Résumé Le Provencal du 15 avril 1973 |
L'O.M. A PERDU SA COUPE
Lyon a pris de vitesse les Marseillais |
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LYON - Faudra-t-il supprimer les matches de Coupe par aller et retour ? Les énormes avantages financiers de la formule ne se discutent pas, mais en trois petits jours, les passions nées de la première rencontre se répercutent dangereusement sur la deuxième. Les grosses primes aidant, les adversaires deviennent des ennemis, et le jeu de football, la guerre. Ce que nous avons vu hier à Gerland, au cours de la première mi-temps, est une honte pour le sport. Toutes les irrégularités possibles et imaginables s'étalèrent sous nos yeux, et il lui fallut un arbitre de fer pour rétablir l'ordre et la décence sur la pelouse. Le drame qui couvait depuis le début à travers les crocs-en-jambes, les pieds levés, les arrêts avec le bras... et les coups de vaches, divers, éclata à la 43me minute. Au milieu d'une nouvelle mêlée - une de plus - on vit Skoblar, hypernerveux, décocher à Domenech un crochet du droit fulgurant que Bouttier n'eut pas désavoué : l'un des plus beaux k.o. jamais vus sur un terrain de football. L'expulsion était inévitable, mais on excusera Josip car son geste n'a été que la conséquence du mauvais esprit général et de tous les excès qui attristèrent les véritables sportifs présents hier à Gerland. Nous avons la faiblesse de croire qu'il y en avait ! À LA MI-TEMPS TOUT ÉTAIT ENCORE POSSIBLE ! Tout cela est grand dommage, car cette première mi-temps avait été d'une rare intensité, et le plus souvent bien jouée. À peu près le même scénario que samedi soir à Marseille, mais à l'inverse. Comme on s'y attendait, les Lyonnais avaient attaqué le match à la vitesse supérieure, tout en observant une certaine prudence défensive. Dès la première minute, Ravier faillit marquer, ou faire marquer deux fois. On devine la résonance qu'eurent, dans l'immense stade plein à ras bord pour la deuxième ou troisième fois depuis sa création, ces premières banderilles lyonnaises. Mais, toujours comme à Marseille samedi, l'équipe attaquante n'arrivait pas à prendre un avantage réel. Tant et si bien que l'on pouvait espérer voir l'O.M. sortir de sa réserve, une fois passait l'orage Lyonnais. Certes, Lacombe, après avoir réussi l'exploit de crocheter Trésor en pleine surface de réparation, avait-il trompé Carnus d'un tir immédiat de la pointe du pied. Mais enfin, un but à zéro, cela ne faisait pas que rétablir l'équilibre. Il restait encore plus d'une mi-temps à jouer. Carnus ayant par deux fois évité deux nouveaux buts grâce à l'excellence de son réflexe, on arrivait à la mi-temps sur le score pouvant tout permettre, quand Skoblar, tel un tigre blessé, quitta le terrain. Nous savions déjà que le doublé de ce serait plus pour cette saison. UN LONG CALVAIRE L'O.M. a dix et sans Skoblar contre Lyon en pleine euphorie et soutenu par les choeurs de Gerland, il eut fallu un miracle pour rétablir la situation. Il ne se produisit pas, et pour tous les Marseillais présents à Lyon, cette deuxième mi-temps fut un long calvaire. Attaquer, ils l'auraient bien voulu, les Olympiens, mais c'était quasiment impossible. |
Les meilleures d'entre eux, ceux qui avaient encore les moyens de se battre vigoureusement, étaient pris presque exclusivement par les besognes défensives. En fait, Durand toute cette période, Keita resta seul en pointe, entouré de Cacchioni, Baeza et Mihajlovic. C'était beaucoup trop pour lui, d'autant plus qu'il ne reçut pratiquement aucune balle. Tout le spectacle donc, pendant cette deuxième mi-temps, fut assuré par la cavalerie légère de Lyon qui ne se gêna pas pour attaquer sous tous les angles et de toutes les façons. Ce fut un déferlement constant des Di Nallo, Chiesa, Lacombe, Ravier et Domenech, jouant franchement en position d'ailier droit, avec un bandeau sur le front ; ce qui se produisit alors été inévitable, et un cinglants quatre à zéro vint en conclusion de cette malheureuse partie qu'il faudra vite oublier. L'O.M. PARAISSAIT MANQUER DE FORCE Cependant, tant en première mi-temps qu'en deuxième, il apparut que l'équipe olympienne n'était pas dans un de ses meilleurs