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Résumé Le Provencal

du 14 décembre 1970

 

DOUCHE BORDELAISE !

L'ombre de l'O.M. sous le soleil de la Gironde

Nous avions titré dans "Le Soir :

"L'O.M. soleil, contre l'ombre des Girondins".

Ce fut exactement ça.

À l'envers.

L'ombre de l'O.M., sous le soleil de la Gironde.

La rencontre terminée, nous n'avons entendu que des opinions concordantes.

Chez les Girondins, dans les vestiaires de l'O.M., dans les coulisses, chez les neutres et sortant de la bouche des supporters des deux camps : un seul commentaire :

- Le meilleur du jour à légitimement et indiscutablement gagné.

Mario Zatelli n'avait même pas pris sa grosse voix pour constater ce fait aussi évident qu'un et un font deux.

Il fallait bien que ça arrive tôt ou tard. La loi des longues séries.

Après une période rose arrive inévitablement un jour noir.

L'important est de ne pas tomber dans la série de la même couleur.

L'O.M. pouvait supporter un échec.

C'est fait.

Il ne faut ni en faire un drame, ni en sous-estimer la portée.

Venant après la mésaventure de Saint-Étienne à Sedan, ce revers semble prouver qu'il n'y a pas une seule équipe invulnérable, en France, cette saison.

En s'en doutait d'ailleurs un peu.

2 à 0 à la mi-temps :

pas cher !

La rencontre est assez facile à raconter.

Toujours les premiers sur la balle, les Girondins conduisirent le jeu, presque de bout en bout.

Cet avantage surtout visible et net en première mi-temps.

Notre carnet de notes est divisé en deux colonnes, sous le titre "occasions de buts".

À gauche (la colonne de l'O.M.) un retourné de Couecou et un coup de tête de Skoblar.

À droite : une pleine demi-page d'écriture, dont vous trouverez le détail dans la relation du match.

À la mi-temps, les Girondins menaient par 2 à 0 et l'on pouvait objectivement estimer que ce n'était pas cher.

Jamais - sauf peut-être à Trnava - nous n'avions vu l'O.M. aussi ballotté par son adversaire et par les évènements.

Trop de lacunes

On va vous demander maintenant :

"Pourquoi ?"

Deux causes essentielles :

A) Le milieu de terrain, Novi Leclercq, Couecou, ne put jamais prendre la situation en main (en pied si vous préférez) ni même la stabiliser.

En face, Burdino, Giresse et Grabowsky faisaient la loi.

B) Magnusson, soit qu'il ait été en petite forme, soit que Rostagni ait fort bien joué (il y a vraisemblablement un peu des deux) fut dans l'incapacité de jouer son rôle habituel.

Il ne pesa jamais sur la défense girondine et aucune de ses actions ne réussit à la mettre vraiment en difficulté.

Dans ces conditions, le reste de l'équipe fut placé dans une situation très difficile.

L'attaque, privée de bonnes balles, et la défense souvent aux abois, ne purent pas grand-chose pour remédier aux lacunes d'une équipe faisant eau de toutes parts.

De Ruiter et Rostagni

Il convient tout de même d'ajouter que si l'O.M., imprécis, inconstant et d'une grande lenteur d'exécution, fut méconnaissable, les Girondins, eux, réalisèrent un fort bon match.

Ils ne se contentèrent pas d'être les premiers sur la balle, de s'en assurer généralement la maîtrise, ils surent, aussi, fort bien l'utiliser.

Le football français est-il plus riche qu'on ne le croit ?

En tout cas, les spectateurs de cette rencontre ont eu du mal à croire que l'un des adversaires était le premier, le futur champion, et l'autre la lanterne rouge.

Deux Girondins s'imposèrent constamment : Ruiter, le mal-aimé, par sa technique, sa finesse, son sens du jeu, sans oublier sa ruse, et Rostagni, lequel justifia pleinement sa qualité d'international.

Mais ils ne furent pas les seuls, Burdino se montra excellent et efficace, Giresse, l'espoir, a beaucoup plu, et le Danois Jensen, s'il n'est pas un génie de la balle ronde, a eu au moins le mérite de marquer deux forts beaux buts.

Pas morts, les Girondins.

L'hirobonnelle

"Qui va à la chasse perd sa place".

Ce vieux proverbe n'est certainement pas vrai, pour Bonnel.

"Le balayeur de Florensac", comme l'appellent ses amis, manqua terriblement.

Sans lui, le ménage fut moins bien fait et si le jeune Leclercq eut parfois quelques excellents éclairs offensifs, il n'a pas et de loin cette rigueur, cette présence constante qui font de "Jo" Bonnel un titulaire presque aussi irremplaçable que les deux as étrangers de l'équipe.

