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Résumé Le Provencal

du 20 avril 1975

 

1 A 0 POUR BORDEAUX : LE TITRE S'ELOIGNE

L'O.M. s'est incliné au terme d'un match trop violent

BORDEAUX - En avance sur les quarts de finale du championnat de France de Rugby, nous avons assisté hier soir au stade municipal de Bordeaux à ce que les spécialistes de l'ovale appellent une farouche empoignade.

Pour un peu nous laisserions le soin à notre confrère Roger Couderc de téléphoner à notre place ce qu'il faut penser de ce match hors série.

Vous aurez une idée plus exacte de ce qui s'est passé quand nous vous aurons dit que Bereta, l'un des joueurs les plus correctes de l'hexagone a écopé d'un avertissement pour s'être vengé sur le doux Tokoto d'un coup qui lui avait été administré par un autre bordelais.

Un peu plus tard, le même Tokoto se ruait littéralement sur Trésor, ce qui donnait à la bagarre une allure très colorée.

C'est donc dans ces conditions très particulières que l'O.M. a perdu sans doute ses dernières chances de reconquérir le titre de champion de France.

Mais il faut bien préciser que les 22 joueurs sans exception sont responsables du jeu dur qui a sévi hier à Bordeaux. Il ne faut chercher d'excuses à aucun des participants à cette rencontre, c'est tous qui jouèrent irrégulièrement.

Il faut ajouter aussi que sur l'ensemble de cette rencontre, l'O.M. ne méritait pas de gagner.

Il a prouvé hier soir de sérieuses qualités physiques et morales, mais il a oublié aussi de jouer au football et c'est sans doute ce qui a causé sa perte.

Paulo Cezar qui, ordinairement, donne au jeu de son équipe un caractère collectif et parfois artistique, ne se mis en valeur que par quelques coups francs.

Quant à Bereta, qui on le sait représente beaucoup pour sa nouvelle équipe, il fut aussi très effacé.

Les matches à Bordeaux, décidément, se suivent mais ne se ressemblent pas. Il y a environ trois mois de cela contre Nîmes, en Coupe de France, nous avions vu un O.M. éblouissant et assisté à ce que l'on a qualifié à l'époque de merveilleuse samba brésilienne. Hier soir, rien de tout cela. Pas de samba brésilienne, pas de jeu collectif, mais seulement un O.M. laborieux et courageux qui, à l'image de sa défense et de Trésor, a fait de son mieux pour essayer de protéger le point du match nul jusqu'à quelques minutes de la fin.

UNE PREMIÈRE MI-TEMPS

MAUVAISE ET MÉCHANTE

Sur une pelouse impropre à un football de qualité, nous aurions volontiers pardonné aux 22 joueurs la médiocrité de la première mi-temps. Mais qu'an mauvais jeu vienne s'ajouter la méchanceté, voilà qui est surprenant et condamnable de la part de jeunes gens pratiquant le même métier.

Vous nous direz qu'il y a en jeu de grosse primes, trop grosses sans doute, et que ceci explique cela ; au propre et au figuré l'argent est devenu le nerf de la guerre des stades et on ne peut que le déplorer.

Nous n'allons pas faire le compte des coups échangés, ni essayer de savoir qui a commencé, mais il est certain que cette partie fut très déplaisante dans son esprit et que M. Bancourt, tel Ponce Pilate, s'en est tiré en infligeant quatre avertissements : deux à l'O.M. et deux à Bordeaux. Sur l'ensemble cette première mi-temps, les Girondins avaient généralement dominé, mais sans jamais réussir à passer complètement la solide défense olympienne.

UN BUT DE GALLICE

LE TITRE S'EN VA SANS DOUTE

Il restait alors toute la deuxième mi-temps pour voir l'O.M. passer de l'expectative à l'offensive. Il n'en fut rien hélas et cette deuxième mi-temps fut encore pire que la première par son mauvais esprit. N'insistons pas, nous avons déjà suffisamment souligné le fait.

Bref, durant la deuxième période les Girondins eurent de nombreuses occasions de marquer au moins un but et Couecou de Gallice en particulier en ratèrent deux qui paraissaient acquis.

