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Résumé Le Provencal

du 30 mars 1959

 

A PARIS, L'O.M. NE S'INCLINE QUE PAR 2 BUTS A 1

Un but de Bollini (91') prive les Marseillais

d'un match nul très mérité

(De notre correspondant parisien : Marcel SERRES SUBE)

PARIS - Il y a 16.123 spectateurs (recette : 5.994.240 frs), pour assister au match Racing-O.M. Cet après-midi de sport commence par une bordée de sifflets accueillant l'équipe du Racing, à qui l'on reproche sa cuisante défaite en Coupe de France devant Nîmes.

Le temps est gris et venteux. Ce vent favorisera l'O.M. en première mi-temps et, bien entendu les Parisiens ensuite.

L'O.M., très applaudi, déclencha sa première attaque pas Alauzun, qui se montrera d'ailleurs le meilleur attaquant de l'O.M. tout au long du match.

Voilà encore une attaque bien dessinée et commencée par une talonnade de Tillon donnant le cuir à Eschmann qui passe à Touré. Ce dernier fermant le cycle glisse à Tillon en bonne position, mais Varini, plongeant dans les pieds, subtilise la balle.

Le même Tillon réussit une belle reprise devant un Chicha aussi admiratif qu'immobile...

Alauzun, bien aidé par Eschmann, continue à faire un très bon travail constructif.

L'O.M. mène le jeu

Il faut d'ailleurs dire qu'en ce début de partie l'O.M. mène le jeu, à petite allure il est vrai mais de façon quasi-permanente et Sénac doit sauvé une situation assez difficile pour le Racing.

À la 7e minute, Touré tire au-dessus de la barre transversale, puis nous notons un arrêt de Varini devant l'insistance d'Alauzun puis Cisowski déclenche un tir dévié par Molla et arrêté par Fischbach. Un raid de Grillet, toujours très rapide, n'est pas utilisé par Cisowski.

L'O.M. insiste

A la 10e minute, Chicha part du milieu du terrain, passe à Tillon. Ce dernier trouve Touré qui lui rend la politesse, et le blond avant-centre néo-marseillais tire au-dessus (du pied gauche, il est vrai).

Pillard, en position avancée, oblige Fischbach à sortir.

Le match est assez équilibré, avec un avantage pour l'O.M., qui est loin d'être ridicule. Alauzun en particulier, pratique un football digne d'un meilleur sort. Molla, au centre de la défense, intervient à plusieurs reprises avec autorité, bien secondé par Gransart. Nous remarquons encore une ouverture de Touré sur Tillon, mais la passe est trop longue.

Retournement de situation : à la 20e minute, Fischbach sauve du "bout des doigts", mais une minute plus tard, un corner est refusé injustement à l'O.M.

Le public interpelle Chicha juge, par lui, un peu trop passif.

À la 28e minute, Fischbach arrête sans difficulté un tir lointain mais appuyer d'Ujlaki, puis une minute plus tard sauve du poing un shoot de Senac déclenché d'une vingtaine de mètres.

Marseille ouvre le score

Hédiart est sifflet hors-jeu, le public siffle à son tour l'arbitre.

A la 32e minute, coup de théâtre qui sera à deux épisodes, comme dans les plus mauvais mélodrames, Chicha, en position d'inter droit, se fait descendre dans la surface de réparation. Fort opportunément, il reste étendu ; l'arbitre décide du penalty. Oliver, capitaine et vengeur, se charge de la chose et la réussit. L'O.M. mène par un but à zéro.

La compensation immédiate

Mais les joueurs de football (certains tout au moins) sont astucieux. Ainsi, trois minutes plus tard, Cisowski se prête avec complaisance à une charge de Gransart. "Ciso" tombe de tout son long - et avec le sourire énigmatique de la Joconde - l'arbitre M. Taieb, qui n'a pas le sens de l'humour, accorde sans rire ni sourire, le penalty et le Racing égalise : un but partout.

