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Résumé Le Provencal

du 13 octobre 1958

 

LENS inscrit deux buts dans chaque mi-temps

et bat l'O.M. (4-1)

(D'un de nos envoyés spéciaux : Jean Peyrache)

LENS (par téléphone) - Le temps est gris au stade Bollaert, pendant que les amateurs de Lens et de Noeux les Mines s'expliquent pour le compte du championnat de France des "purs".

Inexorablement, le destin de l'équipe qui compta Raymond Kopa dans ses rangs, se dessine sur le cadran lumineux.

La levée de rideau est toujours un lever de rideau. Le public est indifférent lorsque Lens marque son quatrième but.

Est-ce un présage ? Au-dessus du chiffre 0, sont inscrites, bien détachées au tableau d'affichage les initiales O.M...

Dans la tribune centrale, pourtant, et juste derrière nous, deux hommes sont aux prises, verbalement, comme au Stade Vélodrome de Marseille, mais (nous n'apprendrons là rien à personne) avec moins de volubilité.

Nous entendons :

"Théo abattu Rennes à lui seul l'an dernier..."

L'un des deux supporters regrette Théo qui justement... est devenu Rennais.

À Lens comme à Marseille, il y a les partisans et les détracteurs de la politique pratiquée dans le domaine du sport ou ailleurs.

Le Racing Club local n'inspire pas à tout le monde la même confiance. Mais on espère quand même que contre l'O.M., authentique lanterne rouge du Championnat, il va obtenir une victoire qui rentrera dans la norme des choses.

Les amateurs de Noeux les Mines ont succombé par 5 buts à 0, et le chiffre 5 a disparu du tableau d'affichage.

Est-ce un autre présage, heureux celui-là pour l'équipe du tandem Zaraya - Maurer ?

7.094 spectateurs ont laissé aux guichets la recette de 1.656.350 francs.

L'O.M. donne le coup d'envoi à 15 heures, avec Eschman et Marcel, respectivement inters droit et gauche, Oliver et Leonetti opérant derrière eux avec le numéro 4 et 6.

C'est assez déroutant si l'on se rapporte à l'équipe annoncée.

Le premier tir orthodoxe et l'oeuvre de l'avant-centre lensois Oudjani, servi par son ailier Deloffre. Et la minute suivante, Marcel répond par une reprise de volée en chandelle, qui va bien au-dessus.

À la 6e minute, Gransart concède carner à Stievenard, mais alors que l'O.M. craignait un "départ à tout casser" de son opposant, réputé jeune et entreprenant, il n'a pas réellement été en danger encore pressant.

À la 10e minute, sur faute d'Oliver contre Lafranceschina, à la limite de 17 mètres, le coup franc qui s'ensuit est très bien donné par Chiarelli sur la tête d'Oudjani qui marque. Mais il s'était servi de la main.

Fischbach, entré en contact avec l'avant-centre lensois, boîte. Mais il y a plus de peur que de mal.

Molla concède un autre corner à la 13e minute, puis un centre shoot de l'Hédiart est détourné avec une certaine dose de chance par Clément.

La vista de Fischbach

A la 16e minute, Fiori se mue en ailier. Il sert Deloffre, qui centre sur Stievenard. La reprise de ce dernier est renvoyée par Fischbach remarquable de vista.

Sur le renvoi, l'O.M. obtient un corner. Mais Lens repart, et Oudjani, qui a hérité d'un mauvais renvoi de Célestin Rliver, fusille Fischbach. Ce dernier plonge et détourne à son tour en corner.

La pression lensoise se maintient, et (21e minute), Fischbach plonge dans les pieds de Raspotnik. Il reste étendu comme à Strasbourg.

Fausse alerte, pourtant. Mais deux minutes plus tard, le gardien marseillais accroche avec peine un centre shoot venu de la droite.

Fischbach souffre visiblement, et avec lui l'O.M...

25me minute : Lafranceschina

marque

Pour ajouter au désarroi du goal Jean-Jacques Marcel et Leonetti abandonnent sur mésentente, une balle à Deloffre, lequel à la 25e minute, sert Lafranceschina qui s'avance et, de 15 mètres, ouvre le score pour les gueules noires.

Le dénouement est venu plus tard qu'on ne le redoutait dans le camp marseillais, puisque, rappelons-le, on y attendait un départ rapide des lensois. Ce dénouement est venu tout de même.

