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Résumé Le Provencal

du 06 janvier 1958

 

5 BUTS A 0 ! L'O.M. EN DEROUTE A NIMES

L'O.M. TINT BON PENDANT UNE MI-TEMPS

PUIS, HANDICAPE, S'EFFRITA SOUS LA PRESSION NIMOISE

(De notre correspondant nîmois : Jacques PONS)

NIMES - Il est certain qu'à la mi-temps de ce derby provençal on ne s'attendait pas un résultat final aussi sévère.

Certes l'O.M. avait peut-être fait illusion et sur le terrain lourd, qui diminuait les effets de la vitesse nîmoise, l'équipe au maillot blanc avait tenu bon.

Elle avait pourtant concédé six corners contre un à la pression nîmoise avait été quasi ininterrompue, mais l'abattage de Jean-Jacques Marcel et les exploits de Domingo avaient permis de "sauver les meubles".

Hélas ! Quatre minutes après le retour aux vestiaires, Akesbi sonna le glas des marseillais et, dès lors, il n'y eut plus qu'une seule équipe sur le terrain, d'autant plus que les blessures successives d'Amalfi et surtout de Leonetti et de Domingo virent encore compliquer la tâche d'une équipe qui n'avait pas besoin assurément d'un tel handicap.

Durant toute la première mi-temps, des Nîmois devaient avoir un net avantage territorial entrecoupé par quelques contre-attaques marseillaises.

Et la 3me minute, Domingo concéda un corner sur un dangereux tir plongeant de Skiba.

Les tirs furent cependant assez rares au cours de la première demi-heure.

À 31me minute, par contre, Akesbi termina une attaque classique des Nîmois menée par Rahïs et Skiba, par un bon tir à ras de terre bien arrêtée par Domingo.

Puis, sur attaque de Jensen suivie d'une ouverture à Andersson, ce dernier mit Rozak à contribution, mais son tir manquait de puissance.

A la 40me minute, sur centre de Rahïs, Domingo se fit applaudir en détournant en corner le ballon repris de la tête avec force par Mazouz.

Enfin, une minute avant la mi-temps, sur passe de Mazouz à Akesbi, ce dernier tira en coin et Domingo détourna en corner. Au repos, donc, le score était de 0 à 0 et Nîmes n'avait pu matérialiser sa supériorité territoriale.

AKESBI ouvre le score

Dès 'la reprise, Amalfi victime d'un léger claquage, se mit à boitiller et il devait ailier droit en permutant avec Rustichelli.

À la dernière minute, sur un centre de Rahïs à Skiba, ce dernier passa de la tête à Schwager qui donna immédiatement à Akesbi, dont le tir en coin et à ras de terre trompa Domingo.

SKIBA marque le 2e but

La pression nîmoise allait cependant en s'accentuant et les corners se succédaient. Sur le 13me corner, en faveur des Crocodiles, le ballon fut repris par Mazouz et alors qu'il prenait le chemin du but marseillais il fut dévié d'une talonnade par Skiba. Domingo, pris à contre-pied fut immédiatement battu.

Nîmes menait par 2 à 0.

LEONETTI et DOMINGO out

Dès lors, le match paraissait définitivement jouer mais pourtant, l'énervement aidant des incidents regrettables allaient malheureusement survenir.

Ce fut tout d'abord Leonetti qui se blessa grièvement au genou en disputant une balle avec Rahis. De la tribune de presse, il nous fut impossible de voir ce qui s'était passé, mais Leonetti quitta le terrain.

Quelques minutes plus tard, Gransart se mit fâcheusement en vedette en donnant un coup de pied volontaire à Skiba et le match fut interrompu un moment.

Enfin, à la 77me minute, Rahis passa à Barlaguet qui tira en quoi à ras de terre.

Domingo plongea et dévia le ballon sur Skiba, qui obtient sans peine le troisième but nîmois.

Cependant, comble d'infortune pour l'O.M., Domingo c'était luxé l'épaule en plongeant et il quitta le terrain tandis qu'Andersson le remplaça au poste de gardien de but.

Une pénible fin de match

Les dernières minutes de la rencontre furent en fait une parodie de match, pénible pour le public et pénible aussi pour les joueurs à la fois fatigués et énervés.

