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Résumé Le Provencal

du 16 avril 1975

 

O.M. : VICTORIEUSE DEFAITE !

Les Olympiens, supérieurs techniquement, ont cent fois mérité leur qualification

LILLE - L'O.M., qui restait sur quinze matches sans défaite, a assuré, hier soir, sa qualification pour les quarts de finale de la Coupe de France, après, justement, avoir perdu le seizième.

Situation paradoxale peut-être, mais résultat conforme à la logique sur la physionomie des deux rencontres que nous avons vues l'une vendredi dernier au stade vélodrome, l'autre hier soir au stade Jooris.

L'O.M., hier soir, a fait preuve d'une maturité technique nettement supérieure à celle de ses rivaux et ce, en dépit d'un but concédé dans le fameux premier quart d'heure que l'on redoutait tellement.

COMME PRÉVU

Comme il fallait s'y attendre et Georges Peyroche n'en avait d'ailleurs pas fait mystère, les Lillois, soutenus par un public record et enthousiaste, entamèrent les opérations tambour battant, avec l'idée bien arrêtée de réussir le K.O. d'entrée. On craignait donc pour l'O.M. les premières quinze minutes de jeu et la suite devait prouver qu'on avait raison.

M. Machin avait sifflet le début des hostilités depuis à peine 10 minutes que René Charrier était déjà obligé d'aller chercher la balle au fond de ses filets, Coste ayant exploité au maximum une mésentente entre Trésor et Lemée et un contre favorable.

Restait à savoir, alors, comment les Olympiens allaient réagir après ce coup du sort. Il ne fait pas l'ombre d'un doute que la plupart des équipes françaises auraient à ce moment-là sombré corps et biens.

Celle de Jules Zvunka et de Fernand Meric n'en fit rien, bien au contraire.

Sans jamais s'affoler, Trésor et ses camarades laissèrent passer l'orage, plièrent quelquefois, mais et c'est tout à leur honneur, ne rompirent jamais.

Mieux encore, en fin de première mi-temps, lorsque les Lillois sentirent le besoin de souffler, au vu des Phocéens s'assurer la maîtrise de la balle, essayant et réussissant le plus souvent à éclipser leurs rivaux, obligés de courir dans le vide.

A la pause, bien sur, le match n'était pas joué, tout restait encore possible, mais les Olympiens, toujours aussi à l'aise, mirent rapidement les choses au point.

C'est ainsi, et nous donnons ces enseignements à titre d'exemple, que l'on vit les hommes au maillot blanc réussir à un moment donné une dizaine de passes devant les Nordistes ne sachant plus visiblement à quel saint se vouer.

L'O.M. A CONFIRMÉ

Ce qui devait arriver arriva, c'est-à-dire que l'on vit les joueurs aux maillots rouges s'énerver, M. Machin sortir deux fois le carton jaune pour les pénaliser, alors que les Phocéens de plus en plus certains de tenir le bon bout, continuaient à jouer le ballon que l'on qualifie couramment de "sérieux".

L'O.M. ne devait pas arriver à égaliser, mais si, sur l'ensemble du match, cela avait été fait, personne sans doute n'aurait songé à crier au scandale, tant il est vrai qu'on se demande comment Paulo Cezar d'abord, puis Jairzinho ensuite, ne réussirent pas à convertir en buts deux occasions royales qui s'étaient magnifiquement créées.

Ne cherchons pas à faire la fine bouche. Cette défaite très court en vérité, concédée hier, vaut beaucoup de victoires. Nous aurons un tout cas pour notre part vu une équipe marseillaise qui a confirmé d'éclatante façon ses progrès du point de vue du jeu collectif. Une fois encore, si les individualités comme Paulo Cezar, Jairzinho et Bereta purent de temps à autre exprimer leurs talents personnels, elles mirent le plus souvent leurs qualités au service de la collectivité. C'est sans doute le plus réconfortant.

Ne terminons pas ces commentaires sans mettre une fois encore en exergue l'excellente partie de la défense marseillaise qui, quelques bavures mises à part, joua une partie sans faute, prouvant par la même occasion qu'elle était prête à soutenir des combats d'un niveau un peu plus relevé.

Nous pensons, notamment, mais vous l'avez sans doute compris, aux Coupes européennes. Et, pourquoi pas, la Coupe des Coupes.

André de ROCCA

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Avec du coeur au ventre

Ainsi c'est à la 16e rencontre que s'est interrompu la série victorieuse de l'O.M., mais tout un chacun conviendra avec nous que l'échec enregistré hier soir sur le stade Henri Jooris valait bien tous les succès du monde. Battu 1 à 0, l'équipe marseillaise n'en est pas moins qualifiée pour les quarts de finale de la Coupe de France. Et c'est bien avant tout le principal.

