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Résumé Le Provencal

du 24 novembre 1958

 

LE RACING N'EST PAS TOMBE A MARSEILLE

L'O.M. part en trombe

Puis les remplaçants parisiens

Se révèlent et gagnent le match (2-1)

Ainsi donc, le vieil O.M. comme on l'appelle, sans qu'il n'y ait là rien de péjoratif, n'a pas battu le tout aussi vieux Racing Club de Paris, aujourd'hui plus pimpant puisqu'il occupe le poste de leader de Division Nationale, tandis que son rival de toujours ne parvient pas à abandonner la lanterne rouge.

Il y avait au stade vélodrome 28.054 spectateurs (ils laissèrent au guichet la recette record pour la saison de 8.032.270 francs) et nombre d'entre eux (une écrasante majorité certainement) s'étaient rendus dans la grande arène du boulevard Michelet avec l'espoir d'assister à la chute du géant de la capitale.

Un départ rapide de l'O.M.

Il vibrèrent dès le début grâce aux hommes que l'on savait les moins forts mais qui, à cause de cela, entamèrent le combat avec l'ardeur de ceux qui n'ont rien à perdre.

À peine Marcel et Pillard se fussent-ils heurtés en l'air (5me minute), ce qui valut à l'ailier parisien de se faire soigner pendant quatre minutes, à peine Bollini eut-il mis sur un montant un shoot qui sembla manquer de conviction et que Hartman reprit pour envoyer le cuir dans les bras de Péri (9me minute), l'O.M. se lança à corps perdu dans la bataille.

Tillon mis au-dessus (11me minute) un premier essai puis (13me minute), sur service très sec à ras de terre de J.J. Marcel. Touré, victime d'une obstruction de Marche, obtient un coup franc indirect. Il ne donna rien mais la balle voyageait devant Djolakian.

La minute d'après, sur centre de Vescovali, Tillon, puis, à deux reprises, Touré manquèrent franchement de réussite et Djolakian fut, par contre, très heureux de se saisir en plongeant du cuir juste sur sa ligne !

Un premier corner pour l'O.M. (20me minute), un long centre de Vescovali (22me minute), apparemment parti hors-jeu, permirent à Marche de dégager loin sur Guillot. Touche, remise en jeu et lamentable tir à côté de Cisowski qui ne sera pas bien brillant dans ce genre d'exercice.

23' : TILLON ouvre la marque.

Il fallait absolument que les Olympiens ouvrent la marque pour espérer continuer à faire figure honorable.

Tillon s'en chargea, la 23me minute, mais Leonetti servant Vescovali sur la gauche et le dit Vescovali, après une brève course, donnant à son tour très intelligemment la balle à son avant-centre, furent les instigateurs de cette action d'éclat.

On respira dans le clan de l'O.M. même, lorsque (34me minute) une combinaison Guillot - Hartmann, dangereux à l'extrême, se déroula jusqu'à proximité de Péri, car Marcel, remarquable, était là. L'arrière central servit directement Vescovali et Djolakian eut besoin de toutes ses ressources pour stopper sous la barre.

43' : MAGNY égalise

Le Racing ne s'affolait pas et l'O.M. paraissait s'endormir sur ses lauriers car, à la 43me minute, le demi parisien Magny se rendait maître au milieu du terrain, d'une balle qu'il conduisait jusqu'à 25 mètres de Peri et d'un tir croisé qui heurtait un montant, égalisait pour ainsi dire à la surprise générale...

Une deuxième mi-temps

parisienne

C'était dommage et la suite allait donner raison aux pessimistes... car il y avait !

La 2me mi-temps, en effet, fut parisienne...

En effet, l'O.M. obtint un grand nombre de corners. Il fallut, à la 53me minute, un retourner de Magny pour sauver, sur une tête de Touré, à la suite d'un de ces coups de pied de coin, puis (55me minute) Bollini n'eut que cette ressource pour stopper Tillon, mais, à la 54me minute, un départ en duo d'Ujlaki et Cisowski permit à Péri d'effectuer magnifique plongeon.