Les Marseillais s'efforcèrent de limiter les dégâts et Andersson, au poste de gardien de but, effectua quelques bonnes parades.

Néanmoins sur un mauvais dégagement de l'ex-Suédois, Burlaguet marqua sans peine le quatrième but nîmois (85me minute).

Puis (87me minute) Skiba profita d'un centre de Schwager pour marquer le 5me et dernier but de la rencontre.

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LE MIRACLE DOMINGO

NE SUFFIT PLUS

(D'un de nos envoyés spéciaux : Lucien D'APO)

L'OLYMPIQUE DE MARSEILLE n'est pas à la fin de ses tourments. L'équipe dont on s'acharne, peut-être par esprit régionaliste, à croire à la résurrection, n'a pas encore touché le fond de ses malheurs. Elle a connu hier à Nîmes d'affreux moment. Elle aurait pu inspirer quelque pitié quand dans les dernières minutes, avec huit joueurs, le onze nîmois l'a sacrifiée sans pitié sur l'autel du championnat.

Mais le football, et qui plus est la compétition, ne s'embarrasse pas de sentiment. Le sport couronne l'effort et condamne les faibles. Car avant même de souffrir des blessures de l'adversité, avant même de voir Amalfi, puis Leonetti, puis Domingo quitter le terrain, le onze olympien avait fait la preuve de son incapacité. Il s'était certes bien battus pour atteindre la mi-temps sur le score nul, mais ce qu'il avait fait, tout ce qu'il avait fait n'avait inspiré aucune confiance. Une fois de plus, le miracle Domingo avait été nécessaire, une fois de plus le grand Domingo, par trois parades extraordinaires, avait sauvé son équipe devant l'ardente attaque nîmoise. Les miracles n'ont qu'un temps. Domingo, dès la reprise, dut s'avouer battu. C'est alors que commença le calvaire que le onze nîmois jalonna comme à plaisir de terribles coups de butoir, de larges offensives et d'une efficacité incontestable.

Nous voulons bien croire, pour épouser les dires des joueurs phocéens, à la sévérité du jeu gardois, encore faut-il le démontrer, mais ce qui est certain, c'est que l'ensemble de Firoud avait démontré une supériorité incontestable lorsque survint la première blessure. Loin de nous l'idée d'approuver les gestes et les hurlements d'une partie de ce sévère public nîmois qui, à la manière des Romains d'autrefois, encourageait son équipe et toutes ses forces à achever les gladiateurs battus. Le championnat à toutefois des exigences que les attaquants nîmois ont respectées. Nous ne sommes pas pour ces élans de joie frénétique qui dépasse les limites du spectacle sportif.

Mais il est certain que toutes les excuses que les Marseillais pourront avancer n'auront aucune valeur en regard de la production nette, souveraine est indiscutablement supérieure des vainqueurs.

L'O.M. a continué à s'agiter à Nîmes sur la voie de l'imprécision et de la stérilité dans laquelle il s'est engagé depuis des mois.

Aussi bien si l'on doit analyser son jeu, on constatera une fois encore la bonne volonté de ses acteurs, mais aussi et surtout leur lenteur, cette lenteur qui se traduit sous la forme d'un dixième de seconde de retard sur chaque balle et dans chaque geste. La promptitude n'est plus l'armes dont on usait autrefois à l'O.M. En ajoutant à cela ou, si vous voulez en expliquant ceci par cela, vous aurez encore noté à Nîmes la précarité des moyens et de la condition physique de la majeure partie des joueurs marseillais.

Si un communiqué peut sauver l'honneur, disons que Jean-Jacques Marcel et Domingo, d'une part, puis Leonetti, Ramon, Molla et Andersson d'autre part, ont tout de même signé quelques phases qui nous rassurèrent provisoirement.

Quant aux Nîmois, quelles que soient les sympathies que leurs adversaires puissent nourrir à leur endroit, disons si vous le voulez bien, que leur équipe occupe une place méritée dans la hiérarchie du football français.

Nîmes pratique selon une méthode ; sa manière et bien établie, son football est large, souvent calculé, la décision de ses attaquants est une réalité constante. On vérifie alors efficacité du team gardois.

