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Résumé Le Provencal

du 04 décembre 1972

 Un simple acte de présence

La sagesse des supporters meilleur gage

d'avenir pour le football "pro"

Bien sûr, il y a eu un match de football, hier après-midi au Stade-Vélodrome.

22 joueurs répartis en deux équipes, 3 arbitres, un ballon, un terrain, des poteaux réglementaires... et même un nombre relativement élevé de bien gentils spectateurs.

C'était plus qu'il n'en faut.

Mais avons-nous assisté à une rencontre disputée dans l'esprit de compétition.

Répondant franchement : NON !

 LES DONNÉES

DU PROBLÈME

Les données du problème méritent d'être rappelées.

D'une part, la réserve très mixte du R.C. de Strasbourg. Quatre titulaires, le reste venant d'une équipe jouant ordinairement en Promotion d'Honneur.

De sympathiques jeunes gens, en majorité, qui, avant le match, auraient demandé des autographes à Keita, Skoblar, Bosquier... et compagnie, s'ils l'avaient osé.

En face, exception faite de Carnus remplacé par Kraft, la meilleure équipe olympienne du moment, du moins dans l'esprit de ses responsables techniques.

Mais une équipe olympienne semblant un peu honteuse de se trouver là, pendant que des camarades syndiqués faisaient la grève et qui joua sur la pointe des pieds.

Le plus représentatif de cette tendance fut Salif Keita.

Il nous fit penser à un objecteur de conscience faisant la guerre faute d'avoir trouvé une meilleure solution et qui s'applique à tirer en l'air.

 LA LUTTE D'ABORD

Dans ces conditions, 4 à 0, 8 à 0, 6 à 1... ou 12 à 2, quelle importance !

Le sport, quand il n'y a pas lutte véritable, désir exacerbé de l'emporter de part et d'autre et égalité des valeurs n'est que caricature.

Nous avions fait la même remarque la veille, en assistant (à la T.V.) à la rencontre de tennis entre Smith et Gorman.

Là, le problème était totalement différent.

Les images venues de Barcelone reflétaient les excès d'un sport professionnel, quand il est trop commercialisé.

 UN PUBLIC EN OR

Dans le fond, c'est le public qui nous a le plus étonné, hier.

Écrire qu'il est bien brave et au-dessous de la vérité.

Malgré les transferts, les scandales, les grèves... et tout ce qui pourrait faire douter de la pureté du sport, de son utilité sociale, de son rôle éducatif, et continue à manifester un esprit supporter admirable.

Hier, on aurait pu craindre qu'ayant payé pour assister à un spectacle sportif et indiscutablement lésé, il se fâchât.

Mais pas du tout.

Toutes les réflexions que nous avons pu entendre se rapportaient à la défaite de Nice, à la possible homologation de la rencontre de l'après-midi... et au match de dimanche prochain.

Ne l'oubliez jamais, que vous soyez dirigeants ou joueurs, la seule base solide du football en France et son public, ou plus exactement ses supporters.

Sans eux, dont la passion, l'attachement au club font bouillir la marmite, il n'y aura plus qu'à mettre la clef sous la porte.

 EN FONCTION DE NICE

Pour revenir au seul football, que faut-il penser de l'équipe olympienne alignée hier, en fonction du match de Nice ?

Exactement rien !

Ce que nous avons vu, hier après-midi, avait encore moins de signification qu'un match entraînement du mercredi ou du jeudi.

La formation alignée est-elle la meilleure possible ?

Honnêtement, nous n'avons aucune opinion.

Ni pour, ni contre.

Prétendre le contraire serait se moquer de nous lecteurs.

On y verra plus clair, dimanche prochain, à Nice.

Dans la mesure où cette vague de fond, qui vient de perturber la vie du football professionnel, n'aura pas de conséquences graves.

Le moment n'est pas encore venu d'estimer l'importance de la cause.

Mais, répétons-le. Le football "pro" est un spectacle dont l'élément essentiel est la lutte entre clubs, entre villes.

Pour qu'il puisse vivre et prospérer, il faut, au moins qu'ils soient crédibles.

Le reste ne nous regarde pas.

Maurice FABREGUETTES

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Où est l'autorité ?

On sait que le football est un jeu.

C'est aussi un métier.

Lorsqu'il est pratiqué par des professionnels qui font de ce divertissement, à l'origine récréatif et éducatif, leur gagne-pain.

L'erreur du grand public est de ne pas envisager les problèmes professionnels ou syndicaux qui se posent aux footballeurs comme ils se posent à tous les travailleurs.

