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Résumé Le Provencal

du 14 janvier 1974

 

L'O.M. oubliant le football et MAGNUSSON

Fit le jeu de NIMES et n'aurait jamais dû perdre

 

Les commentaires

L'O.M. vient de perdre sottement - et qui plus est, sur son terrain - un match qu'ils auraient dû gagner.

Disons bien sottement, car pour ce qui est de l'énergie, de l'engagement, de l'esprit de corps bref de tout ce qui est utile au football, mais n'a jamais fait de football, les Olympiens n'ont rien à se reprocher.

Ils furent vaillants et combatifs au possible et aveugles un point difficile à imaginer pour qui n'a pas assisté à la rencontre.

Faire du Nîmes contre Nîmes, alors que l'on a eu la chance de marquer le but dès la 7me minute et le comble de la bêtise collective.

MAGNUSSON AU PIQUET

La première et la plus visible des erreurs marseillaises fut la mise au piquet, involontaire, ce qui est pire encore de Magnusson.

On a le meilleur ailier du match, joueur dont les quelques et rarissimes actions paniquèrent la défense de Nîmes et on l'oublie presque complètement.

Sur notre calepin, nous avons noté à la 77e minute (nous ne rêvons pas) première vraie passe de Magnusson.

Pourtant le Suédois est le joueur de France, d'Europe et sans doute du monde, plus facile à servir, puisqu'il peut recevoir le ballon utilement non point derrière, mais devant son adversaire direct.

Demandez-le Bonnel qui, lui avait "pigé" du premier coup.

La deuxième erreur olympienne nous a crevé les yeux, surtout en deuxième mi-temps.

L'O.M. a obtenu 10 corners. Sur toutes ses chances de but, on voyait Trésor, Zvunka et Bracci (les trois plus grands) postés à 50 mètres du lieu de l'action pour marquer le seul Janssen.

Enfin est-il possible de faire travailler à Trésor des corners offensifs, pour mettre un atout important de plus dans le jeu de l'O.M. ?

L'EXPLOIT ET L'ERREUR

DE SKOBLAR

La troisième erreur fut causée par Skoblar.

Nous aimant énormément Josip qui nous a procuré tant de joies pures, mais ne le suivront jamais sur le terrain de l'énervement.

Le propre d'un grand champion et de savoir conserver le contrôle de ses nerfs.

Bénéficiant d'un louper nîmois - le jeu n'est fait que de faute - Skoblar venait de marquer un but tout de même admirable.

Les données de la rencontre étaient inversées.

L'O.M. avait la chance, rare, de pouvoir jouer, sur son terrain, en contre attaque, contre un spécial grand spécialiste du contre.

On pouvait, ce moment-là, penser aux bonus.

C'est alors que Skoblar, pour des raisons déraisonnables, dit à l'arbitre des paroles désagréables à entendre.

Il écopa d'un avertissement, se vengea sur Janssen qui n'y était strictement pour rien, même si l'on sait que le Hollandais de Nîmes n'est pas un tendre... et le match dégénéra.

Or, quand un match dégénère, que les joueurs visent plus adversaire que le ballon, le football est oublié et entre les deux équipes, les chances s'équilibrent.

Et la chance que pouvait avoir l'O.M. de battre les Nîmes, en jouant au football s'envola.

O.M. : UN BON DÉBUT

DE 2me MI-TEMPS

En deuxième mi-temps les esprits un peu calmés, le football retrouva ses droits.

On s'aperçut, alors, de la limite des deux équipes. Ce n'est pas pour rien qu'elles sont classées, cette saison, au milieu du tableau.

Sur 23 rencontres, la vérité finit toujours par se dégager.

Pendant le premier quart d'heure, l'O.M. nous montra son meilleur jeu de la partie.

Mais Landi, absolument transcendant, sauva son équipe, parce des arrêts extrêmement difficiles.

En fin de match - ce n'est pas une nouveauté - l'O.M. parut fatigué et Nîmes en profita pour gagner par k.o., avant de terminer le match à la hongroise, c'est-à-dire en gelant le ballon.

Le public siffla, c'est pourtant de bonne guerre.

MEZY ET LANDI

Que reste-t-il de ce derby qui, en première mi-temps, ressembla à une "bataille royale" ?

Si vous l'ignorez, la "bataille royale" était aux temps héroïques de la boxe une sorte de sélection. Cinq boxeurs sur le ring tous les coups étaient permis... et, à la fin, le dernier debout était le vainqueur.

