Article Le Provencal

du 28 août 1969

OM - Saint Etienne

Un beau gâchis

44813 spectateurs, 44 millions d'A.F., record de recette. Ce match OM Saint Etienne aurait pu constituer l'un des sommets de la saison de football professionnel, mais voila, à la 75me minutes, il a fallu que 5000 exaltés, se croyant au Carnaval et non dans un stade envahissent le terrain parce que l'arbitre avait refusé le but égalisateur pour l'Olympique, pour un spectacle de qualité, haut en couleur, passionnant se transforme en "charlottade" indigne d'une grande ville dont certains de ses habitants qui se prétendent des sportifs ne sont en réalité que des pales troublions recherchant les incidents, les éclats.

L'ambiance, sud américaine c'est très joli, mais envahir le terrain (4 fois en 75 minutes), frapper l'arbitre, les joueurs visiteurs, lancer des pierres, des boites sur les dirigeants est ce digne d'individus du XXeme siècle ? Nous ne le penons pas. Si le sport doit engendrer des mini révolutions, alors, c'est que certains ne sont pas dignes d'assister à des spectacles sportifs ?

Mais après ce préambule nécessaire, il n'est pas inutile de rappeler la chronologie des événements et d'essayer de situer les responsabilités.

Comme pour les rencontres de coupe OM - Angoulême, OM - Angers, les abords de la pelouse avaient été envahis bien avant le coup d'envoi et l'arbitre hésitait à signer le début de la rencontre.

Plusieurs appels furent diffusés au haut parleur, demandant aux spectateurs de bien vouloir reculer de 3 mètres, après bien des atermoiements, ils finirent par obéir et jusqu'à la 75ème minutes, ils ne provoquèrent pas d'incidents notables, si ce n'est cette détestable habitude de centaines de "Derviches" "tourneur" se croyant obligés d'envahir le terrain chaque fois que leurs favoris marquent un but ! hier soir, cela se produisit à deux reprises jusqu'à la 75me minute.

A ce moment là, Magnusson exécuta un excellent centre que Djorkaeff reprit de façon remarquable. Trois buts à trois ! il venait d'égaliser, les spectateurs exultaient.

Aussitôt après, l'arbitre de touche M. Martin agita son drapeau pour indiquer à l'arbitre M. Machin que le but olympien était hors jeu et qu'en conséquence il devait être refusé ! Les specateteurs avaient envahi le terrain pour la 3me fois.

M. Machin s'approcha de son arbitre de touche et le questionna : "Vous en êtes bien sur ? " M. Martin remua la tête. "Je le crois ! enfin faites ce que vous voulez "

Et M. Machin décida d'annuler ce but, alors se fut un véritable déchaînement 5000 " fous fous" firent irruption sur la pelouse, ce fut une confusion extraordinaire ! on ne voyait plus les joueurs, le service d'ordre était débordé ! les joueurs stéphanois regagnèrent les vestiaires comme ils le purent, plus ou moins protégés par leurs camarades olympiens. Larqué reçut un violent coup derrière la nuque donné par un spectateur, l'arbitre M. Machin fut frappé au bas ventre. C'est un miracle qu'il n'y a pas eu davantage de blessés !

Les vestiaires des marseillais étaient fermés et nous ne pûmes interviewer les olympiens par contre, nous avons vu les Stéphanois qui étaient unanimes à sanctionner l'attitude d'une minorité de "nervis"

L'entraîneur Albert Batteux nous a confié : "Avant le match quand j'ai vu l'ambiance qui régnait au stade Vélodrome, j'ai compris qu'il y avait de l'orage dans l'air ! et j'ai donnée mon avis au président Rocher : "Je préfère que nous encaissions rapidement un ou deux buts ! de cette façon ils seront contents, il n'y aura pas d'incident ! Comme nous avons dominé, il est normal que ce match se termine comme il s'est terminé."

Jacquet constatait : "c'est incroyable de voir ca ! Vraiment ils ne sont pas civilisés ! Nous avons été tous plus ou moins frappés qu'on ne vienne pas me dire qu'il aime le football à Marseille."

Revelli était formel : "l'arbitre était obligé de refuser le but égalisateur de l'OM, car sur l'action, Bonnel état hors jeu".

Peut on situer les responsabilités ? elles sont multiples.

L'OM a déjà joué avec le feu à plusieurs reprises dans d'autres matches importants, en Coupe devant Angoulême et Angers, hier soir, on a dépassé la coté d'alerte.

Il y a longtemps que l'on aurait du ceinturer la pelouse du stade Vélodrome pour éviter de semblables incidents à ceux d'hier soir ! l'OM n'a pas pris cette précaution. Le président Marcel Leclerc s'en explique : "ils étaient nettement énervés que je me demande si un fossé, des ponts levis auraient suffi pour protéger les acteurs de ce match, mais à présent c'est évident il faudra mettre des barrières."

L'arbitre M. Machin a mis le feu aux poudres involontairement. Il a agi en son ame et conscience " En 21 ans c'est la première fois que je dois arrêter un match que je dirige ! "a t-il déclare.