Est-ce le but psychologique, celui qui va abattre les énergies ?

Un centre shoot de Leonetti, difficilement contrôlés par Clément, à la 31e minute, est le tir avant-coureur d'une réponse négative.

Touré égalise

L'O.M. ne baisse décidément pas les bras.

À la 36me minute, (aide-toi le ciel t'aidera) un service malheureux de Deloffre à Hédiart encourage l'ailier à s'enfuir à toutes jambes et à donner la balle comme sur un plateau à Toure.

L'avant-centre attire Clément et égalisa à ras de terre en coin, sur la droite du portier lensois.

C'est à refaire...

Deux phases identiques

un autre but de Lafranceschina

L'attaque locale obtient un corner. Elle s'obstine. Elle sollicite surtout Stievenard et Lafranceschina.

À 3 minutes du repos, le premier sert le second dont le tir manque de peu l'encadrement des buts marseillais. Le public applaudit fort l'action. Si fort qu'à peine la remise en jeu effectuée par Oliver, la même phase se reproduit, mais cette fois le tir de l'inter droit artésien part avec un effet extraordinaire et malgré un plongeon, Fischbach est battu pour la deuxième fois.

Il y a 44 minutes que l'on joue.

Le score de 2 à 1 pour Lens sera celui de la mi-temps.

L'O.M. n'a, en somme, a fait mauvaise contenance pendant cette première partie du match, mais il faut dire, en toute sincérité, que Lens n'a pas affiché une maîtrise digne des plus grands éloges.

On est loin des équipes au maillot "sang et or" qui marquèrent le football français de leur empreinte.

Pour tout dire, l'O.M. conserve intacte ses chances de refaire le terrain perdu.

La seconde mi-temps débute par une autre intervention de Fischbach.

Dès la remise en jeu, en effet, Lafranceschina sert Chiarelli qui prolonge sur Stievenard. L'ailier se rabat vers les buts marseillais, mais Fischbach sort et du pied détourne en corner.

L'O.M. se rebiffe et Hédiart servi par Marcel, puis Leonetti décoche deux tirs valables stoppés par Clément.

Le même Clément plonge dans les pieds de Touré qu'avait servi Leonetti, mais l'avant-centre était hors-jeu.

Voilà bien trois actions qui auraient pu être payantes, mais à la 52me minute, Lafranceschina met à son tour Fischbach dans l'obligation de bloquer.

Le shoot meurtrier d'Oliver

À la 55me minute, Leonetti est stoppé à la limite de la surface. Le coup franc tiré par Oliver touche le demi Piatzak en pleine tête.

Ce dernier est transporté derrière la ligne de but.

Une combinaison Marcel - Hédiart - Touré est vouée à l'échec, parce que le noir avant-centre rate de quelques centimètres son coup de tête.

Le match perd, semble-t-il de son intérêt.

Lens, pourtant n'a pas encore gagné, ce qui laisse entendre que l'O.M. n'a pas encore perdu.

Oliver le sait qui, à la 67me minute, reprend en position d'ailier gauche, une balle qui lui vient de Touré, mais elle échoue au-dessus la transversale.

Touré le sens aussi qui lance Eschman sur la droite et, après avoir récupéré le cuir, tire à ras de terre, Clément bloque.

Le calvaire de Fischbach

Puis Lafranceschina fait encore des siennes.

Sur l'une de ces actions, Fischbach sort, repousse la balle, mais il reçoit Stievenard sur le "paletot". Le gardien reste encore étendu. Son calvaire continue.

Il s'amplifiera encore à 75me minute, lorsque sur montée offensive de Fiori, le même Stievenard le battra pour la troisième fois.

Le sort en est maintenant jeté.

On note bien, à la 84me minute, un magnifique travail sur la gauche de Marcel qui sert Oliver, lequel inscrit un non moins magnifique but refusé pour hors-jeu douteux.

On assiste bien à une descente en force du même Marcel, l'énergie de l'international n'est pas récompensée.

À Oudjani le coup de grâce

Et l'O.M. boit le calice jusqu'à la lie, car à la 87me minute, Chiarelli sert Oudjani par-dessus la tête de Célestin Oliver.

L'avant-centre a le champ libre.

Il fonce et de 15 mètres donne le coup de grâce en inscrivant un quatrième et dernier but.

