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Résumé Le Provencal

du 17 janvier 1955

 

A LA MEINAU, MARSEILLAIS ET ALSACIENS, VOLONTAIRES ET APPLIQUES, ONT REALISE UNE SPLENDIDE PREMIERE MI-TEMPS

Quatre tirs de Strasbourg ont abattu l'O.M.

Le Onze phocéen disloqué après le repos, par la blessure de BEN BAREK

Alors que rien n'était perdu, perd finalement, par 4 à 1

(de notre envoyé spécial Lucien D'APO)

STRASBOURG (Par téléphone) - Pas le moindre coin de bleu dans le ciel d'Alsace jusqu'à hier matin. Des jours durant, d'énormes nuages sont venus s'effilocher sur les pointes des innombrables clochers de la cathédrale de la capitale alsacienne.

Autour de la ville, le Rhin, déchaîné, a inondé les berges et dans tous les villages qui font une frange à la cité de Kléber on s'est davantage inquiété, cette semaine, de la montée des eaux du Rhin, de l'Ill ou de leur Zizel que de la forme et des espoirs des footballeurs de Humpal.

Mais aujourd'hui, les éléments ont accordé aux sportifs quelques heures de trêve. Le soleil lui-même, l'espace d'un instant, est venu accompagner cette foule des supporters alsaciens, dans la longue théorie ressemblent à un pèlerinage qu'il avance à pas lents vers un sanctuaire. Ils sont des milliers en casquette et imperméable, à défiler vers ce stade de la Meinau, tout d'ordre et de propreté.

Mais la recette ne sera pas celle que l'on escomptait. C'est l'occasion pour les dirigeants de grimacer une première fois. En effet dans les villages environnants, on occupera cette journée à vider les caves envahies par l'eau. Pas de football pour les inondés. Hélas ! ...

Rolhion a choisi

Rolhion et ses dirigeants ont réfléchi jusqu'à la dernière minute avant de composer leur équipe. Le matin, déjà en compagnie de Ben Barek, il s'était inquiété de l'état de la pelouse. Cette pelouse convenait au marocain.

À 15 heures, c'était donc dans la formation suivante que l'O.M. très applaudi, pénètre sur le ground : Angel, Gransart et Palluch ; Scotti, Johansson et Marcel ; Luzy, Vandooren, Andersson, Ben Barek et Le Gall.

Humpal n'a pas déplacé un pion sur l'échiquier strasbourgeois. Il conserve les mêmes, c'est-à-dire Fragassi, Wendling et Borkowski qui forment le trio défensif ; Krug et Dreyer la ligne médiane ; quant au quintette offensif il fera fait de Sesia, Muller, Haan, Stojaspal et Carlier.

C'est le soleil qui attaque le premier et, à grand coup d'éclats, réussit à trouver le gris du ciel pour éclairer ce stade de la Meinau ou 14.500 spectateurs sont installés.

La première attaque et l'oeuvre de Marcel. Strasbourg aussitôt, fait donner ses demis qui viennent ravitailler leurs avants à profusion durant cinq minutes.

Vandooren, très actif en ce début de partie, réussit à transporter le jeu en face, et avec le concours de Marcel, Andersson, Luzy et Ben Barek, c'est l'O.M. qui a son tour met les Alsaciens à l'ouvrage.

À la 7me minute, Vandooren crochette Dreyer et sert impeccablement Andersson dont le tir fulgurant de quinze mètres est détourné en corner par Fragassi. Le corner ne donne rien.

Puis c'est à Le Gall de shooter vers le keeper strasbourgeois sans réussite d'ailleurs.

Le jeu se poursuit avec des alternatives diverses. C'est un cliché commode certes mais qui dit bien ce qu'il veut dire. Mais au centre de ce départ, Johansson brilla de mille feux. Il renvoie tous, balaie tout et Dieu sait si le football subtil des Strasbourgeois, qu'anime Stojaspal est pénétrant.

Une nouvelle intervention de Sesia, une offensive de Carlier inscrivant sur notre carnet de notes, peu avant un tir de Vandooren (10me minute).

Kaelbel est alors surpris à bousculer Andersson, puis ce dernier est prouvé par l'excessive virilité du pivot alsacien, se relève tout contri.

