Résumé Le Provencal du 10 décembre 1968 |
L'O.M. continue son étonnante ascension 2 à 2 à LYON (De notre envoyé spécial : Louis DUPIC) |
|||||||
LYON - Donnez-nous des matches comme celui-là, on ne parle plus de crise du football. Tant il est vrai que les meilleurs réformateurs possibles ne sont pas les dirigeants, mais bien les joueurs eux-mêmes. Marseillais et Lyonnais ont joué hier, à Gerland, une rencontre d'une ampleur, d'une plénitude telle qu'elle nous a tous laissés assez pantelants et que le public local en a pratiquement oublié que les vainqueurs n'étaient pas les siens. Continuant son extraordinaire escalade, l'O.M. a enlevé sa quatrième victoire consécutive et on ne saurait dire qu'elle ait été facile, l'équipe lyonnaise n'étant tout de même pas la première venue ! Les Marseillais ont abordé la rencontre sans aucun complexe et, tout au long de 90 minutes, il aurait été difficile de dire laquelle des deux formations évoluait à domicile. Moralement, ils eurent l'immense mérite de réagir vigoureusement chaque fois qu'il fallait et notamment après les deux buts lyonnais qui survenaient psychologiquement assez mal. Les tournants du match En effet, l'O.M. avait pris la partie en mains lorsque son adversaire ouvrit le score à la quinzième minute. Dix minutes lui suffirent pour refaire son retard, et là encore le but refusé à Bonnel, pour une faute imaginaire de Joseph aurait pu constituer un véritable coup d'arrêt. Quelques secondes plus tard le métier était remis vaillamment sur l'ouvrage et le résultat ne se faisait pas attendre. En seconde mi-temps la réaction locale fut également foudroyante. Sans aucun doute sermonnés pendant la pause, les Lyonnais attaquèrent sous tous les angles et réussirent à égaliser, continuant même sur leur lancée à se montrer extrêmement dangereux. Et là, se situe ultime tournant du match : alors que Guy manquait l'occasion de donner l'avantage à son camp, Magnusson sur la contre-attaque, faisait basculer définitivement l'avantage en faveur de l'O.M. Mais sur toutes ces actions, il fallut se battre ô combien ! et certains Marseillais, tel Destrumelle et Bonnel finirent le match épuisés après avoir abattu un travail de géant. Des hommes libérés Nous avons déjà parlé d'équipe sans complexe, et c'est évidemment la première image qui vient à l'esprit. À l'exception de Escales et de Hodoul, tous les joueurs marseillais consacrèrent à l'attaque une partie de leur activité. Cette euphorie morale s'accompagna une grande aisance technique, tant il est vrai que tout est lié en football. Les Olympiens pratiquèrent un jeu généralement simple, précis et audacieux, couronné comme il se devait d'une belle réussite, se comportant entre footballeurs professionnels majeurs, conscients de leur valeur et de leurs responsabilités. Aux vestiaires le président Leclerc eut d'ailleurs une parole qui mérite d'être rapportée : "Ils ont joué comme Domergue aurait tant aimé qu'ils jouent". |
Football moderne Dire que l'O.M. joua à Lyon un football moderne ne veut peut-être pas dire grand-chose, mais c'est la seule expression que nous qui nous vient naturellement sous la plume. Par moderne, nous entendons, évolue tel qu'il devrait l'être par des hommes bien préparés physiquement, moralement et techniquement. Il est certain que les joueurs marseillais se battirent lucidement et souvent élégamment jusqu'à l'extrême limite de leurs forces, donnant conjointement avec un adversaire non négligeable, un fort beau spectacle aux 12.000 spectateurs. Nous nous apercevons que nous avons fort peu parlé des Lyonnais. Ils sont certainement inférieurs à nos représentants, puisque jamais l'avantage du terrain ne parut sensible alors qu'on le chiffre généralement à deux buts. Mais du moins, répondirent-t-ils par une volonté et un engagement digne d'éloges car il est bien évident que, pour faire un bon match il faut être deux ! A féliciter en bloc. A l'issue des dernières