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Jusqu'à la 75e minute les chances

de l'O.M. furent réelles

LENS (par téléphone) - Une nouvelle fois, le stade Félix Bollard n'a pas été favorable à l'O.M. Et pourtant, le Racing Club Lensois n'avait pu encore bénéficier des services de Wisnieski, de Sowinski et de Bonvin qui de l'avis de l'entraîneur Michlowski devraient prochainement permettre à son équipe de jouer un rôle plus brillant dans le concert des clubs français de Division Nationale.

Mécontent, l'entraîneur nordiste était avec juste raison car, malgré le 4 à 1 réussi, sa formation n'a jamais donné l'impression de pouvoir s'élever au-dessus d'une honnête moyenne.

C'est bien ce qui est regrettable pour l'O.M., vaincu après avoir jeté dans la balance toute son énergie. Énergie à l'image de celle de Jean Jacques Marcel qui permit aux joueurs au maillot blanc d'atteindre la mi-temps avec des chances intactes, malgré un but de retard.

Fischbach : rentrée

prématurée !

Nous n'étonnerons personne en écrivant que Camille Fischbach fut un héros malheureux du match. Mais comme nous le craignons, il a fait une entrée prématurée.

Nous ne voulons rechercher aucune excuse à la défaite de l'O.M.car nous avons la conviction qu'un gardien valide n'aurait guère mieux fait que lui, sauf peut-être sur le premier but, alors qu'il groggy.

Cependant, dès l'instant où à la 21me minute, il resta étendu à la suite de son premier choc avec Raspotnik, chacune de ces interventions souleva la crainte du fatal accident.

Fischbach se plaignait, après le match, du troisième but accordé à Stievenart alors qu'il était parti hors-jeu sur le service de Fiori. Or, ce troisième but fut déterminant, car il se situe à la 75e minute.

Molla et Gransart :

mention bien

Si Alauzun fut rarement heureux dans son duel avec Deloffre, Molla et Gransart abattirent, en défense, de la bonne besogne.

L'arrière central notamment, sut très bien contenir Oudjani que l'on avait présenté comme un redoutable battant et qui, en fait, fut inférieure à Touré.

L'O.M., nous l'avons dit, s'aligna dans une composition assez inattendue, puisque Eschman et Marcel jouaient inters droit et gauche, tandis que, en définitive, Leonetti se vit confier un poste de demi-aile.

Un vide apparut souvent au centre du terrain et Lafranceschina put souvent évoluer dans cet espace libre.

Il ne faut donc pas trouver anormal qu'il se soit révélé comme le buteur du jour, puisqu'il fut l'auteur des deux premiers tirs victorieux.

Si l'O.M. n'avait pas éprouvé au départ une certaine crainte et même une crainte certaine, l'ancien Grenoblois aurait-il pu évoluer avec la même aisance ? C'est douteux.

De faibles ailiers

L'équipe au maillot blanc pêcha une nouvelle fois par son attaque.

En admire la bonne volonté d'Hédiart, la bonne volonté suffit-elle pour un ailier de Division Nationale ?

Le dernier en date des Olympiens couvre un terrain énorme, mais le rendement est bien faible. Hier, son pendant de gauche Ikonga, blessé au début du match dans un choc avec Fiori ne fut pas non plus dans le bain.

La faiblesse des ailiers de l'O.M. est un fait connu. Si l'on ajoute qu'Eschman ne réussit pas toujours ce qu'il entreprit et que Marcel eut surtout pour lui sa fin de match, jouée à l'arrache, on admet que la défense lensoise ait pu tenir le coup avec un minimum de dégâts.

Touré eut le mérite d'inscrire le but et Oliver n'était peut-être pas hors-jeu lorsqu'il réussit le second, qui lui fut refusé, sur service de Marcel.

Mais il était trop tard...

Peut-être qu'en donnant à Leonetti, le battant, une consigne plus offensive, les chances de vaincre auraient été plus grandes. Cette chance ne furent-elles pas réelles jusqu'à la 75e minute ?

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Les Lensois avaient découvert avant l'heure "H"

que FISCHBACH n'était pas rétabli

(D'un de nos envoyés spéciaux : André HATCHONDO)

LENS (par téléphone) - Il est des cas où en sport, fut-il professionnel, donc intéressé les acteurs rendent hommage à leurs malheureux adversaires.

Oui, les Lensois faisaient grise mine, après leur succès éloquent si l'on s'en rapporte au tableau de marque.

Michiowski, loin d'exulter, était catastrophé : "Mon équipe a mal joué !"