Marcel, à son tour, vient tenter sa chance grâce à un heading. Carlier loupe une occasion d'ouvrir le score, et c'est Andersson qui réceptionne sur le renvoi. Il file le long de la touche, trompe Krus et Wandling et centre au cordeau. Le Gall est à la réception, mais le ballon qu'il expédie de la tête est cueillie par Fragassi (18me minute).

Dans la phase suivante nouveau dégagement de Angel qui réussit à écarter du poing un shoot difficile de Muller : ce dernier étant particulièrement remarquer depuis le début du match. Dreyer, à son tour intervient et envoie le ballon devant la cage d'Angel qui, bousculé et gêné manque la balle. Cette dernière revient sur Stojaspal. On croit au but au cours de ces quelques secondes d'affolement, mais Angel s'est remis en place est stoppe l'offensive.

 

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Zéro partout au repos

Les corners se succèdent. Les tirs aussi plus nombreux du côté strasbourgeois cependant, les Olympiens se montrent plus vite que leurs adversaires sur la balle. Leur production et excellente ; il contrôle d'ailleurs le match durant une dizaine de minutes (27me et 37me minute). C'est alors qu'une furieuse série d'assaut, conduit par Stojaspal et Carlier sont successivement brisée par Johansson, Gransart, Palluch et par Angel qui dégage aux poings un tir expédié on ne peut plus vigoureusement à bout portant par Stojaspal.

L'O.M. menace encore par Andersson, Luzy et c'est la mi-temps qui survint sur le score de 0 à 0.

Satisfaction

Indiscutablement, on est en droit de retirer de nombreuses satisfactions de cette première mi-temps de l'O.M. donc la chaleur des actions à convaincu tout le monde.

De son côté, Strasbourg n'est pas moins agréable à suivre. Si bien que l'on n'est pas en mesure de prévoir ce qui va arriver. Au contraire, on pense très sérieusement à un match nul, voire à une victoire du onze marseillais.

Mais les événements vont changer la face du match. Les spectateurs n'ont pas encore repris leur place que Stojaspal, lancé dès le coup d'envoi arrive seul devant Angel à la parade. Le shoote vient mourir dans les bras du portier marseillais qui dégage aussitôt. La balle va à Ben Barek qui contrôle parfaitement, ouvre subtilement à l'intérieur sur Le Gall, lequel se rabat vers le centre et, avant d'être attaqué, place un shoot tendu, net, que le poteau vertical renvoi alors que Fragassi était battu.

Rien n'est perdu puisque le ballon, revenue en jeu, va au devant d'Andersson qui s'était rabattu. Shoot, but! Fragassi n'a rien pu faire. Nous sommes à la 46e minute de jeu.

O.M., 1 - Strasbourg, 0

Voilà qui ne plait pas aux Alsaciens. On remet en jeu. Haan donne à Stojaspal qui redonne à Haan lancé en avant. Ce dernier déplacé de la droite à la gauche sur Dreyer qui frappe de toutes ses forces vers les buts. Sesia détourne légèrement le tir splendide et c'est le but il y a 47 minutes que l'on joue.

O.M., 1 - Strasbourg, 1

Nouveaux déplacements de jeu que réussi Sesia par-dessus Johansson, Dreyer - encore lui - à la réception fusille Angel pour la seconde fois en une minute. Angel n'a pas pu esquisser un geste de défense avant la promptitude du mouvement et du tir parti de quinze mètres.

 

O.M., 1 - Strasbourg, 2.

L'enthousiasme est, cette fois déclenchée dans le stade. Un tir de Vandooren vient souligner le travail des marseillais de ne point en rester là. Volontaires, remarquablement combatifs il faut le souligner les hommes de Rolhion se ruent vers les buts de Fragassi. Et dans l'âpre combat que se livrent les vingt-deux joueurs, Ben Barek essaie de capter la source d'un désordre passager. Mais à la 54me minute il doit abandonner. Claqué, il gagne la touche, puis, plus tard les vestiaires, laissant ses camarades défendre à dix les positions que les Alsaciens attaquent maintenant sous tous les angles.