Une série de corner judicieusement partagés termine cette première mi-temps, ou l'O.M. s'est vaillamment comporté.

FISCHBACH a du travail

Dès la reprise, Fischbach repoussa un "bolide" d'Ujlaki dans les jambes de... Grillet. Celui-ci, bien placé, mais surpris (on ne saurait penser à tout) envoie nettement à côté, puis nouvel arrêt de Fischbach sur un tir de Pillard, puis Alauzun fait un excellent travail d'approche, mais pousse trop loin et se fait contrer par Marche. C'est maintenant le Racing qui a prit la direction du match, comme l'O.M. n'avait fait en première mi-temps.

À 53e minute, Eschmann tire à côté, lors que l'ouverture était faite. Nous sommes loin du temps face d'Andersson...

À la suite d'un corner contre le Racing, une offensive Touré-Chicha se termine par la chute de ce dernier, qui se fait soigner sur la touche, puis Tillon tir deux fois au but et c'est ensuite un corner en faveur du Racing. Touré est écrasé sous le corps de Varini.

ALAUZUN marque mais...

À son 72e minute, Alauzun marque bien un but de façon judicieuse, mais l'inévitable M. Taieb siffle un hors-jeu.

À la 77e minute, Fischbach renvoie par-dessus la barre un tir de Grillet. Puis c'est Sadat qui envoie vers le goal marseillais.

...le but de chauffe

A la 82e minute, Bollini commet une faute sur Touré (qui joue à présent avant-centre), Oliver le tire en hauteur. Touré surgit reprend de la tête, mais le vent contrariant la trajectoire du ballon, le rabat sur Marche qui dégagea à la désespérée.

Le jeu est maintenant assez mauvais pour ré utilise Yd? ée mauvais pour être sifflé avec conviction.

À la 86e minute, une attaque Tillon-Hédiard se termine sur Chicha qui envoie le ballon au ras de la verticale gauche.

À la 88e minute, un corner contre le Racing n'est pas utilisé par les Marseillais. Sadat perd sa chaussure à la suite d'un heurt avec Chicha. L'O.M. fait le forcing pendant les ultimes minutes.

Mais ces ultimes minutes se prolongent au-delà du temps minuté et l'on joue depuis 91 minutes et 40 secondes lors une ruée du Racing fait, s'avancer Bollini qui, recevant un centre de Sénac, placé à gauche, reprend et marque le but de la victoire au milieu de la houle du public, qui a bien remarqué que le match s'est prolongé de façon anormale.

La malchance n'aura pas épargné l'O.M. aujourd'hui.

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Bien qu'il ait lutté courageusement

L'O.M. N'EST VRAIMENT PAS L'EQUIPE

De l'APRES-DERNIERE MINUTE du MATCH

(De notre envoyé spécial : Maurice FAGREGUETTES)

PARIS - Nous pensions que l'O.M. n'avait pas de chance du tout de même pas à ce point.

C'est à peine croyable.

Après la rencontre, les joueurs marseillais, que nous avons vu dans leurs vestiaires, en étaient choqués.

La plupart d'entre eux restèrent de longues minutes à leur place, comme cloués sur le banc et Touré, la tête entre ses mains était l'image vivante du désespoir.

Un tel point que nous avons pu caresser sa chevelure crépue en signe d'encouragement sans qui s'en aperçut.

Un but extraordinaire

Que s'est-il passé exactement ?

Disons sans plus tarder que le véritable résultat de cette partie aurait dû être de 0 à 0.

L'arbitre, M. Taieb accorda d'abord un penalty à l'O.M., dans des conditions, assez obscure puis un second au Racing absolument ahurissant.

La plus horrible des politiques de compensation, en somme.

Là-dessus, la partie s'était poursuivie, le Racing dominant généreusement généralement, l'O.M. se défendant de façon tellement efficace que Fischbach ne fut jamais surchargé de besogne, jusqu'aux dernières minutes.