Le Racing se manifestait alors et Ujlaki donnait un premier avertissement à l'O.M. en inscrivant un faux deuxième but, car l'inter avait régulièrement poussé Marcel et M. Schwinte avait sifflé la faute.

61' : HARTMANN donne

la victoire au RACING

Cet avertissement fut suivi d'un autre, avec frais à la 61me minute.

Magny, le remplaçant, auteur du premier but victorieux, servit Hartmann, l'autre remplaçant, en position d'ailier gauche.

Ce dernier tenta sa chance mollement, plus mou encore fut le plongeon de Péri et le Racing se retrouva nanti d'un but d'avance !

Il devait le conserver jusqu'à la fin, malgré une demi-heure olympienne faite d'efforts désespérés qui allaient continuer à se matérialiser par des corners (six en tout).

À la 75me minute, Cisowski claudiquait et s'exilait à une aile. Trois minutes plus tard, Molla, Péri et Pillard sautaient sur une balle haute. Le goal s'écroulait, restait tendu et finalement regagnait le vestiaire, victime d'une fracture de la clavicule droite.

C'en était trop !

Oliver, avec le talent qu'on lui connaît, remplaça Péri et le Racing chercha surtout gagner du temps pour conserver sa victoire.

Il y parvint, mais cette défaite de l'O.M. n'a pas le même caractère que celle concédées à Monaco et à Angers. Elle est,, tout de même, moins déshonorante...

Jean PEYRACHE

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On attendait CISOWSKI et UJLAKI

et ce furent les remplaçants

qui frappèrent les deux coups

Le football est une éternelle boîte à surprise.

L'O.M. avait basé sa tactique défensive sur la neutralisation d'Ujlaky et de Cisowski. Le fameux tandem que nos excellents confrères parisiens voudraient tricolore.

Leonetti et Marcel, soutenus par Molla, devaient suffira à la tâche.

Ça c'était la théorie.

Elle ne pêcha que par un point ! l'illustre inconnu Hartman.

Lequel Hartman, bénéficiant une complète liberté de marquage, se permit tout simplement d'être le meilleur attaquant sur le terrain en première mi-temps.

Le premier coup vain de Magny

Mais il y eut pire encore : alors que l'O.M., en dépit d'une évidente infériorité technique au centre du terrain, se défendait plutôt bien que mal, le premier coup devait lui venir d'un autre inconnu encore plus illustre qu'Hartman : un certain Magny.

Cisowski paraissait lourd et maladroit, Pillard se faisait régulièrement boucler par Alauzun, Ujlaky jouait les hommes invisibles... et Guillot "n'en piquait par une", bref on s'acheminait vers la mi-temps sur un score de 1 à 0 en faveur de l'O.M., quand soudain un tir de 25 mètres de Magny vint heurter le poteau gauche, avant d'entrer dans la cage.

Ce tir, aussi inattendu que brutal devait porter un rude coup au moral de Péri, le héros de Nîmes et de Nancy.

Tant et si bien que le jeune gardien par la faute d'une colossale erreur de placement, était stupidement battu par un tout petit tir d'Hartmann au moment crucial du match.

Cette réussite de l'inter néo-pingouin venait confirmer que ce dimanche était celui des remplaçants.

La supériorité d'une équipe

Mais on n'aura pas tout dit, en constatant ce fait.

N'allons pas chercher midi à quatorze heures. L'O.M. a tout simplement été battu par une équipe qui lui est supérieure dans tous les domaines du jeu.

Tout ce que l'on pourrait ajouter serait de la littérature.

C'est surtout à l'échelon des inters que la différence apparut la plus grande. Oliver, qui fut très applaudi comme gardien, et Eschman péchèrent par manque de précision. Que de mauvaises passes... que de mauvaises passes !

Aussi, malgré le courage des Marcel, Gransart, Leonetti, Alauzun, Tillon... et épisodiquement Vescovali et Touré, l'O.M. ressembla-t-il trop souvent à une valeureuse formation d'amateurs.

En face, en plus d'Hartman révélation du match, on nota Bollini et Senac, excellents... et le vieux père Marche...

...Et surtout un jeu d'équipe, une harmonie dans les différents rouages de la machine qui fait cruellement défaut à l'O.M.

