Résumé Le Provencal du 15 février 1960 |
St-ETIENNE marque son 3e but à la 119e minute et l'emporte L'O.M., maudit, s'incline sur un coup heureux (3-2) |
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Nice (Par téléphone). - Dix jours après Nice - Réal de Madrid, sept jours après Nice-Reims, on ne saurait reprocher au public azuréen d'avoir boudé "l'affichette" qui lui était proposée. Un seizième de finale et le 11me de la seconde Division ne pouvaient que souffrir énormément de l'impossible comparaison et incitaient plutôt les Niçois à s'évader dans la nature pour aller cueillir du mimosas... Ce qu'ils firent. Un quart d'heure avant le coup d'envoi, le stade du Ray était aux trois quarts vide, tandis que le tableau d'affichage indiquait : Saint Etienne 3 - Marseille 1 ! Etait ce le pronostic local ? Renseignement pris, il s'agissait du score du matin de Coupe Gambardella Nice-Corte. Il n'empêche que la centaine de supporters marseillais devaient en ressentir une impression de malaise... Les efforts des jeunes insulaires ne purent leur éviter une cuisante défaite. Et l'on rentra dans le vif du sujet. Avertissements gratuits Sur le terrain très gras, la vitesse et la précision des Stéphanois laissèrent d'abord supposer que les Foréziens allaient obtenir un rapide avantage. Herbin, Liron, Glovacki, Peyroche, Ferrier évoluaient avec facilité et élégance au milieu des Marseillais médusés. Au cours du premier quart d'heure, ils trouvèrent rois fois la position idéale par Ferrier qui met à côté un tir du gauche à la 6me minute, Liron qui contraignait Corazza à lui plonger dans les pieds (8me minute), puis Peyroche qui tira très fort, Corazza devient en corner (10me minute). But de Mitoraj Comme on pouvait s'y attendre, Saint-Etienne finit bien par obtenir un but à la 15me minute, Molla et Corazza se télescopèrent sur une échappée de Glovaski et la balle roula sur l'aile droite de Mitoraj l'expédia dans les filets d'un beau tir à ras de terre, malgré l'angle très réduit... et la boue. Ensuite St-Etienne qui avait fort bien joué pendant un quart d'heure, baissa nettement son rythme, peut être par excès de confiance et les deux équipes semblèrent oublier qu'elles jouaient un match de Coupe. L'O.M. fut un peu moins dominé et à la 25me minute, une déviation de Tillon mit Moresco en position idéale face au but adverse, mais il enleva maladroitement sa balle. Puis les accrochages dus au terrain glissant se multiplièrent et avec eux les coups francs. Mais le match restait sans envergure et sans passion. Deux coups francs Certes, Corazza eut encore plusieurs arrêts à effectuer ; notamment devant Glovacki (28me minute), Herbin (30me minute) ; il dut cueillir du bout des doigts une magnifique balle brossée de Peyroche, mais sur deux coups francs tirés par Oliver, l'O.M. inquiéta Abbès. Durand dévia le premier de la tête au-dessus de la barre et Glovacki sauva habillement sur le second, exploitant la balle du cafouillage. Et l'on atteignit la pause, alors qu'un but venait d'être refusé à Mitoraj pour hors jeu. L'O.M. s'en tirait plutôt bien avec un seul but de retard. Tassonne notamment, n'avait jamais su comment attaquer Peyroche, et, à un degré moindre, les autres défenseurs marseillais s'étaient montrés mal à l'aise sur le terrain glissant Liron manque le coche Trois minutes après la reprise, Molla, soleil dans les yeux, rata son dégagement de la tête. Liron, parti seul, arriva devant Corazza et envoya la balle nettement au-dessus, manquant ainsi l'estocade probable. Le jeu devient de plus en plus décousu. Même Ferrier s'éteint. Et Mitoraj est blessé dans un choc avec Moresco. Il reste une demi-heure de jeu et Saint-Etienne joue à dix. L'O.M. va t-il saisir cette chance inattendue ? Nos représentants, devant un adversaire diminué, pêchent alors par imprécision. Ils se rachetèrent plus tard. |