Le juge de touche M. Martin a reconnu : "Je crois que j'ai manqué de psychologie"

Enfin, il faudra faire comprendre à certains individus qu'aimer son club cela ne consiste pas uniquement à lancer des fusées, à frapper arbitre, joueurs, policiers.

Jusqu'à présent cet article ressort d'avantage de la chronologie des faits divers que celle de football, il y a eu pourtant un match très agréable, très dispute qui a duré 75 minutes et au cours duquel nous vîmes d'agréables phases de jeu sanctionnées par 5 buts de belle facture, signés de la façon suivante : 38me Loubet (OM), 40me Keita (Saint Etienne), Larqué (Saint Etienne), 48me Loubet (OM), 49 Keita (Saint Etienne). Il y eu même un -me but obtenu par Djorkaeff et dont on connaît les prolongements.

L'OM va donc avoir match perdu et le terrain suspendu ! N'est ce pas lamentable ?

Alain Delcroix

Article Le Provencal

du 29 août 1969

Passant du meilleur au pire,

le public marseillais a fait grand tort à l'OM

Douze heures après les violents incidents qui écoutèrent de seize minutes la rencontre au sommet, le stade Vélodrome est étrangement calme...

Des huit heures du matin, le président Leclerc est venu faire le tour du propriétaire, décidant des mesures à prendre avec le directeur, Guy Vassal. Mesures d'ailleurs extrêmement simples : le grillage qui entourait auparavant la pelouse sera rétabli. Pour cela les organisateurs ont exactement un mois devant eux, car aucun match ne se jouera à Marseille d'ici le 1er septembre, date de la venue des Tchèque de Dukla;

Au moment où nous arrivons, le président est reparti pour Paris et le porte-parole de l'OM sera son secrétaire général, M. Neumann, qui répondra à nos questions.

On a du s'étonner à juste titre que les organisateurs n'aient pas cru apparemment au succès de ce match. M. Leclerc ayant demandé à son collègue Rocher de le jouer à Saint Etienne, "Marseille étant déserte en août".

De nombreux spectateurs font grief à l'organisation d'avoir mis en vente 45000 billets alors que 35000 personnes peuvent raisonnablement trouver place dans l'enceinte.

Beaucoup de gens incriminent le service d'ordre insuffisant, et pas assez énergique. Un service d'ordre, impuissant tout d'abord à contenir le flot des arrivants, puis à le refouler assez loin des lignes délimitant la pelouse.

M. Neumann, comme pierre Gallian, s'est retrouvé au coeur du problème. Ils ont leur opinion sur les origines des incidents et sur les attitude de M. Machin, l'arbitre de la rencontre et de son juge de ligne, M. Chorel (et non M. Martin comme nous l'avons annoncé par erreur)

"Pour nous tous, Bonnel et Joseph ne pouvaient etre hors-jeu puisque Magnusson a centré en retrait et presque de la ligne de but. D'ailleurs M. Machin n'a pas hésité et accorde immédiatement le point. Mais les stéphanois ayant vu M. Chorel agiter son drapeau en ont fait état et ont attiré l'attention de l'arbitre, d'ou les palabres qui ont suivi à la grande colère des centaines de spectateurs bien placés, puisqu'au bord de la touche.

Pour nous les arbitres ont surtout eu le tort d'accepter de diriger une rencontre dans des conditions de sécurité aussi précaires. Ilsle firent évidemment sous la pression générale

"ALLEZ Y ! IL NE SE PASSERA RIEN !

Ils furent ensuite le jouet des évènements

Il est rare que des incidents empêchent une rencontre de championnat pro de se dérouler jusqu'au bout.

Mais en l'occurrence, le club organisateur est responsable de tous les incidents qui pourraient se produire dans les enceintes des stades.

La commission compétente se réunira mardi prochain " on peut redouter plusieurs dédissions qui paraissent inéluctables

1)sur le plan sportif, elle donnera match perdu à l'OM

2) le stade peut être suspendu pour une ou plusieurs rencontres

3) une amende sera infligée à l'OM

(Ainsi Saint Etienne vient d'écoper de 500 francs pour jets de bouteille sur son terrain

L'OM devait recevoir l'A.C. Ajaccio le 20 septembre, retour de Prague, il demandera à jouer au Parc des Princes ou à Nice, à la même date.

Ne terminons pas sans louer comme il convient l'attitude des joueurs et dirigeants marseillais qui firent l'impossible pour protéger leurs visiteurs et les arbitres. Les Stéphanois ne s'y trompèrent pas, qui nous prièrent de remercier leurs camarades de l'OM pour leur courage et firent sportivement la part des choses, ne confondant pas les énergumènes assoiffés de pagaille et les membres du club, désolés de ce qui arrivait.

Quand au public marseillais et a sa fraction turbulente, ne sent-il pas aujourd'hui, lui qui est capable du pire, mais aussi du meilleur, qu'il a joué avec le feu, fait du tord au club qu'il aime et côtoyé le drame.

Louis Dupic