C'est alors que les Marseillais sentant la victoire à leur portée se ruèrent à l'attaque.

Sur le coup franc tiré de la gauche par Oliver notre chrono qui, jusqu'à preuve du contraire marche très bien, venait de passer le cap de la 90e minute quand Varini se saisit du ballon.

Le jeu n'en continua pas moins et c'est très nettement à la 91e minute 40 secondes que Bollini réussit, d'environ 20 mètres, une extraordinaire reprise de volée.

Une de ses reprises de volée comme un joueur même de grande classe en réussit à peu près deux ou trois dans sa vie.

Le ballon partit tel une fusée télé-guidée et alla se loger dans la cage de l'O.M. au grand désespoir de Fischbach qui n'en pouvait mais...

Et c'est ainsi que l'O.M. perdit le bénéfice d'un match nul qu'il avait amplement mérité.

Une défense de zone efficace

Chose assez curieuse, cette rencontre, moins le rythme nîmois et moins le brio offensif du tandem Akesbi - Skiba, ressembla étrangement à celle que nous avions vue à Marseille huit jours plus tôt.

Le Racing techniquement supérieur, on s'en serait douté, domina largement, mais ne put jamais franchir le rideau défensif tissé autour de Molla.

Fischbach, bien meilleur que ces derniers dimanches, n'eut, en tout et pour tout, que deux tirs dangereux, un par mi-temps, à dévier en corner.

Le reste du temps, le gardien marseillais s'en tira, très bien d'ailleurs, mais sans jamais avoir à se surpasser.

C'est dire combien la défense de zone des Marseillais avec Oliver jouant derrières ses arrières fut efficace.

Reconnaissons cependant que, comme contre Nîmes le dimanche précédent, les Parisiens n'appuyèrent jamais très franchement leurs actions. Pierre Pibarot devait en convenir à la fin de la rencontre.

L'attaque de l'O.M.

N'est pas celle des raids

Mais, quoi qu'il en soit, les Marseillais avaient réussi à appliquer la première mi-temps de leur plan, empêchant le Racing de marquer.

Quant à la seconde, battre Varini sur contre-attaque, elle fut c'est bien évident, beaucoup moins réussie.

C'est que l'O.M. n'est pas de Nîmes et qu'il n'existe, au sein de l'attaque de cette équipe, aucun tandem rappelant même de loin celle formée par Akesbi - Skiba.

Tillon - Touré au départ, Touré - Chicha par la suite s'efforcèrent bien de passer en force ou en finesse, mais sans grand résultat ce qui est plus grave, sans laisser entrevoir la moindre espérance.

Il apparut ainsi une fois de plus que l'O.M. n'est pas une équipe de raids. Tout au contraire, son attaque ne se montra dangereuse que les rares fois où elle put opérer avec le concours de son deuxième inter Alauzun ou de ses demis Eschman et Oliver.

Mais il est bien certain que tout cela n'est que la théorie. Si Alauzun, Eschman et Oliver ne s'étaient voués à des tâches défensives l'O.M. eut été vraisemblablement nettement battu.

C'est un peu le procès d'une équipe, incapable de parler d'égal à égal avec le Racing et qui en est réduite à utiliser des moyens de fortune pour obtenir un match nul ou une victoire arrachée par les cheveux.

D'ailleurs s'il en était autrement, l'O.M. ne serait pas le bon dernier du Championnat avec ou sans chance.

L'excellent moral marseillais

D'une manière très générale, à la seule exception de Chicha qui fit une nouvelle fois Monsieur 20 pour cent, tout juste, pour ne peut que louer l'excellent esprit et la volonté des joueurs marseillais.

Tous luttèrent 90 minutes durant et firent de leur mieux pour défendre ce maillot blanc.

Le moral de cette équipe n'est pas celui d'un candidat à la descente.

Ce n'est pas le côté le moins curieux de l'O.M. 58-59.