C'est alors que l'O.M. pourtant largement dominé réussit en deux contre-attaques à tirer deux fois sur le poteau. La première fois ce fut Emon qui, profitant d'un loupé de toute la défense bordelaise, avait réussi à s'infiltrer. La deuxième fois ce fut au tour de Paulo Cezar, sur coup franc, de réussir ce même exploit négatif. Mais tout à fait en fin de match, inévitable se produisit et malgré la grande valeur de Trésor, la sûreté de Charrier et d'une manière générale des qualités athlétiques de l'ensemble de la défense olympienne, Jean Gallice réussit à donner le but de la victoire à son équipe.

L'O.M. SANS SES MENEURS DE JEU

Il est évident que nous n'avons pas retrouvé hier soir à Bordeaux le grand O.M., celui qui venait de faire au classement une remontée sensationnelle.

La cause la plus évidente est due à l'effacement de ses meneurs de jeu, Paulo Cezar, que l'on ne vit guère que sur quelques coups de pied arrêtés, joua le plus souvent en marge du match. Par moments, on aurait même pu se demander s'il était présent à Bordeaux. Bereta, également, ne joua qu'un rôle tout à fait modeste. Pour toutes ces raisons, Jairzinho, un peu trop esseulé au centre de l'attaque fut dans l'impossibilité de placer le moindre tir.

En fin de match, il fut même assez sauvagement "descendu" par un ancien olympien Couecou.

C'est donc tout le reste de l'équipe olympienne qui supporta le poids de la rencontre et plus particulièrement la défense. Trésor ? Une fois encore, fut le meilleur homme sur de son équipe et peut-être le meilleur homme du match, bien secondé par tous ses camarades de la défense.

Dans une équipe bordelaise très vive et très alerte et qui ne ressemble que d'assez loin à celle que nous vîmes au stade vélodrome, le meilleur joueur du match fut sans doute Tokoto.

Mais Jean Gallice, le petit Giresse et l'ensemble des défenseurs méritent également la citation.

Dommage, répétons-le, que cette rencontre ait été surtout marquée par une forme inhabituelle de brutalités réciproques.

Maurice FABREGUETTES

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Pourquoi ?

C'est, en effet, la seule grande question qu'on puisse se poser à la suite d'une rencontre aussi tumultueuse que celle que nous avons vécue hier soir. Aux vestiaires, nous avons mené évidemment notre petite enquête, bien que ce que nous avions vu puisse véritablement nous en dispenser.

Personne n'était coupable.

C'était toujours les autres qui avaient commencé. On se demande toujours si les adversaires des deux camps ont vu le même match que les journalistes ! Entendons-nous bien : nous ne voulons rejeter la responsabilité sur personne en particulier. Ce serait à la fois trop facile et trop difficile. Nous croyons que, pour faire un bon match il faut être deux. Pour en faire un mauvais aussi. Hier soir, avec les orchestres folkloriques, les concours de pancartes et de banderoles plus ou moins humoristiques, 20.000 supporters ayant acquitté malgré la pluie le tarif d'un match de gala, on partait en principe pour une véritable fête du football. De fête il n'y en eut pas, et il est bien difficile, maintenant, d'expliquer exactement pourquoi. Il y a, comme cela, des soirs où rien ne va, les choses se passent obligatoirement de façon confuse et désagréable.

Longtemps, nous avons vu deux équipes paralysées par la peur de prendre des risques. A la mi-temps, le bilan offensive des avants des deux camps se limitait à deux tirs lointains, en ce qui concerne les Bordelais, et à deux coups-francs de Paulo César. Un résultat, on le constate, assez mince !

La seconde mi-temps, avec la ruée bordelaise, allait l'être un peu plus animée, mais malheureusement génératrice d'incident de toutes sortes, au point qu'ont pu croire un instant la bagarre générale. On peut, évidemment, incriminer l'état du terrain extrêmement glissant, qui favorisait les glissades et les chutes spectaculaires, de même que les chocs toujours dangereux en pareil cas.

À notre avis, M. Baucourt peut également être incriminé même s'il distribua quantité de coups-francs et quatre avertissements, pas forcement aux plus coupables ! M. Baucourt est très certainement un bon arbitre, selon les termes des règlements, et un honnête homme. Mais, déjà, nous l'avions vu cette saison à Lyon incapable de tenir véritablement deux équipes qui voulaient se battre.

Il en était de même hier soir. C'est dommage !