Le succès ne le consolait pas, des défauts de la cuirasse que la formation qu'il supervise, a manifestés tout au long de ce match.

Ses yeux bleus, fixés, son visage étonnamment basané chez un homme originaire de Pologne, son masque sévère, auraient pu appartenir à un entraîneur archi battu.

Intelligence d'un responsable se rendant bien compte une victoire sur X... ne signifie pas forcément victoire sur soi-même.

Pourtant, au bout d'un temps de réflexion, la volonté propre à sa race prit le dessus. Il se consola : "Bien sûr ça ira mieux avec la rentrée de Zunzack, Sowinski, Bonvin et Wisnierski..."

Il se mit subitement dans la peau de Maurer : "L'O.M. est l'adversaire le plus malheureux que je connaisse", nous dit-il avec un accent semblable à celui d'Elvire Popesco.

Et interrogea : "Enfin pourquoi donc les Marseillais ont-ils permis à Fischbach de jouer. J'ai observé ce pauvre garçon avant le match, au moment ou les joueurs échauffent leurs muscles. La première fois où il a levé les bras pour arrêter la balle, il a grimacé. J'ai compris que nous ne pouvions perdre le gain de cette rencontre".

Une autre question : "Pourquoi l'O.M. a-t-il adopté cette tactique défensive, avec Célestin Oliver comme 5me arrière ? Il a prouvé une fois de plus que le béton ne paie pas. Une attaque ne se passe pas impunément d'un battant comme Célestin.

Le chauve Fiori acquiesça.

Pendant que l'entraîneur lensois manifestait sa mauvaise humeur - au début de notre entretien - nous enregistrâmes une réflexion de Chiarelli a fait à voix basse, une pierre dans le jardin du menteur : "Il y a des gens qui ne sont pas contents. Tant pis pour eux. Nous avons gagné, voilà le principal.

Dans les parages des vestiaires le coeur de spectateurs se plaignait : "Un match indigne de la Division Nationale".

Football ton côté spectaculaire fout le camp renchérissait un quidam surexcité.

Nous n'avons pas encore parlé des vestiaires olympiens.

Ce n'était que lamentations... exprimées sous forme de bride de phrases, brides qui jaillissaient dans un silence qui n'était pas d'or. Vous connaissez les trams habituels et lancinants comme une liturgie de messe des morts : "L'arbitre, les juges de touche, la brutalité de l'adversaire, les Si et les Mais".

Fischbach pleurait comme un gosse. Il fallait une tape amicale d'Eschman, un mot réconfortant et plein de sollicitude Célestin Oliver, pour que le goal surpris par sa réaction d'enfance se redresse sur son séant, rectifia son dos courbé, au prix d'un effort visiblement douloureux, qui lui arracha une plainte et une grimace.

A notre question : "Est-ce votre dernière blessure qui s'est réveillée ?". Camille secoua la tête. "C'est un nouveau mal qui me tiraille les muscles du dos".

Traduisez : " Il s'agit en réalité d'une aggravation de son état qui n'était pas parfait avant l'heure".

Célestin Oliver claironnait : "Je n'étais pas hors-jeu pour le but qu'on m'a refusé. Je l'affirme..."

Nous réaffirmons tous aussi, tout comme les Lensois.

Il faut admettre pourtant que ce point n'aurait pas changé à la face des événements. Si le jugement du responsable de la touche n'avait pas été erroné.

Écrivons la conclusion sans tergiverser.

La situation dramatique de l'O.M. persiste, c'est là le malheur...

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OUDJANI, une mauvaise

affaire que l'O.M. a évitée

LENS - On ne peut pas dire que l'O.M. a eu la main particulièrement heureuse dans la réalisation de certains transferts pendant l'intersaison.

Ce qu'il y a de sûr c'est qu'il a été bien inspiré en ne s'attachant pas les services d'Oudjani pour un transfert d'un million.

Ce garçon a montré des qualités physiques appréciables au poste d'avant-centre, mais il gâche ses donc avec une inconscience complète. Il est vrai que Molla était dans un bon jour.

Par contre Lafranceschina - le Grenoblois pour lequel les responsables exigeaient 16 millions plus un joueur - a brillé de mille feux au sein de la formation Lensoise. Il éclipsa notamment Chiarelli... trop lent. On persiste à penser que l'ex-valenciennois est plus à l'aise au poste de demi-aile.

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