Résumé Le Provencal du 17 septembre 1972 |
SKOBLAR - LECLERCQ, un tandem fatal à RENNES |
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Les héros de Lyon étaient-ils fatigués ?. Ou le jeu de Rennes convient-il toujours aussi mal aux olympien ? Ce sont les questions que l'on se posait à la mi-temps. Quoiqu'il en soit, le versatile public du Stade-Vélodrome avait vu,, avec un déplaisir certain, son équipe laissait la conduite du jeu aux Bretons, sur son propre terrain. La raison en était évidente, le milieu du terrain des visiteurs se montrait supérieur, dans l'attaque et le maniement rapide du ballon, à celui de l'O.M. Il est vrai que l'entre-jeu a toujours été une spécialité rennaise. Il est encore heureux pour les champions de France, qu'à la préparation, les footballeurs rennais n'ajoutent pas la finition. Sinon, à la mi-temps, le petit 1 à 0 inscrit au tableau d'affichage aurait-il pu être modifié à l'avantage de l'équipe visiteuse. UN BEAU NUMÉRO DE BILBOQUET Pourtant tout avait commencé de manière à satisfaire pleinement la grande foule du Stade-Vélodrome. Un excellent premier quart d'heure de l'O.M. et un festival de "têtes" faisant un à zéro et six buts au classement personnel de Skoblar. Six buts qui allaient faire sept, un peu plus tard, et l'égalisé avec le Niçois Revelli. Mais nous n'en sommes pas encore là. Donc après que Buigues, sur un corner court de Magnusson ait failli tromper Bernard d'un revers de tête, nous allions assister à une manif un magnifique numéro de bilboquet. Tête de Bonnel, tête de Skoblar, comme à la parade. Du grand jeu aérien. Mais là-dessus, Skoblar ayant raté un penalty les Rennais avaient passé la vitesse supérieure et à la mi-temps, l'O.M. ne faisait nullement figure de triomphateur. LES ZONES DE VÉRITÉ Nous n'étions cependant pas tellement inquiet, pour deux raisons qui sautaient aux yeux, même pendant la meilleure période rennaise. La supériorité au milieu du terrain n'est qu'un avantage très relatif, si l'on est inférieur dans les deux zones de grandes vérités : devant son but et devant celui de l'adversaire. |
Or l'O.M., tant en attaque, qu'en défense dispose d'atouts faisant défaut aux Bretons. On ajoutera à cette réalité que les Rennais, en voulant percer la défense de l'O.M. en son centre, par petites passes répétées, allaient à leur propre perte. Arme offensive d'hier le "une - deux" est, aujourd'hui, passablement démodé du fait de la densité des défenses et, en plus, de la libéralité des arbitres accordant tous les droits aux arrières. Voilà pourquoi, en deux coups de cuillère à pot, ou plus exactement une de ces reprises dont Josip a toujours le secret et un gauche foudroyant de Leclercq, l'O.M. allait-il, en deuxième mi-temps rétablir la situation et mettre les applaudisseurs de son côté. CEUX QUI FIRENT LA DIFFÉRENCE En définitive, la part faite au bon et au mauvais, nous avons été les témoins d'un match très vivant, indécis jusqu'au deuxième but de Skoblar et partant spectaculaire. Une fois de plus, le métier supérieur de l'O.M., son réalisme et la classe, très au-dessus de la moyenne française, de certains de ses joueurs ont fait la différence. Skoblar, actuellement en grande forme, sa détente verticale en est la preuve, a joué en seigneur du football européen. Un peu surpris, en première mi-temps par la vitesse du jeu, Leclercq s'est remis au premier plan de l'actualité après la pause, alors que les Rennais, accusant une certaine fatigue, se montraient moins tranchants dans l'attaque du ballon. À partir de ce moment, le gauche magique du grand Daniel refit merveille, distillant des passes longues magistrales et réussissant un but qui fit exploser le stade. Bosquier, lui aussi, qui, en première mi-temps, avait raté de nombreuses passes longues, termina avec un brio étourdissant. Tout cela fit que les spectateurs ont quitté le Stade Vélodrome sur une impression très favorable. Leur O.M. est toujours champion et son duel, encore à distance, avec Nice s'annonce sensationnel. Tont mieux, pour le football français. Maurice FABREGUETTES |
