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Résumé Le Provencal

du 28 septembre 1959

 

ALES et BRAHIM se déchaînent en seconde mi-temps

et l'O.M. est battu (3-1 après avoir dominé pendant une heure)

(D'un de nos envoyés spéciaux : Maurice FABREGUETTES)

ALES - Sans doute le football est-il un jeu collectif et nous serions les derniers à nier, voire même à discuter, l'importance de la stratégie ou de l'application des consignes données par l'entraîneur.

Mais il ne faut pas non plus oublier qu'une équipe est faite de onze joueurs et que la classe ou la réussite d'un seul de ces joueurs peut être déterminante pour le résultat d'une partie.

C'est précisément le cas de cet Alès-Marseille

Sur le plan collectif, les deux équipes ont fait sensiblement jeu égal, avec des moyens et des méthodes très différentes, empressons-nous de le dire. Mais c'est Brahim qui a fait pencher la balance en faveur de l'Olympique Alésien.

La classe et la réussite de celui que les Bizontins avaient surnommé "Tatum" n'enlèvent d'ailleurs rien au mérite de ses coéquipiers, car à quoi servirait-il de marquer deux buts, même géniaux, si on en encaissait cinq ?

MARSEILLE domine et marque

Mais revoyons comment les choses se sont passées, sur ce terrain de la Prairie, dont le gazon excessif et les bosses mériteraient un sérieux coup de niveleuse.

Ajoutons cependant que le stade alésien a été, il y a un an, à peine, ravagé par les inondations, ce qui explique et excuse en grande partie l'actuelle médiocrité de sa pelouse.

Donc, l'Olympique de Marseille, fort d'une supériorité collective, surtout marqués au centre du terrain, fut généralement maître du terrain en première mi-temps.

Les Marseillais opéraient le plus souvent par petites passes précises, auxquelles répondaient de longues ouvertures des Alésiens, qui n'arrivaient pas à tromper la vigilance des excellents Molla et Bruneton.

On notait, du côté des visiteurs, le bon travail fourni par Leonetti, Eschmann et Peri, tandis que, en face, seuls la défense et Brahim donnaient entière satisfaction.

L'OM marqua un but à la suite d'un loupé de Szeremata, dû essentiellement à un faux rebond du ballon sur une motte d'herbe. But sans doute heureux, mais qui reflétait assez exactement la supériorité des Marseillais qui, dans l'ensemble, faisaient honneur à leur place de premiers.

Un but psychologique...

et deux exploits de TATUM

En seconde mi-temps, Léonetti, légèrement touché, et Eschmann accusant la fatigue de ses généreux efforts de tout un début de saison, Alès, dont les deux demi-ailes Delset et Szeremeta jouaient beaucoup mieux, se mit à dominer à leur tour.

On crut cependant, jusqu'à la 63e minute, que la défense marseillaise était capable de protégé son avantage d'un but jusqu'au bout.

C'est alors que Fischbach commit une erreur de jugement et ce fut l'égalisation.

Ce but, aussi heureux que le précédent, n'était toutefois pas injuste, car il récompensait une supériorité alésienne de masse.

Psychologiquement, cette égalisation, longtemps espérée par les supporters cévenois, mais qui se faisait attendre, transforma totalement la physionomie de la partie.

Les Alésiens se ruèrent à l'assaut des buts marseillais et c'est à ce moment qu'en deux minutes Brahim réussit deux exploits individuels qui mirent littéralement l'O.M. k.o.

Le premier but de Brahim, une reprise d'au bond à au moins 1h50 du sol, relevait, c'est le cas de le dire, de l'acrobatie pure. Détente et souplesse. Le second, un passage en slalom à travers toute la défense marseillaise, Fischbach y compris, était de la haute école.

Les Marseillais, dont l'excellent moral est à souligner, ne baissèrent pas les bras pour autant, et un tir de Boulle et un autre de Molla en fin de partie vinrent prouver leurs velléités offensives.