Hier, le vainqueur fut Mendoza qui obtint la décision sur Buigues et Couecou.

Un authentique exploit dans le domaine de la savate.

En football, les Nîmois du match furent Landi et Mezy.

Le second d'abord menacé par Leclercq finit par dominer son rival à la résistance et grâce à un meilleur engagement.

À l'O.M., on a remarqué Trésor, Leclercq, Buigues... mais le meilleur eut été Magnusson, si...

Maurice FABREGUETTES

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Ils disent

Fernando Riera, scandalisé :

"Nous ne méritions pas ça..."

 

Comme il fallait s'y attendre, c'étaient des joueurs profondément marqués par la déception que nous avons retrouvés au vestiaire. Les dirigeants eux-mêmes paraissaient accablés par ce coup du sort qui avait donné aux Nîmois, disaient-il, une victoire inespérée.

Le président Gallian, dont c'était la première apparition officielle depuis sa maladie, invoquait bien entendu la malchance.

"Je me demande encore, nous déclare-t-il, comment l'O.M. a pu perdre ce match ! Décidément, ma reprise débute mal. Et pourtant, que pourrais-je reprocher à mes joueurs ? Tous ont livré une rencontre satisfaisante. Leur seul défaut, à mes yeux, et d'avoir manqué de réussite.

"Il faut préciser aussi que l'arbitrage ne les a guère favorisés. Les Nîmois ont blessé sérieusement deux de nos joueurs. Dans l'affaire, c'est Skoblar qui a écopé d'un avertissement. Cette victoire de nos adversaires, injustifiée je le souligne, a été en fait une prime au jeu dur.

"Enfin ! J'espère que nos gars ne vont pas se décourager. S'il joue avec cette volonté jusqu'à la fin de la saison, les résultats ne leur seront pas toujours défavorables."

RIERA SCANDALISÉ

Si le président était plutôt modéré dans ses propos, entraîneur, en revanche, avait du mal à contenir sa colère. C'est même la première fois que nous avons vu le calme et placide Fernando Riera rouler des yeux tout noirs, en se rasant devant la glace.

"Oui, c'est un scandale, nous dit-il. Les visiteurs sont venus ici pour imposer leur manière forte, et ils ont été protégés par l'arbitre. Moi j'appelle cela un complexe d'autorité. M. Kitabdjian a systématiquement dirigé les débats contre l'équipe locale.

"Sinon, nous n'aurions jamais été battus. Vous avez vu le match comme moi, alors dites-moi si l'O.M. méritait la défaite cet après-midi ?

"Si ce n'était le résultat, je serais prêt à féliciter chacun de mes hommes. Sur le plan du football, ils m'ont donné toute satisfaction. Ce match cela, je l'affirme, nous aurons dû l'emporter. Et encore, avec le bonus ! C'est vraiment pas de chance !"

- Comment avez-vous jugé Albert Emon ?

- "Très bien ! Comme d'ailleurs tous ses camarades.

- Les spectateurs, d'autre part, ont eu l'impression que Magnusson n'était pas suffisamment utilisé ?

- "Que voulez-vous, c'est difficile. Roger a toujours deux ou trois adversaires sur le dos. Mais, nous avons souvent orienté le jeu sur l'aile gauche. Et j'estime que nous y avons réussi de très bonnes choses.

COUECOU :

ON CRAINT UNE FRACTURE DU NEZ

Nous avons ensuite interrogé les joueurs. En premier lieu, ceux qui avaient été les héros malheureux de la partie. Couecou arborait un sparadrap sur son nez endolori. "C'est un coup de coude, nous confia-t-il, je vais me rente de se pas à l'hôpital pour y passer une radio. J'ai bien peur qu'il s'agit d'une fracture de la cloison nasale. Mais, voyez-vous, ce qui me fait encore le plus mal, c'est d'avoir été battu."

Buigues, lui aussi, avait un peu près le même sentiment, malgré son coup reçu la cheville.

"La blessure n'est pas grave, nous dit-il à son tour. La défaite, en revanche, c'est beaucoup plus. Un match que nous devions gagner haut la main. Et voilà ! C'est dur à encaisser, croyez-moi."

Quant à Skoblar, même l'idée de rejoindre sa Yougoslavie natale (il part aujourd'hui pour affaires personnelles dans son pays d'origine), ne parvenait pas à lui ramener le sourire. "Je me suis énervé, nous assure-t-il, parce que l'arbitre m'avait donné sans raison un avertissement. C'est le directeur de jeu qui a faussé toute la rencontre !"

