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Résumé Le Provencal

du 30 novembre 1959

 

LE "ONZE" MARSEILLAIS A CHERCHE, DURANT TOUT LE MATCH ET EN VAIN, A METTRE SES AVANTS DE POINTE EN POSITION DE TIR

L'O.M. nettement battu à GRENOBLE (3-1) après avoir marqué le premier

(D'un de nos envoyés spéciaux Lucien D'APO)

Grenoble (par téléphone). - Tout commence dans les clameurs. Les Grenoblois ne sont pas aussi froids que leurs montagnes et dans les tribunes c'était le chant des sonnailles de pâturage, le tintement des clochettes savamment distribuées et l'éclatement des pétards, à la manière sud américaine.

C'est dans ce tintamarre que Pierre Péri, héros malheureux de ce match, bloquait sa première balle, venue de la droite, à la vitesse d'un V1.

L'attaque grenobloise avait engagé le fer sans aucune espèce de fair-play, Molla, plus réaliste que ses coéquipiers, donnait immédiatement le meilleur de lui-même, du pied et de la tête, au beau milieu de l'instabilité et du désarroi de son équipe.

Et pendant qu'aux extrêmes, Durand et Tillon bottaient en pure perte dans les bois, au centre, le onze grenoblois s'attendait à pousser droit les attaques avant même que son adversaire ait pris le pouls des réalités.

C'était d'ailleurs Valorisek, ce beau cheval fait de muscle et de courage qui donnait le ton. Une première fois, il vint se montrer à Peri, balle au pied. Le keaper marseillais eut le temps de lui saisir le cuir entre deux foulées.

Ce diable de Valorisek, secouant ses hommes avec le concours d'un public en or d'ailleurs, organisait fort bien le travail offensif.

Mais c'est pourtant l'O.M. heureuse surprise, qui devait marquer en premier.

Nous étions à la 20me minute. Corner pour l'O.M. Célestin Oliver le tire posément et avec précision, Abad, le puissant goal grenoblois, s'allonge, s'étire, en même temps que Tillon et Durand fusent sur lui, sans autre manière. La balle est mouillée, Abad se voit entouré et hésite et l'irréparable s'accomplit. Il lâche le ballon que Durand, d'un coup de botte pousse au fond des filets, Consternation...

Un penalty... mais pas pour l'O.M.

Dans ce stade rendu au silence, on pense que l'arbitre qui aurait pu sanctionner une faute bénigne à l'origine du mouvement ne tarder pas à équilibrer les chances du jeu des compensations.

Il ne faudra pas attendre longtemps. Nous ouvrons, à nouveau, notre carnet de notes, 4 minutes plus tard, pour inscrire : "Attaque grenobloise, Tassone sur sa ligne de but est proprement éjecté du terrain de jeu par Gori, le centre-avant grenoblois, qui utilise ainsi le moyen le plus rationnel de supprimer l'adversaire. Dans la même fraction de seconde, l'opération de déblayage accomplie, il se retourne pour dégager la balle en force, cette balle trouve, à quelques mètres, l'obstacle naturel d'un joueur, elle est contrée, revient vers Tassone qui hors du terrain de jeu, la reçoit sur sa main droite collée au corps. Ce n'est pas la main qui a été vers le ballon, mais la balle vers la main. Nuance ! Pas de culpabilité donc.

Qu'à cela ne tienne, M. Bossoni, c'est le nom de l'arbitre, siffle tout de même penalty et l'O.M. se trouve donc à égalité après que Valorisek ait converti le don du directeur de jeu en un but, 1-1.

On remet ça.

Et c'est toujours Grenoble qui conduit les débats dans le climat que provoque le dévouement hurlant des supporters alpins.

Toutefois de manière que les choses ne restent pas douteuses, le onze de Fornetti impose et son jeu et sa volonté à un adversaire qui cherche son football, en attaque en particulier.

A la 30me minute, Valorizek, encore lui, échappe à Léonetti, centre - un très beau coup de pied d'ailleurs - Peri doit sortir mais il ne sort point et Steibel avant que la balle ne touche le sol, en profite pour la rabattre d'un coup de tête dans les filets marseillais.

Deux à un, et ce n'est pas car, quelques minutes après, Geri et Desgranges manquent un but que le préposé au tableau d'affichage s'apprêtait déjà à inscrire. Ici, Péri a sauvé.

Pendant ce temps, Leonetti, Molla et Tassone fournissent une besogne considérable. Les situations dangereuses pour l'O.M. se succèdent jusqu'à la mi-temps.

