retour avait quelque peu retiré de son suspense à la Coupe de France.

Après avoir vécu cet O.M. - Montluçon, nous voilà obligé de réviser notre jugement.

En 120 minutes, nous sommes passé et les supporters marseillais avec nous, de la colère à la joie, de la déception à l'incrédibilité.

Nous avons tout vu.

Du bon football (assez rarement) de l'à peu près (beaucoup plus souvent) des "pros" incapables de maîtriser leur sujet, des amateurs faisant jeu égal avec leurs prestigieux rivaux, des coups défendus, (beaucoup trop à notre sens) des tirs sur la barre, deux joueurs quittant le terrain sur une civière et enfin, un but concrétisant une nette supériorité, mais un but que l'on n'attendait plus.

Un match irritant, crispant. En deux mots, un vrai match de coupe avec tout ce que cela suppose de positif et de négatif.

QUALIFICATION MÉRITÉE

A la lecture du résultat sec, nos lecteurs n'ayant pas assisté à la rencontre vont faire la grimace. Un petit but à zéro (but marqué dans la prolongation), l'O.M., penseront les mêmes lecteurs, s'est qualifié par la petite porte.

C'est en partie vraie. C'est en partie faux.

C'est en partie vraie, parce qu'il peut sembler anormal qu'une équipe constellée d'étoiles de première grandeur, doive se contenter d'une si courte victoire alors qu'elle joue sur son terrain devant son public.

C'est en partie faux, parce qu'il faut bien admettre que les Olympiens ont cent fois mérité leur qualification.

Et pour plusieurs bonnes raisons.

D'abord parce qu'ils ont joué plus d'une heure sans René Charrier, blessé en fin de première mi-temps et qui fut transporté d'urgence à l'hôpital. Ce qui, vous en conviendrez, est un handicap sérieux. Et que Trésor a traîné la jambe pendant 75 minutes. Ce qui n'était pas fait pour arranger les choses.

Ensuite, parce qu'ils ont le plus souvent dominé les débats.

Enfin, parce qu'il faut bien admettre que la défense montluçonnaise (indépendamment de la très grande partie de son gardien de but Chartier) avait la chance avec elle, trois tirs marseillais (un de Buigues et 2 de Bereta) s'écrasant sur le poteau.

LE TORT DE L'O.M.

Ainsi, il aura été prouvé une fois encore qu'un match de football n'est jamais joué d'avance.

Et nous avions bien raison de souligner au terme du match aller qu'il serait plus dangereux de vouloir vendre la peau de l'ours montluçonnaise avant de l'avoir définitivement abattu.

Pour une raison évidente, parce que le football n'est pas, mais alors absolument pas, une science exacte.

On pleurerait ce soir dans les chaumières marseillaises si Romier, par exemple, à quelques secondes du coup de sifflet final ne s'était pas bêtement affolé, expédiant une balle dans les nuages alors que son équipier Ouali admirablement placé, n'aurait eu aucune peine à transformer en but une passe judicieuse.

L'O.M. aurait été certes éliminé contre le cours du jeu. Mais éliminé sans recours. On peut donc se demander pourquoi les Marseillais ont été incapables de bousculer une équipe courageuse mais limitée.

Nous avons parlé de la grande partie de Charrier et de sa défense. C'est vrai. Nous avons parlé de la baraka montluçonnaise. C'est encore vrai.

Loin de l'action, avec un minimum de recul, il faut bien dire que les Phocéens peuvent également "battre leur coulpe" parce que peut-être trop sûrs de leur fait, voire de leur supériorité, ils ont quelque peu négligé le jeu collectif pour se lancer dans des actions individuelles spectaculaires parfois mais jamais efficaces. C'est ainsi que Emon et à un degré moindre Jairzinho et Paulo Cezar, pour vouloir trop en faire, n'ont réussi qu'un minimum.

Et si dans la prolongation les joueurs de Jules Zvunka sont arrivés à leur fin, ils le doivent surtout à la fatigue des amateurs et à l'omniprésence de Georges Bereta, véritable homme orchestre qui multiplia les attaques et les centres.

Le public d'ailleurs ne s'y est pas trompé qui scanda en fin de match le nom du capitaine de l'équipe de France sur l'air des lampions.

REGRETTABLE

Si en fin de compte la logique a été respectée et si pour l'O.M. l'essentiel a été obtenu, nous serions coupables de ne pas stigmatiser les actes d'anti-jeu qui se sont succédés tout au long de la 2e mi-temps du temps réglementaire.

