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Résumé Le Provencal

du 13 décembre 1976

 

NI TRESOR, NI CADEAU : 5 A 0

 Pour l'O.M. à Bordeaux à cinq jours de Noël

(D'un de nos envoyés spéciaux André de ROCCA)

BORDEAUX - Puisqu'il n'est pas interdit de rêver, rêvons !

Si Carlos Bianchi, à force de remettre sur le métier son ouvrage, n'avait pas crucifié l'O.M. et Migeon à l'ultime minute d'un Reims - O.M. mémorable et si, contrairement à toute logique, les Marseillais, imbattus de la saison au stade vel, ne s'étaient inclinés deux fois en trois jours sur leur herbe, les Olympiens auraient joué hier, au stade municipal de Bordeaux avec pour objectif revenir à un point du champion d'automne Nantes.

Cessons maintenant de rêver, pour revenir sur terre.

Hier, dans un stade à moitié plein selon les optimistes, ou à moitié vide d'après pessimistes, les "Girondins" de Bordeaux, en très mauvaise posture au bas du classement, donnaient la réplique à l'O.M. en très nette perte de vitesse et dont on s'imaginait aisément qu'il serait à la peine, handicapé par les absences de Yazalde, Alonso et surtout celle de Marius Trésor.

Ainsi, à l'issue des quatre-vingt-dix minutes, personne ne fut surpris outre mesure, si ce n'est par l'ampleur du score, que les locaux soient restés maîtres sur leur terrain.

Mais comment donc que s'est déroulée cette rencontre ?

La première mi-temps, si l'on tient compte des occasions nettes de but, vit les deux informations faire pratiquement jeu égal.

En deux reprises, Migeon intervient opportunément sur des essais de près de Giresse et Barthou pour, comme l'on dit, sauver les meubles.

Mais de son côté, Bergeroo n'était pas resté inactif, en détournant avec brio une tête plongeant de Florès, un tir de gauche d'Emon et en intervenant dans les pieds du même Emon, qui avait brûlé la politesse à la défense bordelaise.

Un tir (du droit) de Bereta avait, par ailleurs donné le frisson aux supporters locaux, le ballon frôlant la transversale alors que Bergeroo cette fois semblait battu.

Au repos, pourtant, les hommes de Robert Buigues avaient un avantage d'un but, un but signé Gallice qui, il faut bien écrire pour rester objectif, résumé parfaitement la domination d'ensemble assez nette de l'équipe de Montes.

La deuxième mi-temps ne ressembla en rien à la première. Après que, dès la 46e minute, Noguès eut percuté de la tête une balle sur la transversale, à la suite d'un coup franc botté par Albaladejo, ce fut pour les hommes d'Arribas le commencement de la fin.

La défense paniquée, le milieu submergé, l'attaque privée de balles et maladroites dans ses rares occasions, les Bordelais entamèrent alors un véritable cavalier seul.

Ce fut d'abord Jeandupeux qui porta le score à 2-0 puis tour à tour Giresse, Gallice, firent monter l'addition jusqu'à 4. La défaite, que l'on présentait, mais que l'on espérait honorable à la mi-temps, se transformait en véritable déroute.

Et comme il fallait s'y attendre, ce fut l'inévitable Robert Buigues qui, pour se rappeler au souvenir de ses anciens équipiers, porta l'estocade finale d'une tête magistrale, dont il a le secret et qui fit bien souvent les délices des supporters du stade vélodrome.

ET MAINTENANT ?

Et maintenant, vive les vacances, serions-nous tenté d'écrire dans un premier temps.

Il va de soi que cette défaite ne doit pas être considérée comme une catastrophe, si l'on veut bien admettre que l'équipe phocéenne était tout de même sérieusement handicapé, surtout par l'absence de Trésor, dont on a vu, hier, le rôle qui tient.

Cela dit, il faut souhaiter que les Olympiens profitent de la trêve pour se refaire une santé physique en récupérant tous leurs blessés mais aussi et surtout une santé morale.