Empressons-nous d'ajouter que les quelques supporters marseillais présents à Lille, et avec tous les dirigeants olympiens, ont passé une soirée pour le moins épouvantable. Oui ! Tous ont eu peur, à la 10e minute, quand Coste s'en vint battre Charrier d'un excellent tir croisé.

"Ils vont avoir du pain sur la planche !". Nous nous sommes surpris nous-mêmes à faire à haute voix cette réflexion. Sans doute n'étions-nous pas le seul à émettre de telles craintes.

Rendons alors cette justice la formation de Jules Zvunka. Jamais au grand jamais, elle n'a paru s'affoler devant un événement qui n'était pas loin de précipité sa perte. C'est là, justement, ou nous avons vu que l'O.M. avait des ressources, insoupçonnées voici quelques mois à peine.

La maîtrise, le métier ont parlé devant un adversaire certes ambitieux, plein d'enthousiasme, et follement encouragés mais qui se heurtait invariablement à l'esprit de corps des Olympiens. La qualification, l'O.M. l'a enlevée à la force du poignet, en mettant dans la balance un coeur, une détermination remarquables.

On craignait pour trésor, on s'inquiétait pour Jairzinho, dont les blessures respectives avaient compromis un moment la présence, dans la cuvette bouillante du stade Jooris. L'un et l'autre se sont battus sans relâche, à l'image de tous leurs camarades, dons le sourire rayonnant faisait plaisir à voir, après la fin du match.

Mission accomplie donc, au terme d'un combat violent, passionné, ou l'esprit de la Coupe fut toujours présent. L'O.M. poursuit sa route. Certains joueurs ont regretté de ne pas avoir arraché le match nul qui eut préservé leur invincibilité pour une rencontre de plus. Mais la n'est pas pleinement la question. L'O.M. battu, peut entrer à Marseille la tête haute.

Jean FERRARA

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Ils disent

Le président Méric :

"Un grand merci à tous"

Beaucoup de monde dans les vestiaires marseillais, après ce match qui connut une fin houleuse sur le terrain, notamment pour l'arbitre M. Machin, que les spectateurs lillois accusaient de tous les maux. Le président Meric était entouré d'une nuée de journalistes, lorsque sont venues recueillir ses impressions. Visiblement il portait encore sur le visage les traces du match éprouvant, vécu depuis la tribune d'honneur. Mais c'est avec le sourire qu'on imagine qu'il répondit à nos questions.

"Eh bien, voyez-vous, nous dit-il, je garde encore mes moustaches. Je suis d'autant plus satisfait de cette qualification que Lille, aujourd'hui s'est montré un adversaire autrement plus dangereux qu'il ne l'avait été à Marseille. Et je crois que la performance de l'O.M. doit être soulignée à sa juste valeur. Bien sur, nous avons pu rester invaincus pendant seize rencontres, mais qu'importe, puisque cette défaite nous vaut de continuer notre route en Coupe de France. La série est interrompue. Raison de plus pour être décidés à vouloir en entamer une nouvelle qui, je l'espère, se terminera, cette fois, au Parc des Princes !"

- Avez-vous eu peur, président, avons-nous demandé, lorsque Costa a marqué son but ?

"Oui, je ne vous le cache pas, car Lille donnait l'impression, à ce moment-là de vouloir faire la différence. Heureusement les joueurs n'ont pas perdu leur sang-froid. Personne ne s'est affolée et la maîtrise de l'ensemble a fini par avoir le dernier mot. L'O.M., ce soir, mérite toutes les félicitations".

JULES ZVUNKA :

QUALIFICATION LOGIQUE

Jules Zvunka, pour sa part, ne cachait pas sa tacite sa satisfaction : "Le résultat, sur l'ensemble des deux matches, est assez logique. Je ne pense pas que quelqu'un puisse contester notre qualification. Certes, nous avons eu des débuts difficiles, mais cela était prévu.. Par la suite, l'état du terrain, et cette pluie qui tombait sans arrêt, ne nous ont pas favorisés. Je pense notamment à ses actions de Paulo Cezar, Noguès, Jairzinho, qui auraient pu nous valoir un match nul mérité. Mais rien à dire à l'équipe.

Elle s'est battue dans seulement avec courage, mais sachant faire aussi, étalage de son métier. Je vous avouerai franchement que le premier but de Coste ne m'a pas inquiété outre mesure. Je vous avais fait part de ma confiance à Marseille, et j'avais gardé le même esprit, ici, sur le banc de touche. À la vérité, j'étais un peu plus nerveux, tout à fait en fin de rencontre, car à ce moment-là tout était possible. Mais l'équipe, heureusement, n'a pas fléchi, et c'est fort justement, je le répète, que l'O.M. poursuit sa route en Coupe de France".