Maurice FABREGUETTES

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Pierre PIBAROT :" Avait-on oublié"...

Pierre Pibarot est le plus souriant et le plus décontracté des entraîneurs... Pensez donc ! Tout réussit à son Racing, peut-être parce que la fortune sourit volontiers aux valeureux. Aussi laissons le parler du match il le fait si bien !

"Pourquoi les Marseillais semble-t-il dans si déçus ? Leur formation n'est pas dénuée de valeur. Il s'est battu courageusement. Mais ne croyez-vous pas que l'on s'était un peu adapté par ici de vendre notre peau aussi bon marché ? Nous en avons vu d'autres : depuis le début de saison. Nous sommes leaders... et invaincus, et l'O.M. dernier. Ses deux matches nuls en déplacement, l'ont revigoré certes... mais il ne faut rien exagérer.

"Je suis très content de mes jeunes Magny, Hartman et Djolakian, de qui nous attendions beaucoup !"

D'ailleurs, tout le monde souri dans le vestiaire parisien. Le rouquin Senac et le calme Lelong :"A l'O.M. tout le monde veut marquer lui-même ! Cela ne peut aller bien loin."

Roger Marche : "Qui veut partager mon shampooing ? J'en ai trop !"

Le jeune Hartman : "Je pense m'en être bien tiré pour mes débuts !"

Oui, tout le monde souriait sauf Ujlaki qui ne rit jamais.

Côté O.M. les sentiments sont mitigés.

M. Zaraya estime qu'un nul aurait mieux payé ses hommes de leurs efforts. C'est un point de vue valable.

Touré : "Marche fut un adversaire correct, et quel métier il a ! " ; Eschman intervient : "Je me suis approché de lui... et il m'a cassé le nez d'un coup de coude, mais il ne l'a pas fait exprès !..."

Maurice Gransart estime que l'on n'a pas la tête assez froide dans les 16 mètres adverses.

Quant à Marcel, il ne peut plus bouger "tellement j'ai pris de court en intervenant à la dernière extrémité, en désespérée !"

Laissons le mot de la fin au capitaine Oliver, que nous plaisantions sur sa partie comme gardien " Tout cela ne donne pas les deux points !"

Louis DUPIC

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ESPOIR ENFOUI

L'O.M. a échoué là où il espérait tant réussir. Cette semaine d'espoir s'achève donc sur un nouvel échec. Et pourtant le Racing s'était un peu nourri d'inquiétudes avant le match. Deux réactions brutales en terre gardoise et Lorraine du onze marseillais avaient bousculé sa tranquillité de leader. On savait l'ensemble de Maurer mieux équilibré, plus réalistes depuis une quinzaine. Et cet enthousiasme renaissant aidant, on n'avait pas pensé - qu'après tout et en fin de compte - un succès des Marseillais n'était pas impossible.

Mais le football à des vérités que le plus vorace des enthousiasmes ne saurait écarter. Pendant quarante cinq minutes, le Racing essuya la domination volontaire des Phocéens et s'attacha surtout à endiguer le flot olympien personnifié par Tillon et Vescovali.

Puis le maître du championnat s'appliqua à faire respecter la hiérarchie de la compétition. Dès lors, par-dessus leur affection partisane - c'est humain - les 27.000 spectateurs suivirent sans réplique la démonstration du football étudié des Racingmen.

L'O.M. était battu en toute logique. Et pourtant il avait eu une maîtresse chance à la fin de cette première mi-temps, de creuser l'écart est peut-être de le préserver.

Mais retenons une fois encore, de ce difficile examen, l'énorme volonté que les Marseillais apportèrent aux débats. Leurs qualités morales sont réelles. Ah ! Si le rassemblement de leur talent de footballeur pouvait se faire !

Notre camarade Maurice Fabreguettes - orfèvre en la matière - nous dit par ailleurs ce qu'il pense sur le plan technique, de ce match.

Pour notre part, c'est équipe marseillaise, toujours à la recherche de sa cohésion, est encore, croyons-nous en quête d'une formule de jeu. Les passes dans le vide ou adversaire se succèdent. La position des inters correspond rarement à celle des avants de pointe et les courses sont trop nombreuses et inutiles. La balle est ronde, il faut la faire courir. Cette règle d'or n'est pas toujours observée.