Et de n'accorder qu'une attention discrète à leur désir de se voir mieux administrer et mieux garantis durant le leur très courte carrière.

C'est alors que la grève prend ici un tout autre visage que dans n'importe quelle autre collectivité professionnelle.

C'est à tort qu'on y voit des fantaisies, les humeurs de vedettes "trop bien payées et qui pourrait être moins".

Trop lapidaire. Comme tous les jugements à chaud du public.

À la vérité, les joueurs ont estimé que la grève était aussi leur droit et, si célèbre soient-ils, leur seul moyen de force et d'expression.

Ça c'est le principe, la mise à plat du problème.

La pratique est bien différente. On a vu les Niçois, les Marseillais et les Rennais jouer dans leur meilleure formation.

On a vu Saint-Étienne "lockouté " par son président. On a vu les Bastiais "reprendre la truelle avant que leurs propres dirigeants dynamitent le mur qu'ils construisent laborieusement".

On a vu d'autres équipes observées la grève tenace et totale, et Strasbourg n'envoya à Marseille que des "doublures" qui n'en pouvaient mais...

Interprétations et actions différentes du Nord au Sud. L'imbroglio. Le noir dessein des tenants d'intérêts particuliers, sacrifiant sur l'autel des vertus du bénévolat les intérêts généraux de tout le football.

Je n'ai personnellement rien contre les grévistes ni leurs dirigeants, seraient-ils d'accord ou non. Je pense que leurs intentions son estimables.

"La liberté est... libre", disait un ami.

Les footballeurs sont payés pour taper dans un ballon le mieux possible et avec des fortunes diverses, comme l'est le serrurier qui vous cisèle une clé de porte, où le musicien qui, plus harmonieusement, fait le même usage que d'une clé de sol.

En somme, il y a des artistes.

Et ceux qui les dirigent, les conseillent et les commandent.

Et ce sont ces derniers les vrais responsables de la situation.

À commencer par l'illustre avocat des "causes de la balle ronde", Me Bertrand, dont on a tout lieu de croire qu'il sait parfaitement tirer les ficelles. Les dossiers s'accumulent sur son bureau en même temps que les honoraires correspondants. C'est le grand maître en la matière. Il arrache les cas de jurisprudence, jongle avec les règlements et le statut des joueurs "pros" et a finalement créé ce climat dans lequel on ne sait plus où est le chaud où est le froid.

Vous nous direz : "Voilà un merveilleux terrain pour un homme de talent, bien documenté et décidé à assurer sa célébrité. Merveilleux terrain offert par les hésitations, les silences et les erreurs de conception du Groupement".

Le Groupement est cette secte de nos plus hauts dirigeants du football professionnel dont les structures rouillées se désagrègent et dont les méthodes de travail sont encore à peu près ce qu'elles étaient à l'événement du professionnalisme.

Et l'autorité ?

À se demander si le terme est connu au Groupement.

Qui et quoi empêchait ce dernier d'annuler purement et simplement la journée d'hier ? C'eût été plus juste et plus logique.

Pourquoi son président et aussi celui de la Fédération ne se sont-ils pas adressé aux spectateurs et à leurs joueurs ostensiblement, nettement, publiquement, pendant les deux jours ou ils laissèrent les clubs et les règlements aller à vau-l'eau ?

Deux questions qui restent posées.

Et à propos desquelles les palatins de notre football pourraient assurément fournir des réponses de toutes sortes.

Sauf la bonne.

Qui est bien celle où ne peuvent figurer les mots vers : Ordre, Efficacité, Autorité.

Lucien D'APO

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LINDER : "Le football français est très malade !"

Vous comprendrez avec nous que les joueurs olympiens et leurs dirigeants n'ont guère fait de commentaires à leur rentrée aux vestiaires, sur la partie qui venait de se jouer sur la pelouse.

Cette fois, pour les raisons que l'on sait, l'intérêt de la journée se situait un peu en dehors du domaine sportif.

Le président Gallian, par exemple, évoquait l'inévitable baisse des spectateurs.

"À ce rythme-là, disait-il, ce ne sera pas toujours facile pour assurer les fins de mois !"

Puis, la conversation se portait bien, bien entendu, sur les conséquences de la grève.

- Pensez-vous, lui avons-nous demandé, que les résultats seront homologués ?

- Eh bien ! il ne manquerait plus que la rencontre soit annulée ! a répondu le président. Le Groupement nous a mis en demeure de disputer les rencontres. Et en ce qui concernent l'O.M. nous avons joué et gagné. J'espère que ce sera une affaire classée !..

- Et la défaite de Nice ?