Mais il était trop tard et l'Olympique d'Alès grâce surtout au punch de Tatum Brahim, venait de remporter une victoire que personne ne songeait à lui contester.

Un bon match de l'O.M.

Ainsi se terminait cette partie qui valut davantage par l'engagement total des vingt deux joueurs que par la qualité de son jeu.

Mais il est important de faire remarquer que la partie se disputa sur un rythme toujours très rapide et que l'état du terrain nuisit passablement à la précision des passes. L'O.M. bien que vaincu, a produit l'impression de pouvoir remonter en première division dès cette saison.

C'est dans l'adversité que l'on juge le mieux une équipe et il nous ait apparu, à la Prairie, que l'O.M. par son moral et l'ensemble de ses qualités physiques et techniques, disposait de suffisamment d'atouts dans son jeu pour se maintenir dans le peloton de tête jusqu'au bout de la course.

Bruneton et Molla furent les deux meilleures Olympiens sur l'ensemble de la partie. Mais Leonetti, Eschmann et Peri, furent excellents en premières mi-temps et Oliver, s'il n'eut pas sa réussite habituelle, eut tout de même le mérite de ne jamais abandonner le combat.

Les deux ailiers eurent la mauvaise chance de jouer contre deux arrières qui leur furent supérieurs en vitesse de course et Ramon et Bobik, bons en début de partie, souffrirent un peu quand l'attaque alésienne se déchaîna.

Fisbach ne commit qu'une faute, mais une faute capitale.

Le réveil de l'Olympique Alésien

L'olympique Alésien avait, lui absolument besoin de cette victoire. Il obtint grâce à la générosité de toute son équipe, jouant constamment et résolument l'offensive, une offensive peut être brouillonne par instants, mais qui, en définitive, fut payante.

Nous avons déjà assez dit de bien de Brahim pour ne plus avoir à y revenir.

Après lui, nous accorderons la mention Très Bien à Palazzo, redevenu impérial, et aux deux arrières Hermann et Zapata, qui eurent le très grand mérite de tenir leurs ailiers en respect.

Mallet fut très sûr, comme d'habitude, tandis que Szerelets et Delset se reprisent bien en seconde mi-temps.

Quant à Sekou, Wilson et Kaelfi, ils confondirent souvent vitesse et précipitation. Mais quelle attaque dynamique aura Alès si ces joueurs réussissent, dans un proche avenir, à discipliner leurs actions et leurs dons !

Albertin, au contraire, pêcha, lui, par excès de timidité, un mal dont il devrait pourtant se guérir assez facilement.

Voici donc l'Olympique Alésien reparti vers les sommets du classement. Il ne tient qu'à ses joueurs de s'y maintenir.

 

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Un but de PELLAZZO (65e minute)

et l'espoir changea de camp...

(De notre correspondant alésien Maurice LAURENT)

ALES - Il y avait beaucoup moins de monde qu'on était en droit d'espérer, dans le stade de la Prairie, inondé de lumière, quand M. Carite appela les deux équipes sur le terrain. Les vendanges qui battent leur plein dans la région, la corrida de Nîmes. Le meeting politique du Martinet... constituèrent, en effet, une lourde concurrence pour ce match dont on attendait beaucoup et qui fini, d'ailleurs, en grande partie, ses promesses.

La partie débute à toute allure, c'est Boulle qui se montre le plus dangereux en reprenant de volée un centre de Durand mais son tir passe au-dessus.

BOULLE ouvre le score

Mais ce n'est que partie remise en effet, à la 5e minute, sur un centre d'Eschman que Leonetti alerte avec à propos. Széremeta et Boulle se précipitent, un faux rebond prive l'Arlésien de la balle dont le Marseillais se saisit pour battre Mallet, pris à contre pied.

O.M. : 1 - O.A. : 0

La réplique ne se fait pas attendre et Sekou est à deux doigts de marquer, mais Bruneton l'arrête avec à-propos.