À la mi-parcours du championnat, ils sont, qu'on le veuille ou non, sur le fil du rasoir.

Le mois de janvier, avec des matches importants et difficiles, contre Nantes au stade vélodrome et Saint-Étienne à Geoffroy Guichard, par exemple, sera lourd de conséquences, n'en doutons pas, pour l'avenir du club.

Si ce virage parvient à être négocié de façon satisfaisante, alors chacun pourra préparer le proche avenir en toute quiétude, bien qu'il soit désormais exclu que l'équipe, chère au président Meric, puisse terminer à une place honorable.

Dans le cas contraire et dans la mesure où beaucoup de formations se tiennent à peu de points, c'est-à-dire dans la mesure où une série de victoires peut nous propulser vers le haut du tableau, mais une série de défaites nous enfoncer aussi vite dans les profondeurs, il conviendra de prendre au sérieux le moindre match et enregistré avec plaisir le moindre point.

Il serait tout de même désolant de voir une équipe qui, à trois journées de la fin des matchs aller, pouvait encore espérer flirter avec la première place, se mettre à lutter pour repousser le spectre d'une éventuelle relégation.

Et surtout, supporters ne haussez par les épaules...

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Le Gallice jusqu'à la lie

(D'un de nos envoyés spéciaux Alain PECHERAL)

Vingt-deuxième minute : Emon sur un ballon amorti de la poitrine par Zlataric, s'en va seul au but.

Devant Bergeroo, sorti à sa rencontre, il tente une pichenette, ni tir ni dribble en direction de la cage grand ouverte. Malheureusement pour lui, le "long", ainsi qu'on l'appelle en Gironde, en raison de sa haute stature, reçoit la balle sur l'épaule. Et sur la contre-attaque, Jean Galice, l'homme qui marque toujours devant l'O.M., ouvre la marque non sans que Baconnier ait une première fois sauvé sur la ligne.

Caprices du football. Car malgré une domination sensible des Girondins, durant les 45 minutes initiales, l'O.M. ne méritait pas vraiment d'être mené à la marque à la mi-temps, les deux équipes s'étant partagé à peu près équitablement les occasions de but. Migeon, par deux fois, avait sauvé son camp devant Giresse et Gallice, mais en contre-partie Bergeroo avait du se détendre sur une reprise de la tête de florès, à mi-hauteur, puis sur un tir de gauche d'Emon, cependant qu'un essai de Bereta (du pied droit !) flirtait avec la lucarne.

Mais tout cela n'était pas pour autant le fait d'un football de très haute qualité. Et la suite n'allait pas apporter de modification au scénario, du moins pour ce qui concerne la qualité du jeu proprement dit. Car pour le reste, dès que Buigues et ses coéquipiers sentirent à leur portée une victoire qui était indiscutable, il n'y eut plus qu'une seule équipe sur le terrain. Une équipe et l'ombre d'une autre.

Le 2e but de Jeandupeux, consécutif à un coup franc de Giresse, constituait le tournant du match.

Non seulement parce qu'il consommait la défaite olympienne, mais parce que Migeon se blessait au coude sur l'action. Blessure qui, précisons-le en toute objectivité, ne changeait rien au fond du problème. L'O.M. battu le plus logiquement du monde, hier, a essuyé l'une des plus lourdes défaites de son histoire moderne comparable à celle que lui avait infligée le Nantes d'Arribas, en 1973.

Et l'on se demande désormais où s'arrêtera cette dégringolade.

Pour l'O.M., que nous avons vu hier, c'est incontestable, des lendemains bien noirs se préparent. D'autant que l'on a beau chercher, on ne voit pas où pourrait résider le remède miracle.

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Les réponses aux questions que vous vous posez

- COMMENT EXPLIQUER LA DÉROUTE DE L'O.M. ?