COEUR OLYMPIEN

"L'ESSENTIEL EST ATTEINT"

Voyons, maintenant, opinion des joueurs :

Albert Emon était peut-être le plus radieux de tous. Devenez pourquoi ? Eh bien, tout simplement, parce que c'est la première fois que dans sa jeune carrière, il atteint le stade des quarts de finale :

"Le terrain boueux nous a beaucoup gênés. Les Lillois nous ont donné une très bonne réplique, mais je crois sincèrement que l'O.M. étaient le plus fort".

François Bracci, lui était quelque peu déçu, ou, si vous préférez, sa joie était ternie par le fait que l'équipe avait interrompu sa série victorieuse :

"Je pense, nous dit-il, que nous aurions pu enlever le match nul. Quoiqu'on en dise, nous nous étions habitués à ne plus connaître la défaite. Mais enfin, ne soyons pas trop gourmands. Nous sommes en quarts de finale, et c'est, après tout, le principal".

"Le but est atteint, disait pour sa part Roger Buigues. Nous avons souffert après le but de Coste, mais heureusement personne dans notre équipe ne s'est affolée. Je peux même ajouter qu'avec un peu de réussite nous aurions pu enlever le match nul, et même obtenir la victoire, qui sait ? Enfin, nous voilà maintenant qualifiés ; il ne reste plus qu'à attendre le tirage au sort".

Georges Bereta sortait de la douche quand il nous a fait part à son tour de ses impressions :

"Ce fut un match très dur, mais nous attendions à ne pas disputer une partie facile. Zvunka nous avait demandé de jouer un match sérieux : c'est exactement ce que nous avons fait. Je regrette mon avertissement, qui est d'autant plus au stupide que mon intervention ne présentait aucun danger. J'ai peur, maintenant, d'écoper d'une suspension qui m'empêchera de tenir ma place à Bordeaux. Je vous avouerai franchement, par ailleurs, que le but de Coste, inscrit tout à fait en début de rencontre, m'a procuré quelques inquiétudes. Heureusement nous n'avons jamais perdu la tête, et sans la grande partie de Duse, je crois que nous pouvions enlever le match nul".

"Nous avons fait le match qu'il fallait faire, enchaînait Marius trésor. Pour nous, les conditions n'étaient pas faciles ; le temps, d'une part, le public de l'autre, et enfin ce but dès la 10e minute. Mais je crois que l'O.M. a prouvé ce soir qu'il avait les moyens de traverser les moments les plus difficiles".

Jairzinho et Paulo Cezar étaient sous la douche lorsque nous les avons retrouvés. Tous deux étaient ravis par cette défaite, qui fallait à qualification à l'O.M. :

"Je n'ai pas eu tellement de réussite, nous disait Paulo. Avec un peu plus de chance, je suis persuadé que j'aurais pu obtenir le but égalisateur".

Jairzinho avait à peu près la même opinion : "Il faut dire, ajoutait-il, que Duse, le gardien lillois, s'est montré une fois encore irréprochable. Qu'importe la victoire, après tout ? Le principal était bien d'enlever la qualification".

Nous laisserons le mot de la fin à Jacky Lemée :

"Sur l'ensemble des deux matches, nous déclarait le défenseur, pas de problème. L'O.M. mérite de sortir vainqueur.

Qu'ajouter d'autres, sinon qu'il faut attendre désormais le tirage au sort pour connaître le nom du prochain adversaire ?

J.F.

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Peyroche :

"Lille a rempli son contrat"

Dans les vestiaires lillois, les joueurs, bien entendu, étaient déçus d'être éliminés par un seul petit but d'écart. Un but, disaient-ils, qu'ils auraient pu obtenir après un peu plus de réussite. Certains étaient furieux contre l'arbitre, nous le disons par ailleurs. Mais Peyroche, l'entraîneur, essayait de faire contre mauvaise fortune bon coeur :

"J'ai vu ce soir un très bon match, nous disait l'entraîneur, et ce qui est d'autant plus réconfortant, c'est que mon équipe a prouvé ce soir qu'elle était de taille à se hisser au niveau des meilleures, car l'O.M. a joué ce soir en grande équipe. Moi aussi, bien sûr, j'aurais préféré que cette rencontre se termine sur une autre conclusion, mais que faire, le football c'est cela. C'est peut-être paradoxal, mais je suis à la fois déçu et content. Mes joueurs m'ont offert ce soir de très belles satisfactions. Nous avons perdu la coupe, mais vous savez que nous avons encore une situation à assurer en championnat. Si nous continuons toujours avec ce même esprit, je crois que nous conserverons notre place en première division. Que dire sur le score ? Nous avons battu l'O.M. 1 à 0. Je pense qu'il nous a manqué un brin de réussite pour avoir une marge un peu plus importante au tableau d'affichage, mais, soyons logique, O.M. était loin d'être le premier venu."