Nous n'avons pas à savoir qui a commencé et qui a continué. Le spectacle de joueurs étendus sur la pelouse alors que le ballon se trouve de l'autre côté du terrain voilà qui est inadmissible.

Et si le match a pu aller jusqu'à son terme, ce n'est pas la faute de M. Bacou, bien trop souvent dépassé hier par les événements.

Il convient maintenant de terminer par une note optimiste (encore que les blessures de Charrier et Trésor ne laissent pas bien augurer de l'avenir).

Souvent, une équipe accrochée par plus faible qu'elle mais cependant victorieuse, voit sa carrière en Coupe se terminer... au Parc des Princes.

C'est tout le mal que nous souhaitons aux Olympiens.

En espérant que ce jour-là Trésor et Charrier soient de la fête.

André de ROCCA

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Il n'y a plus d'amateur

Le mot de la fin revient à Georges Bereta.

Comme nous le félicitions pour son remarquable esprit sportif, il nous répondit après avoir étudié le compliment : "Oui ce fut un match très dur. Le football français a nettement progressé par la base. Désormais il n'y a plus d'amateurs. Une équipe comme celle de Montluçon est bien préparée, rodée par le difficile championnat de deuxième division et il faut objectivement reconnaître qu'elle nous a posé des problèmes".

C'est évidemment le moins que pouvait dire l'ancien capitaine de Saint-Étienne, lequel mériterait au demeurant sans vouloir faire de peine à l'excellent Trésor, de prendre la direction sur le terrain de sa nouvelle équipe.

Pour en revenir à notre sujet, performance de Montluçon confirme le match nul de notre équipe juniors en Hollande et la belle victoire de l'équipe de France amateur avec le Montluçonnais Rubio en Allemagne.

Entre certains joueurs de ces équipes, dites amateurs, et pas mal de joueurs de première division, la différence est bien mince pour ne pas dire inexistante.

Rubio, le très jeune Rosier, l'infortuné Coutard que Jairzinho expédia deux fois au tapis en dehors du jeu, ce qui est un double cas d'expulsion, ont à peine plus de 60 ans à trois. Il représente bien l'avenir de notre football, ainsi que le remarquable gardien de but Chartier.

En première mi-temps, alors que la fatigue ne se faisait pas encore sentir dans les jambes des Montluçonnais, leur jeu collectif ne mérita que des félicitations. Dans ce domaine ils réussirent même parfois à surpasser l'O.M.

Nous pouvons affirmer que de nombreuses équipes professionnelles de première division depuis le début de la saison se sont montrées moins offensives et moins généreuses que celle de Montluçon.

Il est seulement dommage que la belle résistance des visiteurs, qui valut au public d'assister à un véritable match de Coupe, se soit traduit par l'apparition de ce que l'on appelle depuis les origines du football la matraque.

Le phénomène n'est pas nouveau et nous avons déjà connu des joueurs beaucoup plus durs, sinon plus méchants que ceux que nous vîmes hier après-midi. À titre d'exemple, nous conseillerions à Jairzinho de se modérer, si en face il y avait l'équivalent de ce que furent, il n'y a pas un siècle, les Benezech, Mihoubi, Bettache... ou même l'ancien capitaine de l'O.M. le regrettait Bastien.

Avec eux et l'autre côté, le carnage se fut poursuivi dans les vestiaires et peut-être sous les douches.

Ne revenons pas en arrière, mais constatons une fois de plus que l'arbitre, placé devant une situation explosive, ne sut pas faire la part de ce qui est bénin et de ce qui est dangereux.

Il manque à la plupart de nos arbitres d'avoir été sur le tas. Excellents quand il s'agit de discuter des lois du jeu à tête reposée, ils n'ont pas, faute d'expérience, le coup d'oeil de l'ancien pratiquant. Mais ceci est une histoire qui mérite un plus long développement.

Maurice FABREGUETTES

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Ils disent

Jules Zvunka : "Amère victoire"

La joie de la victoire était tempérée chez les Marseillais par les blessures survenues à leurs camarades Charrier et Trésor. Et de fait l'indisponibilité - même si elle s'avère moins longue et moins grave que ce qu'on avait pu le redouter - des deux meilleurs olympiens depuis le début de la saison, n'a rien de réjouissant.

"C'est une qualification qui nous coûte très cher, commentait Jules Zvunka. René Charrier en a au moins pour trois semaines et on ignore pour l'instant ce qu'à Marius qui a courageusement terminé le match mais s'est rendu à l'hôpital en souffrant beaucoup.