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Kurt Linder : "Des sujets de satisfaction !" |
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Ce n'était évidemment pas un match à soulever les passions et à déclencher les polémiques, la seconde mi-temps avait permis aux olympiens se retrouver la faveur d'un public longtemps sur sa faim est toujours difficile. Il y avait, bien sûr, quelques sourires, le directeur sportif breton Jean Prouff, au soir de la rencontre de Coupe d'Europe de Gerland, où il était venu en observateur, ayant déclaré que Rennes gagnerait au stade vélodrome. C'est sans doute en se souvenant de ses paroles que Édouard Kula nous a dit, en sortant de la douche : "Eh bien heureusement pour eux que nous avons joué mercredi contre la Juventus. Sans cela, je crois bien qu'ils prenaient le compte !" De la Juventus, on parlait dans le fond beaucoup plus que de Rennes, tant il est vrai que nous venions de vivre une soirée sans histoire. C'est aussi en fonction du match de Lyon que Kurt Linder analysait celui que ses hommes venaient de remporter huat la main. "J'avoue que je craignais beaucoup la rencontre de ce soir, venant seulement 72 heures après une partie difficile, disputée au niveau supérieur. Et puis Rennes, très honorablement classé, était un interlocuteur valable, et tout à fait capable de poser un problème à mes hommes, qui n'avaient pas eu le temps de récupérer. "Aussi, même s'il y a eu quelques ratés dans notre équipe, je peux de montrer satisfait car les joueurs professionnels sont des êtres humains, et non des robots. "Je leur ai vu, d'ailleurs, réussir de très bonnes choses, notamment des longs déplacements de jeu, dont l'un nous a permis de marquer un troisième but superbe..." Par ailleurs, Kurt Linder, estimant qu'à chaque jour suffit sa peine, se refusa à songer au match de Nancy avant le lendemain. Pour Mario Zatelli, il ne s'agissait pas d'un match destiné à faire date. "Rennes nous a un peu empoisonné avec sa défense en ligne, il y a toujours chez eux quelque chose d'inachevé en attaque. Ils amorcent bien leur action, et les terminent mal. Dans le fond, ils n'ont pas été très dangereux." |
Gilbert Gress mettait l'accent sur les traces laissées par la rencontre de Lyon : "Nous avons fait beaucoup d'efforts mercredi et, pour ma part, j'ai bien failli souffrir de crampes en fin de partie. Mais l'essentiel est d'avoir maintenu notre position. Pour nous, c'est une bonne soirée..." Bernard Bosquier, pour sa part, s'étonnait que venant après une victoire retentissante, il n'y ait pas eu plus de demandes (23.600 spectateurs payants) pour applaudir l'O.M. "À Lyon, c'était trop loin. Aujourd'hui que leur est-il arrivé à nos supporters ? Je ne sais pas ce qu'il faudra faire décidément pour qui viennent au stade... "Aujourd'hui, nous avons mis du temps à nous échauffer. Rien de plus normal, car nous avions dans les jambes la rencontre de mercredi." contre de mercredi..." Jules Zvunka nous disait : ne pas avoir eu trop de mal à contenir Keita. "C'est certainement un bon joueur, qui n'hésite pas à se servir de son poids, mais de là à le comparer à Salif, il y a loin à mon avis. Le président Pierre Gallian, en cette soirée avait beaucoup trop souffert d'une crise sciatique que du fait des visiteurs rennais. "Ce sera une bonne soirée si nous n'étions pas inquiets au sujet de Josip !" Comme quoi, il n'y a jamais de bonheur sans mélange ! Louis DUPIC |
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Jean Prouff : "Pour une fois Rennes n'a pas été fidèle à la tradition" |
