Résumé Le Provencal du 18 décembre 1974 |
UN BUT MIRACLE DE PAULO CEZAR
Récompense un O.M. moralement et physique exemplaire
SOCHAUX - Le jour ne s'est pratiquement pas levé, hier à Sochaux : petite pluie permanente et glacée, nuages gris semblant accrochés aux toits des maisons et c'est à la lumière des projecteurs que c'est jouée la deuxième mi-temps. Quant à la pelouse du stade Bonal, elle correspondait parfaitement à l'expression classique de "pré à vache" : lourde, grasse, spongieuse, freinant le ballon et rendant très instable l'équilibre des joueurs. Ces quelques remarques ne sont pas inutiles car c'est essentiellement l'état du terrain et les conditions météorologiques qui ont fait le déroulement de la rencontre. Sur un pareil terrain les habituels problèmes techniques et tactiques passent au second plan. Il s'agit d'abord pour les deux équipes, de s'assurer la maîtrise du ballon et de lutter pied à pied, pour ne pas sombrer. L'abnégation, l'esprit de corps, la vigilance, chère au rugbymen, sont les vertus premières pour espérer réussir une performance dans un tel bourbier. Sochaux qui recevait et avait absolument besoin d'une victoire il y alla de toutes ses forces et de tout le talent de ses meilleurs footballeurs. Il lui manqua pour obtenir la victoire un peu plus d'efficacité offensive ou plutôt de sens offensif. C'est d'ailleurs le défaut de la plupart des équipes françaises. L'O.M. pour lequel un match nul constituait une bonne opération s'appliqua à freiner de toutes ses forces et tentatives de son rival pratiquant par la force des choses un jeu de contre-attaque. Après avoir frôlé la nette défaite en début de deuxième mi-temps il se reprit fort bien pour terminer assez fort, paraissant même moins fatigués, en fin de rencontre que son adversaire. Le tout a débouché sur un match nul qui paraît assez logique et reflète assez bien l'ensemble de la partie. DEUX BUTS EXTRAORDINAIRES Les deux buts furent marqués de façon inattendue et peuvent aussi bien l'un et l'autre être qualifiés de chanceux. Celui de Sochaux vint, en fin de première mi-temps, récompenser le léger avantage de cette équipe. Soler touchait à la cheville par Bracci venait d'être remplacé par le bouillon Maier. Ce dernier entra comme un loup dans la bergerie, attira la défense olympienne vers le centre et servit sur la droite, totalement libre, son arrière Dufour. Celui-ci fonça jusqu'à la ligne de camp, glissa et, au moment de tomber, centra. On vit alors le ballon s'élever et lober Charrier... et venir échouer dans le coin droit de la cage de l'O.M. Un pur miracle. |
Paulo Cezar égalisa dans des conditions aussi extravagantes. Depuis le début de la rencontre (on était à la 73e minute), on pouvait se demander s'il était vraiment venu à Sochaux. La balle lui parvint à l'aile gauche. Entre lui et la cage de Sochaux : trois défenseurs, plus le gardien Battmann, aucun partenaire en vue. La cause paraissait entendue. Eh bien non : on vit alors les trois Sochaliens se gêner, Battmann sortir contretemps, le ballon rouler tout doucement dans la cage de Sochaux. Un autre miracle ! Pour nous, les deux causes principales de ce but sont évidentes : la classe à l'état pur de Paulo Cezar et sa réputation. Sa classe lui permit de trouver la faille et sa réputation fit que les défenseurs de Sochaux perdirent complètement la tête en le voyant devant eux. Quoiqu'il en soit, ce petit coup de pied de presque rien du tout vaut à l'O.M. un point extrêmement précieux, lequel lui permet, à la moyenne anglaise, de revenir à niveau de zéro. ÉNERGIE : UNE FORME DE TALENT Que faut-il penser de ce match et de ce point obtenu à l'énergie avant l'arrivée à Marseille de Bereta ? La remarque la plus intéressant est que l'O.M., sans être encore une grande équipe, possède un moral et une condition physique absolument exemplaire. Dans le bourbier de Sochaux, exception faite de Paulo Cezar, dont le rôle est de plus en plus celui d'un joker, personne ne leva le pied personne ne rechigna à la tâche