Mitoraj rentre en boitant. Il n'y a plus de match, mais de part et d'autre une série d'efforts décousus. Moresco égalise A la 63me minute, Cassado arrête irrégulièrement Moresco. Eschmann tire le coup franc. Moresco émerge du paquet de joueurs et égalise irrésistiblement de la tête. Il devait rester sur sa gloire éphémère car trois minutes plus tard, sur un accrochage bénin avec Cassado, M. Schwints sortit les deux belligérants. Maintenant l'O.M. joue beaucoup mieux. Coup sur coup, Corazza puis Abbès doivent sauver devant Glovaski et Durand. L'égalisation a redonné une valeur certaine à la rencontre. Peyroche servi par Herbin, tire très fort à coté. Les minutes passent... C'est au tour de Tillon de tirer de loin au-dessus. Puis deux minutes plus tard, c'est encore lui qui force Abbès à un arrêt de grande classe (73me minute). Cinq minutes après, Peyroche conduit un dribble jusque le montant droit de Corazza. L'O.M. revient de loin ! Les dernières minutes du temps réglementaire seront sinon perdues, du moins passionnantes. Les deux équipes se livrent à fond et attaquent à tour de rôle. Ce sera en vain, il faut jouer les prolongations. Le cavalier seul initial des Foréziens à fait place à un match "au couteau" où l'O.M. rend coup pour coup. Le supplément gratuit au programme débutera lentement pour les deux équipes fatiguées. Puis c'est un tir fulgurant de Tillon, magnifiquement stoppé par Abbès, impeccable, heureusement pour Saint-Etienne. Albert Durand malheureux Les Marseillais dominent maintenant nettement. Servi par Leonetti, Durand écrase son tir sur la transversale. Puis Abbès sauve du bout des doigts, dix secondes après, sur un centre d'Eschmann. Par contre, Richard Tylinski, passe à l'attaque, gêne Peyroche en bonne position devant les buts de Corazza. A Peyroche le second but Alors que l'on entrevoyait le succès des olympiens, c'est Saint-Etienne qui va reprendre l'avantage sur montée offensive de Herbin, démarquage de Peyroche et tir croisé fulgurant de ce dernier sur la transversale. Nous sommes à la 98me minute et l'O.M. ne baisse pas les bras... Il en sera récompensé. Tillon égalise A la 12me minute, Bruneton donne à Durand qui centre impeccablement. Celestin Oliver reprend sèchement de la tête et Tillon accompagne la balle dans la cage. Abbès ayant glissé dans la boue. Et voila tout remis en question pour deux équipes de plus en plus fatiguées et qui aspirent maintenant à la douche... Un tir sur le coté du filet par Tillon, un coup franc de Domingo dans la lucarne, superbement dévié en corner par Corazza. Mais tout le monde est "sur les boulets" et les défenses concèdent corner sur corner. Et c'est soudain le drame Il reste une minute à jouer et Liron à la balle au pied devant Bruneton. Il centre fort mais la balle frappe la poitrine et le bras de Régis. Coup franc, indique M. Schwintz ! Domingo le tire très haut, Richard Tylinski monta à l'attaque reprend de la tête et Corazza, les pieds plantés dans la boue, voit la balle échouer dans ses filets. C'est le drame : le véritable "Lucky punch" et l'O.M. qui n'a jamais joué aussi vaillamment est éliminé de la Coupe à la suite d'une faute involontaire à la dernière minute. Il ne l'avait pas mérité. Recette : 14.850 fr pour 4.622 spectateurs |
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Tout est perdu, sauf l'honneur... |
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Tout le monde pleurait dans le vestiaire marseillais, ou à peu près. Et vraiment, il y avait de quoi. Les olympiens ont été à un cheveu de sauver leur saison et ont vu une fois de plus leurs espoirs ruinés. C'est vraiment trop de malchance. On parle souvent des impondérables. Mais ont ils jamais joué en faveur de nos représentants ? Hier à Nice, moins que jamais. Les Marseillais furent tout d'abord surpris par le jeu et précis de Stéphanois beaucoup mieux habitués qu'eux à un terrain lourd et glissant, sur lequel il est impossible de se reprendre. Pendant 20 à 25 minutes, ils furent à peu près constamment pris à contre pied par les passes redoublées auxquelles excellent Ferrier, Glowacki, Herbin, Peyroche, Domingo, tous très fins footballeurs. Il est bien certain que l'addition de ces premiers instants aurait dû être bien plus lourde... Mais enfin l'orage passa et les Foréziens se désunirent assez vite ; alors l'O.M. apparut et l'on peut dire que jusqu'à la fin du