Dans les vestiaires rennais, les visages étaient sombres, et les paroles rares. L'entraîneur Cedolin a fini par nous dire : "Nous avons été beaucoup trop contractés, trop crispés ; nous devons avouer que nous avons mal joué. Durant les vingt premières minutes du match, Keita a été agressé au moins trois fois, et ici, pour marquer un but, on a l'impression qu'il faut soulever une montagne. C'est en tout cas notre plus mauvais match de la saison". Le président Dault faisait contre mauvaise fortune bon coeur, et remarquait : "Le Stade Rennais, c'est un peu comme certain cidre de Bretagne : il a de la difficulté à s'exporter ! Le score final est sans doute trop sévère. Tous nos éléments, sauf Bernard, ont joué comme des juniors. Ils ont été naïfs" Rizzo était évidemment mécontent : "J'aurais bien voulu que nous soyons plus brillants devant mes concitoyens, et en particulier devant les parents ! Mais le score final est peut-être trop lourd, car en première mi-temps nous avons tenu la dragée haute aux Marseillais". Keita était déçu : "Nous n'avons pas été souvent dangereux en attaque et, pour ma part, je n'étais pas dans un jour favorable, mais je dois avouer que je n'ai pas été ménagé". Enfin, Jean Prouff soulignait avec une certaine philosophie : "D'habitude, nous faisons toujours de bons matches à Marseille. C'est dommage que nous n'ayons pas été fidèles à la tradition !" |
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Les Bretons inefficaces (3-0) |
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Un peu plus de 25.000 spectateurs sont venus applaudir au stade vélodrome les vainqueurs de la Juventus, en Coupe d'Europe. Les Olympiens sont heureux d'enregistrer la rentrée de leur buteur Skoblar, tandis que les Rennais ne peuvent aligner leur gardien marseillais Jean-Paul Escale. Rennes présente : Bernard, Cosnard, Goueffic, Rizzo, Cardiet, Duarte, Keruzore, Guermeur, Keita, Betta, Dortomb. Remplaçant : David L'O.M. : Carnus, Lopez, Bosquier, Zvunka, Kula, Bouygues, Gress, Magnusson, Bonnel, Skoblar, Leclercq. Remplaçant : le Boedec. Les poulains de Linder se trouvent dans l'obligation de battre les Bretons s'ils veulent demeurer au coude à coude avec les Niçois qui ont gagné, on le sait, vendredi soir à Saint-Étienne. Des joueurs phocéens portent tout un brassard noir en hommage à feu Pierre Robin, ancien président du club. Dès les premières secondes de jeu, Carnus doit intervenir sur un centre de Guermeur. C'est au tour de Bernard de dégager de la main une balle plongeante de Magnusson. À la 3me minute, sur un corner de Magnusson, Buigues reprend de la tête, Bernard dégage in extremis. Quelques instants plus tard (4') Bonnel donne de la tête à Skoblar qui marque. O.M., 1 - Rennes, 0. Skoblar, en bondissant a heurté le montant gauche de la cage et s'est fait mal à une jambe. Il doit se reposer pendant trois minutes sur la touche avant de reprendre sa place sous les applaudissements de la foule. Guermeur, parti tout seul, gaspillé une belle occasion (8'). Un ballon en or de Magnusson (10') est mal exploitée par Gress qui ne lui donne qu'une "pichenette" et facilite la tache de Bernard. L'O.M. flotte légèrement, puis Bosquier mais le cuir en corner à la 16'. Mais l'attaque rennaise n'en profite pas. |
On note une certaine mollesse dans les deux camps, ce qui provoque quelques lazzis de la part des spectateurs. Sur une main de Goueffic, l'arbitre, M. Debroas siffle un penalty trop sévère. Il est botté par Skoblar (21') et bien arrêté par Bernard qui repousse le ballon. Celui-ci est reprit par Bonnel, mais le gardien breton est encore à la parade. Au milieu du terrain les Rennais s'imposent leur loi. Le jeu demeure assez mièvre. On attend avec impatience un coup d'éclat. Un centre de Gress oblige Bernard à intervenir précipitamment. Les Marseillais se ressentent sans doute des efforts prodigués mercredi au stade de Gerland. Dans un choc avec Buigues (40e), le Rennais Betta est touché. Il récupère vite et on s'achemine tout doucement vers la mi-temps qui est sifflée sur le score de 1 à 0 en faveur de