Au centre de cette ligne offensive, Akesbi conduit le bal, c'est un régulateur dont le sens du but qu'il prépare ou termine, est communicatif. Certes, ce football fin, mais solide, utilise l'extraordinaire abattage de Bernard Rahis et l'opiniâtreté de Skiba, deux hommes dont on ne retrouve pas les qualités correspondantes dans le quintette marseillais. Nîmes à d'autres atouts en Lafont, Schwagner, Salaber et Mazzouz. Bettache fut moyens hier. Mais ce dont l'équipe nîmoise déborde, c'est d'une condition physique à peu près idéale et qui laisse constamment ses hommes en mouvement ou sur le qui-vive.

Les trois premiers buts sont le résultat de cette mobilité, et ce désir de se démarquer et d'utiliser les "espaces vides" pour employer des termes à la mode. Les deux autres surviennent alors que l'O.M. désemparé, traînait ses malheurs et ne jouait plus qu'à huit.

A Nîmes, comme à Nice on était venu voir Yeso Amalfi. Ce dernier fut le premier blessé. Une insidieuse élongation était venue rompre son harmonieuse musculature. Ce qui, du reste, ne changea pas grand-chose aux événements car, pour tout dire, Yeso avait su conserver sa beauté et sa casaque d'une blancheur Persil durant sa période sans blessure. Ajoutant pour avoir une idée exacte de son rendement, que le terrain était glissant et boueux. Amalfi est pour le moment très loin de justifier la confiance que ses acquéreurs en mise en lui.

Mais reparlant de Marcel Domingo pour saluer l'un des meilleurs gardiens de but de l'heure, sinon le meilleur. Reparlant aussi de Marcel, opiniâtre, solide, et dont le jeu constitue la seule clarté dans le brouillard de la technique olympienne. Reparlons en fin de Gunnar Andersson - le capitaine courageux - qui se battit avec le coeur de ses 20 ans et la tenace volonté de réussir l'impossible. Ce qui fit fut excellent.

... Et sa crise de larmes dans les vestiaires aurait ému les plus impassibles.

Mais un match ne se gagne ni avec des larmes ni avec des mots, mais avec du sang froid, de la volonté et du talent. C'est-à-dire un ensemble de qualités dont l'O.M, précisément, n'est plus le dépositaire..

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MARCEL : "Si cela continue, Robin sera obligé

de rehausser les souliers"

(D'un de nos envoyés spéciaux : Alain DELCROIX)

M. Zaraya, les traits serrés, disait laconiquement : "Quelle poisse ! Pas moyen de terminer un match au complet !"

L'entraîneur Jean Robin soupirait : sans exagérer, nous pouvons affirmer que nous ne sommes pas vernis !"

Marcel Domingo, visage pâle, souffrait en silence, tandis que le docteur Luciani essayait de l'aider à ce rhabiller : "C'est en plongeant que j'ai fait un faux mouvement et j'ai senti mon épaule qui lâchait".

Yeso Amalfi, était sorti de son habituel flemme pour s'écrier dans une langue pittoresque : "Je n'ai pas pu courir, j'avais une déchirure musculaire. De plus on m'a donné un coup de pied à la cuisse. Le public nîmois et sadique, on se croirait au temps des Romains".

J.J. Marcel se plaignait de l'arbitrage : "L'arbitre ne nous a pas gâtés ! Mais que peut-on faire quand on finit avec huit joueurs seulement ! Je crois que si cela continu, John (c'est-à-dire Robin), sera obligé de rechausser les souliers à crampons d'ici la fin de la saison."

Maurice Gransart était furieux : "Quand M. Bondon a sifflé contre moi, c'est Skiba qui avait commis la faute ! On veut nous prendre pour des Charlot et on a réellement tort ! À Marseille nous serons obligés de jouer aussi vigoureusement à présent !"

J.L. Leonetti avait encore les yeux rouges pour tout communiqué : "Rahis m'est rentré dedans avec trop d'empressement et j'ai eu le genou bloqué !"