rencontres, nous avions pris l'habitude de mettre en évidence les mérites de l'artiste Magnusson et de l'athlète Joseph, tant temps leur influence nous paraissait prépondérante. Ils ne l'ont pas été à Gerland en dessous de leur réputation en marquant un but chacun et en posant comme à l'accoutumée à leur adversaire un problème bien difficile à résoudre. Le Suédois réussit quelques dribbles et tirs remarquables et se battit également comme un lion, allant jusqu'à se replier profondément en défense. Joseph bien que souffrant beaucoup des adducteurs, eut son rendement habituel conservant son avance sur son rival André Guy. Alors disons que les autres se hissèrent à leur niveau. Escale eut des parades décisives, Hodoul ne commit pas de faute. Les demis Novi et Zwunka renouvelèrent leur dernière sortie, tandis que Lopez et Djorkaeff répartirent leurs efforts harmonieusement entre la défense et l'attaque. Destrumelle et Bonnel jouèrent un très bon match, tandis que Fiawoo se comportait, plus souvent qu'auparavant en véritable ailier gauche. Le succès de l'O.M. à Lyon ne fut pas celui de quelques individualités mais bien plutôt celui d'un d'une équipe soudée bien meilleure qu'on ne le croyait tout en conservant ses solides qualités morales. Popluhar très discret Lyon faisait débuter l'international tchèque Popluhar et les regards étaient bien entendu fixait sur lui. Disons que ses débuts furent assez discrets. Sa lenteur et sa lourdeur lui voudront sans doute beaucoup d'ennuis dans un championnat de France dont le niveau n'est peut-être pas extraordinaire mais qui est du moins disputer vivement. Les meilleurs lyonnais furent Rambert, égal à lui-même, Leborgne et l'arrière Lhomme, qui tenta d'imiter Djorkaeff tout en surveillant Magnusson. Chauveau et Guy nous parurent nettement inférieurs à Escale et Joseph. D'ailleurs pour toutes les personnes interrogées la supériorité marseillaise ne faisait aucun doute. |
----------------------
BONNNEL, JOSEPH et MAGNUSSON buteurs marseillais |
|
LYON - La partie débute par ce temps gris et couvert qui annonce parfois la neige au moment même où le froid commence à devenir plus vif. Bien que l'O.M. ait été très bruyamment encouragé par des centaines de supporters munis de banderoles, c'est Lyon qui mène, par Rambert, la première attaque dangereuse (3e mn). Au cours des minutes suivantes l'O.M. fait bonne figure et domine dans l'ensemble sans pouvoir inquiéter Chauveau. Tout au contraire, Leborgne reprenant un faible renvoi de Djorkaeff, tire littéralement au-dessus de la barre (11e mn). 15e minute : PERRIN marque A la 15e minute l'ailier droit lyonnais Felix rabat habilement de la tête de balle venue de la gauche dans la foulée de son camarade Perrin qui marque de près. Cette réussite encourage les Lyonnais et Rambert mène coup sur coup des attaques extrêmement dangereuses, enrayer par escale, aux 20e et 24e minutes. Tout semble aller assez mal pour l'O.M. qui va réagir victorieusement. 25e minute : BONNEL égalise A la 23e minute, Chauveau charg2 par Joseph, lâche une balle que Bonnel met rapidement au fond des filets... sans mal pour les Lyonnais, M. Machin, l'arbitre, annulant le point pour irrégularité de Joseph. Mais deux minutes plus tard, Bonnel va prendre sa revanche à peu près dans les mêmes conditions, Magnusson ayant dévié vers lui un long centre de Djorkaeff. Décontractés, l'O.M. ne va pas desserrer son étreinte jusqu'à la pause. Chauveau ne se laisse pas surprendre par la balle appuyée de Djorkaeff à la 34e minute, ni par le tir croisé de Magnusson à 37e minute. Cependant, à la 42e minute, il ne peut que repousser un nouveau tir de Djorkaeff et Joseph, qui a bien suivi, loge irrésistiblement la balle dans le but. Sur sa lancée, l'O.M. est à deux doigts de creuser définitivement l'écart, mais Bonnel ne peut reprendre une balle de Magnusson qui roule impunément devant le but lyonnais. La seconde mi-temps débute logiquement par une vive réaction locale et pendant quelques instants on ne voit plus que des maillots oranges, Magnusson se rappelle néanmoins au bon souvenir des Lyonnais en dribblant magistralement, mais gratuitement, l'immense Popluhar. |