Aussi, après le match, tout le monde me disait :

"Ah ! Si Bonnel !"

N'exagérons rien ; une hirobonnelle n'aurait pas fait le printemps de l'O.M., hier à Bordeaux, mais elle aurait sans doute contribué à adoucir l'automne de cette journée grise.

Maurice FABREGUETTES

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 Le fait du match

L'absence de BONNEL...

Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! Dans les conversations marseillaises, un nom revenait sans cesse : celui de Joseph Bonnel. Un homme sans laquelle l'O.M. ne serait peut-être pas ce qu'il est devenu.

Nous avons posé la question à Mario Zatelli. Pour le coach, pas de problème ! Bonnel est toujours là où il faut pour "faire le ménage", sans avoir l'air d'y toucher, aussi prompt à stopper un adversaire menaçant qu'à aider son attaque et même dans les grandes occasions à y aller de son petit but.

Si le mieux terrain de l'O.M. a été nettement dominé par son vis-à-vis ce n'est pas par hasard.

René Gallian est formel :

"Avec le balayeur de Florensac (sic) nous n'encaissions par les deux premiers buts, j'en suis persuadé. Il aurait été là pour empêcher Budino et Jensen de tirer !"

Mais c'est Magnusson l'artiste, qui rend à l'indispensable artisan le plus bel hommage : "Il m'est impossible d'avoir mon meilleur rendement si Bonnel n'est pas là en soutien. C'est lui qui permet aussi la plupart de nos combinaisons avec Lopez. Aujourd'hui, le ballon n'est jamais arrivé dans les meilleures conditions..."

L'absence de "Zizou" n'explique sans doute pas complètement la défaite de l'O.M., mais elle constitue l'une des raisons évidentes.

L.D.

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 Ils disent

Mario ZATELLI : "Laissez-moi réfléchir"

Les coulisses (rayonnantes) bordelaises

Après une défaite aussi indiscutable, il ne reste plus qu'à faire contre mauvaise fortune bon coeur. Nos olympiens en ont perdu l'habitude, mais ils se montrèrent beaux joueurs. Ainsi Marcel Leclerc :

- Nous avons été si mauvais qu'il me faut bien croire à un incident, semblable à celui de Nancy. Mais il est évident que, si nous voulions justifier nos ambitions, il conviendrait que ce genre d'aventures ne se reproduise pas trop souvent.

- Cette défaite précipitera-t-elle vos beaux projets actuels de recrutement ?

- Elle ne peut ni les freiner, ni les accélérer, mais il est certain que la fatigue s'est fait sentir aujourd'hui, dans notre équipe, et il me paraît toujours souhaitable d'étoffer notre effectif !

X X X

Mario Zatelli avait accueilli, lui aussi, cet échec avec assez de philosophie.

- Après une bonne série, il fallait bien que cela nous arrive un jour. Eh bien, c'est fait ! Mais je ne veux pas analyser notre match sous le coup de la déception. Je préfère attendre demain.

"Je ne vous répondrai donc que sur un point : Bonnel nous a beaucoup manqué, comme je le craignais. Notre trio intermédiaire n'a pas fait la loi..."

X X X

Toute la semaine, Didier Couecou, le seul véritable Bordelais sur le terrain, avait été au coeur du problème :

- Vous dire que je suis déçu n'est qu'un euphémisme. En fait je suis tout à fait catastrophé !

J'aurais tant voulu réaliser un bon match et gagner avec l'O.M. dans ma ville natale. Le football m'a refusé ce petit plaisir que j'espérais tant.

"Je voudrais ajouter tout de même que nous ne sommes pas entrés sur le terrain en conquérants, et que personne n'a le droit de se moquer de nous.

Mon grand regret ? De n'avoir pas mis au fond mon retourné en début de match. C'était l'égalisation qui pouvait tout changer !

X X X

Le public ne fut pas tant avec Roger Magnusson. Le Suédois, comme ses camarades, était parfaitement conscient de ne pas avoir joué un bon match.

- Je trouve que Bordeaux vaut beaucoup mieux que son classement. Je craignais ce match, car, dans la situation de nos adversaires, il leur était indispensable de le gagner.

"Quant à nous, c'était un très mauvais jour. L'explication en est, je crois, l'absence de Bonnel, Lopez et moi, notamment, avons besoin de lui pour avoir notre rendement le meilleur.

"Rostagni m'a mené la vie dure. Mais je trouve qu'il est uniquement destructeur et ne cherche jamais à assurer ses passes.