- Oui, il nous arrive de ne pas être très bon à l'extérieur. Mais après le résultat de Rennes, il semblerait que les Niçois sont loin, eux aussi, d'être irrésistibles chez l'adversaire... Le championnat, après tout, n'est pas encore joué.

LINDER :

"RÉSULTAT ACQUIS".

Voyant l'opinion de Kurt Linder, qui paraissait absorbé par d'étranges pensées, à la fin du match.

"Vous voulez mon avis sur ce mouvement de grève ? C'est, je crois, la crise cardiaque du football français. Pour ma part, je n'ai jamais connu une histoire pareille. Et vous non plus sans doute.

"L'U.N.F.P. n'aurait jamais dû lancer son mot d'ordre avec autant de précipitation.

"Vous avez vu, personne ne savait quoi faire. Même pas les responsables syndicaux. Alors, dans ces conditions...

"Nous, nous étions tenus, d'une part de ne pas risquer la défaite par pénalité. Et puis, nous devions penser à notre public, fidèle toute l'année, et qui, aujourd'hui attendait une rencontre.

"Maintenant, sur le résultat, pas de problème. L'O.M. a gagné, Nice a perdu. Je pense qu'on ne reviendra pas là-dessus.

"Il n'empêche, comme je le disais tout à l'heure, que tout cela est assez triste..."

NOVI : "FINALEMENT

NOUS AVONS BIEN FAIT"

Côté joueur, il était intéressant aussi de connaître le point de vue du délégué syndical.

"Tout compte fait, a confié Jacky Novi, l'O.M. a bien fait de jouer. Tout d'abord vis-à-vis des spectateurs, dont beaucoup avaient déjà loué leurs billets, avant cette affaire.

"Et puis, supposer que le groupement homologue les résultats et nous déclare battus par forfait. Nous serions encore à 6 points de Nice, malgré sa défaite en Bretagne. Il était trop stupide de perdre championnat dans ces conditions.

"Avant la rencontre, nous avons pris contact avec Quittet, par téléphone. Le capitaine niçois, nous a dit : on joue ! Nous étions obligés de suivre.

"En conclusion, je crois que cette grève a été lancée un peu trop à la hâte. Nous n'avons pas eu le temps de nous organiser. Deux jours n'étaient pas suffisants. Et puis, beaucoup de points sont demeurés obscurs dans ce mouvement. Quelques prises de position, entre autres, n'étaient pas normales.

"La preuve. C'est que tous les footballeurs n'ont pas été d'accord.

"L'O.M., je le répète, a rempli son contrat. Même si quelques dents vont grincer au sein de l'U.N.F.P. : nous n'avons rien à regretter. Attendons maintenant pour connaître la réaction du groupement".

SKOBLAR : "FÉLICITATIONS

À STRASBOURG"

Bernard Bosquier, lui, s'est empressé en sortant de la douche, de féliciter Keita... Pour les deux buts de son cousin rennais, face aux Niçois !

Et Salif, avec un large sourire, a été sensible au compliment.

Kraft, pour sa part, était heureux d'avoir fait un match avec l'équipe première.

"Dommage, ajoute-t-il, que Strasbourg n'avait pas sa formation professionnelle".

Quant à Skoblar qui étrennait ses galons de capitaine, il a songé, avant tout, à rendre hommage aux adversaires alsaciens.

"Ces jeunes de Strasbourg se sont très bien défendus, reconnaissait Josip avec sportivité. L'O.M., de son côté abordait le match dans des conditions morales assez particulières. Vous savez pourquoi.

"Enfin, nous avons gagné. Voilà 2 points de plus !"

- Dimanche, ce sera donc le grand choc ?

"Oui. Un match nul à Nice serait, pour nous, une très bonne opération. Ce qui ne veut pas dire, vous l'imaginez que nous ne jouerons pas pour gagner.

Mais je ne pense pas que cette rencontre sera décisive pour désigner le champion. La compétition est encore longue. Et les Niçois ont l'air d'accuser un certain passage à vide.

Soyez persuadés, tout de même, que la rencontre fera un certain bruit".

Nous le croyons sans peine.

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LES REPONSES AUX QUESTIONS QUE VOUS VOUS POSEZ

Que va-t-il se passer ?

 Il s'est produit hier un événement inédit dans le domaine sportif : une grève de joueurs professionnels, avec de sérieuses conséquences, et un premier bilan : cinq rencontres annulées, deux seulement joués par des équipes au complet, trois matches "mixtes". Cela doit-il être considéré comme un succès du syndicat des joueurs ?

