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Résumé Le Provencal

du 05 avril 1971

 

NANTES A BIEN JOUE

MAGNUSSON et COUECOU

Deux ailiers d'infortune

N'aurions-nous pas été trop ambitieux pour l'O.M. ?

Tous, président, entraîneurs, joueurs, supporters... et journalistes.

À la voir, cette tout de même sympathique équipe, avec les yeux de l'amour et à travers ses meilleures performances de la saison - sa brillante victoire à Nantes entre autres - n'avons-nous pas eu tendance à lui demander plus qu'elle ne pouvait faire ?

Ah ! Si seulement on s'était contenté de vouloir "chatouiller St-Étienne" pour reprendre l'expression imagée de M. Leclerc au début de la précédente saison, peut-être aurait-on apprécié le match de dimanche à sa juste valeur.

À la déception générale se serait substitué un contentement certain.

Celui d'un public venant d'assister à une excellente rencontre de championnat, fort bien jouée et de surcroît très indécise.

Sans doute, ce public se serait-il rendu compte que la meilleure équipe du jour, celle ayant le handicap de jouer à l'extérieur, était la nantaise.

Mais il se serait aisément consolé en disant :

"Dans le fond notre équipe ne s'est pas tellement mal défendue, contre un adversaire de classe, avec un rien de chance elle pouvait même l'emporter".

Ce qui eût été, d'ailleurs, le reflet de la froide réalité.

Le F.C. de Nantes aurait pu gagner, il ne faut pas le nier, mais l'O.M. aussi.

Un gagnant : St-Étienne

Oui, mais voilà, il n'y a pas de froide raison en football - sauf sur le terrain dans les échanges et surtout les tirs - mais de la passion.

Tous les matches de l'O.M. sont jugés dans l'optique du duel avec St-Étienne.

D'où les raisons de la déception d'un public voyant l'acquis de son équipe s'émietter au fil des matches nuls : 5 en tout, dont deux contre le Red Star et Nîmes et peuvent être considérés comme des contre-performances.

Hier l'O.M. n'a pu rejoindre St-Étienne (même avec un match de plus) à la tête du classement, sa différence de buts ne s'est pas améliorée et il est bien certain que ce point perdu ne pourra être rattrapé que par une série de victoires extérieures, dans l'Est de la France.

À dire le vrai, plus personne n'y croit.

Il appartient aux joueurs de faire renaître l'espérance, en allant gagner à Paris (coupe) à Sochaux et à Metz, pour n pas dépasser le mois d'avril.

Sans oublier, cela va de soi, V.A. Domergue-Joseph que l'on verra le 14 de ce même mois au stade vélodrome.

Pourquoi pas ?

Comme on peut le dire à St-Étienne : "Il ne faut pas vendre la peau de l'O.M. avant de l'avoir tué".

Magnusson et Couecou

privés de ballon

Chacun ayant le droit d'avoir son opinion sur une rencontre, voici la nôtre.

Nous n'allons pas nous perdre dans des conditions stratégiques, ni diviser le 4-2-4 par le 4-3-3 ou 5-3-2.

Nantes supérieure au centre du terrain, meilleur que son rival dans l'art des combinaisons prestement exécutées, n'a pas gagné parce que le centre de son attaque manquait de punch.

L'O.M. équipe de tempérament, spécialiste de la contre attaque a surtout péché par l'effacement de ses deux ailiers.

Or l'O.M. sans ses ailiers ne saurait être l'O.M.

Magnusson fut aussi malheureux et inutile qu'il avait été brillant et précis contre Santos.

Une seule action en 90 minutes, digne de ce brillant joueur, un passage en dribbles, en seconde mi-temps, terminé par un fulgurant tir du gauche de peu au-dessus.

Pour un Roger Magnusson, c'est un minimum.

Et d'un.

Couecou n'est pas un ailier. On le sait. Par-dessus le marché, il avait devant lui un arrière capable de le remonter au sprint, de sauter plus haut et de mieux "tripoter" le ballon.

Nous avons nommé ce merveilleux athlète qu'est Lemerre. Le meilleur arrière latéral de France et d'assez loin, si seulement il voulait s'en persuader. Et de deux.

Bonnel et Gress : le changement

de rôles ne pouvait tout bouleverser.