- Par deux raisons majeures. La première, la plus évidente, bien sûr, parce que les Bordelais étaient meilleurs qu'eux. L'équipe locale, qui avait dans ses rangs de jeunes joueurs, joua avec un bel enthousiasme, et répétons-le, son succès ne doit rien à personne. La deuxième raison, bien entendu, c'est l'absence de Marius Trésor. On a souvent critiqué, à Marseille, le libéro de l'équipe de France, parce que, paraît-il, il faisait une bêtise par match. Nous aurions bien aimé qu'il soit sur la pelouse du stade municipal de Bordeaux ; nous aurions souhaité qu'il fasse une bêtise, mais il est certain qu'à la fin des 90 minutes, le score aurait été moins lourd.

- FAUT-IL CRITIQUER LE JEUNE BACCONNIER ?

- Assurément pas. Il est encore junior et jouait pour la première fois en équipe pro, à un poste qui demande beaucoup de métier et beaucoup d'assurance. Par ailleurs, il a fait son entrée à un moment qui n'était guère propice, dans la mesure où l'équipe marseillaise restait sur trois défaites consécutives. En conséquence, seuls ceux qui n'ont jamais joué au football peuvent lui lancer la première pierre.

- BUIGUES S'EST-IL ADAPTÉ À BORDEAUX ?

- Avant le match, nous avons eu une conversation avec Robert. Après ce qui nous a dit, il est satisfait de la carrière qu'il a commencée voici un peu plus de deux mois en terre girondine. Lui, qui est un combatif de nature, a sûrement été transcendé par le brassard de capitaine qu'il portait hier. De toute façon, on sait qu'il est un meneur d'hommes et il est probable qu'à ses côtés et à ceux de Jeandupeux et Giresse, les jeunes loups bordelais progresseront à pas de géant.

- LE SUCCÈS POPULAIRE A-T-IL ÉTÉ GRAND ?

- Non, sans doute pas. Il y avait en tout cas beaucoup moins de monde que lors des précédentes confrontations entre Bordelais et Marseillais. À cela, une raison essentielle, la peu glorieuse place qu'occupaient les locaux au classement et, aussi, il faut bien le dire, le peu de prestige dont est entourée cette saison l'équipe de José Arribas. Il est bien fini le temps où l'O.M. pulvérisait les records de recette à chacune de ses sorties.

- LES CONDITIONS CLIMATIQUES ÉTAIENT-ELLES BONNES ?

- Excellentes. Avant le match, le ciel était bleu. Il s'est un peu couvert avant que ne débute la rencontre, mais pour une mi-décembre, la température était douce, et en tout cas propice à la pratique d'un bon football.

Une seule petite ombre au tableau, la pelouse n'était pas absolument parfaite, et elle gêna quelquefois les joueurs. Heureusement pour les Marseillais, d'ailleurs, car l'addition aurait pu être plus sévère, ce qui en tout état de cause aurait été injuste.

A. de R.

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JOSE ARRIBAS : "La plus grande déroute

de toute ma carrière"

BORDEAUX - Devant la porte des vestiaires marseillais qui demeura longtemps fermée, M. Vernet, le secrétaire général du club, n'en revenait pas :

"Quelle deuxième mi-temps ! C'était invraisemblable. Aucun appel de balle. Nous sommes demeurés statiques, figés comme des débutants.

"C'est bien simple, sur le deuxième but qui a précipité notre défaite, nos joueurs étaient encore en train de faire le mur pendant que Jeandupeux pousser la balle au fond des filets. Il y a bien longtemps que je n'ai vu un O.M. aussi décevant".

Et à l'intérieur des vestiaires, comme l'on s'en doute, l'ambiance n'était pas précisément joyeuse.

Il y régnait même un silence de cathédrale. Notre premier souci fut de demander à François Castellonese des nouvelles des blessés :

"En ce qui concerne Emon, devait-il dire, il se plaint d'une douleur à l'aine. Il s'agit vraisemblablement d'une contracture au niveau des adducteurs.