soirs. Au début de la rencontre, elle fit illusion par son calme et son métier, mais on devait se rendre compte assez rapidement que les joueurs marseillais étaient régulièrement battus par leurs adversaires dans la lutte pour la conquête du ballon. Nous avons vu assez souvent des équipes réduites à dix, faire front de manière plus efficace que ne le fit l'O.M. hier soir. L'équipe a accusé la fatigue des matches répétés qu'elle vient de disputer ces derniers temps et de sa remontée en championnat. Plusieurs joueurs, dont nous ne citerons pas les noms, parurent éteints sur le terrain et trop régulièrement battus par les Lyonnais. L'O.M. devra donc maintenant se consacrer à son championnat avec, au départ, une rencontre fort difficile contre Angers, sans pouvoir compter sur Skoblar. Vous savez tous, sans doute, qu'un joueur sorti du terrain est automatiquement suspendu pour la rencontre suivante. Il semble que l'O.M. ait manqué de force, hier soir, au stade de Gerland et que son adversaire lyonnais, beaucoup plus frais, sans doute parce qu'il ne vise que la Coupe, en a largement profité. Cependant, tant en première terminer cet article de commentaires sans souligner l'excellence impression produite par l'équipe lyonnaise. Comme à Marseille, sa défense intelligemment pivotée par Mihajlovic, fut très sûre. Quant à son attaque, elle conduisit de merveilleuses offensives avec comme chef d'orchestre Chiesa et Di Nallo qui forment un tandem sans égal en France, par son entente et la vitesse de son jeu. Ajoutons également que le jeune Lacombe a confirmé tout le bien que l'on pensait de lui. Cette saison, Lyon débarrassé de tout souci en championnat, sera un concurrent très dangereux en Coupe. Maurice FABREGUETTES |
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Le président GALLIAN : "L'arbitre, seul responsable !..." |
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LYON - Eh bien, voici une soirée qui ne contribuera pas à détendre les rapports déjà passablement perturbés entre les deux Olympiques, celui de Lyon et celui de Marseille, ni à apaiser les rivalités qui séparent depuis toujours les deux grandes villes qui se disputent le titre géographique de dauphin de Paris ! Accueilli par les sifflets, les Marseillais sont repartis aux vestiaires sous les huées. Alors qu'on se disputait et qu'on se tiraillait encore au milieu du terrain, certains joueurs marseillais voulant dire leur façon de penser à l'arbitre, Georges Carnus avait déjà regagné les vestiaires, ou un jeune ramasseur de balle - pas des plus sportifs, on va le constater - l'apostrophait en ces termes : "Alors, Carnus, tu me le donnes ton maillot ? " Et Georges Carnus, qui venait d'encaisser quatre buts, et qui ne méritait pas pareille humiliation, de lui répondre : "C'est malin !" C'est une rumeur confuse qui nous avertit un peu plus tard de l'arrivée de René Gallian, qui poursuivait une vive conversation avec l'arbitre, M. Peauger, et les délégués. Arrivé dans son vestiaire, le président de l'O.M. ne devait pas mâcher ses mots. "Je n'hésite pas à le dire, c'est M. Peauger qui a tué le match, qui a tué le spectacle et qui a tué l'O.M. "En effet, il a laissé faire à peu près tout ce qu'ils voulaient aux Lyonnais au cours de la première demi-heure, qui, à mon avis, a été décisive. C'est, en effet, au cours de cette période que le sort du match s'est joué. Nous avions déjà eu des ennuis avec cet arbitre à Lille, où les défenseurs nordistes s'étaient livrés à de véritables agressions sur la personne de Keita, mais nous avions oublié tout cela, dans la joie de la victoire. De ce fait, il ne nous serait pas venu à l'idée de récuser cet arbitre. " Je pense qu'il est aussi responsable de nos malheurs que les joueurs lyonnais ! Après tout, ceux-ci pouvaient agir impunément et ils auraient été bêtes de ne pas en profiter. "De retour aux vestiaires, à la mi-temps, je m'étais permis de recommander au mien, ce qui n'est peut-être pas très fair-play : Vous n'avez qu'à agir comme eux, puisqu'ils vous mettent sans arrêt les semelles, vous n'avez qu'à les caresser avec vos crampons. "Mais c'est tout de même l'arbitre le principal fautif. En n'agissant pas