Magnusson n'était pas moins outré que son ami Josip. "En deuxième mi-temps, tous mes dribbles ont réussi, et nous avons eu au moins cinq ou six occasions de buts. Ce n'est pas possible d'être battu de la sorte !"

Après les confidences du Suédois, nous sommes allés trouver Emon pour le féliciter de sa brillante partie.

"Oui, dit-il, mais j'aurais préféré que ce soit plus concluant, notamment au tableau d'affichage. Franchement, il y avait longtemps que je n'avais pas eu vu cela sur un terrain".

Le mot de la fin à Georges Carnus, qui étrennait en l'occurrence ses galons de capitaine.

"Que voulez-vous faire, c'est le football".

Il n'empêche que ce genre de mésaventure n'arrange pas les affaires de l'O.M...

Jean FERRARA

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Jacky NOVI : "C'est bon pour le moral"

Dans les vestiaires nîmois on nageait en pleine euphorie...

L'entraîneur Kader Firoud, évidemment, était l'un des plus heureux.

"En première mi-temps, les Marseillais s'étaient montrés très dangereux et nous avons eu le tort de leur laisser une trop grande liberté d'action, par contre nous avons fourni une excellente seconde mi-temps. À l'heure actuelle nous participons à un championnat fou, fou, aussi j'estime que nous conservons une chance car notre ensemble est solide !"

Augé, le capitaine, se lamentait sur le premier but qui fut marseillais : "J'ai loupé la balle à cause d'un rebond inattendu et c'est pour cela que Skoblar a pu en profiter. Je râlais car j'estimais qu'en la circonstance, j'avais été très malheureux. C'est la sixième victoire que nous remportant à l'extérieur ! Bravo ! Mais il faudrait songer à en faire autant sur notre terrain au nous n'avons plus gagné depuis le 22 septembre dernier !"

Jacky Novi exultait littéralement : "Nous n'étions pas tellement rassurés au début de la rencontre mais malgré son forcing, l'O.M. n'avait réussi qu'à prendre un léger avantage ! Mais vraiment ça m'a fait plaisir de gagner à Marseille devant mon ancien public ! C'est bon pour le moral !"

Alain DELCROIX

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Le match en bref

COIFFE SUR LE POTEAU

Le derby O.M. - Nîmes a commencé sous un ciel nuageux mais une température très clémente, en présence d'une vingtaine de milliers de spectateurs.

Après quelques instants d'observation, à la 6me minute, Buigues monte par le centre. Il adresse sa balle à Skoblar totalement démarqué. Celui-ci, très calmement et sans se presser, fusille Landi. O.M. 1 - Nîmes 0.

A la 11me minute, Couecou rate d'un fil un second but. Sa tête passe de peu au-dessus de la transversale.

À la 25me minute, l'arbitre, M. Kitabdjian, donne un avertissement à Skoblar. Ce dernier s'énerve, fauche le Hollandais Janssens. Carnus vient conseiller la modération au bouillant Yougoslave.

La tension monte, les nerfs sont à fleur de peau dans les deux camps. Mendoza descend Buigues qui se tord de douleur (35me, et sort du terrain, Mendoza récidive aussi bientôt, 40me), aux dépens de Couecou qui est blessé au nez et doit se faire bander par le masseur.

Buigues guéri, reprend sa place (43me), puis c'est au tour de Couecou (44me). Le public manifeste contre l'arbitre et les Nîmois. Boissier sauve sur sa ligne et c'est la mi-temps. Il y a de l'ambiance ! Landi doit intervenir à la reprise sur des actions de Skoblar de Magnusson, mais à la 62me minute, la défense olympienne marque un temps d'arrêt. Mezy lance Kanyan qui glisse le cuir à Pintenat. Celui-ci égalise de près O.M. 1 - Nîmes 1.

Couecou sort. Il est remplacé par Franceschetti (73me). On parait s'acheminer vers un nul équitable, mais à la 86me minute, Novi centre sur Kanyan qui, dans sa foulée, trompe Carnus.

Finalement, Nîmes bal O.M. par 2 buts à 1.

Alain DELCROIX

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Le fait du match

Un soupçon d'injustice

Le bruit et la fureur, la passion, le drame, sans des ingrédients indispensables à la recette de tout derby qui se respecte, surtout lorsqu'il concerne les deux rivaux méditerranéens. Nous avons eu tout cela hier après-midi, et même un peu plus puisque, pour corser le cocktail, en y ajouter le sang de Didier Couecou et un zeste d'injustice et d'illogisme.