Privé de ses deux armes majeures, ce qui se traduisit par l'isolement presque total de Skoblar, l'O.M. se trouva-t-il ainsi à la merci d'un adversaire meilleur manœuvrier que lui.

On comptait beaucoup sur l'inversion des rôles entre Bonnel et Gress.

Ces deux joueurs furent parmi les plus satisfaisants de leur équipe, mais un simple changement ne serait modifier la physionomie d'une équipe.

Dans un ensemble jouant par saccades, le deuxième avant-centre est tellement tiré vers l'arrière, qu'il lui est pratiquement impossible de soutenir constamment son véritable avant-centre, Skoblar en l'occurrence.

Bonnel, comme il le fait toujours, se trouva sur tous les points du terrain et Gress, ayant de plus grandes responsabilités défensives, ne se porta que très épisodiquement en attaque.

Résultat : rien de changer.

Le grand jeu part de derrière.

En fait, on le sait déjà, legrand jeu collectif part de l'arrière.

Or, il se trouve que l'O.M. possède une défense dont les qualités apparaissent plus dans l'adversité que dans la construction du jeu.

C'est une constatation que l'on a pu faire depuis longtemps.

Pour prendre l'exemple du jour, le centre de la défense de Nantes fait de deux jeunes Rio et Osman est plus rapide, plus souple et plus habile que celui de l'O.M.

L'équipe marseillaise étant, tout de même mieux placer que la Nantaise on en déduira aisément qu'elle a d'autres qualités.

Des qualités ne pouvant s'exprimer pleinement que par un jeu simplifié, direct et le passage par les ailes.

Contre Nantes, comme à Angoulême, l'O.M. n'avait pas d'ailiers, sa cause, donc, était difficile à défendre.

La seule différence est qu'il y a entre Nantes et Angoulême une bonne classe d'écart.

Maurice FABREGUETTES

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  Mal payés, les Nantais

On sait que les meilleurs spectacles proviennent généralement d'une franche opposition des styles. À cet égard, nous étions particulièrement bien servis, Nantes étant l'anti-O.M., par excellence...

Les visiteurs opérant dans le meilleur esprit offensif, nous avons eu droit à un très bon match de championnat qui méritait mieux qu'une assistance presque confidentielle pour notre ville.

Nous savons bien que nos concitoyens n'ont pas l'habitude de se rendre sur les stades munis d'imperméables ou de parapluies... Mais qu'importe : ils ont eu tort. Car il ne plut presque pas pendant la rencontre et les acteurs s'accommodèrent fort bien des conditions difficiles : pelouse gorgée d'eau donnant à la balle des accélérations foudroyantes.

COUP DE THÉÂTRE !

Lyon a perdu un nouveau point dans cette affaire. Mais les choses avaient débuté pour les Marseillais de façon à peu près inespérée. Dès la première attaque, menée sur la gauche par Gress et Skoblar, Josip tentait sa chance depuis la ligne de but malgré un angle très fermé. La réussite lui souriait, la balle pénétrant dans le but après avoir ricoché sur Rio et Osman. Un véritable carambolage !

Mais l'O.M. ne sut pas profiter de cet avantage moral considérable, et la partie s'équilibra bien vite, les Nantais tentant leur chance par des tirs trop lointains de Maas ou Kervarec. Le premier événement notable de cette période agréable à suivre, mais assez peu mouvementée, était la blessure de Lemerre touché par Couecou à la 19e minute.

Après un très bon coup franc de Skoblar, dévié en corner par Fouché (25me), Nantes allait prendre en main la direction du jeu.

NANTES DOMINE...

À la 29me minute, Osman, après relais de Blanchet, arrivait tout près du but mais glissait et manquait son tir.

Peu après, à la suite d'un contrôle raté de Novi, Kervarec ne voyait pas Courtin, bien placé et tirait de trop loin (30e).

Les maillots "canari" continuaient de déferler... Escale, sorti de son but, ne pouvait se saisir de la balle et avait la chance d'être supplée par Lopez qui déviait un tir de Courtin (32).

À la 38me minute, Blanchet, bien servi par Courtin, glissait au moment de conclure...

...ET ÉGALISE !

Il allait être plus heureux un peu plus tard, curieusement démarqué au milieu de la défense marseillaise. Il recevait la balle de Pech, se faufilait habilement, évitait Escale et obtenait un but régulateur largement mérité (43me).