"Même si la trêve n'a pas été totale, elle aura, en perturbant complètement une journée de championnat, atteint son but, en faisant la preuve que les "pro" représentaient maintenant une force, avec laquelle instances supérieures et employeurs devaient compter.

"Et cela, d'autant plus que l'opinion publique ne croyait pas, vraiment, à la possibilité de cette grève.

"La voici maintenant sensibilisés aux problèmes du professionnalisme après la très large diffusion faite à cette affaire qui polarisa l'attention depuis vendredi, occupant le premier plan de l'actualité".

 Quelles vont être sur le classement les incidences de cette journée tronquée ?

"En principe, selon les directives du groupement les résultats obtenus sur le terrain seront homologués et les clubs défaillants déclaraient "forfait" avec zéro point."

 Comment résumer la position prise par l'O.M. et ses joueurs ?

"À la veille d'un match qui sera peut-être décisif et conditionnera lourdement la suite de la saison, elle a été influencée par l'attitude de Nice, le club rival, décidé à jouer son match de Rennes.

"Cela a pesé sur la décision des joueurs qui ne pouvaient se résoudre à le voir, éventuellement prendre le large.

 L'O.M. pouvait-il aligner ses amateurs ?

"L'O.M. ne pouvait utiliser ceux opérant habituellement en troisième division, et qui avait joué la veille à Béziers. Il ne pouvait aligner que des joueurs de promotion d'honneur.

"Dans ce cas, le président Gallian avait prévu l'entrée libre au Stade-Vélodrome.

 Nous en arrivons au grief principal d'une fraction du public, reprochant à la direction du club d'avoir maintenu le prix des places. Que faut-il en penser ?

"L'O.M. a répondu à cette question en précisant qu'il avait présenté son équipe professionnelle et que dans ces conditions si un reproche devait être fait, c'est à Strasbourg qui déplaça une formation composée d'amateur.

"Samedi, l'O.M. avait prévenu son adversaire de la décision de ses joueurs de disputer le match, et lui demandant d'envoyer ses professionnels.

 Il y avait au stade vélodrome prêt de 8.000 spectateurs payants qui connaissaient parfaitement la situation. Comment faut-il l'expliquer ?

"Il y avait certes des sociaux, des abonnés qui ont leur place à l'année et de toutes façons n'avaient rien à perdre. N'oublions pas aussi la curiosité légitime de beaucoup de supporters fidèles : le mauvais temps, peu propice à la promenade et l'amour inconditionnel que les Marseillais portent à l'O.M. et au football sous toutes ses formes.

"Huit mille qui ne voulaient pas manquer ça et auquel certains joueurs peu combatifs auraient dû penser".

 Le groupement ne va-t-il pas subir l'assaut des dirigeants des clubs ayant dû déclarer forfait ?

"Certes, et nous ne voyons pas comment le président du Paris F.C. pourrait accepter le 11 a 1 encaissé devant Metz qui envoya aux portes une équipe comprenant ses "pro" étrangers, Comboin et d'excellents stagiaires.

"Déjà, président de Strasbourg a annoncé sa démission, et l'on doit s'attendre à de violentes prises de positions à Saint-Étienne et ailleurs.

 On a évoqué un point du règlement, faisant obligation aux clubs d'aligner sept joueurs pros ?

"C'est aujourd'hui contesté, et cela devrait être éclairci. Mais tous les cas, assez rares, de clubs ayant présenté une équipe réserve ou une équipe incomplète, peuvent faire en quelque sorte jurisprudence. Chaque fois, le résultat du match a été cassé, et la rencontre a dû être jouée.

Ainsi l'O.M. qui, il y a quelques années, envoya ses amateurs à la place de ses "pros" partis en vacances pendant la preuve la trêve.

 On a pu s'étonner à juste titre que le syndicat des pros ait comme préside un joueur redevenu amateur Philippe Piat. Est-ce exact ?

"Philippe Piat, lors du congrès de Versailles, a proposé une démission qui n'a pas été acceptée par ses collègues.

 En conclusion, cet immense imbroglio pouvait-il être évité ?

"Notre opinion personnelle est que le groupement, en raison du temps limite dont disposaient les parties en présence pour régler leurs problèmes aurait dû raisonnablement, annuler la journée de championnat, ce qu'il sera peut-être d'ailleurs obligé de faire !"

Louis DUPIC

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Les spectateurs du Stade :

"Non à la grève !"

Nous avons bavardé avec plusieurs spectateurs et nous leur avons demandé leur opinion sur la grève des footballeurs professionnels. Dans l'ensemble ils y sont opposés et estiment que ce mouvement lèse, en premier lieu, les spectateurs !