"Florès, lui, s'est fait une entorse au pied droit et la douleur s'étend jusqu'au tendon d'Achille. J'ai bien peur que les ligaments soient atteints.

"Enfin Migeon a vu se réveiller une ancienne blessure qu'il s'était faite l'an dernier à Nancy dans des conditions à peu près similaires. En heurtant du coude l'un des côtés de ses buts, il a réveillé une entorse. Il faudrait qu'il fasse une radio, pour savoir si la tête de l'olécrane n'est pas atteinte.

Question. - Combien prévoyez-vous de disponibilité pour eux ?

- C'est difficile à dire, comme cela a chaud. Mais je pense que Flores en a bien pour une bonne quinzaine de jours, Emon pour huit à dix jours. Quant à Migeon, le cas échéant, il sera contraint au repos durant une à trois semaines. Autant dire que pour ces trois garçons, les vacances sont fichues.

Du côté des joueurs, qui s'empressait de filer sous la douche la tête basse, aucune réaction. Seul José Arribas, bien que n'ayant guère le coeur à le faire, tentait d'analyser cette triste partie : "Sur un match pareil, il n'y a rien à dire, ou plutôt si l'on se laissait aller, il y aurait trop à dire... Il y a une chose significatif, c'est que tous les tackles sont sorties pour nos adversaires, tout au long de la partie.

"Tout par-delà. Pour arriver à s'exprimer, il faut avoir le ballon. Et celui-ci ne se gagne pas comme par enchantement à une quelconque loterie, il faut se battre pour l'avoir. J'avoue qu'avec Nantes j'ai souvent été balayé à Bordeaux. C'est un peu la façon de jouer des Girondins qui veut cela. Mais une déroute comme celle-ci, j'avoue que cela ne m'était jamais arrivé.

- Vous avez pourtant eu quelques bonnes occasions de buts en première mi-temps ?

Oui, c'est vrai, et même aussitôt après la reprise, la tête de Noguès qui s'est écrasé sur la transversale aurait pu nous permettre d'égaliser. Mais je ne m'accroche pas à ces prétextes. Même si nous avions à peu près rempli notre contrat durant la première mi-temps, il ne faut pas oublier qu'un match dure 90 minutes et que nous avons été au-dessous de tout durant la seconde période.

"Dans un jour comme celui-ci, il n'y a aucune excuse à invoquer. Le seul souhait que je puisse formuler, c'est que les joueurs se battent durant les matches retours et disputent leurs chances avec un peu moins de désinvolture.

Alain PECHERAL

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Buigues : "Heureux, mais le score

est trop lourd !"

"Il nous fallait absolument gagner" nous a dit Robert Buigues, "et nous avons rempli notre contrat, ce qui va nous permettre de partir en vacances, l'esprit tranquille, quelques jours seulement, car nous entreprenons une tournée au Maroc, durant la trêve" (Robert prenait d'ailleurs aussitôt après le match, la route de Marseille).

"Pour en revenir au match, disons que notre victoire ne se discute pas, mais le score est tout de même sévère et je me mets à la place des olympiens aujourd'hui, un score de 3 à 1 aurait suffi à notre bonheur : "seuls les 2 points de la victoire nous intéressaient, parce que nous en avions bien besoin.

Je ne comprends pas très bien ce qui s'est passé à l'O.M. Après une bonne première mi-temps, où nous avions connu pas mal de problèmes, les Marseillais se sont complètement désunis.

Il faut dire aussi que qu'un garçon comme Marius leur a terriblement manqué et pourtant le petit Baconnier n'a pas été mauvais du tout.

Mais l'O.M. sans Marius, ce n'est plus tout à fait la même équipe.

J'espère tout de même que la trêve permettra aux Olympiens d'oublier ce match et que de notre côté, nous poursuivrons notre sur notre lancée.

A.P.

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