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RED STAR 2 - 2 (2 - 2) OM

Le président de l'Olympique de Marseille, Marcel LECLERC, était souvent en conflit avec le Groupement (ancienne Ligue Professionnelle). En effet la rencontre initialement prévue le 09 novembre 1968 fut annulée car l'OM devait jouer 3 jours plus tard son 8ème de finale de Coupe d'Europe contre le Dynamo de Zagreb. L'OM et le Red Star se mirent d'accord pour jouer ce match en retard le 11 janvier après la trêve, mais le Groupement fit pression sur Mr ZENATTI (Président du club audonien) pour changer cette date. En effet pour que ce match ait lieu à la date fixée par le Groupement (28 décembre) il a fallu un revirement de M. ZENATTI. Il avait le 12 décembre, par écrit, donné son accord au Groupement et à l'O.M. après avoir demandé à M. LECLERC un chèque de 20 000 francs sur la future recette pour lui assurer sa fin de mois, pour que la rencontre ait lieu le 11 janvier. ZENATTI expliqua que son geste provenait du manque de discrétion de LECLERC qui avait fait publier dans son journal spécialisé l'information (But) concernant l'avance faite sur la future recette. "Marseille assure les fins de mois du Red Star".

Le président olympien répliqua : "C'est la trêve, tous nos professionnels sont en congé, certains ont retenu leurs billets d'avion comme Magnusson, Skoblar, Joseph. d'autres ont loué avec leur famille ... Dans ces conditions nous présenterons notre équipe d'amateur". La presse ainsi que les autorités du football s'indignèrent de cette réponse, la rencontre fut maintenue et le président olympien fit monter son équipe réserve à Paris, qui évoluait en division d'honneur (avec Casolari et Lopez) pour jouer ce match. Ce fut le gag du match nul qui plaça les dirigeants du Groupement dans une position ridicule. Non par la décision du président. LECLERC mais par le magnifique comportement de douze joueurs amateurs qui ont pour le football une véritable passion et se sont moqués de la "cuisine" des dirigeants, en transformant le présumé canular en un match sérieux et agréable.

Voici l'article de Francis Le Goulven, rédacteur à Miroir du Football. Une analyse avec un peu de recul, par rapport à un quotidien, mais assez sévère sur la qualité du jeu produite par le club de Saint-Ouen.

"Les portes des vestiaires du Red Star sont restées désespérément closes le dimanche 28 décembre. Pourquoi interdire aux journalistes le droit à l'information d'autant plus que l'équipe parisienne qui se trouve sous la menace de la lanterne rouge, venait, en mettant son calendrier à jour, d'obtenir le match nul (2-2) devant l'Olympique de Marseille détenteur de la Coupe de France ? Tout simplement parce que l'exploit provenait des Marseillais dont l'équipe de division d'honneur du Sud-Est venait de partager les points avec les professionnels du Red Star et de manquer la victoire à 4 minutes de la fin et bien avant quand son 12ème homme Bertelone que venait de remplacer Casolari manqua une occasion en or par excès de précipitation et sans doute parce qu'il ne s'attendait pas à voir la défense d'un club de l'élite aussi aisément mystifié.

Le Red Star évitait une humiliation totale mais l'année se terminait par un gag digne d'Helzapoppin qui montre l'anarchie dans laquelle se débat le football français, au moment précis où certains vantent l'autorité de sa direction. Si 3 000 spectateurs assistèrent à cette confrontation apparemment déséquilibrée, c'est parce qu'ils considéraient dans leur majorité une défaite du Red Star comme possible, compte tenu de la faiblesse tactique et de l'absence de conception de jeu de l'ensemble audonien sous la férule de Ladislav Nagy

Ils avaient vu juste puisque le Red Star fut en deux circonstances mené à la marque et ne dut qu'à un penalty extrêmement sévère de ne pas connaître les affres de la défaite.

Sur le terrain on vit qu'il n'existait aucune différence sur le plan technique entre les deux équipes. On peut même dire que dans le domaine de la clairvoyance l'ex-professionnel Casolari dur supérieur à ses adversaires tout en n'atteignant pas le niveau de l'ancien international junior Chaumeton distributeur intelligent.

