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Résumé Le Provencal

du 26 janvier 1959

 

GRAVES INCIDENTS A SEDAN OU LEONETTI EST BLESSE PAR UN SPECTATEUR, TANDIS QUE LEFEVRE MARQUE LE 4e BUT (69e minute)

GRANSARD refuse de reprendre le jeu

L'O.M. TERMINE A NEUF

Et s'incline lourdement : 6 à 1 !

(D'un de nos envoyés spéciaux : Lucien DUPIC)

SEDAN (Par téléphone) - il faisait un temps idéalement beau pour un pays de l'Est, il y avait 5.000 spectateurs au stade, le soleil brillait et l'O.M. nous semblait être dans d'excellentes dispositions.

Certes, nos Olympiens ne s'étaient pas transformés en foudre de guerre, en virtuoses, mais enfin ils combinaient agréablement. Les avants Eschmann, Tillon et Touré étaient courageux à chacun de leurs départs et on avait l'impression qu'il allait y avoir un match !

Cette bonne période allait durer un grand quart d'heure. Si l'O.M. avait eu un peu de chance, ce quart d'heure lui aurait peut-être suffi pour estoquer une formation sedanaise sans doute plus technique, plus précise, plus appliquée, mais qui, cette saison, a assez souvent vacillé sur ses bases pour qu'on puisse estimer qu'elle aurait difficilement surmonté un handicap de 2 buts.

Le destin se manifesta sous les traits virils de l'arrière sedanais Robert qui arracha littéralement de sa cage une balle que Tillon y avait expédiée après avoir grillé Polak qui devait tout au long du match, se conduire de façon fort déplaisante.

Puis ce fut le geste débonnaire du juge de touche qui signala Eschman "off-side" alors qu'il avait été remis en jeu, par un défenseur ardennais au terme d'une excellente combinaison menée par Leonetti, Oliver et Tillon. Ce but (2me minute) fut refusé.

Pendant ce premier quart d'heure l'O.M. perdit le match en ne gagnant pas ! Vérité de la Palisse ? Peut-être ! Mais ensuite, le second quart d'heure fut celui de la résistance héroïque et désespérée, le troisième étant celui de la fatigue.

En effet le terrain lourd, fatigant, n'était pas pour arranger les affaires d'une formation ayant dû livrer un rude combat trois jours auparavant.

La cavalerie sedanaise

Certes, l'O.M. fatigué en fin de la première mi-temps, eut la mauvaise fortune de tomber sur une attaque sedanaise particulièrement alerte et qui, aux dires de chacun, n'avait jamais évolué avec autant d'allégresse. Sans cela. Sedan n'occuperait pas une place aussi peu en rapport avec sa valeur qui est réelle. Les passes redoublées entre Breny, que nous n'avions jamais vu aussi bon, les excellents techniciens Mouche et Lefebvre et les deux pur-sang Rustichelli et Fulgenzy, mirent de plus en plus la cavalerie ardennaise en position de tir. Cette cavalerie se transforma en artillerie dont les coups se précipitèrent à une cadence infernale. Fulgenzy et Rustichelli touchèrent les premiers la cible.

Fischbach héroïque

Bien que personne à l'O.M. au cours de cette période, nous ait paru franchement critiquable, aucun ne put atteindre les sommets. Et Camille Fischbach qui, au cours des dernières rencontres, nous avait donné des craintes, fut sensationnel au deuxième but où il ne put que freiner un tir violent de Breny qui fut ensuite expédié dans la cage par Rustichelli. S'il n'arrêta pas cent balles difficiles, il n'en arrêta aucune ! Au début de la deuxième mi-temps, alors que la fatigue pesait sur les jambes olympiennes et que sa défense allait jusqu'à concéder six corners en quelques minutes, il était toujours là ! Il fut toujours face à l'adversaire, alors qu'il n'y avait plus de match et que neuf marseillais s'efforçaient de tenter Dieu sait quoi, tandis que leurs adversaires, heureux, essayent d'améliorer leur "goal average".

La corrida

Car il nous faut bien parler de l'incident - ou de l'accident - navrant que surgit à la 24me minute de la deuxième mi-temps et qui laissera toujours un blâme sur cette encontre.

M. Bondon venait, contre l'avis de son juge de touche, de refuser un but à Michel Lefebvre et Leonetti s'écroulait de façon incompréhensible, secouru par Robert de Sedan, tandis que Christian Oliver alertait l'arbitre.

Hésitation de part et d'autre, Mouchel en profitant pour donner la balle à Lefebvre qui passait Fischbach sans rémission.