Un tir d'Oliver est bloqué, ensuite, avec brio par Mallet.

Le jeu est toujours aussi rapide et la balle voyage d'un camp à l'autre, sans avantage marqué pour aucun des deux antagonistes.

A la 19e minute, Durand s'échappe et décroche un tir que Mallet pare sans bloquer, mais se reprend à temps pour dégager. C'est au tour de Fisbach de briller sur un shoot d'Albertin d'abord, en enlevant la balle à la barbe de Sekou ensuite.

Les visiteurs sont souvent dangereux, mais la défense alésienne fait bonne garde et ne commet aucune faute.

Le premier corner de la partie se situe à la 23e minute. C'est Hermann qui le concède, Eschman le sert avec précision, Bruneton reprend mais Mallet intercepte brillamment et dégage.

Peu après, un second corner est accordé aux Marseillais, Mallet intervient à nouveau avec sûreté.

Durant les dernières minutes de cette première mi-temps, Alès fait le forcing et les défenseurs phocéens sont à l'ouvrage ; ils s'en sortent d'ailleurs à leur honneur.

La mi-temps survient sur le score de 1 à 0, qui reflète imparfaitement la supériorité d'ensemble que les Marseillais manifestèrent sur leurs adversaires durant cette période.

Deuxième mi-temps

La physionomie du débat évolua après la pause. Les Arlésiens bien enlevés par Brahim, imposèrent un rythme toujours plus rapide et le résultat ne tarda pas à se manifester.

Fisbach fut de suite alerté mais se tire d'affaire à son avantage. Ce fut Delcet, cependant, qui concéda le premier corner de la seconde mi-temps, Khalfi, replié éloigna le danger.

C'est à la 52e minute qu'Alès obtint son premier corner, Albertin le servit derrière la ligne ... et récidive, peu après sur une seconde balle de coin, concédée par Bobick.

ALES gagne en deux minutes

Les Alésiens font, à présent, feu de tout bois et le but chauffe pour eux. Le voici enfin !

A la 3e minute, Pelasso, qui s'est intégré dans la ligne offensive locale, lobe adroitement Fisbach, sorti quelque peu inconsidérément de sa cage. La balle roule au fond des filets, sous un tonnerre d'applaudissements.

Les deux équipes sont à égalité.

Le temps de remettre en jeu et voilà de nouveau le camp marseillais en danger. Sekou centre devant Molla qui ne peut intercepter la balle dont Brahim se saisit et d'un drive judicieux, marque imparablement.

Alès 2 - O.M. 1

Dès lors, la partie se déroule dans l'ambiance des grands jours. Les Marseillais ne s'avouent pas battus et un tir d'Eschman passe de peu à coté. Khali réussit ensuite un but qui est refusé pour hors-jeu (74e).

Une attaque menée par Boulle va loin. Hermann déséquilibre l'ailier visiteur, avant de pousser la balle en corner. C'est Pelazzo omni-présent en défense qui dégage.

Le bouquet final de BRAHIM

A la 76e min., servi par Szremetta, Brahim s'en va sur la droite, feinte deux adversaires et dans sa foulé, décoche un tir fulgurent contre lequel Fisbach ne peut rien.

Alès 3 - O.M. 1.

Le sort en est jeté, Alès va gagner la partie. En effet, malgré les efforts méritoires des Marseillais, qui se dépensent sans compter, dans l'espoir de réduire la marge, les défenseurs alésiens toujours bien groupés, font front avec autorité et conservent, jusqu'à la fin, l'avantage acquis.

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LE FIL DU RASOIR

par Louis DUPIC

Entre une victoire et une défaite, il n'y a bien souvent, pour tomber de l'une dans l'autre qu'à franchir une cloison aussi mince que le fil du rasoir... Ceci dit en m'excusant auprès de Somerset Maugham qui parlait lui, de l'amour et de la haine et non du football...