et ceux qui commirent des erreurs s'empressèrent toujours à se replacer pour limiter les dégâts. Le courage, le désir de ne pas céder un pouce de terrain à l'adversaire, l'esprit de combat sans cesse manifesté sont, en football, comme dans tous les grands sports d'équipe d'ailleurs, une forme méconnue de talent. À quoi aurait servi le but artistique de Paulo Cezar si le reste de l'équipe s'était effondré devant les multiples attaques de Sochaux ? On rendra donc hommage aux Lemée, Buigues, Victor Zvunka, Trésor, Bracci, Albaladejo, à Vannucci, très brillant hier et même à Noguès, Troisi et Emon qui, comme on le dit populairement "allèrent au charbon" quand c'était nécessaire. Ce match nul fut donc celui de toute une équipe qui, si elle n'a pas encore la grande pointure, a tout de même le mérite d'exister et qui a su affirmer, hier, dans des conditions, répétons-le, très difficiles, sa personnalité. Maurice FABREGUETTE |
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Un pour tous L'O.M. a ramené un point du bourbier sochalien : un terme qui n'a rien d'exagéré, le terrain du stade Bonal ressemblant plus, en maints endroits, à une cour de ferme qu'à une pelouse britannique. Il aurait peut-être même pu en ramener deux, avec le petit coup de pouce favorable du destin... ou avec une véritable ligne d'attaque. Mais il serait malséant de faire la fine bouche. Car, au-delà du résultat proprement dit, qui leur permet de garder le contact avec le peloton de tête et d'espérer attirer la grande foule dimanche, pour la venue de Nice, c'est la manière dont les Marseillais ont su mener leur barque que nous nous plaisons à souligner ici. Ce but stupide, par exemple, inscrit involontairement (le Sochalien en convenait lui-même) par Dufour à une minute seulement du repos, aurait coupé les jambes à plus d'une équipe. D'autant que les Olympiens avait fait jusqu'à là jeu égal avec leurs adversaires, obtenant même un nombre identique de corners. Or, loin de les décourager, ce coup du sort les transcenda. Et à l'image de Troisi, qui a surpris tout son monde par son ardeur au combat, l'on vit onze Marseillais se défendre, - mais non pas défendre - avec un rare acharnement, chacun soutenant à tout moment le porteur du ballon. Que le but salvateur de Paolo Cezar ait été obtenu une fois de plus sur un exploit facile ne change pas grand-chose au problème : c'est avant tout à sa rage de vaincre et son sentiment enfin retrouvé de la collectivité que l'O.M. doit ce résultat. Et c'est certainement beaucoup plus encourageant qu'il n'y pourrait paraître à première vue ! A.P. |
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Ils disent |
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Jules Zvunka rayonnant : "Cette fois, je suis satisfait" |
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Couverts de boue des pieds à la tête, les joueurs marseillais n'en rayonnaient pas moins dans les vestiaires. Ce match nul, obtenu dans les conditions particulièrement difficiles, prenait presque des allures de victoire... M. Gamet, seul dirigeant olympien ayant effectué le déplacement, n'était pas moins heureux. "Je vais finir par croire que ma réputation de porte-bonheur est justifiée, s'exclamait-il. "Songez que depuis que je suis entré au comité directeur, je n'ai vu perdre l'équipe qu'une seule fois à l'extérieur, l'an dernier à Saint-Étienne, invaincu en déplacement par les temps qui courent, c'est tout de même assez rare ! Et j'espère que ça va continuer. En tout cas, un match nul ici est particulièrement précieux. Et la façon dont il a été obtenu est à mon sens significative et encourageante". JULES ZVUNKA : "NOUS AVONS EU PLUS D'OCCASIONS DE BUTS" Eh bien oui, nous disait en riant Jules Zvunka. Je suis pour une fois totalement satisfait. C'est assez rare. Mais aujourd'hui mes garçons ont fait exactement ce que j'attendais d'eux. Un résultat comme celui-là, croyez-moi, il fallait le faire. La deuxième mi-temps, plus particulièrement, a été excellente. Si l'on