On relevait Jean-Louis le visage ensanglanté, qui avait été abattu par un objet lancé par un spectateur des premiers rangs de la grande tribune. Certains joueurs marseillais se précipitaient pour rechercher le coupable, tandis que d'autres essayaient de convaincre l'arbitre de refuser le but acquis à la faveur de l'incident. Tandis que la police arrêtait le coupable découvert, l'équipe marseillaise quittait le terrain. MM. Martinelli, Oliver et Marcel parvenaient à convaincre leurs camarades de n'en rien faire. Et Maurice Gransart, surexcité, laissait ses camarades jouer à neuf, tandis que Leonetti était emmené à l'infirmerie. Il allait revenir sur le terrain, mais restant vacillant et étourdi, il était invité par ses dirigeants à regagner le vestiaire.

L'incident avait duré 10 minutes.

Ensuite, il n'y eut plus de match, mais peu importe, Breny et Fulgenzy portaient la marque à 6-1.

Ce compte rendu technique a prit l'allure d'un fait divers et toutes les belles actions de la rencontre disparurent auprès de ces scènes navrantes. Mais lorsqu'elles se produisent, l'O.M. toujours en raison de ce jeu d'équipe invertébré, pliait devant Sedan et rendait inutile les efforts individuels de Fischbach, Tillon et Marcel, voir Touré.

Le mal est toujours le même.

Les Sedanais étaient dans un bon jour.

Nous éliminerons de tout commentaire élogieux le dangereux Polak qui, battu à tous les coups par Tillon, accumulait brutalités et irrégularités.

Les meneurs de jeu furent Christian Oliver et surtout Dominique Rustichelli qui se comporta en joueurs de très grande classe. Nous serions tentés de dire en "internationale", car ses percées rectilignes modèle du genre, ainsi que ses passes, ses tirs, ses ouvertures et ses corners. En pleine forme, il était navré que les éléments aient pris un tours aussi tragique.

Allons-nous assister à l'épanouissement que tous ses amis marseillais attendaient ?

Dans l'ensemble, et pour nous résumer, Sedan battit l'O.M. en technique et en précision.

Comme tous ces garçons-là peuvent aussi courir très vite, il y avait peu de monde en face pour soutenir la cadence. Ce sera la leçon de l'histoire.

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Malchanceux au début

l'O.M. domine ensuite

et encaisse six buts

(D'un de nos envoyés spéciaux : Marcel SERRES-SUBE)

SEDAN (Par téléphone) - Par un temps froid, grille en début de partie, ensoleillée ensuite, s'est déroulé ce match Sedan - Marseille si important pour deux équipes plus que menacées par la seconde division.

4.796 personnes s'étaient déplacées pour assister à une rencontre qui devait être, tout au long passionnée par des contestations et des incidents aussi regrettables que ridicules.

C'est l'équipe locale qui donna le coup d'envoi et c'est Mouchel le petit blondinet Sedanais qui, le premier, tire au but.

Du côté des marseillais, c'est à Touré qu'échoit cette première initiative.

Un jeu assez dilué manque de construction du côté de l'O.M.

Eschman tire assez mal un corner. Rustichelli qui, sera le meilleur avant sedanais de cette journée, effectue le premier tir obligeant Fischbach à s'employer réellement.

Tillon bat Bernard, mais...

À la 6me minute, Tillon très actif se trouve en bonne position de shoot. Le tir a battu le gardien sedanais, mais l'arrière Robert, replié précipitamment et judicieusement renvoie le ballon qui allait atteindre la ligne de but.

La contre-attaque vient de Fulgenzy, qui tire au-dessus de la barre transversale.

Un but refusé à Eschmann

Il est dit que ce début de partie sera défavorable aux Olympiens qui ne récoltent pas le bénéfice de leurs efforts.

À la 10me minute, Célestin Oliver tire un coup franc. Sur cette phase de jeu, Eschman, bien placé reprend la balle qui avait été repoussée au préalable par Lemasson.

L'ailier marseillais marque le but, mais l'arbitre M. Bondon ne tenant aucun compte de l'intervention du joueur sedanais qui a remis Eschman en jeu, refuse le but, ce qui provoque quelque énervement dans les rangs marseillais.

Les joueurs de l'O.M. doivent maintenant faire face à un corner bien dégagé par Jean-Jacques Marcel.

L'O.M. se tire tout à son honneur de ces dix premières minutes ; pourtant Rustichelli demeure pour eux un danger permanent.