Louis DUPIC

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Jules ZVUNKA :

"Un véritable guet-apens !"

Ils sont tous rentrés aux vestiaires couverts de boue qu'il s'agisse de civils ou de ceux qui venaient de jouer le match, et aussi dans les deux camps le coeur plein d'amertume.

En effet, nous venions d'assister tout comme 23.000 spectateurs bordelais à une furieuse explication, sans que nous puissions très bien démêler les responsabilités qui doivent être à notre avis partagées entre tous les belligérants.

Dans les vestiaires marseillais, l'entraîneur Jules Zvunka, oubliait complètement le côté technique de la partie pour ne s'attacher qu'aux attentions dont ces joueurs avaient été l'objet de la part de leurs adversaires bordelais.

"Je sais bien que le football n'est pas un jeu de fillette, c'est un sport viril et parfois brutal. Mais je crois qu'il ne faut pas confondre justement virilité et brutalité répétée.

La plupart de nos joueurs sont rentrés fortement marqués aux vestiaires. Je veux parler de Jair qui a dû laisser ses camarades à un quart d'heure de la fin et qui souffre sans doute d'une entorse au genou, de Bereta ou de Trésor.

Mais tous les autres ont souffert dans leur chair ! Ce qui m'irrite surtout, c'est le jeu, ce soir, de notre ancien co-équipier Didier Couecou qui a multiplié les agressions à l'égard de ses anciens camarades. Je veux bien que dans la vie Didier soit un parfait gentleman, mais ce soir, il ne s'est pas conduit comme tel.

Quant à l'entraîneur des Girondins, on nous a dit qu'il était licencié en psychologie. C'est bien possible, mais je trouve qu'il place assez mal ses enseignements".

Interrogé sur le match lui-même, Jules Zvunka nous a répondu : "Il est évident que l'état du terrain n'a pas facilité les choses aux deux équipes et qu'on lui doit en partie, les nombreux accrochages, glissages ou actions dangereuses auxquelles nous avons assisté ce soir.

Nous regrettons évidemment de n'avoir pas fait la décision moment où c'était encore possible car il ne faut pas oublier que juste avant d'encaisser un but à cinq minutes de la fin, nous avons raté nous-mêmes, en tirant deux fois consécutives sur les poteaux, de belles occasions d'ouvrir la marque. Mais enfin cela, j'estime que c'était le football. On tire à côté, on tire dedans, cela fait partie des règles du jeu.

Je peux vous assurer que je n'ai jamais assisté à la fin d'un match avec autant de colère qu'aujourd'hui, et le plus fort c'est qu'un garçon comme Bereta écope d'un avertissement qui l'empêchera vraisemblablement de jouer la semaine prochaine".

Marius Trésor, le capitaine marseillais, optait évidemment pour les dires de son entraîneur.

"Ce qui s'est passé ce soir est absolument inqualifiable. Le public était venu nombreux a assisté à un spectacle exécrable. Nous portions certainement une partie de cette responsabilité, mais je crois surtout que nos adversaires très tendus, ont pratiquement renoncé à jouer au football, ce qui explique tous les contacts et tous les mauvais gestes que l'on peut déplorer.

"Songez par exemple que Didier Couecou, pour ne citer que lui, fut pourtant un charmant camarade, agressa Georges Eo et, aux reproches ce dernier lui faisait, répondait :"Excuse-moi, je croyais que c'était Jair !".

Dans les vestiaires marseillais, ce n'était qu'un concert de lamentations. Il est évident, que tout le monde se rendait compte que le titre ne pouvait plus échapper à Saint-Étienne, mais on supputait également sur les conséquences physiques de la très dure rencontre d'hier soir. !

L.D.

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COUECOU : "Je jouais de cette façon à Marseille..."

Didier Couecou était évidemment sur la sellette. Tous les radios-reporters qui revenaient du vestiaire de l'O.M. le "chambraient" plus ou moins gentiment, en lui rapportant les propos que ses adversaires venaient de tenir.

Et c'est à Didier Couecou très détendu qui répondit à cela :

"Je ne vois pas, après tout, ce que les adversaires et anciens coéquipiers me reprochent. Lorsque je portais le maillot de l'O.M. certains étaient bien contents que je me comporte de cette manière ! D'ailleurs, on me fait une réputation exécrable de casseurs de jambes, alors que pareil accident ne m'est arrivé qu'une seule fois au cours de toute ma carrière : j'ai cassé la jambe du Stéphanois Barek, et je détiens une lettre de ce joueur reconnaissant que ce n'était absolument pas de ma faute, et que c'était lui, par une action dangereuse, était responsable de l'accident qui lui était arrivé".