Djorkaeff, en soufflant de la tête à Félix, et Escale en arrêtant une reprise de volée de Lhomme, permettront à l'O.M. de passer cette période difficile dont le point culminant se situe au moment où M. Machin fait exécuté "une balle à terre" à cinq mètres du but marseillais. 55e minute : GUY égalise ...Peu après, l'égalisation lyonnaise, acquise par Guy à la suite d'un centre de Lhomme cafouillé par la défense marseillaise, est dans l'ordre normal des choses, l'O.M. ayant depuis le repos perdu quelque peu de sa belle assurance. 60e minute : tête de MAGNUSSON A la 60e minute on voit Guy poursuivi par Zwunka et Hodoul rater de peu l'occasion de donner avantage à Lyon. Mais la contre-attaque marseillaise et payante. Centre de Destrumelle sur Chauveau et Magnusson, surgit comme un diable d'une boîte, marque superbement de la tête. Quel match ! Les Lyonnais ne renoncent pas et Escale doit s'envoler pour cueillir un centre de Félix (61e). L'O.M. comprenant qui ne doit pas se laisser dominer, coup sur coup Bonnel et Joseph sont dangereux. Un coup franc de Destrumelle provoque une belle panique devant le but lyonnais (75e). Rambert, bousculé par Leborgne se reçoit mal sur l'épaule et doit quitter le terrain (80e) Lyon perd là malheureusement son meilleur joueur, remplacé par Degeorges. Dans la nuit et le froid l'O.M. conserve finalement, et somme toute assez facilement, son avantage. Louis DUPIC |
----------------------
M. Leclerc : "Mon pari tient toujours !" |
LYON - Dans les curieux vestiaires voûtés de Gerland, la joie était évidemment marseillaise et le désappointement le lyonnais. M. Leclerc s'était tout d'abord intéressé au classement et annonçait à ses hommes leur remonter à la 10me place. "On a du me prendre pour un illuminé lorsque j'ai parlé que nous terminerons dans les cinq premiers. Eh bien, mon pari tient toujours et je suis sûr que nous allons en faire souffrir beaucoup en Coupe de France." Mario Zatelli, le directeur sportif, qui avait accompagné l'équipe, jubilait : "Quel bon match, en vérité. Notre équipe a joué sans aucun complexe comme si elle n'opérait pas à l'extérieur. Et cette décontraction a été payante. Cet avis était nullement partagé par tous les joueurs. Par ailleurs, Joseph s'étonnait que son action sur Chauveau ait fait refuser un but de marquer par Bonnel. "J'ai sauté en même temps que le gardien lyonnais, nous dit-il, je ne l'ai pas bousculé. Il a botte la balle qui est tombée dans les pieds : Joseph". Fiawoo enchérissait : il n'a pas commis de faute. Par contre Kuffer m'a ceinturé comme au catche ou au rugby". Les défenseurs marseillais, eux, affirmèrent que le but égalisateur Lyonnais avait été précédé d'une faute de main de Perrin. Mais tous ces petits détails n'avaient pas grande importance pour des garçons extrêmement heureux d'avoir enlevé leur quatrième succès consécutif. Interrogé au sujet de Popluhar, l'opinion marseillaise, unanimes était qu'il s'agissait, bien sûr, d'un homme de classe, mais dont la lenteur et la lourdeur aurait du mal à s'accommoder à notre championnat. |
----------------------
Mignot : des circonstances défavorables |
L'entraîneur lyonnais Mignot n'était, on sans doute, pas tellement satisfait. Rien ne va plus pour nous depuis novembre. Notre jeu collectif s'est complètement détériorés été. Mais aujourd'hui les circonstances ne nous ont pas été favorables. Les tournants du match pouvant, tout comme aux Marseillais, d'ailleurs excellents, nous permettre de prendre l'avantage. "Vous me demandez, ce que je pense de Popluhar... Il est évident qu'il n'est pas en forme et nullement habitué au jeu de ses camarades. Cela devrait s'arranger assez facilement et bien vite". |