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L'adieu aux larmes de Jean-Pierre Papin

OM-Cannes : 25 avril 1992 : avant OM-Cannes, son dernier match, son dernier but, Jean-Pierre Papin annonce son départ pour Milan sur la pelouse du Vélodrome

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En ce samedi 25 avril, le public du Vélodrome découvre que Maradona se prépare sur la pelouse avant OM-Cannes. Plus exactement, un homme vêtu du maillot bleu ciel du Napoli, floqué du N.10. C'est l'arbitre Claude Bouillet, qui dirige sa dernière rencontre avant la retraite et qui a choisi Marseille pour tirer sa révérence et un maillot offert par Diego pour s'échauffer.

Mais ce ne sont pas pour ces adieux au terrain que tout le monde retient son souffle. Un autre homme vêtu d'un maillot d'un bleu plus soutenu, avec trois grosses bandes blanches qui courent sur l'épaule vient à son tour et il va se planter au milieu de ce terrain où il a marqué tant et tant de buts, connu et offert tant de joie. Le départ de Jean-Pierre Papin au Milan AC est un secret de Polichinelle, mais on ignore qu'un an plus tard, les deux clubs se retrouveront en finale de la Ligue des champions. L'émotion est à son comble. "Je voulais enregistrer un message vidéo, mais le Boss m'a dit : 'Non, tu prends le micro et tu leur parles directement'". Vingt-huit ans plus tard, Jean-Pierre Papin se souvient de tout. Son discours, il ne l'a pas préparé mais il laisse parler son coeur, avec une voix chevrotante, au bord des sanglots.

"Si je m'en vais là où je vais maintenant, je vous le dois et je tiens à vous dire merci du fond du coeur ; je ne vous oublierai jamais. Je vous dois tout, j'ai toujours joué franc-jeu avec vous et c'est pourquoi j'ai tenu à réserver le nom de mon futur clubau public marseillais. Ce sera le Milan AC et je remercie Bernard Tapie de m'avoir donné la possibilité de réaliser mes voeux. Maintenant, nous allons tout faire pour apporter à Marseille un quatrième titre consécutif. "

JPP est alors le Ballon d'Or en titre, le seul encore à ce jour remporté par un joueur dans un club français. Et on est loin de se douter que dans les rangs d'en face, ceux de l'AS Cannes, le jeune milieu offensif marseillais, qui sera remplacé à la mi-temps par Franck Durix, sera le prochain Ballon d'Or français, mais sous le maillot de la Juventus. Il s'appelle Zinedine Zidane, ne fêtera ses vingt ans que dans deux mois, et reste anonyme pour le grand public.

Entre le jeune attaquant tout fou et l'homme qu'est devenu JPP, il y a un monde. Une vraie vie. Sur le terrain et surtout en dehors. "J'étais un babache comme on dit dans le Nord", énonce-il lui-même dans notre livre "Grands Buteurs de Marseille", aux Éditions Gaussen. Un "babache" en ch'ti, c'est un benêt. Mais entre 1986 et 1992, il a eu le temps de mûrir et il n'était pas si babache que ça car il a eu l'intelligence d'écouter les conseils d'Alain Giresse, Michel Hidalgo, Gérard Banide, Klaus Allofs, il a rencontré Florence, s'est remarié, il est devenu capitaine de l'OM et a développé avec Bernard Tapie une amitié teintée d'amour quasi filial. Avec ses rebondissements passionnels comme il le raconte encore.

"Après la finale perdue à Bari, Bernard Tapie nous a jetés, nous disant que tout le monde pouvait partir, qu'il ne retenait personne. Trois jours après, nous jouons contre Rodez en coupe et j'annonce avant la rencontre, sur TF1, que je vais partir. Le Boss me chope dans le vestiaire, me hurle dessus et me dit que ce n'est pas la peine de me déshabiller, parce que je ne joue pas. Je lui dis d'avoir plus de respect pour ses joueurs, je passe mon brassard, je sors m'échauffer et il me prend par l'épaule en me rappelant que je suis comme un filspour lui. Je marque trois buts, je bats le record du monde de prise de douche et de rhabillage, je m'en vais et au moment où je franchis la porte vers l'extérieur, un garde du corps m'attrape par le bras et me dit : 'Le Boss veut te voir'. Là, il m'a parlé, tourné, retourné, convaincu et au bout du compte, nous annoncions ensemble que je restais un an de plus". Jean-Pierre est hilare quand il raconte cet épisode. "Ça s'est joué à un mètre..."

Mais déjà, un soir, le téléphone a sonné dans la jolie villa près de Célony. Silvio Berlusconi a appelé JPP pour lui manifester son intérêt. Cette saison 1991-92 sera donc sa dernière à l'OM car Bernard Tapie tiendra évidemment sa promesse de le laisser partir. Alors, à 20h25, quand il pénètre sur la pelouse, il ne peut réprimer une petite larme, effacée d'un revers de manche. Il va se battre une dernière fois.

Car on ignore encore que c'est son dernier match. Il reste encore une ultime journée à Lille, mais Raymond Goethals alignera surtout des réservistes, préservant ses titulaires pour la demi-finale de coupe de France à Bastia, le 5 mai. Qui n'aura jamais lieu.

Il faudra attendre 70 minutes pour voir Papin signer son dernier but en blanc. Un centre de Jocelyn Angloma, une reprise de la tête et, derrière la cage de Michel Dussuyer, un petit blond bondissant crie "Papa ! Papa !" ; c'est Christopher, le fils du natif de Boulogne-sur-Mer, qui assiste aux adieux de son père sur la pelouse. Il restait à Didier Deschamps de marquer le deuxième, lui aussi de la tête, à Pascal Olmeta de partir dans une série de dribbles pour rigoler un peu, à Chris Waddle, qui relevait de blessure d'entrer quelques minutes en jeu pour participer à la fête de son pote. Et c'était fini...

"J'éprouve vraiment une immense fierté d'avoir porté ce maillot pendant six ans.Je ne remercierai jamais assez Bernard Tapie."Les derniers mots de JPP étaient prémonitoires : "Revenir ici avec le maillot du Milan AC ? Ce serait vraiment dur..."

C'est à Munich qu'il retrouverait l'OM en rossonero. Battu en finale, sonné, malgré les consolations de son ex-président mais toujours ami. Et un rêve : revenir un jour à l'OM. Rêve jamais réalisé depuis vingt-huit ans.

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Fiche joueur Jean-Pierre Papin >>>