Sur sa lancée, après le repos, Nantes allait maintenir sa pression, se montrant le plus souvent maître du terrain et du ballon. Escale sauvait devant Courtin, très bien servi par Blanchet (51me), Osman tirait au ras du poteau (57me).

Devant une équipe malmenée, on attendait un second but nantais. Ce fut l'O.M. qui reprit l'avantage...

ENCORE BONNEL !

Il fallut, bien sûr, une série de fautes visiteuses, mais qu'importe ! Lemerre laissa filer Couecou qui centra. Fouché ne put capter le ballon qui n'était pas insaisissable. Mais Bonnel, lui, était bien placé et le rabattit victorieusement de la tête, malgré un angle difficile (58e).

Là, il faut bien dire que les Nantais marquèrent nettement le coup !

Skoblar ajusta un tir terrible que Fouché réussit à dévier et sur la remise au centre de Novi le gardien visiteur parvint à se saisir de la balle (59e).

Mais l'O.M. rata le coche quand Gress, servi par Bonnel, fut bousculé tout près du but est ne put ajuster son tir (66me). Il y eut aussi une magnifique passe de Skoblar dont Jules, avancé tout près du but et surpris de l'aubaine, ne put profiter...

Ayant laissé passer l'orage, Nantes allait encore se rebiffer.

Escale du sauvé devant Michele (70me). C'était là le dernier avertissement avant d'avoir à payer la note.

BUT DE KERVAREK

Le petit Pech, astucieusement servit sur la droite Michel dont la remise au centre fut reprise à bout portant par le vif et très courageux Kervarec (73me).

C'était la seconde égalisation nantaise, au moins aussi méritée que la première. Les choses allaient en rester là, malgré une infiltration de Maas et Blanchet, arrêtée in extremis par Kula (74me), un déboulé de Magnusson, terminé par un tir du gauche sensationnel, frôlant la transversale, et par une ultime tentative de Novi dont le tir du gauche au coin était bien dévié par Fouché.

Il est évident que le public n'a pas enregistré de gaieté de cœur la perte d'un cinquième point à domicile, au moment ou le sprint final est lancé. Mais il se rendit compte, tout de même, que l'O.M. avait été tenu en échec par un très bon Nantes qui, rappelons-le l'avait emporté à Saint-Étienne. Ce n'était certes pas une consolation totale, mais un peu de baume étendu sur cette nouvelle blessure d'amour-propre !

Louis DUPIC

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UN 5me POINT PERDU

"La situation est maintenant critique"

Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'ambiance n'était pas très joyeuse dans les vestiaires marseillais.

La mine triste, les joueurs se déshabillaient lentement et se montrer fort avares de paroles.

Escale constatait :

"Je crois qu'aujourd'hui nous n'avons pas mal joué. Le malheur c'est que nous n'avons pas pu en retirer le bénéfice escompté. La situation est maintenant critique : je ne dis pas que c'est "cuit", mais, enfin, ce sera très difficile de combler notre retard sur Saint-Étienne".

Lopez renchérissait :

"Oui, c'est vraiment bête de perdre encore un point à domicile. C'est à croire que le mauvais oeil s'acharne sur nous au Stade Vélodrome".

Jules Zwunka, effondrait sur le banc, et récupérait les yeux fermés :

"C'est dur ! Autant au physique qu'au morale ; nous nous sommes livrés à fond, personne n'a ménagé sa peine, et voilà que nous perdons un nouveau point sur Saint-Étienne. Mais ces Nantais ont diablement bien joué !" ...

Jean-Louis Hodoul, aussi peu bavard qu'à l'ordinaire, reconnaissait que les Bretons avaient mérité le match nul.

Édouard Kula faisait soigner par Yansanne, une magnifique estafilade qui ornait sa jambe droite.

"On a manqué de punch en seconde mi-temps. En continuant d'appuyer sur l'accélérateur, nous pouvions les assommer définitivement !"

Jacky Novi se montrait un peu plus optimiste :

"Bien sûr, nous avons encore perdu un point, mais après tout, le championnat est encore loin et Saint-Étienne n'a pas encore gagné son match de retard contre Metz !

"Ce qui est important, je crois, c'est que nous avons mieux joué que lors de nos précédentes sorties. Mais nous ne parvenons pas à nous imposer chez nous !"