l'O.M. La deuxième mi-temps débute par un choc entre Keita et Zvunka. Le Marseillais se relève vite. Plus de peur que de mal ! Une descente de Magnusson se terminer par un shoot dans les pieds de Bernard (50e). Le gardien breton se sort bien ensuite d'un cafouillage dangereux. À la 55e minute, Leclercq, en position d'ailler gauche, adresse un centre en cloche. Skoblar surgit comme une fusée et fusille Bernard : O.M. 2 - Rennes 0. L'O.M. respire mieux et le public aussi. L'O.M. ayant l'impression d'avoir le succès en poche est plus décontracté ; Magnusson tente sa chance trop en hauteur (64e). Dortomb à une timide réaction en tirant faiblement à côté 65e. À la 70e minute, Leclerc, de 25 mètres, en position d'avant-centre, réalise un tir percutant qui fait mouche. 3 à 0 ! Rennes réagit par un corner. Cafouillage sans suite pour les blancs. Magnusson saute encore dans les nuages (76e), mais plus rien ne sera marqué. Alain DELCROIX |
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Le merveilleux gauche de LECLERCQ Nous garderonts longtemps le souvenir de ce tir fulgurant qui par la grâce du pied gauche magique de Daniel Leclercq allait se figer sous la barre d'un Bertrand éberlué par autant de puissance et de précision. Et comment ne pas souligner l'ovation populaire qu'il l'accueillit. Pour les milliers de spectateurs enthousiastes, cette action remarquable constituait un régal des yeux, un de ces événements qui longtemps alimentent la chronique. Aujourd'hui et demain et après-demain encore, on évoquera dans tous les lieux ou bat le coeur de l'O.M., la merveilleuse réussite de Daniel. Nous avons longtemps suivi, hier soir, la performance de ce jeune garçon aux cheveux d'or, qui sans l'air d'y toucher se conduit le plus clair du temps en véritable "patron". Durant les quarante-cinq premières minutes, il ne tourna peut-être pas à son régime, mais après le repos ce fut un festival. On ne compta plus ses passes distillées au millimètre, ces immenses transversales trouvant toujours un partenaire démarqué, s'engouffrant aussitôt dans l'espace libre et portant très vite le danger dans le camp adverse. Une telle vision du jeu, une telle pureté dans la trajectoire constituent autant d'armes magiques propres à forcer la décision. De l'aile gauche, ce fut lui l'instigateur du second but, mettant littéralement sur le pied de Skoblar un ballon aussitôt propulsé dans les filets. Et il était normal - et fort juste - qu'il connaisse lui aussi la joie de participer grâce à son but de rêve à la victoire finale. Par la suite, bas retournés sur les jambes roses, il servit de pôle, plaque tournante par laquelle passait la quasi-totalité des actions offensives bien. Mieux, sans avoir l'air d'y toucher avec cette rare décontraction propre aux athlètes déception, il se permit le luxe de dribbler dans un mouchoir de poche deux rivaux décontenancés par autant de technique. Décidément, Daniel Leclercq c'est bien la révélation de l'O.M. de Kurt Linder. Désormais on voit mal qui pourrait le suppléer dans un rôle de distributeur et aussi de finisseur qui lui colle à la peau. Avec lui, les Marseillais ont trouvé l'homme de la situation, et si à Paris, il fut à la base des trois buts marqués par les Olympiens, si au stade de Gerland il se montra aussi souverain dans son face-à-face avec les Italiens de la "Juve", hier soir, il a fait la conquête de Marseille. Gérard PUECH |
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Radio pour SKOBLAR Lorsqu'il marqua à bout portant de la tête le premier but de l'O.M. à la 3me minute, Josip Skoblar se heurta au gardien Bernard et resta plusieurs minutes sur la touche avant de reprendre sa place. On crut d'abord qu'il vait reçu un coup au foie, mais, après la partie, la douleur n'avait pas disparu et, dans l'éventualité d'une fêlure des cotes, il fut adressé à l'hôpital Nord où il a été soumis à une radiographie. L.D. |