L'avenir n'est donc pas particulièrement réjouissant alors qu'un programme chargé nous attend encore.

Ce match entre tout cas aura prouvé que nous avions bien à faire à une équipe très sérieuse. Ce qui explique le 0-0 du match aller que certains n'avaient pas trouvé à leur goût.

Nous avons eu il est vrai aujourd'hui une certaine malchance en plaçant 4 tirs sur les poteaux et en ratant de très peu un très grand nombre d'occasions.

Peut-être avons-nous fait preuve aussi d'une certaine maladresse...

Mais j'estime cependant que l'équipe a relativement fait un bon match.

Ainsi durant toute la seconde mi-temps, et les prolongations, Lemée n'a eu que deux tirs à arrêter. C'est tout de même la preuve que nous avons empêché nos adversaires de s'exprimer. Et pourtant nous avons joué toute cette période avec Marius Trésor blessé.

C'est sans doute en raison de notre première mi-temps, durant laquelle nous n'avons pas suffisamment pris le match en main, que nous avons connu tant de soucis.

En définitive notre qualification je crois, est parfaitement juste, malgré la valeur, que je tiens à souligner une fois de plus de notre adversaire.

Une fois de plus on a pu vérifier qu'en Coupe de France, il est difficile de prévoir quoi que ce soit.

Mais au fond, pour aller loin dans l'épreuve, peut-être faut-il savoir passer parfois "par des petits trous" comme nous l'avons fait aujourd'hui...

M. MERIC : NOUS AVONS EU CHAUD ?

Encore sous le coup de l'émotion de cette fin de match incertaine, le président Meric rejoignait l'opinion de son entraîneur :

"Nous avons vraiment eu chaud. Mais les Montluçonnais que je n'avais pas vu au match aller m'ont agréablement (je dirais "désagréablement" si je ne craignais de me montrer chauvin) surpris. Ils forment une très belle équipe.

Néanmoins, nous avons dominé une heure durant, mis trois ou quatre tirs sur la barre, et il était juste que nous ayons le dernier mot.

Mais je suis profondément attristé de la blessure de Charrier. Car au-delà de tout ce dont sa blessure va priver l'O.M., je pense à la peine qui va être la sienne en manquant le rendez-vous de l'équipe de France, cette consécration qui méritait cent fois !"

PAULO : "UN TERRAIN ÉPUISANT"

Pour Paulo César, ses camarades et lui avaient avant tout manqué de chance.

"Mais nous n'avons vraiment bien joué, ajouté-t-il, qu'à partir de la dernière demi-heure. En tout cas, comme celui de Monaco le match était c'est épuisant !"

Georges Bereta était occupé à maintenir un cube de glace sur l'une de ses arcades, ornée d'un magnifique coquard consécutif à un coup de tête.

"Je n'arriverai décidément pas à marquer, nous disait-il en souriant, par allusion à ses deux tirs sur la barre. Mais cela n'a aucune importance du moment que nous gagnons...

La performance des Montluçonnais n'est, somme toute, pas si étonnante que cela, car aujourd'hui le terme d'amateur n'a qu'une signification relative".

Enfin Jacky Lemée, très entouré après son expérience de gardien de fortune expliquait.

"J'ai eu très peur durant cinq minutes et puis la façon dont nous nous sommes mis à dominer m'a complètement décontracté. J'ai quand même eu la chance pour moi sur le tir de Perigaud que je n'avais pas vu arriver. À 35 ans, je pourrais me reconvertir chez vétérans comme gardien..."

Alain PECHERAL

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GARDIEN : "Nous avons failli en faire

pleurer pas mal..."

On n'avait pas perdu le sourire dans le camp montluçonnais. René Gardien allait de l'un à l'autre de ses joueurs et les congratulait à coups de tapes amicales sur l'épaule.

"On a bien failli faire couler des larmes dans les chaumières marseillaises" nous lançait-t-il dans un clin d'oeil. "Vous voyez que nous n'étions pas venus ici avec un esprit défensif. Nos gars ont fait un match parfait et sont passés juste à côté d'un grand exploit.

Il est même un peu décevant de s'incliner ainsi par le minimum après avoir si vaillamment résisté. Mais que voulez-vous, la logique a été respectée... Bien que le 5-0 pronostiqué par Jairzinho n'ai pas eu lieu !

Un autre de mes regrets concerne le public que je n'ai pas trouvé très sportif et la faiblesse de l'arbitre qui s'est fait prendre aux simagrées de Jairzinho alors que le Brésilien n'a cessé de donner des coups !"