MOLLA et ALAUZUN

les meilleurs

Fischbach ne peut être rendu responsable des deux buts qu'il encaissa. Il semble revenir en forme et nous avons déjà souligné ses deux meilleures interventions.

Le bloc défensif - à quatre arrières, Oliver jouant le plus souvent en soutien - fit un bon match collectif. Accordons une mention spéciale à Molla qui fit certainement hier le meilleur match de la saison.

En demis très gros travail d'Eschman, qui n'a pas fait le tort de passer un peu trop le ballon.

Alauzun, tout autant demi qu'inter fut le joueur le plus remarqué dans l'équipe marseillaise. Il mit à son actif quelques actions de grande classe et travailla pour l'équipe de vous de l'en bout.

En attaque, Touré et Tillon se bâtirent avec énergie que nous leur connaissons mais, hélas, mais, sans grande précision.

Chicha à quelques dribbles près se borna à regarder jouer ses partenaires. On ne peut que le déployer surtout de la part d'un joueur ne manquant pas de chasse.

Hédiart, il est vrai isolé à l'arrière à l'aile droite fut extrêmement effacé.

Au Racing,, ou Varini joua mieux qu'à Marseille, on remarqua une fois de plus Bollini et Senac tendu qu'Ujlaki et Cisouski ne se manifestèrent que très épisodiquement.

Quant à l'arbitre M. Taieb il fut en dessous du médiocre.

 

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M. TAIEB, arbitre agréé parle de l'article 5

PARIS - Après le match, l'atmosphère était assez passionnée dans les abords du vestiaire marseillais. M. Zaraya, entouré de journalistes, du délégué au match et de joueurs, s'indignait de l'arbitrage de M. Taieb, histoire des penalties et surtout prolongation insolite du match qui permettait au Racing de marquer le but de la victoire.

Le délégué au match disait : "Bien sur le match a duré 1 minute 40 secondes de plus que le temps réglementaire, mais l'arbitre est seul juge pour déterminer le temps des arrêts de jeu".

La discussion se poursuivit dans et hors les vestiaires. Je décidai d'aller à la source en interrogeant à la source, c'est-à-dire l'arbitre.

M. Taieb a l'air tout surpris de me voir dans son vestiaire. Il se refuse, d'abord, à toute déclaration. Comme j'insiste (poliment) il me dit : "Voici ce que je peux vous dire officieusement. Regardez mon chronomètre. Il est arrêté à une seconde près, sur les 45 minutes".

Puis d'un ton agressif : "D'ailleurs, en tant que journaliste, vous devriez connaître l'article 5 du règlement qui donne tout pouvoir à l'arbitre pour prolonger le match d'après les arrêts de jeu. Or j'ai aidé à transporter Chicha sur la touche lorsqu'il a été blessé ; puis quelques minutes avant la fin, j'ai interrompu la partie pour donner un avertissement à Lelong. Je suis forte de mon droit. Tout ceci dit officieusement, bien entendu, puisque je n'ai pas le choix de vous faire de déclaration.

M. Taieb n'ajouta pas : "Rompez", mais je comprends que l'entretien est terminé.

Zaraya : "Je réclame"

Quelques minutes plus tard, M. Zaraya me dit son intention d'écrire à la ligue pour protester contre le mauvais arbitrage de M. Taieb, mais ajoute M. Zaraya : "Je ne me fais aucune illusion sur l'efficacité de cette démarche."

RAMON : "la bonne mère"

Un peu plus loin, Ramon me demande : "mais qu'est-ce qu'on a fait à la bonne mère !

En ce jour de Pâques, je suis dans l'impossibilité de répondre à l'arrière marseillais.

Pibarot : "Nous revenons de loin"

Dans le vestiaire adverse, on a le sourire. Les joueurs s'inquiètent, surtout des résultats obtenus par Nîmes, Nice et Reims. Quant à l'entraîneur Pibarot, il nous dit simplement (et calmement) : "Nous revenons de loin".

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