Bonnel, lui, ne partageait pas l'avis de son coéquipier :

"Il aurait mieux valu mal jouer contre comme contre le Red Star et gagner 2 à 1. Seul le résultat compte !"

Magnusson, le premier habillé, reconnaissait la valeur de son adversaire direct :

"De Michele a fait un bon match. Il m'a empoisonné, car il est très accrocheur et, de plus, il est très rapide".

Gress voulut bien reconnaître, lui aussi, que le match nul des Nantais était loin d'être immérité. Skoblar, quant à lui, expliquait comment le ballon avait heurté la cuisse du gardien nantais avant de pénétrer dans le but.

Enfin, Couecou se montrait désabusé :

"Pour être champion, il faudrait jouer tout le match à l'extérieur...

"C'est toujours la même excuse que nous invoquons, mais elle demeure valable".

Charly Loubet, qui avait suivi le match du banc de touche, était d'accord avec le Bordelais :

"On est toujours aussi contractés à domicile. Mais Nantes a prouvé qu'il fallait encore compter avec lui".

Lucien Leduc, très entouré, faisait le point :

"Le fait de mener deux fois au score aurait du avoir pour effet de nous décontracté...

"À 2 - 1, nous n'avons pas su nous imposer et préserver notre avantage mais Nantes est une équipe très solide qui est tout de même troisième du championnat !"

Le président Leclerc, comme à son habitude, tirait la leçon du match :

"Ce fut une bonne partie, d'un niveau technique très honnête. Aujourd'hui, les conditions atmosphériques étaient telles que nous avions le meilleur public de l'O.M.

"Nous sommes à la fois heureux d'avoir bien joué devant lui et malheureux de perdre un nouveau point. Mais je crois que ce match peut laisser espérer que l'O.M. redeviendra vite ce qu'il doit être.

Alain PECHERAL

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 A quoi pensiez-vous

Joseph BONNEL ?

Ce match, ce beau match, a manqué peut être de justice dans son verdict.

Il a partagé les points entre une équipe qui joue selon ce qu'elle pense est une équipe qui ne pense pas ce qu'elle joue.

Non, c'est encore un ensemble qui s'évade vers un autre football. L'O.M. se recroqueville sur le sien.

Où est-elle cette attaque dont les coups de foudre nous enchantaient il y a quelques mois à peine et qui se trouve aujourd'hui aux antipodes du réalisme qui fut le sien ?

Oui, où est-elle ?

Et a qui poser la question : aux joueurs, à l'entraîneur ou au président ?

D'autres entameront peut-être le procès. Tel ne veut pas être mon propos.

J'ai préfé, par jeu, passer l'après-midi en tête à tête avec un seul joueur, un seul homme choisi à dessein. Je l'ai vu, suivi et épié pendant quatre-vingt-dix minutes en isolant en quelque sorte dans un décor qui perdait tous ses acteurs, sont bruit de fond, son public et jusque et y compris l'arbitre.

J'ai suivi pas à pas, foulée par foulée, en essayant de comprendre et de partager ses satisfactions, ses déceptions, ses exploits et ses fautes, un seul homme : Joseph Bonnel.

Pour me dire finalement : mais au fond, la vedette, est-ce vraiment celui que la renommée consacre ?

Bonnel, lui, est comme hors de tout naturel, hors de cette boîte de jeu où les pions mobiles vont et viennent pour trouver rarement la bonne place. Lui ne la cherche va. Sa course l'y conduit sans réflexion. L'instinct de cet homme est aussi sûr que celui d'un Cheyenne sur la trace d'un bison. Il joue comme vous respirez. Parce que le jeu de ballon est chez lui une expression de vie. On serait tenté d'écrire la seule. Ce qui sera inconvenant si on ne savait pas ce garçon possesseur de vertus cardinales auxquelles il ajoute sérieuse et la prévoyance.

Sa vie, pourtant, c'est le football. Il ne sait pas ce qu'elle sera plus tard. Pour l'instant, elle roule sur l'herbe et dans les clameurs comme le ballon.

Mais je me suis demandé à quoi pouvait penser Joseph le réservé quand il joue.

Et par exemple quand il ne reste plus, entre lui et le gardien adverse, que juste la place d'exprimer son talent. Quand l'imminence du but se précise, quand la fièvre du combat lui monde à la tête... et lui brûle le pied.