Jamais mieux qu'au stade de la Prairie, on ne put voir les deux visages de deux équipes, et les deux faces de la pièce symbolique qui lancés en l'air pour une durée d'une heure et demi décide en retombant bien à plat de la victoire ou de la défaite.

Pendant quarante cinq minutes, la pièce offrit aux quatre mille spectateurs - au fait où vont donc les Alésiens le dimanche ? - la face qui portait, gravé, le nom de l'O.M.

Sur la lancée de leurs six victoires consécutives, les équipiers au maillot blanc jouèrent en leaders qu'ils étaient.

Oh ! Ce n'est pas qu'Alès ne donnait pas la réplique, mais tout était pour l'O.M. Technique, placement, précision et chance, puisque les visiteurs obtenaient un but sur une faute grossière et qu'un contre favorable à Fischbach opposé au noir Sekou...

Au repos les visages des quelques dizaines de Marseillais présents reflétaient la plus parfaite sérénité. L'O.M. allait gagner ce match.

C'était faire injure au dieu des batailles qui insuffla aux locaux toute la hardiesse, l'inspiration qui leur manquait.

Les attaques marseillaises cessèrent d'affoler la défense au maillot rouge... et la cavalerie foncée des mineurs, noblesse oblige, se déchaîna.

Malgré tout, la pièce, en l'air, nous montrait toujours la face de l'O.M. jusqu'au moment où le destin, maléfique pour Alès à la 5me minute, se montra particulièrement méchant pour les visiteurs en faisant aboutir jusque dans leurs filets une balle absolument anodine envoyée par le demi-centre Palazzo, sans intention préconçue.

Nous étions à la 65me minute et la pièce offrait maintenant son tranchant... et pas pour longtemps car, deux minutes plus tard, l'affaire était dans le sac.

Alès virevoltait, courait, stoppait, tandis que les jambes marseillaises devenaient de plomb. Maintenant, tout était pour Alès... même les montants et la transversale.

C'en était trop pour l'O.M. qui n'était d'ailleurs plus leader, puisque Nantes était en train de gagner à Besançon.

Et l'on me dirait que Nantes marquait des buts au moment même où l'O.M. en encaissait, que cela ne m'étonnerait pas...

Le maillot jaune quittait lentement es épaules des Marseillais pour aller se placer sur celles des Maritimes... pendant que la pièce tournait en l'air.

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LUCIEN TROUPEL : "Ah! Si en première mi-temps !"

ALES - Tandis que M. Zaraya retrouvait son visage des mauvais jours, Lucien Troupel analysait calmement la situation : "Il est inconcevable que nous ayons fait cavalier seul pendant à peu près une heure et que nous perdions 3 à 1 !

"Nous avons perdu par notre faute une belle occasion de vaincre en n'appuyant pas assez nos actions au cours de la période où nous étions les maîtres du jeu."

"Peut-être nous sommes-nous plus fatigués jeudi contre Sète qu'Alès, qui à "laisser courir" à Rouen.

" Et puis le facteur moral est entré terriblement en jeu. Nous nous sommes marqué un but qui nous a coupé les jambes alors qu'il les faisait retrouver à nos adversaires ! C'est le football !

" Mais l'équipe a fléchi dès le moment ou Léonetti fut touché et, par-là, moins efficace dans son action qu'en première mi-temps"!

Mr Sadoul :

"Nous n'avons pas une très grande équipe, mais vous voyez qu'elle est capable de se déchaîner .... Pour moi, notre succès est très équitable, car les deux premiers buts s'annulent..."

Marcel Tomazover :

"Le but marqué par Pellazzo fut le tournant du match... Il redonna des ailes à nos hommes tandis qu'il sapait le moral des Marseillais".

Pellazzo :

"Après la lourde défaite subie à Rouen à cause d'énormes erreurs défensives, ce succès est tout à fait le bienvenu pour nous remettre en course à tous les points de vue !".

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(Photos : Collection personnelle Norman Jardin)

 

 

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