Tillon, actif et qui suit de nombreuses balles se fait contrer très sèchement par le demi-centre Polak.

Le jeu, un peu trop sérieux de l'ex-joueur lensois, et d'ailleurs sanctionnée par de multiples coups francs.

Sedan prend la direction

du match

Petit à petit, l'équipe sedanaise s'organise et c'est alors que l'on peut vérifier que l'équipe marseillaise se compose en fait de onze individualités, dont certaine valables mais à l'action insuffisamment liée pour faire échec à une équipe peut être modeste mais qui opèrent collectivement.

Les efforts de Jean-Jacques Marcel, Touré, Tillon viennent s'ébrécher puis mourir devant les bois adverses.

La partie et littéralement hachée par les coups de sifflet de l'arbitre qui, sans doute, opère de façon préventive.

Fischbach est maintenant fort à l'ouvrage. Il détourne en corner un tir de Mouchel puis un autre de Fulgenzy.

L'attaque sedanaise et incisive et dangereuse, grâce à l'organisation réalisée par Christian Oliver. Maryan et Rustichelli poussant l'attaque de façon intéressante.

Après une demi-heure de jeu, le cours de la partie s'est renversé. L'O.M. ne domine plus ! Les Marseillais sont à présent dominés et les Sedanais, plus heureux que leurs adversaires, sauront exploiter cette situation.

Premier but pour de Fulgenzy

C'est à la 33me minute que sera marqué le premier but.

Lemasson dégage le ballon sur Christian Oliver, qui transmet aussitôt à Fulgenzy. Celui-ci reprend le ballon et face au but distant d'une vingtaine de mètres, envoie un shoot violent et bien placé.

Sedan compte un but d'avance.

Deuxième but pour Rustichelli

Deux minutes seulement après ce premier but, l'O.M. est de nouveau acculé dans son camp.

Breny tire au but, Fischbach freine le ballon sans pouvoir l'arrêter complètement. Rustichelli, qui a suivi l'action survient et pousse le ballon entre les jambes de Fischbach. La trajectoire du cuir s'achève au fond des filets.

Polak, demi centre, trop rude continue à "matraquer" avec une obstination qui tourne à la mécanique.

À cinq minutes de la mi-temps Jean-Jacques Marcel tire au but. Mais cette tentative est bloquée par Bernard. Puis immédiatement après Fulgenzy manque une occasion assez sensationnelle.

Un but de Touré

Le public commence alors cette phase de jeu lorsque Touré, recevant une passe de Jean-Jacques Marcel, franchit l'obstacle que constitue l'arrière Robert s'infiltre au centre, se débarrasse de Polak et vient battre Bernard presque à bout portant.

La mi-temps arrive sur ce score de 2 à 1.

Les deux premières minutes de la seconde mi-temps nous font assister à un forcing effréné, mais éphémère de l'O.M.

Six cornaient en onze minutes.

Car dès la 49me minute, Sedan renverse la vapeur et menace plus que sérieusement la défense marseillaise.

Nous comptons six corners tirés contre l'O.M. en espace de onze minutes !

À la 59me minute, Rustichelli porte l'estocade en marquant un troisième but après avoir dribblé Leonetti, Guix et Alauzun.

Ce but marqué de quinze mètres semble signifier le tournant du match.

Un seul effort valable et qui pourrait être payant pour l'O.M. se situe à la 66me minute, lorsque Eschman s'échappe, monte, évite Marwan et tire au but. Mais Bernard évite péniblement.

À 68me minute, après que Alauzun ait mis en corner un véritable "bolide". Lefevre, sur une passe de Rustichelli, marque un nouveau but refusé par l'arbitre alors que le juge de touche le lui accordait.

Incidents en chaîne

C'est alors que se situent les incidents navrants qui vont sont racontés par ailleurs.

Ces incidents se situent dans le même temps ou Lefevre ajoute un 4me but. Gransart rentre aux vestiaires en signe de protestation et Leonetti victime de cette agression stupide va se faire soigner.

L'O.M. continue à neuf joueurs après dix minutes interruption de jeu.

Deux nouveaux buts

Jusqu'à la fin, le jeu va se dérouler de façon insipide. La partie est jouée. Le public étrangement muet se désintéresse et applaudit chichement les 2 nouveaux buts qui sont marqués à son 73e minute par Fulgenzy et à la 80me minute par Breny.

Tillon, Eschman et Touré font des efforts isolés qui ne peuvent aboutir.

