Résumé Le Provencal du 23 décembre 1957 |
L'O.M. SANS AME, S'INCLINE DEVANT NICE Réduits à dix, les Marseillais en perdition Ont pourtant bénéficié de l'imprécision des avants niçois (De notre envoyé spécial : Georges LEOST) |
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NICE - Le stade du Ray avait pris hier sa parure des jours de fête : le soleil illuminé le cadre particulier de l'arène niçoise, aveuglant les occupants de la tribune principale. La foule avait pris d'assaut des places revalorisées par le retour Amalfi. Tout ce qu'il faut, en somme, pour créer l'ambiance propre à un derby. C'est Nîmes qui engage et, sans attendre, Marcel s'empare du ballon et lance Rustichelli. Jensen, servi, perd du temps, laissant aux locaux la latitude de desserrer l'étreinte. La balle voyage devant Lamia, mais sur un dégagement en profondeur, Uljaki sollicite Moreau dont le heading bat Predal. Il y a trois minutes que l'on joue, mais il y a aussi hors-jeu et M. Devillers le signal. L'allure de la rencontre est assez vive. Les Niçois s'appliquent, tandis que les Marseillais sont moins soucieux d'académie. Le résultat est sensiblement le même et nous notons sur nos tablettes : un retourné de Barrou (5me minute), une montée de Gransart qui échoue sur Ferry (6me minute), un plongeon de Predal dans les pieds de Foix (8me minute) et un dégagement opportun de Chorda mettant fin à une intervention de Jensen, bénéficiaire d'un centre d'Andersson (10me minute). Il ne s'agit pas d'un round d'observation. Par leur décision, les deux formations nous ont plongé sans préambule dans la dans le vif du sujet. La 12me minute apportait une illustration frappante à cette constatation : Uljaki sert Foix, ce dernier attire Predal et alors que le portier marseillais redoutait le pire, il shoote à côté de la cage. Successivement, Predal aura encore à intervenir sur un tir lourd de Ferry (11me minute), une tête d'Uljaki (19me minute) et une combinaison Uljaki-Foix-Muro (23me minute) terminée par un tir à bout portant de l'Argentin, tandis que Predal renvoie miraculeusement. Andersson... comme contre Reims... A la 25me minute, Andersson passe Chorda et comme contre Reims tire derrière les filets. Mais les ficelles niçoises sont solides et Lamia n'est pas victime de la mésaventure que connut Colonna au Stade Vélodrome. On s'aperçoit alors que Rustichelli boîte ; il s'est heurté rudement à Muro quelques minutes plus tôt et n'est plus d'une grande utilité pour les "blancs". À la 28me minute, Jensen centre ; il oublie pourtant que le jeu aérien n'est pas le point fort d'Andersson et devine la suite... Puis Nuremberg hésite avant de shooter dehors à la 29me minute et Uljaki s'échappe seul pour voir Predal arrêter son élan à la 31me minute. Le temps de renvoyer et Andersson décoche un shoot que Lamia maîtrise non sans peine à 50 cm de sa ligne. La pause survient alors que Predal et littéralement sur les boulets, mis en danger notamment par Uljaki (40me minute), Ferry (42me et 43me minutes). |
La foule hurle son mécontentement à M. Devillers, plein d'autorité dans des décisions à contre-sens qui n'avantagent personne, mais énervent tout le monde. Foix et Barrou décident Le jeu reprend et Gransart arrête opportunément Nuremberg pour transmettre en retrait à Predal. Rustichelli est passé ailier gauche et Jensen a pris sa place. Nice se fait de plus en plus pressant et une envolée de Predal dans les jambes de Nuremberg (40me minute) s'avère insuffisante : Gransart doit sauver. À la 50me minute, Molla, indécis, laisse partir Nuremberg. Le Luxembourgeois centre en direction de Foix et l'ailier droit des Aiglons n'a aucune peine à battre Predal : Nice 1 ; O.M. 0. Le temps de remettre en jeu, et de faire voyager la balle au centre du terrain et Uljaki, profitant d'une faute de Molla, réussit un retourné et sollicite Barrou au point de penalty. Le Noir se lance, Predal hésite, sort. Trop tard. Le shoot de l'avant-centre local a devancé l'action du gardien visiteur et c'est moins de 60 secondes après l'ouverture du score le second but des "rouges et noirs". Nice 2 ; O.M. 0. Muro confirme L'O.M. va-t-il réduire le score ? On le croit lorsque Amalfi de près, va tenter sa chance. Mais il rate son tir du gauche (54meminute) et à la 59me minute, au contraire, Uljaki prend son élan sur un coup franc de 20 mètres. Il décoche un bolide. La balle rebondit sur le mur, arrive à Muro. L'Argentin s'empresse de battre Predal pour la troisième fois. Nice 3 ; O.M. 0. A la 62me minute, Nuremberg ajoute un nouveau point. Il est hors-jeu et la marque en restait là malgré une domination on ne peut plus nette des locaux. Il y a plus qu'une seule équipe sur le terrain, mais Lamia doit s'effondrer sur le ballon catapulté par Andersson (63me minute). Predal sauve encore, sur un tir trop mou pour faire un but imparable, de Muro (65me minute). Andersson et Barrou bottent l'une et l'autre au-dessus (66me et 67me minute). Puis on relève jusqu'à la fin de dangereuses actions niçoises : Predal s'envole dans les pieds de Nuremberg (72me minute) et repousse en tombant devant Foix (77me minute) ; Nuremberg déclenche un beau tir alors que Predal est masqué (79me minute). Uljaki rate l'objectif de peu (81me minute) et Nuremberg de la tête, l'imite (83me minute). Uljaki porte un bolide à son actif (86me minute). Tout cela pour une seule action marseillaise signée par l'invalide Rustichelli dont le gauche n'inquiète pas Lamia (88me minute). Une dernière tentative de Muro et c'est l'acquittement d'une note qui eut pu être infiniment plus sévère. |