Oui, à quoi pense-t-il ?

À lui, à l'équipe, au public, à sa famille, à ses enfants, à la prime du match, à l'homme qu'il veut battre, à la maison de ses rêves ou... à rien ?

Il est dans un mode bien réel, où il n'y a rien d'incertain rien d'empirique. Mais, pour arriver à connaître ce centième de seconde qui le fera vainqueurs, son raisonnement inconscient sans doute, a été rapide. Il a joué sur le clavier de tous ses automatismes dont l'adversaire ne connaissait pas toutes les touches, et surtout pas celle dont il s'est servi.

Alors, il triomphe. Dans ses yeux, il y a seulement eu la lueur innocente de la joie remplaçant l'angoisse qui précède tout geste que jugeront impitoyablement vingt mille censeurs. L'acte sportif n'est pas que pure activité du muscle. L'intelligence sportive dans son essence est primaire. Le geste de l'athlète - son shoot, sa feinte - est aussi mécanique que le coût de variope du menuisier à l'établi. Mais ce qui fait exploit, le ciselage majeur, c'est l'ultime réflexion, le petit coup qui laissera le défenseur sans défense et le gardien sans ballon.

Le point d'orgue du talent.

Non, Bonnel n'a pas pensé à ses coéquipiers, qui lui ont tout préparé portant. Ni au public. Ni à la prime du match. Ni aux siens.

Il n'avait pas le temps.

En face de l'éclat, à portée de main de la conclusion, il n'était plus qu'une "bête à jouer", un animal fauve qui sait, sent et voit. Dans un centième de seconde, il devait traduire ce qu'il a appris en vingt ans.

Il l'a fait.

Maintenant, il se retourne. Derrière lui, la balle gît dans les filets. La foule hurle comme sur les gradins de Rome pour saluer son rétiaire. Il boit son triomphe avant de redevenir Bonnel Joseph, footballeur professionnel, tout comme les vingt et un autres.

Car, en définitif, la vedette c'est lui. Lui qui joue d'un bout de l'année à l'autre au même rythme, avec la même fureur de vaincre et la modestie des hommes qui aiment la science et l'isolement parce qu'ils y puisent tout.

Du sport, il respecte la nature sans jamais l'altérer. Non parce que c'est son métier, mais bien parce qu'il doit se demander de temps à autre, dans le recueillement qu'il recherche, sans foule et sans fard, ce qu'aurait été sa vie s'il n'avait pas reçu du destin les dons qui ont fait gonfler Bonnel.

Bonnel le magnifique !

Lucien d'APO

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  Un excellent football tout de même

Ne soyons pas plus royalistes que le roi et contentons-nous d'avoir passé un excellent après-midi.

Pas de pluie, quelques rayons de soleil, une pelouse verdoyante bien que spongieuse par endroits, mais très jouable, une température idéale et surtout pour le principal, un match d'une rare plénitude, dense, souvent émaillé d'actions de grande classe.

De quoi réconcilier avec le football après les piteuses quatre-vingt-dix minutes de l'autre dimanche contre le Red Star.

Certes, le supporter inconditionnel se sentira une fois encore lésé.

"Son" O.M. n'a pu franchir victorieusement l'obstacle nantais. Et, pourtant, qui, de bonne foi, pourrait jeter la pierre à des garçons ayant lutté de bout en bout et prouvant que leur classement n'était pas usurpé, loin de cela. Certes, nous n'irons pas jusqu'à écrire que les Bas-Bretons méritaient de succomber. Ils démontrèrent, sous la conduite des Blanchet, Michel, Lemerre, Rio, Osman, Fouche, Courtin, Pech, tous gens pétris de talent, qu'ils valaient les meilleurs.

Mais si d'aventure, les Marseillais l'eussent emporté, là encore il n'y aurait pas eu de fausses notes.

À quoi tient d'ailleurs le sort d'une rencontre ?

Et il suffit de quels impondérables pour tout faire basculer d'un côté comme de l'autre.

Si Skoblar, par deux fois, avait touché juste au lieu de frôler les poteaux, si le tir fracassant de Magnusson avait pénétré sous la barre horizontale au lieu d'être dévié in extremis par un bondissant Fouché, la victoire eut été indiscutable.