M. Hippolyte VAUTELET s'est exprimé en termes mesurés : "On ne déclenche pas une grève en 48 heures ! On doit prendre de telles décisions à froid après avoir mûrement réfléchi ! Ce mouvement porte tort aux dirigeants, aux clubs, aux spectateurs et surtout à l'avenir du football français !"

M. Jos LEVUY est plus direct : "Les footballeurs exagèrent, Ils ont provoqué une pagaille totale ! En résumé, je crois qu'en premier lieu, en agissant d'une façon aussi brutale, ils portent tort à leur cause !"

M. Henri BARRAN est plein de fougue : "Tous les problèmes qui existent aurait pu se solutionner par la discussion ! Cette grève salit les footballeurs professionnels et ne leur accorde pas le soutien de l'opinion publique !"

Son père, M. Paul BARRAN, lui aussi, n'est pas content : "Les footballeurs professionnels n'appartiennent pas à la catégorie sociale la plus défavorisée, il s'en faut. Parmi eux, il y en a qui sont payés comme des vedettes de music-hall, même la masse la plus n'a pas trop à se plaindre de la moyenne de ses salaires !"

M. Bourg nous dit de son côté : "C'est une chose lamentable ! Un malheur pour le football français ! Ce championnat 1972-1973 part mal, cette histoire va lui causer du tort quant à sa régularité !"

M. MARIGNAN s'exclama d'un ton sincèrement désolé : "Un mouvement déplorable qui ne peut pas être approuvé par tous les sportifs sincères".

M. Charles COHEN est littéralement furieux : "C'est inadmissible ! On n'a jamais vu ça, une grève dans le sport ! Où allons-nous ?"

M. ANTONIOTTI s'efforce d'analyser la situation avec modération : "La situation est délicate ! Quelle que soit l'opinion que l'on professe vis-à-vis de la grève, c'est très grave pour le football français, car quand on met le doigt dans l'engrenage, tout le corps peut y passer ! Que va-t-il se passer ? Est-ce qu'on homologuera les matches joués ? Va-t-on prendre des sanctions contre les grévistes ?"

Alain DELCROIX

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 M. Wengler, président de Strasbourg :

"JE DEMISSIONNE !"

Dans les vestiaires strasbourgeois, le président du club alsacien, M. Wengler, était souriant en nous parlant des amateurs.

"Ils ont été très satisfaits satisfaisant, pas du tout ridicules ! Je me demande si les professionnels auraient été meilleurs. On peut penser que les "pro" auraient pu perdre par 6 à 2 !"

Mais le visage du président changea quand il évoqua la situation de la section professionnelle.

"J'en ai assez ! Je démissionne, les joueurs professionnels ont fait grève sans avertir, aussi je leur retiendrai le montant de la location du car ! Pendant cinq ans, j'ai donné ma caution personnelle jusqu'à 100 millions d'AF. Je ne veux plus engager mon fric (sic). Pour commencer, je m'en vais en vacances pendant une semaine. Les joueurs "pros" pourront attendre la fin de cette période pour toucher leur salaire !"

L'entraîneur Mateo, qui s'occupe des jeunes, était plus modéré :

"Je suis content pour méga. Ils ont eu un comportement honorable et je pense qu'ils auraient mérité de sauver l'honneur !"

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 M. GALLIAN :

"Maintenant il faut homologuer"

Bien après la rencontre, M. Gallian n'a pas manqué d'être interrogé sur la réaction possible du groupement après cette insolite 17me journée de championnat.

"Le Groupement, a répondu le président de la manière la plus catégorique qu'il soit, est tenu d'homologuer les résultats.

"Il nous a mis en demeure, samedi, de disputer le match dans n'importe quelle formation. Si maintenant il se désavouait en considérant par exemple la victoire de l'O.M. et la défaite de Nice comme nulle et non avenues, il aurait de mes nouvelles...

"J'espère que nous n'aurons pas à déplorer une telle décision. Mais si elle intervenait malgré tout, il ne faudrait pas s'attendre à ce que je reste plus longtemps un membre du Groupement..."

Attendons.

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Merci à la Fédération des Supporters du Racing Club de Strasbourg (http://fsrcs.free.fr/)

Article "Le livre d'or du Racing" paru en 1977

 

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Nota : merci à messieurs Berthommier Jean-Claude et Michel Chaussin pour leur aide à la reconstitution de la feuille de match.

La rencontre fut annulée et remplacée car celle du 04 avril 1973

 

 

 

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