M. Bicais se lamentait en ces termes : "Nous avons bien résisté pendant 45 minutes... et nous ne méritions pas un score aussi sévère mais que faire quand la malchance s'abat sur vous avec autant de cruauté".

Raïs explique

Dans les vestiaires nîmois l'atmosphère était partagée entre la satisfaction et le mécontentement. Satisfaction de la nette et indiscutable victoire obtenue sur l'O.M. Mécontentement parce que la seconde mi-temps avait été marquée par des incidents regrettables.

Kader Firoud, entraîneur des Crocodiles nous déclara :

"Mon équipe a fait ce qu'il fallait faire. Déjà au repos nous aurions dû mener à la marque si Domingo et Marcel n'avaient fait des prodiges.

"Par la suite, nous nous sommes imposés sans discussion.

"Certes, l'O.M. fut handicapé mais la cause était déjà entendue avant les blessures de Leonetti et de Domingo".

Raïs se défendait d'avoir voulu blesser Leonetti :

"Ce fut un accident malheureux que je regrette sincèrement, déclara-t-il, mais j'ai joué le ballon et je n'ai jamais eu l'intention de faire mal à Leonetti.

"La fatalité a voulu qu'il ait le genou bloqué."

Skiba, lui, était furieux après Gransart, et il déclara, en nous montrant sa cheville endolorie :

"Regardez il m'a frappé là et ma cheville et déjà enflée".

"Heureusement qu'il ne m'a pas touché un peu plus haut car il m'aurait cassé le pied !

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Marcel DOMINGO

sublime rempart

Marcel Domingo, une fois de plus, s'est avéré un sublime rempart au cours de ce derby passionné. Jusqu'à sa blessure, sa classe et son courage éclatèrent notamment sur une tête de Mazzouz (40e) des essais d'Akesbi (31e et 44e). Sans sa présence l'O.M. aurait déjà eu deux buts de retard à la mi-temps.

J.J. Marcel fut un policeman défensif des plus remarquables et en première mi-temps, il brisa maints assauts adverses.

J.L. Leonetti fut un demi-aile très travailleur, extrêmement consciencieux et soulagea son arrière garde.

Molla dans un style sobre, sut couvrir, sa cage et contenir son opposant direct dans la mesure du possible.

Maurice Gransart marqua avec beaucoup d'application un Rahis qui, n'était pas dans un jour très faste.

Christian Ramon domina le jeune Salaber sans s'affirmer d'une façon indiscutable.

Gunnar Andersson s'efforça de passer en force mais il dut se contenter d'un seul shoot véritablement pendant 90 minutes.

Éric Jensen à l'intérieur se montra accrocheur en diable, mais ne signa pas d'exploit.

Rustichelli tenta quelques percées mais il ne trouva pas le trou.

Yeso Amalfi fut plutôt effacé et ne se débarrassa par de Barlaguet.

Alauzun fit preuve de bonne volonté, sans plus.

Laffont dans la défense nîmoise, ne commit pas la moindre faute et se montra d'une valeur sur.

Schwager débuta avec prudence puis se déchaîna dans le rayon offensif après les "citrons".

Bettache ne se livra pas à fond, il avait besoin de se réadapter.

Akesbi fut plus dangereux des avants nîmois et tenta sa chance à diverses reprises.

Skiba a réussi le "coup de chapeau" il fut un avant-centre athlétique et sans peur.

Rahis fut l'auteur de deux tirs inquiétants, dans l'arête gauche (3e minute) et le montant gauche (66e minute).

Mazzouz fut à l'origine du second point des Crocodiles.

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L'arbitre et la blessure de LEONETTI

De la tribune de presse, il fut absolument impossible de voir comment Leonetti avait été blessé, puisque l'action se passa sur la ligne de touche, placée au bas de la tribune.

On ne peut donc que rapporter des opinions. Nous avons donné par ailleurs l'explication de Rahis voici celle de l'arbitre, M. Bondon :

"S'il y a eu aucune irrégularité, de brutalité de la part de Rahis, je n'aurais d'ailleurs sifflé aucune faute si le ballon n'était pas sorti. Rahis a joué la balle et la blessure de Leonetti est vraiment due à la fatalité"

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(photos : collection Norman Jardin)

 

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