fait, durant cette période, le compte des occasions respectives, on constate qu'en dehors du but refusé pour hors jeu et du tir sur la barre de Maier, les Sochaliens n'ont pas été une seule fois dangereux, alors que nous l'avons été très souvent. Ainsi Noguès et Paulo Cezar ont-ils eu le but au but du pied. Et je ne parle pas, dit-il, du tir de Lemée sur l'arête des buts, alors que Batmann était battu. Il y avait beaucoup d'éléments en notre défaveur, et notamment des conditions climatiques et un terrain épouvantable. Nous avons su surmonter tout cela. Et c'est nous qui avons su le mieux finir, dominant nos adversaires mêmes sur le plan physique. Dans cette optique, Troisi, qui a travaillé avec une ardeur inlassable, a parfaitement rempli son contrat. Je crois que le succès populaire du match contre Nice est désormais assuré !" |
CLAUDIO COUTINHO : "DES PROGRÈS ÉVIDENTS" Tous les joueurs, aujourd'hui, on fait montre d'une louable application, d'un bout à l'autre de la partie, surenchérissait Claudio Coutinho. Et pourtant ce terrain était presque injouable. Je crois que si nous avions atteint la mi-temps sur le score de 0-0 (et il s'en est fallu de peu), nous aurions pu gagner. Car, étant menée à la marque, nous avons été obligés de nous découvrir beaucoup plus, de prendre des risques. Cela, heureusement, nous a réussi. Mais sans ce but involontaire de Dufour, nous pouvions réussir l'exploit. C'est égal, l'équipe est apparue transfigurée par rapport au match de Lille, et c'est là l'important. Je crois, pour terminer, que les progrès dans le domaine du jeu collectif, et même de l'action physique, ont été sensibles". LEMEE PAS DE CHANCE Oui, je crois que nous sommes en progrès, nous disait Albert Vannucci, auteur d'un match exemplaire. Je suis aussi heureux de ce match nul que d'avoir su contenir mon ami Lechantre. C'est un garçon qu'il faut surveiller comme le lait sur le feu. C'est d'ailleurs pour cela que je n'ai pas été très offensif, afin de ne pas prendre de risques inutiles". Quant à Jacky Lemée, il regrettait, bien sur, ça non réussite sur ce tir déclenché dans les dernières minutes, et qui aurait pu donner la victoire à son équipe : "Décidément, je n'ai pas de chance. A Nîmes, Martinelli était allé en chercher un dans la lucarne, et ici, je "prends" la barre. Mais ça finira bien par venir, et puis, l'essentiel était bien de ramener un point". Alain PECHERAL |
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COURBIS : "Un résultat équitable" On était un peu déçu dans le camp sochalien. "En football, il n'existe pas, comment en boxe, une victoire aux points, commentait l'entraîneur Paul Barret, c'est dommage, car je crois qu'aujourd'hui, nous aurions été victorieux. Mais il faut aussi savoir négocier les tournants de match lorsqu'il se présente. Et cela, nous n'avons pas su le faire. Notamment, lorsque Maier a tiré sur le poteau. À 2 à 0, le match aurait été, je crois, terminé. Mais nous faisons contre mauvaise fortune, bon coeur ; tous les mal classés comme nous ont perdu aujourd'hui. Ce qui aurait pu être un point perdu, se transforme finalement en un point gagné. Il nous reste maintenant à faire un résultat dimanche à Troyes, et nous pourrons partir en vacances l'esprit tranquille. Je tiens tout de même à souligner le mérite des deux équipes qui ont su offrir un spectacle plaisant en dépit de conditions particulièrement défavorables." Rolland Courbis regrettait, pour sa part, de n'avoir pas su convertir une balle de match qui s'était offerte à lui en fin de partie : "Le ballon était trop lourd. Je n'aurais pas dû le reprendre de la tête mais l'amortir... Cela dit, l'O.M. s'est bien repris en deuxième mi-temps et le résultat est sans doute équitable, mais nous savons longtemps cru à la victoire..." Enfin Gérard Soler nous expliquait comment il s'était blessé en première mi-temps : "François (Bracci) est tombé involontairement sur ma cheville. Je ne pouvais plus poser le pied par terre. J'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une entorse mais je vais passer une radio car cela pourrait être plus grave, un arrachement des ligaments par exemple". A.P. |