Leonetti : des kilomètres

Le match reprend. Changement radical. C'est l'O.M. qui a toutes les initiatives. Tillon quelquefois déborde, Durand est plus positif qu'en première mi-temps. Leonetti qui, depuis le début de la rencontre, court sans cesse, aura à ce train, couvert des kilomètres avant la fin du match. Il ravitaille ses avants de pointe pendant qu'à l'arrière les poussées offensives se préparent avec plus de mordant, plus de précision.

On voit Oliver reprendre de volée un centre de Tillon. Son tir boulet est intercepté.

On apprécie un coup franc remarquablement botté à 25 mètres des buts par Leonetti. On regrette un mauvais heading de Tillon sur un centre d'Oliver

On respire - Tout cela quand on est Marseillais, bien sûr - lorsque Peri hérite finalement d'une balle qui, à trois reprises, s'était complue à danser dangereusement devant les buts marseillais, sur des tirs ou des interceptions de Cappon, Gori et Vidal.

Sur un nouveau centre de Vidal, Péri bloque in extremis une balle donnée de la tête par Steibel.

Pendant 25 minutes, Grenoble moins pénétrant, plus las, était encore à la portée des hommes de Troupel. Mais il est trop tard. Le onze alpin ne s'accorde plus de répit.

Abad et Eschman se télescopent ; Eschman revient sur le terrain, mais Abad à la clavicule touché. Il jouera d'un bras. Ce qui ne l'empêchera pas d'éloigner un violent tir de Leonetti, qui prenait la direction de la lucarne.

Moins heureux sera Peri, qui à la 34me minute, sur un coup franc tiré de la gauche, laisse échapper la balle. Cappon, qui apprécie les cadeaux de cette nature, reprend cette balle et marque le 3eme but.

De nouveaux pétards éclatent alors que les olympiens continuent de lutter, et risquent même de marquer sur une tête de Durand.

Mais il ne s'agit que d'actes gratuits.

L'O.M. est battu sans discussion. Les Grenoblois n'ont pas ménagé leur peine pour cela.

Et les sonnailles de reprendre leur chant dans les tribunes.

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Un point ce n'est pas tout et malgré le penalty

GRENOBLE a mérité la victoire

(D'un de nos envoyés spéciaux : André HATCHONDO)

Grenoble (par téléphone) - Les Olympiens avaient mille fois raison de se lamenter. Stupide autant qu'injuste, le penalty vint au secours des Grenoblois au moment précis où l'O.M. menait par 1 à 0. Mais les lamentations ne changent, hélas, rien au cours du championnat de football qui poursuit inexorablement son bonhomme de chemin en faisant fi des erreurs et des faiblesses humaines.

Si l'arbitre commit une grossière erreur, cette erreur ne peut, à elle seule, constituer des circonstances atténuantes aux faiblesses que ne cesse de montrer au fil des dimanches la formation marseillaise. Cela devient un lieu commun de les énumérer.

Le Réalisme fut du coté grenoblois, hormis les 20 premières minutes de la seconde mi-temps où l'attaque de l'O.M. nous donné quelques espoirs.

Feu de paille en vérité. Celestin Oliver et Leonetti, les seuls à pouvoir décocher des tirs inquiétants pour le goal adversaire. Abad, avait l'esprit par trop mauvais. Il leur fallut 100 fois remettre sur le métier leur ouvrage, toute leur initiative ne trouvant pas plus que Tillon désespérément monocorde et lent, outrageusement dominé par Burda, qu'un Durand (malgré le but) ou qu'un Eschman malheureux sur la "patinoire" du stade municipal, les secours ou l'aide qu'ils attendaient.

Voilà pourquoi tout en regrettant la monstrueuse décision de M. Bossoni, nous nous refusons, réflexion faite, à jeter le moindre discrédit sur la victoire des Grenoblois. Excepté Valorizek, aucun nom ronflant sur le papier. Mais quel coeur ! Quel enthousiasme "Un enthousiasme si débordant qu'il ne fut pas rare de voir les arrières Burde et Fossoud monter à l'assaut de la défense olympienne et décocher des tirs qui obligèrent P. Peri à se détendre comme un ressort.

Les demis Desgranges et Perli n'hésitèrent pas aussi à se mêler aux attaquants. Bien sûr, Valorisek, placé à l'agachon, malgré la surveillance étroite dont il fut l'objet - Leonetti le marqua de près - s'avéra être le centre de gravité de cette équipe autour duquel gravitent un avant centre imprécis mais hargneux comme Gori, un feu follet u souffle inépuisable comme Vidal, un athlète complet comme Steibel.