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60 secondes ont suffi à FOIX et BARROU pour décider du sort du match |
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Sur sa production de dimanche face à Metz, l'O.M. ne pouvait qu'avoir des ambitions limitées en affrontant sur son herbe l'O.G.C. Nice, au classement peu reluisant, certes, mais aux moyens qui lui permettent d'envisager des résultats intéressants de temps à autre, à défaut d'être enregistrés régulièrement. Effectivement, les Marseillais bien que courageux et ne concédant aucun but malgré la blessure tôt venue à Rustichelli, montrèrent dès le coup d'envoi d'un match très mal arbitré par M. Devillers qu'ils auraient quelque peine à atteindre sans dommage le cas des 90 minutes. Après un premier half plein de courage, les Phocéens reprirent place sur le terrain, dans une formation modifiée : Jensen du fait de la mise hors de combat de Rustichelli, redevenant ailier droit et occupant ainsi un poste qui lui convient mieux. Ce déplacement de Jensen, (en dépit de l'amoindrissement comme continue constituée par la perte de Dominique) allait-il permettre à l'O.M. de trouver le chemin des filets de Lamia. La réponse vint rapidement de la 46ème minute, par une action de Nuremberg déplacé au centre. Encore un arrêt difficultueux de Predal, et c'est la 50ème minute. Quand elle aura pris fin, le tableau d'affichage, vierge jusqu'alors traduisait par 2 à 0 la supériorité niçoise. Le match était joué, et l'action de Muro, établissant la marque définitive, n'apporta absolument rien à une cause acquise depuis longtemps entendu. Les Azuréens, en fait, à partir de cette 50ème minute récidive eurent la possibilité d'infliger une correction à leur adversaire. Ils ne le firent pas parce qu'ils jouèrent vainement pour le plaisir, comme à l'entraînement sans grande conviction avec la certitude que les Marseillais ne remonteraient jamais un handicap beaucoup trop lourd. |
Les poulains de Jean Robin, sans ressort comprenait parfaitement que la tâche était trop lourde pour eux pour leurs faibles moyens, jetèrent le manche après la Cognée. Andersson dut persuader Gransart que mieux valait rester sur le terrain ; Marcel lutta plus avec le coeur admirable qui a fait son renom et qui lui permit de s'infiltrer à plusieurs reprises à travers le camp des Aiglons, au cours des 45 minutes initiales, Molla flotta un peu tout ; Predal para au plus pressé ; Scotti se cantonna dans une prudente et défensive réserve ; Amalfi baissa encore d'un ton ; Johansson piétina un peu plus avec une formation remise en confiance, à laquelle les plus belles occasions de marquer étaient encore offertes à jet continue. Nous avons vu hier au stade Ray une bien mauvaise équipe marseillaise. Courageuse, mais empruntée, mal inspirée, maladroite, lourde, elle lutta jusqu'à l'ouverture du score pour sombrer dans le découragement le plus total et le plus complet. Des défauts certes que le fait d'opérer à dix pendant presque toute la rencontre n'explique pas. Le moral, la condition physique, l'ambition manquent beaucoup à ce onze sans conviction sans méthode et qui ne combat plus. |
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RAMON, ANDERSSON et TOURNIER seuls irréprochables |
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NICE - Juger le comportement des Marseillais fait aujourd'hui encore partie du côté ingrat de travail. En effet, quand nous aurons sorti des noms de Ramon, Andersson et Tournier, le rayon des satisfactions ne comportera plus rien. Ramon, placé souvent dans des conditions particulièrement difficiles, effectua un labeur de titan avec un courage jamais démenti, parant aux défaillances de ses camarades de la défense. Andersson, sans bonheur, ne se battit comme si sa vie en dépendait. Il faillit vaincre Lamia à deux reprises, échoueront seulement parce que sentir (avec une balle lourde, il est vrai) n'a plus la même spontanéité. Hargneux, prodigue jusqu'à l'abnégation, il lutta en pure perte. Tournier, inlassable, couvrit un terrain énorme, sans résultat positif, mais en manifestant une foi que l'on aimerait retrouver chez tous les Phocéens. |