En effet, illogisme jusqu'au bout ! L'O.M. marque d'entrée de jeu par Skoblar, l'un de ses "éléments de rupture" redoutés de Kader Firoud, et c'est bien ce que Nîmes pouvait craindre le plus car ce handicap l'oblige dès la sixième minute, à se livrer, à faire le jeu, comme à domicile, ce qui ne lui réussit pas tellement cette saison.

L'O.M., en outre, avec une composition d'équipe plus rationnelle à notre avis, se montre à son avantage et, malgré les déboires de Buigues et de Couecou, rate de peu, au milieu du débat, de prendre le large et même le bonus. Les Nîmois, rendus généreux par leur victoire, n'en disconviennent pas.

La seconde période est jouée sur un rythme beaucoup moins vif, et l'on voit alors la fameuse 2 CV gardoise profiter de deux accidents de terrain pour rejoindre, puis devancer sur le fil la grosse cylindrée marseillaise. Illogisme, mais aussi injustice, car le moins chauvin des chroniqueurs admettra que l'O.M. a été très mal payé d'avoir fourni, peut-être, le match le plus plein de sa saison.

Le plus sérieux, comme le disait Kader, qui a apprécié en connaisseur les qualités de l'adversaire.

Les 20.000 spectateurs sont d'ailleurs tellement ébahis par le but de Kanyan, qu'ils en oublient de manifester.

Ils n'en veulent même pas à leurs représentants, dont on ne peut dire qu'ils se soient relâchés le moindre du monde. Les deux buts gardois sont tombés comme des coups de massue. C'est la glorieuse incertitude du football. Ce sport si riche en impondérables...

Louis DUPIC

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Les réponses aux questions

que vous vous posez

Qu'est ce qui fait gagner

Nimes-Olympiques ?

 Le public marseillais a réagi avec mesure à la nouvelle défaite de l'O.M. Le fait est assez rare pour qu'on s'y attarde.

- Le public n'est pas aveugle. Il a vu son équipe favorite fournir une bonne partie contre Nîmes, et rater au moins deux occasions de prendre définitivement le large. Si un sentiment a dominé chez lui, ce n'est pas la colère, mais l'impression d'assister à une injustice. Sa réaction fut en quelque sorte un hommage au courage malheureux.

 Fernando Riera, après avoir fait longuement confiance à Franceschetti et Kuszowski, mis depuis quelques semaines en concurrence, s'était décidé à les remplacer. Que pensez-vous de cette décision ?

-Si on se réfère à la bonne partie de l'O.M., il ne doit pas être mécontent des modifications apportées à son équipe. Rien ne dit, en outre, que l'heure de ces deux joueurs ne sonnera pas à nouveau, et même dans un proche avenir. Mais disposant de son effectif dans son intégralité, il lui fallait bien essayer quelque chose... qu'il aurait peut-être tenté plus tôt s'il avait disposé simultanément de Buigues et de Magnusson.

 A propos de Magnusson, il semble qu'il ait été oublié systématiquement à son aile droite, tout au long de la première mi-temps.

- Il est toujours difficile pour une équipe de passer d'une façon de jouer à une autre. L'O.M. venait de discuter plusieurs rencontres avec un faux ailier, Robert Buigues, sur la droite épisodiquement.

"Nous ne pensons pas que Roger ait été délibérément ignoré. D'ailleurs en seconde mi-temps il fut plus souvent servi et réalisa même de bons dribbles ou centres face à son vieux rival Kabile.

 Nîmes réalise, cette saison, de meilleurs résultats à l'extérieur que dans son "antre" de Jean Bouin. Pour quelles raisons ?

Kader Firoud a répondu, la veille du match, à cette question. Il dispose d'une défense et d'un milieu de terrain solides et homogènes. Mais son attaque, a on a pu le constater, se cherche encore après avoir été renouvelée à cent pour cent.

"Cette circonstance fait de Nîmes une écriture plus apte à profiter de contre-attaques qu'à faire le jeu. D'où ces résultats qui surprennent, mais sont inscrits dans une certaine logique.

"Remarquons encore que Nîmes domina souvent en première mi-temps sans marquer, et obtint ses deux buts alors que l'O.M., en seconde période, se trouvait plus souvent dans son camp.

L.D.

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 (photo : collection Francois Turpin)

 

 

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