Face à la domination brouillonne des audoniens symbolisée par Herbet, international récent et qui figurait dans la liste des 22 fournie avant la rencontre contre la Suède, les contre-attaques marseillaises amenèrent des occasions de but plus nombreuses et plus nettes.

Ce fut le jour de gloire de l'ailier gauche Di Caro qui marqua les deux buts de son équipe. Le premier en reprenant de plein fouet un centre de Casolari démarqué à la suite d'un une deux effectué sur l'aile droite avec Chaumeton. Le second, au terme d'une course de 50 mètres au cours de laquelle il élimina quatre adversaires par des dribbles successifs à faire pâlir Magnusson soi-même, au point qu'un confrère chantre de l'O.M. s'écria " Voilà ce que Magnusson n'a pas pu faire cette saison". Le contrat du Suédois arrivant à expiration à la fin de la saison nous avons bien lu dans un hebdomadaire bien informé des histoires marseillaises que Di Caro était appelé à le remplacer. Di Caro a 20 ans. Il est originaire de Salon-de-Provence. Il a fort belle allure. Il court très vite et fait penser à Georges Dard qui, durant les années 1940, fut le parfait symbole de la devise de l'O.M. "Droit au but", qui demeure une manière de voir du public marseillais nullement périmée à ses yeux. Si par son efficacité Ange Di Caro, véritable démon sur le terrain de Saint-Ouen, a bénéficié du maximum d'éloges, beaucoup de ses camarades ont démontré qu'il ne déparerait pas l'équipe professionnelle, s'ils n'avaient pas le handicap d'être natif de la région, de n'être ni vedette en suède, en Yougoslavie ou même à Cherbourg ...

A commencer par les fils des anciennes gloires marseillaises. Christian Delachet un gardien de but de 20 ans aux qualités de détente, réflexes, placement, indiscutables et qui dégage à la main aussi bien que son père, mais beaucoup mieux au pied.

Jean-Claude Scotti possède la belle technique de son prodige de papa, vainqueur de la Coupe de France à 17 ans, une sèche frappe de balle mais en raison d'une certaine lenteur, on peut penser qu'il utiliserait mieux ses qualités en tenant un poste plus en retrait.

Dans cette équipe de Marseille qui occupait au moment de son exploit la première place de son groupe en division d'honneur de la Ligue du Sud-Est, deux internationaux juniors de fraîche date confirment leur valeur. Il s'agit de l'avant-centre Chaumeton (19 ans) au registre complet qui excelle dans l'élaboration des actions et de l'arrière droit Yvan Piatti non seulement extrêmement difficile à passer mais habile à relancer le jeu.

A ces joueurs plus en évidence que leurs camarades, il faut ajouter le plus jeune, l'arrière central Bracci (18 ans), les demis Bodji (19 ans) et Galli (23 ans), l'ailier droit Carillo (19 ans) et le 12ème homme Bertelone (18 ans) qui doit peut-être à sa jeunesse ou à son entrée tardive dans une équipe en pleine euphorie d'avoir raté un but qui restera aussi célèbre sur le Vieux-port que celui manqué par Grumelon à Highbury qui aurait permis à la France d'être la première équipe à battre l'Angleterre sur son sol.

Enfin et selon un judicieux dosage, deux professionnels, le "bétonneur" Henry Lopez (29 ans) qui n'apparu pas diminué bien qu'il ait reçu quelques jours auparavant une décharge de plombs dans les fesses en chassant des voleurs à la tire qui venaient de dévaliser sa voiture et Jacques Casolari (27 ans) toujours aussi accrocheur mais souvent clairvoyant pour le bonheur de ses jeunes partenaires. Quand on a vu évoluer tout ce monde on s'étonne que l'entraîneur marseillais Mario Zatelli ait pu récemment prétendre qu'il manquait de réserves. Les amateurs marseillais ont prouvé le contraire même si le Red Star a montré son incapacité à s'organiser, à se départir d'un jeu brouillon..

 

Ange Di Caro sautant de joie après son but.

Debout : Delachet, Galli, Lopez, Piatti, Bracci, Bodji

Accroupis : Carillo, Chaumeton, Di Caro, Casolari, Scotti

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