Se retournant vers les radios-reporters, Didier Couecou ajoutait : "Ai-je le droit de réponse ?". Et, avec la verve qu'on lui connaît, il profita abondamment de ce droit corps qu'on ne pouvait évidemment, lui refuser.

Jean-Pierre Tokoto, qui avait été l'un des meilleurs hommes de la rencontre, nous expliquait :

"Je puis vous assurer que ce sont les Brésiliens qui ont commencé avec leur "cinéma". Il est impossible de les attaquer et de le toucher sans qu'ils se mettent à pleurer et recourir à l'arbitre en agitant les bras dans tous les sens. Et puis vous dire que j'ai subi autant d'agressions ce soir que Jair et Paulo Cezar. Je n'ai pas perdu du temps à me plaindre, j'ai continue à jouer !".

L.D.

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Les réponses aux questions que l'on se pose

- QUE FAUT-IL PENSER DE M. BAUCOURT ?

R. : Il est certain que l'arbitre fut complètement débordé et qu'il infligea des avertissements au petit bonheur la chance. Mais pour une fois nous l'excuserons. Les principaux responsables de cette odieuse rencontre furent les vingt-deux joueurs, à quelques exceptions près.

Dans le cas de ce match, c'est une compagnie complète de gardes mobiles qu'il aurait fallu pour faire régner l'ordre et surtout le véritable esprit sportif sur le terrain. Tout commence par des irrégularités, puis le jeu devient violent, et enfin complètement méchant.

Il est temps que la Fédération et le Groupement se penchent sérieusement sur ce problème. On en parle, on en reparle, mais pour ne fâcher personne, on ne prend jamais les décisions qui s'imposent.

Les arbitres mériteraient d'être mieux soutenus, et le délégué du match, au lieu d'être ce qu'il est des généralement, un aimable promeneur, devrait être l'oeil de la Fédération et faire sur ce qu'il voit des rapports pertinents.

Il n'appartient pas à une Fédération Nationale de modifier les règlements du football. Mais les lois du jeu actuel peuvent permettre de limiter le jeu méchant, si pas de l'interdire complètement.

- PAULO CEZAR A ÉTÉ "MATRAQUÉ" PAR ARRIBAS ?

R. : Arribas n'est pas un modèle de régularité, tant s'en faut, et il arrêta plusieurs fois le Brésilien avec ce que l'on peut appeler les moyens du bord.

Mais enfin, le fils de l'entraîneur de Nantes ne fut pas pour Paulo César un adversaire plus méchant que tous ceux qu'il trouve devant lui à chaque rencontre.

D'autre part, Arribas ne fut pas le seul à commettre des irrégularités sur le terrain. Un bon Paulo Cezar aurait tout de même réussi à tirer son épingle du jeu. Il faut convenir, qu'hier soir, il était en toute petite forme, ce qui explique sans doute en grande partie, la mauvaise partie de l'équipe olympienne.

- Y A-T-IL UN CAS COUECOU ?

R. : Comme il a dit lui-même, Couecou a joué hier soir comme il l'a fait souvent au stade vélodrome sous les couleurs de l'O.M. Pour l'avoir suivi pendant plusieurs saisons, nous avons constaté qu'il était la plupart du temps doux comme un agneau en déplacement, et parfois irrégulier sur son terrain. Il est sans doute à être soutenu par la foule supportrice. En tout cas, hier soir, la façon dont il abattit Jairzinho peut être cité comme l'un des plus mauvais gestes accomplis sur le terrain au cours de ce match. Nous savons bien qu'il reçut lui aussi des coups et que la défense de l'O.M. n'est pas des plus tendre, mais enfin tout cela n'excuse pas la brutalité dont il fit preuve sur Jairzinho.

À tout prendre, nous préférons encore un bon coup de poing franc et loyal, ce qui ne se traduit j'avais que par un "K.O", plutôt qu'une de ces "semelles", qui risquent d'expédier un camarade à l'hôpital.

M.F.

 

 

 

 

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