équitablement, il a faussé complètement le résultat du match, qui se traduit pour nous par une humiliation qui, en fait, ne veut pas dire grand-chose sur le plan sportif. "Qui plus est, l'exclusion de Skoblar, si elle paraît justifiée par les faits, ne l'est pas, en réalité dans l'esprit. "Josip avait été abattu irrégulièrement, mais sans méchanceté par son compatriote Mihajlovic, mais ce fut qui l'a mis hors de lui c'est alors qu'il était à terre, Domenech, avec qui il avait eu maille à partir au cours des premières minutes, est venu lui marcher littéralement sur le ventre. On connaît la nervosité de Skoblar, mais on peut penser qu'à sa place beaucoup de joueurs agressés comme il l'a été hier soir auraient agi de même !" Le principal intéressé, Skoblar, avait d'ailleurs curieusement assisté à la fin de la partie, du bord de la touche, sur le banc de l'O.M. Nous avons retrouvé complètement calmé au vestiaire, ou il confirmait les dires de son président. Nous lui avons demandé s'il ne regrettait pas son geste, lourd de conséquence quant à l'issue de la partie, il nous répondit : |
"Non, je ne regrette rien ! Domenech en avait fait assez pour qu'il ne méritât pas ce coup de poing. Il est rare, en effet, qu'un joueur professionnel se permette de venir piétiner sauvagement un joueur à terre. Il n'a que ce qu'il méritait. Aussi je ne regrette pas cette droite qu'il l'a envoyé au tapis pour le compte". "Je regrette seulement que les conséquences aient été aussi lourdes pour mon club !" oOo Mario Zatelli, lui, prenait les choses avec plus de philosophie et il nous disait sur un ton plaisantin : "Maintenant, nous voilà au moins débarrassés du souci de courir deux lièvres à la fois. Adieu la Coupe ! Tout pour le championnat ! Ce qui est embêtant, c'est que nous allons être privés de Skoblar pendant au moins trois semaines. Il va falloir nous atteler au travail avec Magnusson si nous voulons conserver la deuxième partie de notre double couronne". oOo Les joueurs, évidemment, parlaient beaucoup plus des incidents qui avaient provoqué, selon eux, leur défaite, que de la rencontre elle-même sur le plan technique. Gilbert Gress s'est montré d'un des plus virulents envers M. Peauger, qu'il accompagna de ses protestations et reproches jusqu'au vestiaire. L'Alsacien littéralement déchaîné, nous disait, approuvé par Bonnel : "Je vous assure que je lirai demain matin les journaux avec la plus grande attention, car je me demande comment vous allez pouvoir expliquer la soirée d'aujourd'hui. Je suis curieux, aussi de connaître ce que vous allez dire du comportement des Lyonnais. Est-ce là se comportait en véritables joueurs professionnels, qui font le même métier que nous ?" Lopez, qui ne parle pas beaucoup d'habitude, était également très excité : "Le Groupement avait, paraît-il, donné des consignes. Les arbitres, à l'occasion de ces quarts de finale et à la suite des incidents des matchs allers, ne devaient pas donner d'avertissement ? Une faute grâce et c'était l'expulsion. On se demande alors pourquoi les Lyonnais qui furent les premiers à commettre des agressions, à l'exemple de Domenech, pour ne citer que lui, ont eu droit à un traitement de faveur, alors que la première intervention de Bracci, qui n'était pourtant pas très bien méchante, se traduisit par la sortie du fameux petit carton jaune ?" oOo Assez curieusement, il semble que Skoblar n'ait pas été, d'ailleurs, expulsé sur-le-champ par l'arbitre. Tous les joueurs marseillais (et nous ne voyons pas pourquoi nous ne le croyons pas) disait que M. Peauger lui avait infligé d'abord un avertissement, car il avait contesté l'agression de Domenech, et qu'il ne s'était résolu à l'expulser de joueurs que sur l'insistance des joueurs lyonnais. On comprend donc de se fait que dans le cas olympien on sif confondu arbitre et adversaire, dans les mêmes reproches. Pour en terminer vers avec M. Peauger, héros malheureux de la soirée, nous voulons rappeler la conversation que le secrétaire général de l'O.M., M. Henri Neumann, avait eu avec l'un de nos confrères parisiens. Ce dernier, qui avait assisté au match de Lille, lui assurait en effet que son équipe allait avoir faire un peu plus tard à un adversaire supplémentaire, en la personne de ce malheureux arbitre. Curieuse prémonition ! Louis DUPIC |