Vous nous direz qu'avec des si... le championnat n'existerait plus.

Et, précisément, il existe et en doit s'en réjouir. Parlons maintenant chiffres. Sur ce plan strict, il est indéniable que l'O.M. a perdu à nouveau point.

Lorsqu'on convoite un tee de champion de France, de tels faux-pas coûtent fort cher au bout du compte. Surtout si adversaire direct à nom : Saint-Étienne.

Mais, il n'est pas dit non plus que ces mêmes Stéphanois ne se trouveront pas placés, dans un avenir plus ou moins rapproché, devant des problèmes identiques.

Onze étapes, douze pour les Foréziens restent à parcourir avant le but et le couronnement.

N'en déplaise aux pessimistes, l'O.M. continue à poser sa candidature.

Même si sa position est aujourd'hui légèrement moins confortable.

Gérard PUECH

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  Le second "come-back" de Paul COURTIN

La saison dernière, au printemps, l'O.M. avait largement battu Nantes, et Paul Courtin retiré dans sa famille, dans la banlieue d'Avignon, était venu saluer ses anciens coéquipiers.

Se rendant compte après de nouvelles avec mécomptes avec son genou malade qu'il aurait du mal à poursuivre une carrière professionnelle, il avait décidé tout simplement, de n'être plus à la charge de son club !.. Une attitude de grands seigneurs, correspondant d'ailleurs parfaitement à ce que Paul Courtin, brillant universitaire, et dans la vie : un véritable gentleman...

Avant le match, il nous parle de Gondet à nouveau blessé et nous dit combien il était dur de ne plus être après avoir été ! Il parlait en connaissance de cause. C'est en effet, le second come-back de Courtin, blessé au genou il y a cinq ou six ans avant même de jouer son premier match avec Nantes. Revenant à la surface après deux ans de souffrance, retrouvant Gondet, autre miraculé du football, et même, en octobre 66, contre la Pologne, une place à l'aile gauche de l'équipe de France !

Mais le grand attaquant denté, dont son club attendait beaucoup dut, depuis comme son infortuné camarade, poursuivre une carrière en dents de scie, marquée d'espoir et de grande déception, alternant les bonnes performances et les noires périodes de rechutes. Après sa seconde retraite, volontaire celle-ci, Courtin paraissait bel et bien perdu pour le football. Mais il est bien difficile de renoncer définitivement à ce qu'on aime... La saison était déjà avancée lorsque, constatant une nette amélioration de son état, il décida de se replacer timidement à la disposition son club, dirigé d'ailleurs par une autre victime du football : Robert Budzinski !

Depuis, il a repris sa place dans l'attaque nantaise dont il fut hier, l'animateur inlassable, à la fois au four et au moulin. Venant tour à tour soutenir sa défense au porter le danger devant le but d'Escale...

Pour Courtin ne joua, contre l'O.M., ni en vétérans, ni en demi invalide, allant aux chocs sans rechigner, promenant sa grande carcasse aux quatre coins du terrain, exemple pour ses camarades et, pourquoi pas, pour ses adversaires, leur montrant notamment ce que peut faire un grand numéro dix, ou si vous préférez, un avant-centre de soutien.

Il nous parut, cependant, sans illusion et absolument pas dupe de son actuel renouveau. Il sait qu'un jour ou l'autre, ce sacré genou gauche lui jouera de mauvais tours. Mais, en attendant, c'est autant de pris sur la fatalité !...

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  BUDZINSKI :"Nous méritions la victoire !"

Autant les mines étaient graves dans le vestiaire marseillais, autant les figures étaient réjouies dans le camp nantais.

Les Bretons avaient conscience d'avoir bien joué, et il empochait de plus un point toujours plus précieux lorsqu'il est acquis en déplacement.

José Arribas, le coach nantais, avait donc toute raison de se montrer satisfait :

"Nous avons fait un bon match, comme presque toujours à Marseille, si l'on excepte toutefois un Bastia - Nantes de sinistre mémoire. J'estime pour ma part le résultat parfaitement équitable".

Robert Budzinski, le jeune directeur sportif nantais, estimait pour sa part qu'une victoire de ses couleurs n'eut pas été usurpée :

"Nous aurions dû gagner car nous avons su nous créer des occasions de but les plus nettes. Et le premier but que nous encaissons est particulièrement malheureux, puisque la balle a touché Osman puis Rios avant de rentrer.