Il nous reste cependant à souligner l'irréprochable tenue du trio Gransart - Marcel - Alauzun, souvent remarquable, quelquefois étonnant. En particulier Jean-Jacques Marcel, le meilleur demi centre opérant actuellement en France, sans qu'il soit possible d'hésiter pour l'écrire.

Une fiche de consolation pour lui et ses coéquipiers ? Peut-être ! Il n'empêche qu'elle n'ajoute rien dans l'escarcelle trop vide de nos Olympiens dont le maillot était hier - ô surprise ! - aussi rouge que l'objet lumineux qu'ils traînaient depuis trop longtemps déjà.

Le coche est donc raté, une fois de plus. Pourvu qu'il en reste encore quelques-uns sur la route du championnat !

Lucien D'APO

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Un débutant sans complexe

Francis MAGNY

Dans la semaine, nous avions cru qu'une coquille s'était glissée dans le "flash" qui nous annonçait que le Racing alignerait à Marseille Magny au poste de demi.

Après une période observation d'un quart d'heure, nous avons très vite compris que le junior Francis Magny de Charleville, était un petit gars sans complexe. Il se comporta tout d'abord en excellent "arrière central droit", puis s'enhardissant il poussa des pointes dont l'une se termina, à la 41me minute, par un tir à terre si soudain qu'il mit les deux équipes à égalité. De ce moment-là à la fin, Magny ne se refusa plus rien. Nets arrêts sur l'homme, passes lucides, dribbles sûrs, il se libérait totalement. Évidemment cela n'est possible que dans une équipe qui tourne rond mais ce débutant fut tout de suite dans le vif du sujet. Rien de timoré de "junior" dans son jeu, qui est déjà celui d'un homme fait.

Il s'offrit même avec impertinence une petite jonglerie de la tête qui en dit long sur sa facilité d'évolution. Aussi peut-on dire que ce n'est pas un Racing amputé qui a battu l'O.M., car Hartman fut par ailleurs l'attaquant le plus constant.

Louis DUPIC

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MAURER :"Jamais nous n'aurions dû encaisser ces deux buts !"

L'entraîneur marseillais reconnaissait bien volontiers la valeur, reconnue par d'autres avant lui, du Racing club de Paris.

Il n'était ni accablé ni amer dans ses propos. Il ne cherchait pas, comme M. Zaraya a invoqué un arbitrage défectueux ou la blessure de son gardien pour justifier, la défaite de son équipe.

"Nous aurions pu, au moins obtenir un point comme à Nice ou à Nancy. Je vais bien que l'attaque n'a pas répondu aux espérances placées en elle mais, jusqu'au but de Magny, c'est-à-dire jusqu'à la mi-temps en somme, nous n'avions pas du tout fait mauvaise contenance.

"Jamais, d'ailleurs nous n'aurions du encaisser ce but stupide et le second encore plus déroutant !

"Parce qu'ils furent inattendus, ils coupèrent la cadence de l'équipe."

M. Louis Bernard Dancausse président de la Ligue Nationale nous dit sans ambages :

"Le succès du Racing est normal. Il n'a pas été acquis contre le cours du jeu et il a récompensé la supériorité technique des Parisiens".

M. Louis Pelletier trouva un autre argument pour expliquer la défaite marseillaise :

"Elle s'est dessiné à partir du moment où l'O.M. a voulu jouer au plus fin avec le Racing".

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Dans la grisaille

Ce furent des instants émouvants...

On avait attendu un succès de l'O.M. Un but surprise de Magny avait tour remis en question, puis un tir tout aussi surprenant de Hartmann avait donné l'avantage aux leaders.

Alors que le soir tombait on avait vu partir Peri, clavicule brisée. Cisowski boitait bas. Les deux adversaires attaquaient à fond et à tour de rôle, comme ces boxeurs qui ont abandonné toute garde et recherchent le "coup dur". Celui-ci ne vint pas, mais des dernières minutes crépusculaires avaient en quelque chose de dramatique

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