Pour moi, Diego lui est supérieur !"

X X X

Je crois que je vais pouvoir prendre des vacances... nous dit Skoblar.

"Je traîne deux matches avec sursis depuis pas mal de temps et, cette fois, ils ne vont pas me manquer...

- Mais, quel mauvais match nous avons fait. Nous avons tous besoin de nous reposer !

Alain Maccagno se rhabillait, à côté de son inséparable ami Leclercq. Il soupirait :

- Je crois bien que c'est moi qui porte la poisse à l'équipe !

Rappelez-vous à Nancy, déjà, j'étais deuxième homme !

X X X

Le capitaine Jules Zwunka nous apporta sa conclusion :

- Je sais parfaitement que ce sont là des choses qui arrivent. Mais, ce qui m'inquiète, c'est l'impuissance que nous avons montrée aujourd'hui, avec tout ce que cela implique de doutes pour l'avenir !

(RECUEILLI PAR LOUIS DUPIC)

 GERARD (l'entraîneur des Girondins) : "NOTRE FORCE : LES PREMIERS SUR LA BALLE".

L'entraîneur et ancien gardien des Girondins, Gérard, avait pour une fois le sourire. Chose exceptionnelle cette saison à Bordeaux, ou son équipe avait perdu 6 matches sur 9.

" Nous avons été constamment les premiers sur la balle - nous a-t-il dit - ce fut à la base de notre domination. Mais il convient d'ajouter que les Olympiens ont un peu facilité notre tâche en faisant trop de mauvaises passes. L'O.M. a beaucoup gagné ces derniers temps, ce qui contribue assez paradoxalement, à diminuer le pouvoir combatif d'une équipe.

"Quoi qu'il en soit, je suis très heureux et j'espère que nous ferons aussi bien les prochaines fois !

 M. GALLICE (le girondin de Marseille) : "LE JEU COLLECTIF DE L'O.M. M'A DÉÇU !"

Gallice fut jadis, avec Scotti, Robin... un brillant junior de l'O.M. Puis il devient un pur Girondin. Il est actuellement, l'un des dirigeants du club. Son fils, si vous ne le savez déjà, est l'excellent avant-centre d'Angoulême.

"Le jeu collectif de l'O.M. m'a grandement déçu aujourd'hui nous a-t-il confié.

"Je suis persuadé qu'il ne s'agit que d'un mauvais jour, car la place de l'équipe marseillaise (la première encore) prouve clairement que le mal n'a pas été qu'occasionnel.

"Au demeurant, la défaite du "leader" devant la "lanterne rouge" et un élément banal dans le football. Je suis persuadé que l'O.M. après ce coup d'arrêt, saura reprendre sa marche normale.

Pierrot DANZELLE (l'ex-dauphin de Bordeaux) : "JE N'AI PAS VU LE VRAI O.M. !"

Pierrot Danzelle est un ancien Dauphin sétois de la grande époque Champion de France en 1939 avec Koranyl, Escola, Brusseaux, Balmanya, etc... il est depuis longtemps entraîneur des équipes amateurs de Bordeaux. C'est un connaisseur et un psychologue. Écoutons-le :

"Je ne crois pas avoir vu le vrai O.M. aujourd'hui. Dans la marche d'une très bonne équipe vers le titre, il y a toujours des "trous", des passages à vide.

"Dans le temps, quand cela nous arrivait à Sète, le Père Bayrou nous disait : "Surtout ne faites pas cette tête, ce soir on va faire une bonne bringue pour oublier ça !"

(RECUEILLI PAR MAURICE FABREGUETTES)

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M. Ulhen (l'arbitre) :

"un avertissement à Skoblar"

C'est M. Ulhen lui-même, en petite tenue, nous le l'a dit dans son vestiaire.

"Non je n'ai pas infligé un avertissement à Magnusson, en première mi-temps. Je me suis contenté de le réprimander. Si je lui avais donné un avertissement j'aurais dû en donner un autre à Rostagni.

"Mais j'ai bien noté Skoblar sur mon carnet. Il le méritait. Si à Marseille, jouant dans une équipe adverse, il aurait agi de la sorte, il y aurait eu une petite révolution !.."

Conséquence probable :

deux matches de suspension

Ajoutons à ses déclarations que Skoblar, qui avait déjà deux matches de suspension avec sursis, risque, au mieux, deux matches de suspension ferme.

Donc, selon toute probabilité, Josip Skoblar ne pourra jouer ni contre le Red Star (20 décembre), ni à Ajaccio (31 janvier).

Dure et la loi.

M.F.

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