J.F.

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M. MACHIN :

"Nous faisons un dur métier"

Nous signalons par ailleurs que l'arbitre, M. Machin, avait eu une sortie de terrain plutôt mouvementée. C'est en effet sous la protection de la police qu'il s'est rendu aux vestiaires ou nous avons retrouvé :

"Les spectateurs, nous disait-il, sont furieux après moi. Ils me reprochent d'avoir favorisé les Marseillais. Je me demande bien comment j'aurais pu m'y prendre pour avantager une équipe au détriment de l'autre. J'ai essayé simplement de tenir le match en main. J'ai infligé des avertissements dès que je me suis aperçu qu'en fin de match les esprits commençaient à s'échauffer. J'estime avoir fait mon travail consciencieusement et sans aucun parti pris. Mais décidément, le métier d'arbitre est bien difficile."

J.F.

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Les réponses aux questions que l'on se pose

- M. MACHIN A-T-IL ÉTÉ À LA HAUTEUR DE SA TÂCHE ?

- On sait que les Olympiens avaient émis des réserves comme ils surent que le Groupement avait désigné M. Machin pour arbitrer ce huitième de final retour de la Coupe de France.

En effet, il y a longtemps que cet arbitre semble avoir une dent contre les Olympiens.

C'est lui qui avait arbitré en août 69 lorsque le fameux O.M.-Saint-Étienne qui ne se termina pas et c'est encore lui, cette saison, qui officiait à Lille au match aller lorsqu'il refusa un but à Skoblar et le penalty de Paulo Cezar. Le président Meric était donc quelque peu anxieux avant la rencontre.

Rendons hommage cette fois à M. Machin qui fut un arbitre impartial et qui sut parfaitement tenir les deux équipes.

Il infligea trois avertissements un à Cianquinto, un autre à Parizon et un troisième à Bereta. Dans les trois circonstances nous lui donnons raison.

- QUELLES ÉTAIENT LES CONDITIONS ATMOSPHÉRIQUES ?

- Il pleuvait, bien entendu, mais cela ne surprit personne puisque si nous en croyons les autochtones, voilà six mois qu'il ne se passe pas un jour sans que les rues lilloises soient arrosées.

La pelouse devint donc très grasse au fil des minutes, surtout devant les deux bois puisque en cet endroit-là, il n'y a plus de gazon depuis déjà belle lurette. La température était relativement douce et en fin de compte, le match se joua dans des conditions acceptables.

- POURQUOI BERETA A REÇU UN AVERTISSEMENT ?

Lorsque M. Machin sorti le carton jaune pour sanctionner l'ex-Stéphanois, c'est parce que celui-ci venait d'avoir une intervention que nous qualifierons avec pudeur de virile contre un adversaire. Ce tackle sévère venait quelques minutes après que Bereta eut indisposé l'arbitre en refusant de reculer à distance réglementaire sur coup un coup franc.

- JAIR ET TRÉSOR ÉTAIENT-ILS RÉTABLIS ?

- Il nous faut bien répondre oui puisque ces deux joueurs tinrent toute la partie. Trésor joua avec un emplâtre derrière sa cuisse et ne parut pas gêner le moindre du monde, quant à Jair, s'il faisait la grimace à quelques minutes du coup d'envoi, il retrouvera 90 minutes durant ses jambes de vingt ans. Encore un exploit de mettre à l'actif du tandem Castellonese-Prévost.

- QUELLE FUT L'AMBIANCE ?

- Les joueurs marseillais ont dû faire preuve de beaucoup de sang-froid en début de match, au moment même ou un public record déchaîné et enthousiaste soutenait son équipe. Calicot, trompettes, crécelles et pétards à l'appui. "Marseille tu as un Bereta pour protéger ton Trésor, mais il faut pas Charrier nous l'emporterons. Nous Parizon ce que tu veux", était-il notamment écrit sur les banderoles. Il va de soi qu'au fil des minutes, l'enthousiasme baissa de ton et à la fin du match, quelques excités pénétrèrent sur le terrain pour faire un mauvais sort à M. Machin, pour une fois irréprochable. L'arbitre dut rentrer aux vestiaires sous la protection de la police.

A. de R.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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