"Valo" comme l'appellent intimement les supporters locaux chaque fois que la balle lui échut, alors que Leonetti était en pointe tissa un football classique. Ses passes à ses avants étaient tirées au cordeau et il usa avec beaucoup d'efficacité des changements d'ailes.

Pour résumer la différence entre les deux attaques écrivons que l'une (celle de l'O.M.) tergiversa comme d'habitude alors que l'autre fit feu des quatre fers.

Ajouter à un manque de pénétration des avants de l'O.M. une hésitation coupable de P. Peri et une maladresse.

Pierre Peri a toutes les qualités d'un goal racé. Il fut extrêmement précieux sur les balles hautes mais que ne conserve t-il la tête froide dans des moments, disons faciles. C'est là où le bât blesse.

Le cadet des Peri se sortit merveille de situations délicates. Par contre, il eut deux défaillances inexplicables. Deux fractions de seconde qui coûtent très cher !

Dommage ! Molla et Tassone nous procurèrent bien des joies. F. Peri, s'avéra encore un parfait équipier, un travailleur inlassable, Bruneton et Ramon n'ont rien à se reprocher.

En conclusion : si le problème de la défense sera prochainement résolu avec la rentrée de Sbroglia et surtout celle de Corraza nous sommes cependant très inquiets sur la valse hésitation que ne cessent de danser certains éléments de l'attaque devant les bois adverses depuis le début de cette saison.

Et puis, ce ne sont pas les "lamentos" qui ouvriront la porte d'accès à la Division nationale.

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VALORYSEK : " L'O.M. a tort de se montrer prudent"

Grenoble - "L'O.M. m'a déçu ! Quand une équipe aspire à l montée en Division Nationale, elle doit imposer un rythme une personnalité au lieu de faire preuve de prudence ".

Qui parlait ainsi ?

Celui qui fut "l'ennemi public No1" de l'O.M. au sens sportif s'entend, car Ignace Walorysek est un charmant garçon, qui s'est étonné lorsque nous lui avons annoncé : "vos supporters nous avaient avertis : Valo n'est pas en forme"

Il a l'air outré et il prend à témoin un dirigeant, lequel confirme : "Si le Football Club Grenoblois a remporté quelques succès, c'est à lui seul qu'on le doit".

Et Valo enchaîne en s'attardant sur les défauts de la cuirasse de l'O.M. Il en énumère plusieurs, avant d'en arriver aux hommages ; "Leonetti s'est bien acquitté de sa tache de garde u corps. Il m'a surveillé. Je n'ai profite de son absence que dans les rares occasions où le travail d'attaquant l'absorbait".

Pour Burda, l'arrière qui mit sous l'éteignoir son adversaire direct, Tillon ce dernier représente un cas :

Il a terriblement maigri. Il n'a plus le punch d'antan. Que se passe-t-il ? Si je me suis permis de pousser quelques incursions dans le camp marseillais, c'est uniquement parce que je n'ai pas eu de travail avec lui !"

Et Corraza qu'en pense t-il ?

Nous lui faisons part de la déception qui s'est emparée du camp grenoblois lorsqu'il a appris que le goal messin, son ancien coéquipier, ne serait pas du voyage. A en croire les Grenoblois, leur ville n'a jamais réussi au nouveau gardien de buts de l'O.M.

Il sourit : " C'est de la superstition !"

"Corazza est un grand bonhomme, qui n'est jamais blessé ! J'ai été étonné d'apprendre qu'il soufre d'une déchirure musculaire. C'est la première fois que cette expression médicale est employée à son sujet. Croyez-moi, l'O.M. a fait, j'en suis sûr, une excellente acquisition ".

Aux vestiaires olympiens, après un long silence, la colère éclate.

M. Zaraya donne le ton : " Ce penalty, quel scandale".

Et le jeune Tassone, timide comme un collégien, se justifie.

"M. Zaraya a demandé des explications à l'arbitre, M. Boussoni : il a mis les deux mains pour arrêter la balle".

M. Boussoni est décidément le seul de tous les témoins au stade à avoir vu les deux mains de Tassone se tendre vers le ballon.

Molla, quant à lui, s'élève "contre la facilité avec laquelle les juges de touche ont levé le bras".

Lucien Troupel acquiesce, sans mot dire puis finalement reconnaît : "J'ai eu pendant vingt minute l'impression que l'on gagnerait où qu'on réaliserait un match nul. Mais les Grenoblois ont été très volontaires. Ils méritent la victoire

A.H.

 

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