match, leurs adversaires cessèrent de se promener avec désinvolture... Lucien Troupel devait nous dire que ses hommes et lui-même attendaient un terrain sec. Grande fut leur surprise. Tassone perdit ses crampons dès les premières minutes et passa la première mi-temps à plat ventre dans la boue. Il se reprit fort bien par la suite. Molla connut les mêmes mésaventures devant Liron, tandis que Glowalski et Ferrier, s'infiltraient dans le réseau défensif marseillais comme des flèches. Derrière, Herbin et Tylinski faisaient la loi. La seconde partie du match se déroula dans des conditions diamétralement opposées. Les Marseillais avaient pris la mesure des Stéphanois et ne les lâchèrent plus. On vit apparaître Leonetti et Bruneton on s'aperçut que Norbert Eschman faisait un très grand match, que Celestin Oliver qui n'aime guère la boue, lui qui le roi de la volée, jouait "utile". En second mi-temps, Durand et Tillon se mirent à bousculer Gonzales et Tylinski, ce dernier devant faire appel à toutes ses ressources. Et 'O.M. se mit à dominer. Les passes marseillaises se mirent à aboutir et les échanges stéphanois étaient brisés dans l'oeuf. C'était un changement à vue total, c'était l'O.M. qui attaquait et maîtrisait toutes les balles et qui dictait sa loi. |
Mais il y eut des fameux impondérables... L'O.M. est tombé pavillon haut. Rappelez-vous que le bon roi François 1er écrivait à sa mère au soir de la défaite de Pavie : "Madame, tout est perdu sauf l'honneur". C'est exactement ce qui reste à l'O.M. après avoir perdu toutes chances d'accession et de continuer sa carrière en Coupe. Il lui reste l'honneur, retrouvé par son excellente sortie. Pour juger les joueurs, il faut tenir compte de l'état du terrain très lourd. C'est aussi par exemple que Corazza et Abbès eurent de très bonnes parades, mais restèrent plantés dans la boue sur la majorité des buts qu'ils encaissèrent. Des six arrières, Richard Tylinski fut le meilleur, bien qu'il ait tort de jouer aussi durement. Les Marseillais Tassone, Molla et Ramon s'améliorèrent au fil des minutes, tout comme Leonetti et Bruneton. Le grand animateur de l'attaque marseillais fut Eschman qui ne faillit jamais à sa tâche. Durand et Tillon, mal ou peu servis en première mi-temps terminèrent très fort et semèrent souvent la panique chez leurs adversaires. Chez les étroits vainqueurs, Abbès fut excellent, tout comme Tylinski. Mais à notre sens les meilleurs furent Herbin et Peyroche qui menèrent le jeu à leur guise. Ferrier fut intermittent et Léon Glowacki très bon pendant une heure, Liron par ses maladresses fit le bonheur de l'O.M. Remarquons pour la gloire du football moderne, que les défenseurs stéphanois Herbin et Tylinski firent la décision... En résumé, Excellente démonstration stéphanoise pendant mes 20 premières minutes. Puis match extrêmement méritoire des Marseillais en bonne condition physique, bien inspirés et possédant un admirable esprit de corps. Il ne leur manqua que la chance. |
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Lucien Troupel : "Nous sommes maudits" "Que faut-il donc faire pour arriver à gagner un match ? " Interroge Lucien Troupel et il y a des sanglots dans sa voix..." Nous avons fait le forcing tout au log de la rencontre, tout le monde est allé au-delà de ses possibilités et voila comment nous sommes récompensés. C'est à désespérer. Nous sommes décidément maudits !" M. Zaraya s'en prend amèrement à M. Schwinte qu'il juge responsable de cette défaite. |
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René Vernier : " Nous devions nous imposer au début" "Nous ne jouons pas tellement mieux d'habitude, mais au moins nous ne ratons pas les occasions immanquables que nous avons stupidement ratées aujourd'hui, surtout au début du match. Si nous étions parvenus, l'affaire était "dans le sac". Eschman a fait un très grand match et l'O.M. nous a mené la vie dure. " Claude Abbès très régence : "Nous sommes les maîtres du suspense. Nous avons voulu attendre la dernière minute..." Ferrier rit, comme toujours : "Ce qu'il faut courir pour gagner sa vie !" Ce sera le mot de la fin. |