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Aimé MIGNOT : "Nous ne pouvions pas perdre" LYON - Inutile de dire que la joie était sans mélange dans le camp lyonnais. Sablant le champagne sous la douche, les joueurs entonnaient un champ de victoire tandis qu'Aime Mignot nous lançait en exultant : "Vous voyez que je ne parlais pas à la légère en annonçant notre victoire. Je ne me suis trompé que sur la télévision. J'avais dit aux réalisateurs, en effet, que c'était une erreur de retransmettre la deuxième mi-temps et non pas la première. En fait, c'est après le repos que tous s'est passé. "Mes garçons ont fait ce soir un très grand match. Mais avant que Skoblar ne sorte nous pouvions mener par deux ou trois buts à zéro. Et, d'ailleurs, je crois que l'expulsion du Yougoslave n'a finalement influé en rien sur le résultat. Avec l'état d'esprit qui était le nôtre, nous ne pouvions pas perdre. Sur la lancée, il ne nous reste désormais plus qu'à battre Nice en championnat, vendredi soir". De son côté, M. Jean-Pierre Cappon, le directeur sportif, reconnaissait : "Je crois qu'il n'y a pas de problème, les Marseillais sont passés à côté du sujet. Je dirais même que ce quatre à zéro n'est pas cher payé, si l'on songe aux innombrables occasions de buts que nous avons eues. Di Nallo, en particulier, a joué de malchance tout au long de la partie". Quant au président rocher, il déclarait calmement : "Le plus dur maintenant est fait. L'O.M. était, de loin, l'adversaire le plus redoutable restant en course. Je suis certain que rien désormais, ne peut nous empêcher d'arriver en finale". Le mot de la fin était pour Domenech, qui nous lançait, avec un large sourire : "Une qualification vaut bien une arcade ouverte". |
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LE FAIT DU MATCH L'expulsion de Josip |
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LYON - Ce qui se dégage avant tout de ce quart de finale c'est bien l'ambiance dans laquelle il se discuta et qui suffit à tout expliquer. Les Marseillais furent sifflés abondamment lorsqu'il vinrent reconnaître, en civil, le terrain, une heure et demie avant le coup d'envoi. Hués copieusement un peu plus tard quand on passa aux affaires sérieuses, alors que leurs adversaires lyonnais étaient applaudis de façon proportionnée. Ambiance de la coupe à nulle autre pareille, que nous avons retrouvé hier soir dans l'immense nef de Gerland, garnie plus qu'aux trois quarts. Les supporters provençaux s'étaient déplacés en grand nombre. La proximité des deux grandes métropoles étant évidemment propice aux grandes migrations. Mais ce n'était pas suffisant, et ce fut une immense clameur triomphante suivie d'un énorme soupir de désappointement, qui accompagna, par exemple, la première escarmouche de la rencontre : une passe hasardeuse de Trésor en plein dans les pieds de Ravier, et un tir de l'ailier lyonnais nettement au-dessus. Comme nous en avons pris d'habitude, les charges marseillaises les plus anodines provoquées le déchaînement du public, qui, en revanche, applaudissait à tout rompre quant un Lyonnais parvenait à envoyer son rival au tapis. Se contester défavorable ne parut pas tout d'abord décontenancer tellement l'O.M., qui en a vu d'autres et a beaucoup retenu de ces expériences européennes. Quand on a tenu le coup au stade "Silesia" sous la pluie et les clameurs de 80.000 Polonais, dans le fracas incessant et assourdissant de leurs milliers de trompette filant inlassablement la même note, on ne se "dégonfle" pas si facilement à Gerland. Et les nerfs des Marseillais, persécutés par M. Peauger, qui les assomma de coups francs et de sanctions, furent mis à trop rude épreuve après le but de Lacombe au milieu de la première mi-temps. Ce furent ceux du pur-sang Skoblar, matraqué, agressé sans cesse, qui craquèrent les premiers. Son geste n'était pas excusable, mais tous ceux qui ont joué au football sans être protégés, comme ils auraient pu l'espérer par l'arbitre, peuvent le comprendre. L.D. |
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(photo : collection Rick Mond)