Par contre, Predal hésita sur l'action de barreau qui coûta le second but, sans pour autant pouvoir être tenu pour responsable de la défaite. Gransart se découragea trop vite, voulant même quitter le terrain un certain moment. Marcel plaça quelque raide en première mi-temps, puis eut un rôle défensif sans grand relief, tout comme Scotti. De Rustichelli, blessé, nous ne dirons rien. Amalfi n'entreprit pratiquement rien et Jensen s'enserra constamment dans une portion de gazon trop éloignée de Lamia. À Nice, tout le onze joua bien un match facile, mais Ujlaki et surtout Foix ratèrent des buts qui eussent transformé cet échec marseillais en débâcle. |
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M. ZARAYA : "L'O.M. a joué à dix" LUCIANO : "L'O.G.C.N. absolument décontracté" |
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NICE - Manifestement, les Olympiens marseillais ont accusé leur nette défaite. Aussi étaient-il complètement abattus, quand nous les visitâmes aux vestiaires. M. Zaraya tirait la leçon de la rencontre froidement : "Dès la dixième minute, nous avons opéré avec dix joueurs, Rustichelli ayant été réduit au rôle de figurant. Ainsi nous avons tenu une mi-temps après le repos nous avons encaissé trois buts, bien sûr, mais deux ont été acquis sur des fautes de Predal. Après il n'y a plus qu'une équipe sur le terrain cela se comprend, on ne pouvait affronter Nice avec des chances de succès dans de telles conditions, avec un handicap aussi sensible". Que disait le principal intéressé en l'occurrence Dominique Rustichelli ? Il était navré, précisant : "J'ai reçu un coup au-dessus de la rotule droite. À partir de ce moment-là, je n'ai plus été d'aucune utilité pour mon équipe". Jean Robin laconique pressé de grouper ses hommes et de prendre le chemin de la gare laissa tomber : "Trois buts sur trois fautes défensives, c'est évidemment beaucoup trop quand on ne peut pas marquer". |
M. André Gascard, le préposé au moral des "Blancs", concluait : "On est obligé de se reporter aux performances de Béziers et de Metz à la fin de chaque match". Dans le clan azuréen, Luciano, rassuré, analysait ainsi la production de ses boys : "J'avais peur que Domingo soit là. C'est lui qui nous fit perdre à Marseille. Aujourd'hui les Niçois n'ont pas eu à cravacher pour remonter un but d'écart. Avec une avance de trois buts, ils ont fait beaucoup de chance qu'on ne doit pas faire. Mais ils se sont absolument décontractés et j'en suis très satisfait. Ce résultat doit avoir une répercussion sur la suite de nos résultats parce que la confiance est revenue. Milazzo qui eut le mérite de jugulé Yeso Amalfi, modeste, soulignait, quant à lui : "J'ai eu des consignes très strictes. Je les ai appliquées et vous avez vu que je ne m'en suis pas mal tiré. Il ne faut pas laisser la moindre liberté au Brésilien, ce n'est qu'à ce prix qu'on peut en venir à bout. Ujlaki, en grande conversation avec Curyl, se lamentait presque : "J'ai couru et construit, mais la réussite m'a fui". |
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AMALFI invisible |
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Hier matin, à Nice, il n'était question que de Jésus Amalfi. Un peu partout, l'on répétait des phrases ressemblant à celles-ci. "Sans Amalfi, ce match aurait attiré sept ou huit mille personnes. Il y en aura le double tout à l'heure". Ces prévisions ont été largement dépassées. Mais Amalfi a largement déçu. A-t-on trop attendu de lui ? C'est possible. Mais Luciano avait préparé son affaire avec le sérieux qu'on lui connaît. Milazzo avec reçu des consignes fort précises et, avec l'aide de Ferry excellent quand c'était nécessaire, il étouffa totalement le Sud-Américain. Ce dernier nous le fit remarquer, mais il a démontré s'il en était besoin, qu'il n'est pas l'homme capable de réaliser un résultat à lui seul. Il tenta parfois d'offrir au public (venu pour cela) un récital dont il a le secret. Il échoua. Nous l'avions vu ouvrir judicieusement et lancer ses camarades de l'attaque contre Metz. Face à Nice, il n'y parvint jamais. Évitons les jugements définitifs mais constatons que la deuxième sortie du Brésilien sous le maillot blanc a été un lamentable fiasco. |
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LUCIANO "Marseille m'a déçu" |
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Que pensait, à l'issue de ce derby, l'entraîneur Luciano ? Nous lui avons posé la question et, de fort bonne grâce, le coach local nous a répondu : "Marseille ? Quelle déception ! J'avais entendu comme tout le monde, dire pas mal de choses pessimistes sur le compte des Phocéens. Je m'aperçois que tout cela était fondé. L'ensemble que nous avons battu a été lent ; il a opéré sans moral et pratiqué un football vraiment vieux. Il n'y a rien de consistant à tout cela, et l'on comprend, à la lumière de cette partie le mauvais classement de nos voisins !" |