Et c'est par ce score de 6 à 1 que se termine cette décevante confrontation.

C'est fini et bien fini pour l'O.M...

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Choeur des Marseillais :

CE N'EST PLUS DU VOL

C'EST DE L'ASSASSINAT...

SEDAN - "C'était pourtant un bien joli match, avec une heure de très bon football..."

C'est ainsi que commencèrent tous les commentaires ardennais de vestiaire... Car les heureux adversaires de 'O.M. n'étaient pas contents, mais alors pas contents que leur victoire soit ainsi entachée, diminuée... "Nique" Rustichelli dont l'attitude fut de tous les points de vue exemplaire était évidemment le plus navré.

Tandis que son ex-coéquipier se levait péniblement, il le réconfortait par des paroles amicales...

"Ce n'est pas possible... C'est trop bête et trop méchant... répétait-il sans cesse.

Le vestiaire marseillais était en ébullition.

"On nous vole un peu partout et ici on nous assassine..."

C'était le leit-motiv...

Louis Maurer, le calme était méconnaissable : "Ce matin le président de Sedan est venu nous narguer à Bouillon. "On vous attend", nous a-t-il dit. Nous ne pensions pas qu' "ils" iraient jusqu'à là..."

Maurice Gransart : "J'ai eu 20.000 francs d'amende pour avoir pris à partie un spectateur qui m'insultait bassement. Et celui-ci, va-t-on trouver qu'il a raison... Si je suis parti, c'est que j'estime que nous n'avions plus rien à faire sur ce terrain..."

Eschman se lamentait au sujet du but qu'on lui refusa "à tort puisque Christian Oliver a reconnu que c'était lui qui avait dévié la balle vers moi après la passe de Tillon."

M. Paul Martinelli : "L'arbitre a négligé le coté humain en n'arrêtant pas la partie après l'agression sur Leonetti...

"Tous les Sedanais ont hésité. Qui lui aurait reproché d'avoir stoppé le jeu ?

Georges Bobik qui vit la rencontre de la tribune :

"Jouer comme Polak, tout le monde est capable de le faire à condition d'être assez méchant... Mais peut-on appeler ça jouer ? "

Celestin Oliver a renié Sedan : "Quel sale public... Nous allons porter réclamation, faire suspendre leur terrain... Ne devrait-on pas rejouer ce match ?..."

Enfin, comme nous disons à M. Bondon "quelle corrida...", il parut très étonné : "Ah ou ? Quelle corrida ? Il n'y a rien eu... Le match a été correct..."

Pour lui, il s'agissait d'un évènement extérieur.

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L'O.M. a porté plainte

SEDAN - C'est Marcel Poujenc, l'ami des bons et des mauvais jours et qui mérite bien le titre de supporter N.1 de l'O.M. qui est allé à la gendarmerie déposer une plainte au nom du club.

L'agresseur, qui est sous les verroux, se nomme Cyril Duplicki, né à Donchery, en 1931. Il est soudeur et habite Fresnoy, une bourgade près de Sedan.

Il regrette son geste et déclare avoir voulu viser l'arbitre.

On ne peut pas considérer cela comme une excuse.

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Des nouvelles de Leonetti

SEDAN - Jean-Louis Leonetti a été rappelé de Marseille pour recevoir une pierre en plein visage.

Exactement sous l'oeil gauche où cette pierre, qui était grosse et lui fut envoyée de près et violemment lui a fait une profonde entaille nécessitant la pose de plusieurs points de suture.

Extrêmement douloureuse, cette blessure n'aura pas pour lui de conséquences regrettables. Mais à quelques centimètres près, i pouvait perdre un oeil ou avoir la tempe écrasée.

 

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Déroulement des différents appels :

>>04/02 : La commission sportive de la Ligue se déclare incompétent concernant les réserves faites par l'OM, passe le dossier à la Commission centrale des arbitres

>> 07/02 : la Commission centrale des arbitres rejette ces réserves et redonne le dossier à la Ligue

>> 11/02 : La commission sportive de la Ligue confirme le score de la rencontre et aucune sanctionne n'est prise contre Sedan

>> 27/02 : Le Comité directeur invalide la décision de la commission sportive et reprogramme la rencontre pour le 26 mars

>> 07/03 : La réclamation de Sedan est jugée irrecevable par la Ligue, la date de la rencontre est maintenue

>> 20/03 : La Ligue nationale suspend la date de la rencontre, suite à la demande de la Ligue du Nord Est.

>> 17/04 : La F.F.F.A. confirme la victoire de Sedan.

 

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