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Les réponses aux questions que l'on se pose |
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Et maintenant Bereta
- Quelle devrait être la place de Bereta dans cette équipe ? Jules Zvunka a déjà répondu à cette question en disant que Bereta occuperait un poste au milieu du terrain. Il devait donc, quand l'O.M. sera au complet, avoir une attaque faite, de la droite vers la gauche, d'Emon, Jairzinho, Paulo Cezar, Bereta jouant en renfort offensif. C'est la théorie. Mais maintenant on sait que Paulo Cezar occupe toutes les places et aucune et que personne n'y pourra rien changer. Comme l'on sait aussi que notre sympathique Brésilien, de par sa classe, est absolument indispensable. Dans ces conditions, si Bereta devait s'en tenir aux conseils de son entraîneur, l'O.M. continuerait à jouer presque tout le temps sans ailier gauche. Car, actuellement, surtout après ce que nous avons vu hier à Sochaux, ce qui manque le plus à l'O.M. est une attaque cohérente est vraiment offensive. De ce fait, Bereta, qui reste sans doute le meilleur ailier gauche français et l'un des meilleurs européens, serait peut-être plus précieux pour sa nouvelle équipe s'il pouvait opérer franchement en pointe. Mais l'habitude étant une seconde nature, il est probable que Bereta, une fois olympien, jouera comme il le faisait à Saint-Étienne, c'est-à-dire en position d'ailier gauche, mais d'un ailier gauche participant activement non seulement à la construction du jeu mais aussi à la lutte pour la possession du ballon. Bereta va devoir maintenant 29 ans et, à son âge, on ne change pas un joueur. Depuis longtemps déjà, il a prit l'habitude, qu'il soit placé au milieu du terrain ou à aile gauche, de jouer en faux ailier et il faut reconnaître qu'il a rendu tant à Saint-Étienne qu'à l'équipe de France des services éminents. On peut donc croire que Bereta, une fois olympien, et par la force des choses, se situera davantage à l'aile gauche que franchement au milieu du terrain. Mais ceci dit, il faut reconnaître que sa présence sera un bien précieux pour l'équipe olympienne. |
LE BUT DE SOCHAUX EST-IL DE LA FAUTE DE CHARRIER ? Les gardiens de but sont toujours très difficiles à juger et souvent mal jugés. En fait, Charrier s'était placé dans l'axe d'un tir éventuel de Dufour. Mais celui-ci, au lieu de tirer, donna un centre tir très lobé qui passa nettement au-dessus du gardien olympien pour aller, sans doute entraîné par la boue, plonger dans l'autre coin de la cage. Il s'agit là d'un but et d'une situation assez extraordinaire et, dans de pareilles conditions, il faut se garder de juger un gardien. Les gardiens de but se trouve souvent dans l'obligation de faire un choix ce qui leur permet parfois de réussir des arrêts remarquables par anticipation, mais, en d'autres circonstances, c'est le contraire qui se produit et le gardien est battu d'une façon qui semble coupable pour les spectateurs mal avertis. Nous pensons personnellement que, sur ce but, Charrier n'a rien à se reprocher d'autant plus qu'il était masqué par de nombreux partenaires. BRACCCI A-T-IL BLESSÉ VOLONTAIREMENT SOLER ? Touché à la cheville par son partenaire tricolore et ami Bracci, Soler a du quitté le terrain peu avant la mi-temps. Le coup de pied est indiscutable, mais est-il volontaire ? Nous ne le croyons pas, Soler venait d'échapper au marquage de Bracci en se dirigeant latéralement vers le centre du terrain. L'arrière olympien effectua alors une sorte de grand écart - et l'on sait combien ses jambes sont longues - pour contrer le ballon. C'est alors que son pied heurta la cheville de Soler. Donc, il s'agirait d'un accident purement et simplement. Soler, interrogé à la mi-temps en convenait d'ailleurs lui-même, même si son père n'était pas de son avis. M.F. |
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