Aimé Migeon, dont l'équipe a été éliminée dès les 32e de finales, était venu réconforter les Montluçonnais.

"Je crois, nous disait-il, qu'ils ont fait beaucoup mieux que se défendre. Heureusement, l'O.M. a fini par gagner. Je dis heureusement, parce qu'il est toujours un peu triste de voir une équipe de Nationale éliminée par un club de seconde division. Je pensais tout de même que les Marseillais feraient la décision plus vite. Et cette longue résistance est tout à l'honneur de leurs adversaires".

A.P.

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Les réponses aux questions que l'on se pose

CHARRIER : entorse du genou

- POURQUOI ZAIK EST-IL SORTI DES LA 5e MINUTE DE JEU ?

Parce que Jairzinho, attaqué par deux adversaires et retenu par le maillot, eut un réflexe pour le moins méchant en envoyant sa semelle au petit bonheur la chance. Et le malheur voulut qu'elle atterrit sur le tibia de Zaik.

Un geste pour le moins gratuit de Jair qui se fit remarquer tout au long du match par son jeu dur (entre autres, un pugilat aussi inutile qu'odieux avec Coutard, sous l'oeil bienveillant de M. Bacou), alors qu'il possède bien d'autres moyens pour faire parler de lui ! Même s'il est habituellement la victime de ce genre d'agressions, il a mal choisi son jour pour manifester sa vindicte.

- CETTE BLESSURE A-T-ELLE DÉSORGANISÉ L'ÉQUIPE MONTLUÇONNAISE ?

Incontestablement oui, dans la mesure où le stoppeur sorti, c'est un ailier droit (Christian Lauterbach) qui a fait son apparition. De ce fait, Coutard de milieu de terrain est devenu stoppeur tandis que Romier quitta la pointe de l'attaque pour évoluer dans l'entrejeu.

- LES MONTLUÇONNAIS, ONT-ILS, AINSI QU'ILS L'AVAIENT ANNONCÉ, "JOUE LE JEU" ?

Une fois encore oui. Certes, ils furent le plus souvent dominés, notamment en seconde mi-temps qui vit les Marseillais, après la blessure de Charrier, interdire véhémentement l'approche de leurs buts.

Mais ils firent toujours preuve, dans la relance du jeu, d'un esprit constructif qui aurait pu leur permettre avec un peu plus de réussite et de sang-froid, de faire la différence en première mi-temps.

- PAULO CEZAR, ABSENT DU MATCH ALLER, FUT-IL L'OBJET D'UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?

Non, il fut simplement pris en charge par l'arrière droit Bernard Lauterbach, l'homme qui avait "empoisonné" Bereta au match aller par un marquage excessivement strict auquel on n'est guère habitué en Première Division. Une fois encore, Lauterbach se tira fort bien d'affaire devant son prestigieux adversaire.

- COMMENT CHARRIER ET TRÉSOR SE SONT-ILS BLESSÉS ?

D'une façon fortuite et stupide. On jouait depuis 47 minutes (!) en 1ère mi-temps lorsque le juge de touche signala un hors jeu de position très nette de Ouali sur la droite, lequel leva d'ailleurs les bras à la façon des rugbymen pour indiquer qu'il ne prenait pas part au jeu.

C'est peut-être cela qui incita M. Bacou à laisser l'action se poursuivre à moins que ce soit le fait que son juge de touche ait rabaissé son drapeau. Quoiqu'il en soit Christian Lauterbach qui avait hérité de la balle, mis à profit une coupable hésitation des défenseurs marseillais pour s'avancer dans la surface ou il fut contré in extremis par Charrier et Trésor. Et il semble bien que ceux-ci se soient mutuellement blessés, sans que le pauvre Montluçonnais, pris à partie par la foule, y soit pour quelque chose.

- COMMENT SE PORTENT LES BLESSÉS ?

On a eu très peur pour Charrier, y compris le docteur et les masseurs olympiens qui redoutaient une fracture.

En fait, il s'agit d'une entorse du genou qui immobilisera le gardien marseillais durant environ trois semaines.

Vraiment désolant au moment où il s'apprêtait à recueillir les fruits de ses performances brillantes et répétées et inquiétant pour l'O.M. qui fort heureusement pourra compter sur Migeon pour assurer l'intérim.

Quant à Marius Trésor, qui avait un gros hématome à la jambe (il souffre d'un épanchement de synovie) et Zaik, ils se sont rendus à l'hôpital aussitôt après le match.

A.P.

 

 

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(photo : collection Hervé Girard)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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