"Oui, il ne nous a manqué qu'un peu de culot pour l'emporter. J'avais vu jouer l'O.M. à Angers et il n'avait pas paru être en forme transcendante".

Henri Michel, l'Aixois de Nantes, était bien sûr content de ce match nul :

"Avec un peu plus de réussite, nous aurions même pu gagner. Nous n'espérions pas faire un aussi bon match car plusieurs gars étaient enrhumés. Mais ce Skoblar quel joueur !"

Fouché et De Michelle s'accordaient à reconnaître que l'O.M. n'avait pas fourni une aussi bonne partie qu'au match aller au stade Marcel Saupin :

"Mais par contre, la venue de Gress semble avoir rendu l'O.M. beaucoup plus collectif".

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  Des C.R.S. en bois !

L'ex-Sedanais Roger Lemerre est un fervent supporter de l'O.M. Malgré le passage à vide des Olympiens, il est encore convaincu que le titre 70-71 n'est pas joué : "Avec les Skoblar, Magnusson, Gress, Bonnel, tout est possible. Le match contre Santos m'a enchanté. J'ai surtout vu un très bon arrière : Jean-Pierre Lopez".

Une opinion rassurante qui émane d'un connaisseur le N.2 nantais.

oOo

Ce même Lemerre nous a dit : "A Marseille, les journalistes sont bien informés. Ils connaissent le renvoi des matches avant les joueurs".

oOo

La rencontre ayant été reporté de vingt-quatre heures, les joueurs nantais ont manifesté le désir de se rendre au cinéma. Les avis étaient partagés. Finalement, c'est Rio Lobo qui a remporté la palme.

oOo

C'est Michel Drucker qui a hérité des fameuses chaussures de Pelé. La télévision, en direct sur la première chaîne, nous a offert des gros plans de ces "reliques". Par contre, on a oublié de signaler que c'est le Stéphanois Camerini qui a "kidnappé", dès le coup de sifflet final, le maillot du "Roi". Jacky Novi doit s'en mordre les doigts...

oOo

Le président Marcel Leclerc n'a plus la "baraka". On a grelotté contre Saint-Étienne ; les matches contre Nancy et Nantes ont été reportés de vingt-quatre heures. Voilà des signes inquiétants si l'on ajoute que le coffre-fort du Stade-Vélodrome a été "emprunté" toute une journée ! Que le président se rassure : malgré les dires populaires, nous avons assisté dans les arènes de Nîmes à des corridas sous des trombes d'eau...

oOo

Roger Magnusson a failli rester tout seul à Paris. Jeudi matin, quelques minutes avant le décollage, il s'est aperçu que son imperméable n'était plus dans sa valise. Comme il n'a pas voulu abandonner ses camarades, il a dû, à son grand regret, les faits son bien dans le hall de l'aérogare. Un précieux vêtement qui ferait le bonheur d'un "Socio".

oOo

Jules Zwunka, en bon joueur professionnel qui se respecte, dors très peu la veille les soirs de match : "Je me suis couché chaque fois à 9 heures et je ne trouve le sommeil seulement qu'au premières heures de la matinée".

Ce pauvre Jules n'a donc pas de chance. Avec le report de la rencontre, il aura passé trois nuits blanches !

oOo

Fidèles à la tradition de la coupe, les Olympiens se laissent pousser la moustache. Nous ne pensons pas que le record de "Tchouki" de 1969 (trois centimètres) sera battu. Toutefois Escale, Lopez, Bonnel, Novi et Hodoul sont bien placés. À signaler que Édouard Kula fait de plus en plus très "Titi parisien"...

oOo

Gilbert Gress est retourné de Paris avec un début de grippe. Vendredi et samedi, il était fiévreux. Son meilleur remède : 90 minutes sur la pelouse. "Rien de mieux pour éliminer les toxines", a-t-il déclaré.

oOo

Le jeune supporter de Saint Barnabé (grand amateur aussi de courses motocyclistes) nous a donné une solution pour maintenir à peu de frais l'ordre dans le stade vélodrome : l'enceinte devrait être truffée de C.R.S. en bois !

René CASTILLE

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(Photos : Collection personnelle Christian Escale)

 

 

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