C'est ainsi qu'on notera un tir sur la verticale de Sesia (60me minute), de Carlier (64me minute), une suite d'offensifs d'un réalisme acide de Stojaspal dont Angel sauve l'un des tirs in extremis au pied.

Mais le "onze" olympien et maintenant disloqué. Réduit à dit, les Marseillais courent beaucoup plus que la balle.

Une hésitation entre Gransart et Scotti va provoquer le troisième but. Gransart finalement se saisit du cuir mais n'a pas vu Carlier sur ses talons. Il passe si faiblement à Angel que l'ailier strasbourgeois a le temps de s'interposer, de s'emparer de la balle et de shooter vers Angel. C'est la verticale qui lui renvoie son shoot qu'il réexpédie sans attendre. Cette fois Angel est battu, alors qu'il s'avançait pour réduire l'angle de tir (70me minute).

O.M., 1 - Strasbourg, 3.

Le ressort olympien et maintenant cassé et les Strasbourgeois profitent d'autant mieux de la situation disant une sérieuse marge de sécurité. L'O.M. pourtant, à des soubresauts particulièrement dangereux. Andersson a même un but au bout du pied que toute la défense strasbourgeoise vient lui arracher.

Et le score trouvera son allure définitive à la 83me minute, en complément à une action créer par Stojaspal qui lance Carlier. L'ailier déplace sur la gauche ou Muller, sans hésitation, s'empare de la balle et, de dix-huit mètres, surprend Angel battu pour la quatrième fois.

C'est fini, Strasbourg, net vainqueur, et ovationné par son public. La pluie fait son apparition alors que les joueurs regagnent les vestiaires, les uns joyeux, les autres on ne peut plus tristes.

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Les Olympiens s'étaient présentés avec

un moral de gagnants

STRASBOURG (Par téléphone) - Sont-ce les critiques que nous avons formulées cette semaine à l'endroit des joueurs olympiens qui leur ont inspiré un si bel enthousiasme, hier, à Strasbourg. Nous n'irons pas jusqu'à l'espérer. Il n'empêche qu'ils nous ont donné l'occasion d'écrire ce qui va suivre est donc nous mesurons les termes comme il convient.

Donc, ce que nous offrîmes les joueurs marseillais au cours de ce match joué au stade de la Meinau - dans la première mi-temps s'entend" est assurément ce que nous avons vu de mieux cette année en matière de football.

Jamais de cette saison, le onze Olympien ne s'était montré aussi savant, aussi talentueux qu'au cours de ce premier half, dominé par des mouvements tactiques et des interventions techniques d'une réelle qualité.

Alors que le quatuor Angel, Gransart, Johansson, Palluch constituait un ensemble aussi soudé et adroit qu'irréprochable, la note dominante étend lancée par Johansson : Scotti et Marcel fournissaient un colossal travail défensive et offensive. Qu'ils aient ensuite commis quelques fautes dont l'origine n'est pas en eux, peut-être.

Il n'en est pas moins vrai que ce qu'ils firent au cours de ces 45 premières minutes était un travail de très grande solidité.

Les avants, eux-mêmes, au cours de cette première mi-temps construisirent cent fois mieux qu'à l'ordinaire. Sans pour cela réaliser une production aussi parfaite que le fut celle de leurs coéquipiers de la ligne médiane et des lignes arrière ; il convient de souligner le désir de bien faire qu'il ne les quitta jamais.

ET C'EST SUR CE POINT QUE LA PARTIE FOURNIE HIER A STRASBOURG ETAIEST D'UNE CERTAINE SIGNIFICATION.

Car le résultat final, trop brutal en soi, provoqué, n'oublions pas, et par la blessure de Ben Barek, dont le départ rompit l'édifice, et par les deux buts alsaciens véritables but surprise, le résultat final, disons-nous ne constitue pas l'expression même des faits.

On pourrait beaucoup dire, en revanche, sur la seconde mi-temps ou les erreurs de tactique s'accumulèrent dans le clan olympien, erreur de tactique née de la réduction des effectifs d'abord mais aussi par ce désarroi moral qui frappe l'O.M. des qu'une équipe donc il a battu la défense une première fois réussit à le rejoindre à la marque.

Défaite logique

Ceci dit, la défaite de l'O.M. est on ne peut plus logique. Devant un onze alsaciens décidé au point, vivement encouragé et de plus particulièrement à l'aise sur un terrain détrempé, les Marseillais ne pouvaient plus en seconde mi-temps, contenir ce flot avec 10 joueurs, toujours battu par le onzièmes adverses.

Quand Scotti qui veillait à tout endroit à la fois, Stojaspal eut les coudées plus franches. On comprit alors la liberté que prit la ligne d'avants alsacienne. Certes Barek quitta le terrain alors que la marque était de 2 buts à 1 en faveur de Strasbourg. Elle pouvait rester ainsi voir revenir à un score nul. Il n'eut fallu évidemment, aucune pièce ne manque dans le mécanisme olympien.

Résultat logique, répétons-le, puisqu'il récompense l'équipe qui attaqua le plus souvent. Mais répétons-le aussi, il y a quelques enseignements satisfaisant à retirer d'un échec plus retentissement au tableau d'affichage qu'il ne le fut sur le terrain.

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JOHANSSON et DREYER

leaders des deux équipes

STRASBOURG (Par téléphone) - Johansson et Dreyer, le premier pour l'O.M., le second pour Strasbourg, ont été certainement les deux meilleurs joueurs sur le terrain.

Nous avons dit combien fut impressionnante la besogne que le policeman marseillais réalisa face aux entreprises multiples des Strasbourgeois. Outre le puissant et généreux travail qu'il assura en défense et dans toutes les positions, il s'attacha également à dessiner les offensives qui allèrent fort loin.

Avec lui Scotti et Marcel, en première mi-temps, assurèrent leur rôle parfaitement. Palluch Gransart - malgré sa faute - Luzy, le Gall, entreprenants seront encore à citer.

Ben Barek ne fut pas très heureux dans ce qui entreprit avant sa blessure. Il couvrit néanmoins un terrain énorme et c'est grâce à la subtilité de son action que Le Gall put préparer le but marqué par Andersson. Ce dernier sévèrement marquait, et également à créditer d'un bon match.

Côté Strasbourg, c'est la paire de demi-ailes Krug-Dreyer qui selon nous assura l'essentiel de la production alsacienne.

En deuxième mi-temps, certes le rendement fut d'autant plus efficace qu'ils profitèrent d'une liberté de manoeuvre née du départ de Ben Barek.

Strasbourg plus aussi par son goal l'excellent Fragassi : son demi centre Kaelbel, par ses interventions aussi nettes sur la balle... que sur l'homme et enfin Carlier et Stojaspal ce dernier maître à jouer en certaines occasions.

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ANGEL et ANDERSSON

Nous marquons les premiers,

Mais nous ne savons pas conserver cet avantage

STRASBOURG (Par téléphone) - La déception, évidemment habitait les Marseillais lorsqu'ils rejoignirent les vestiaires. Il y eut même quelques éclats de voix, mais sans conséquence.

Angel, qui explique qu'aux deux premiers buts il n'avait pas le choix, dit aussi :

"On ne peut pas maintenir un but d'avance plus de 5 minutes. C'est quand même terrible ! Pourquoi donc aller au-devant de l'adversaire lorsqu'on a l'avantage à la marque, et alors qu'il est si simple d'attendre précisément cette adversaire !"

Andersson, lui, est encore plus nette :

"Dès que nous marquons un but... c'est arrivé. C'est la chasse à courre. Pendant ce temps, en face, on s'organise et on n'a même pas le temps de profiter du moment de satisfaction que procure un but".

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M. Scheuer : "Le meilleur match de la saison"

STRASBOURG (Par téléphone) - Le sympathique président du Racing Club de Strasbourg, M. Scheur, était particulièrement volubile après la victoire de son équipe :

"Nous avons mérité notre succès, tout comme l'O.M. avait mérité le sien lors du match aller. Mais je dois dire qu'il me fut rarement donné de voir une aussi belle mi-temps que la première de ce match.

"J'avoue que je ne t'ai pas plus rassuré à la reprise. C'est la blessure de Ben Barek qui, à mon sens, à désorganiser votre équipe".

 

 

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